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10/04/2008 | FRANCE | N°06PA03686

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre - formation a, 10 avril 2008, 06PA03686


Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2006, présentée pour la société QUALITY INVEST, dont le siège est Prinsengst 18 à Oslo (0152), Norvège, par Me Mundet ; la société QUALITY INVEST demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris n° 9918678/2 du 27 juin 2006 qui a rejeté sa demande en décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités l'assortissant, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la cha

rge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice adm...

Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2006, présentée pour la société QUALITY INVEST, dont le siège est Prinsengst 18 à Oslo (0152), Norvège, par Me Mundet ; la société QUALITY INVEST demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris n° 9918678/2 du 27 juin 2006 qui a rejeté sa demande en décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités l'assortissant, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la convention conclue entre la France et la Norvège, le 19 décembre 1980 publiée au Journal de la République française le 25 octobre 1981, ensemble le décret n° 81-963 du 16 octobre 1981 qui a prescrit cette publication et la loi n° 81-744 du 5 août 1981 qui avait autorisé l'approbation de cette convention, ensemble un avenant du 14 novembre 1984 publié au journal officiel du 27 octobre 1985 entré en vigueur le 1er octobre 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2008 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,

- les observations de Me Mundet, pour la société QUALITY INVEST,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'au titre de l'année 1991, la société QUALITY INVEST, qui a son siège à Oslo en Norvège et est résidente de cet Etat, a été assujettie par voie de taxation d'office à une cotisation d'impôt sur les sociétés à raison de sa participation au capital de la société civile immobilière Villa Prat , dont le siège est à Nice, et à concurrence de sa quote-part des bénéfices réalisés par cette société ; qu'elle relève appel du jugement du 27 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de cette imposition ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que la société QUALITY INVEST fait grief au tribunal de ne pas avoir répondu à son moyen tiré de ce que le recours à la procédure de taxation d'office était irrégulier en raison de l'absence d'indication, dans la mise en demeure que le service lui a adressée, des motifs pour lesquels elle devait souscrire une déclaration n° 2065 et produire son bilan ; que si l'administration est tenue d'indiquer dans une mise en demeure la déclaration à souscrire et l'exercice concerné, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général du droit n'impose au service de préciser les motifs de fait ou droit pour lesquels il estime que le contribuable est imposable ; qu'ainsi, en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était inopérant, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité ;

Sur les conclusions en décharge de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 du code général des impôts : ... les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. Il en est de même, sous les mêmes conditions : 1°) des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas en droit ou en fait l'une des formes de sociétés visées à l'article 206-1 et qui... ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35... ; qu'aux termes de l'article 218 bis du même code : les sociétés ou personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés... sont personnellement soumises audit impôt à raison de la part des bénéfices correspondant aux droits qu'elles détiennent, dans les conditions prévues aux articles 8, 8 quater et 1655 ter, en qualité d'associées en nom ou commanditées ou de membres de sociétés visées auxdits articles ; que, par ailleurs, l'article 239 ter du code général des impôts prévoit que les sociétés civiles qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations et que leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés ;

Considérant que les sociétés de personnes et les groupements mentionnés par les dispositions précitées, qui ont une personnalité distincte de celle de leurs membres, exercent une activité ou effectuent des opérations qui leur sont propres ; que, dans la mesure où les actes correspondant à cette activité ou ces opérations sont accomplies en France, les bénéfices réalisés par ces sociétés ou ces groupements sont imposables en France entre les mains de leurs membres, y compris de ceux qui résident hors de France, à proportion des droits qu'ils détiennent dans la société de personnes, ou le groupement, sauf stipulation contraire d'une convention internationale relative aux doubles impositions ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière Villa Prat , dont la société QUALITY INVEST détenait au cours de l'exercice 1991 99 % des parts, avait pour objet, ainsi qu'il résulte de ses statuts, l'acquisition de terrains, la construction sur ces terrains d'immeubles collectifs et leur revente en blocs ou par lots ; que son activité était exclusivement exercée en France et consistait, durant l'année d'imposition, en la réhabilitation d'un immeuble destiné à être revendu par lots ; que cette société de construction vente n'avait pas opté pour son assujettissement à l'impôt sur les sociétés ; que, dès lors, la société QUALITY INVEST était en principe imposable en France à raison des profits qu'elle avait retirés de sa participation au capital de cette société, à moins qu'une stipulation conventionnelle ne réserve à la Norvège l'imposition de tels profits ;

Considérant que pour faire échec à l'imposition à laquelle elle a été assujettie en France sur le fondement des dispositions de droit interne susmentionnées à raison de sa participation au capital de la société Villa Prat, la requérante revendique l'application de l'article 22 paragraphe 1 de la convention fiscale du 19 décembre 1980 signée entre la France et la Norvège en vue d'éviter les doubles impositions en faisant valoir que les stipulations de l'article 6 de la même convention relatif aux revenus immobiliers ne lui sont pas applicables ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 relatif aux autres revenus de la convention : 1 Les éléments du revenu d'un résident d'un Etat, d'où qu'ils proviennent, qui ne sont pas traités dans les articles précédents de la présente Convention ne sont imposables que dans cet Etat. ; 2 Les dispositions du paragraphe 1 ne s'appliquent pas aux revenus autres que les revenus provenant de biens immobiliers tels qu'ils sont définis au paragraphe 2 de l'article 6, lorsque le bénéficiaire de tels revenus, résident d'un Etat exerce dans l'autre Etat, soit une activité industrielle et commerciale par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé, soit une profession indépendante au moyen d'une base fixe qui y est située, et que le droit ou le bien générateur des revenus s'y rattache effectivement. Dans ce cas, les dispositions de l'article 7 ou de l'article 14, suivant les cas, sont applicables ;

Considérant, d'une part, que l'article 6 de ladite convention relatif aux revenus immobiliers concerne les revenus provenant de l'exploitation directe, de la location, de l'affermage et de toute autre forme d'exploitation de biens immobiliers, ainsi que les revenus de ces biens servant à l'exercice d'une profession indépendante ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, cet article ne traite pas des revenus de participations dans le capital d'une société de construction-vente et n'a pas pour effet d'écarter l'application du paragraphe 1 de l'article 22 ; que, par ailleurs, aucune des autres stipulations de la convention et de son avenant applicable à l'année en litige relatives à l'imposition des revenus particuliers ne concerne les profits réalisés par la société QUALITY INVEST ;

Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué par le ministre que la société requérante se trouvait dans l'hypothèse du paragraphe 2 de l'article 22 ; que, dès lors, la société requérante est fondée à se prévaloir des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 22 de la convention conclue entre la France et la Norvège qui réserve à la Norvège l'imposition des éléments du revenu d'un résident de cet Etat qui ne sont pas traités dans les autres articles de la convention pour faire obstacle à l'imposition en France des revenus qu'elle a perçus en qualité d'associée de la société civile immobilière française de construction-vente Villa Prat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête relatifs à la procédure d'imposition que la société QUALITY INVEST est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande et à demander la décharge de la cotisation à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1991 et des pénalités y afférentes ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 9918678/2 du Tribunal administratif de Paris en date du 27 juin 2006 est annulé.

Article 2 : La société QUALITY INVEST est déchargée de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1991 ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 3 : l'Etat versera la somme de 3 000 euros à la société QUALITY INVEST au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 06PA01917

SARL GREEN

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N° 06PA03686

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 06PA03686
Date de la décision : 10/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-0519-04-01-01-02-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. GÉNÉRALITÉS. TEXTES FISCAUX. - NORVÈGE (CONVENTION DU 19 DÉCEMBRE 1980) - CLAUSE-BALAI (ARTICLE 22) - OBSTACLE À L'IMPOSITION EN FRANCE, DANS LE CHEF D'UNE SOCIÉTÉ NORVÉGIENNE, DE SA QUOTE-PART DES BÉNÉFICES D'UNE SOCIÉTÉ DE PERSONNES FRANÇAISE DONT ELLE EST ASSOCIÉE [RJ1].

z19-01-01-05z19-04-01-01-02-03z Les sociétés et groupements soumis au régime fiscal des sociétés de personnes, prévu à l'article 8 du code général des impôts (CGI), qui ont une personnalité distincte de celle de leurs membres, exercent une activité ou effectuent des opérations qui leur sont propres et, dans la mesure où les actes correspondant à cette activité ou ces opérations sont accomplis en France, les bénéfices qu'ils réalisent sont imposables en France entre les mains de leurs membres, y compris de ceux qui résident hors de France, à proportion des droits qu'ils détiennent dans la société de personnes ou le groupement, sauf stipulation contraire d'une convention internationale relative aux doubles impositions. Société de capitaux norvégienne assujettie en France à l'impôt sur les sociétés, en vertu de l'article 218 bis du CGI, sur sa quote-part des bénéfices d'une société de construction-vente française soumise au régime des sociétés de personnes par application combinée des articles 8 et 239 ter du CGI. Le 1 de l'article 22 de la convention fiscale conclue entre la France et la Norvège (clause-balai) stipule toutefois que : Les éléments du revenu d'un résident d'un Etat, d'où qu'ils proviennent, qui ne sont pas traités dans les articles précédents de la présente Convention, ne sont imposables que dans cet Etat. L'article 6 de la convention relatif aux revenus immobiliers, qui concerne les revenus provenant de l'exploitation directe, de la location, de l'affermage et de toute autre forme d'exploitation de biens immobiliers, ainsi que les revenus de ces biens servant à l'exercice d'une profession indépendante, ne traite pas des revenus de participations dans le capital d'une société de construction-vente et n'a pas pour effet d'écarter l'application du paragraphe 1 de l'article 22. Par ailleurs, aucune des autres stipulations de la convention et de son avenant, relatives à l'imposition des revenus particuliers, ne concerne les profits réalisés par la société norvégienne. Le 1 de l'article 22 de la convention fait donc obstacle à son imposition en France au titre des revenus en litige.


Références :

[RJ1]

Comp. CE, 9 février 2000, Société suisse Hubertus AG, n° 178389, p. 43 ;

CE, 4 avril 1997, Société Kingroup, n° 144211, p. 133.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : MUNDET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-04-10;06pa03686 ?
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