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06/11/2008 | FRANCE | N°07DA00718

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 06 novembre 2008, 07DA00718


Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. René X, domicilié ..., par la SELARL Christophe de Langlade ; il demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0500235, en date du 22 février 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2000, 2001 et 2002 ainsi qu'à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance et au v

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Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. René X, domicilié ..., par la SELARL Christophe de Langlade ; il demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0500235, en date du 22 février 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2000, 2001 et 2002 ainsi qu'à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance et au versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer lesdites décharges ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens de l'instance et de mettre à la charge de ce dernier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le bâtiment qu'il possède rue d'Estraine, qui est loué et mis à disposition d'une société civile d'exploitation agricole, est bien affecté, en fait et en droit, à la société titulaire du bail ; que, par suite, les travaux d'amélioration de ce bien, qui ont été engagés pour tenir compte de l'évolution de l'activité de la société civile d'exploitation agricole, sont déductibles, sur le fondement des dispositions de l'article 31 I 1° c) du code général des impôts ; que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en estimant, sur le fondement de l'article 31 I 2° c)°, que les travaux de réparation du bâtiment dit « de la Chartrerie », lui aussi loué à la société civile d'exploitation agricole, n'étaient pas déductibles ; que ces déductions se fondent sur les dispositions de l'article 31 I 2° a) aux termes desquelles il n'a pas à justifier de l'utilisation effective de ses biens, objets des travaux, par son loueur ; que le principe même du bail du bâtiment dit de la « Chartrerie » serait remis en cause si les dépenses engagées pour les travaux de réparation de ce bâtiment ne sont pas considérées comme des charges déductibles ; que les pénalités pour mauvaise foi ne peuvent être considérées comme justifiées du seul fait que les travaux étaient hors de proportion avec les loyers du fermage ; que, compte tenu du nombre de ses propriétés, il est tenu de réaliser chaque année des travaux à raison d'échéanciers ; qu'il suit de là, d'une part, qu'il est normal qu'il effectue, certaines années, pour la réalisation de ces travaux, des investissements qui sont hors de proportion avec la valeur locative desdites propriétés et que, d'autre part, l'administration aurait dû examiner le montant des dépenses ayant donné lieu à application des pénalités querellées par rapport à l'ensemble de ses revenus fonciers ; qu'enfin, ce n'est qu'afin de respecter strictement les dispositions de l'article 31 I 2° c) du code général des impôts, qu'il s'est borné à déduire les dépenses en litige sans augmenter, suite à l'amélioration des locaux, les loyers qu'il percevait de la société civile d'exploitation agricole ;

Vu le jugement et les avis d'imposition attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 octobre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui demande à la Cour de rejeter la requête ; il fait valoir, à titre principal, que les bâtiments objets des dépenses litigieuses de travaux n'étaient pas ou ne sont plus, à la suite des travaux réalisés, affectés aux besoins de l'exploitation de la société qui les a pris à bail ; qu'en application des dispositions de l'article 13-1 du code général des impôts, ces dépenses ne constituent pas des charges déductibles ; que, à titre subsidiaire, les dépenses d'amélioration effectuées sur les propriétés rurales ne sont admises en déduction du revenu net imposable qu'à la condition expresse que le nouveau bâtiment soit de même nature que l'ancien ; que M. X ne pouvait pas ignorer que les dépenses en cause n'étaient pas déductibles de ses revenus fonciers alors que les biens, objets des travaux, qui étaient inclus dans le bail, n'étaient manifestement pas ou plus à la disposition de la société civile d'exploitation agricole ; que les travaux entrepris participaient de la valorisation du patrimoine du requérant ; qu'en outre, les dépenses engagées sont hors de proportion avec le revenu attendu des bâtiments rénovés ; qu'il suit de là que les insuffisances déclaratives relevées procèdent d'une volonté délibérée ; que l'Etat ne saurait être condamné au versement de la somme demandée par M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative et le livre des procédures fiscales ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2008 à laquelle siégeaient M. Gérard Gayet, président de chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et M. Xavier Larue, conseiller :

- le rapport de M. Xavier Larue, conseiller ;

- et les conclusions de M. Alain de Pontonx, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X a déduit du montant de ses revenus fonciers dus au titre des années 2000, 2001 et 2002, les dépenses correspondant aux travaux qu'il a fait réaliser sur des bâtiments lui appartenant, donnés à bail à ses fils et mis, par ces derniers, à la disposition de la société civile d'exploitation agricole (SCEA) dont ils assurent la gestion ; qu'il relève appel du jugement n° 0500235, en date du 22 février 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande, présentée le 25 janvier 2005, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2000, 2001 et 2002 ainsi qu'à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance et au versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions à fin de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 13-1 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : « Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu » ; que l'article 31 du même code dispose que : « I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien (...) effectivement supportées par le propriétaire ; (...) 2° Pour les propriétés rurales : a) Les dépenses énumérées aux a à d du 1° ; (...) c) Les dépenses d'amélioration non rentables afférentes aux éléments autres que les locaux d'habitation et effectivement supportées par le propriétaire. Les dépenses engagées pour la construction d'un nouveau bâtiment d'exploitation rurale, destiné à remplacer un bâtiment de même nature, vétuste ou inadapté aux techniques modernes de l'agriculture, sont considérées comme des dépenses d'amélioration non rentables à condition que la construction nouvelle n'entraîne pas une augmentation du fermage » ;

En ce qui concerne les travaux d'amélioration de l'immeuble de la rue d'Estraine :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, notamment de la notification de redressement, et qu'il n'est pas contesté que lesdits travaux, qui ont, notamment, consisté en la réfection du sol en granit rose, en la création de portes fenêtres au rez-de-chaussée, en la surélévation des murs et du pignon, en l'aménagement d'une nouvelle charpente comportant une pente plus importante que l'ancienne ainsi qu'en la réalisation d'un parquet à l'étage, ont entraîné des modifications importantes du gros-oeuvre ; qu'il n'est pas plus contesté qu'un bâtiment du corps de ferme sert d'atelier et de magasin, en lieu et place du bâtiment rénové et que ce corps de ferme a été aménagé, peu avant le redressement litigieux, afin d'y créer un bureau et une salle de réunion qui font désormais double emploi avec les locaux du bâtiment rénové dont le requérant allègue qu'ils ont le même objet ; qu'enfin, l'administration fait valoir, sans être contredite utilement que les travaux de réalisation d'une salle de bains démontre une destination à fin d'habitation ; qu'il suit de là que le bâtiment de la rue d'Estraine doit être réputé comme n'étant plus affecté aux besoins de la SCEA ;

Considérant, d'autre part, que le témoignage de M. Y, salarié de la SCEA entre 1974 et 1982, ne justifie pas de l'affectation du bâtiment à la société après la réalisation des travaux d'amélioration ; que si la lettre de la société Groupama atteste de la présence dans le bâtiment rénové d'un groupe électrogène appartenant à la SCEA et si les photos produites montrent des véhicules, dont il est allégué qu'ils seraient utilisés par la SCEA, garés sur le dallage de ce bâtiment, il ressort des factures, fournies tant par la marbrerie que par l'entrepreneur chargé de la pose du revêtement de sol, que le dallage en cause a été prévu pour l'aménagement de la salle de réunion du bâtiment ; qu'en outre, M. X se borne à alléguer que la salle de réunion, le bureau et la salle d'eau du bâtiment rénové sont utiles à la SCEA et nécessaires à son adaptation aux techniques modernes ; qu'enfin, ni l'existence du bail consenti à la SCEA sur le bâtiment de la rue d'Estraine, ni le fait que l'administration fiscale ait accepté de déduire du revenu imposable de la SCEA les loyers qu'elle verse, à ce titre, à M. X, ne sont de nature à remettre en cause les constatations du service vérificateur quant à l'absence d'affectation effective à la SCEA du bâtiment rénové ; que dès lors, la présomption quant à l'affectation du bâtiment de la rue d'Estraine doit être tenue pour établie ; qu'il suit de là que les dépenses engagées en vue de la rénovation de ce bâtiment n'ont été engagées par M. X ni en vue de l'acquisition ou de la conservation de son revenu, ni à fin de remplacer un bâtiment de même nature, vétuste ou inadapté aux techniques modernes de l'agriculture ; que, par suite, l'intéressé n'est pas fondé à solliciter la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2000, 2001 et 2002 à raison des dépenses qu'il a engagées pour la rénovation du bâtiment de la rue d'Estraine ;

En ce qui concerne les travaux d'entretien et de réparation de l'immeuble dit de la « Chartrerie » :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de la notification de redressement et qu'il n'est pas contesté que ledit immeuble est utilisé pour le stockage de bois réservé à l'usage personnel du requérant et sert également de garage pour divers véhicules ou matériels anciens qui n'apparaissent pas à l'actif du bilan de la SCEA ; que l'existence du bail consenti à la SCEA sur « la Chartrerie » n'est pas de nature à remettre en cause la présomption quant à l'absence d'affectation effective de ce bâtiment à la SCEA ; que cette présomption doit, par suite, être tenue pour établie ; qu'il suit de là que les dépenses correspondant aux travaux d'entretien et de réparation de « la Chartrerie » n'ont pas été engagées par M. X en vue de l'acquisition ou de la conservation de son revenu ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2000, 2001 et 2002 à raison des dépenses qu'il a engagées pour l'entretien et la réparation de l'immeuble dit de la « Chartrerie » ;

Sur les conclusions à fin de décharge des pénalités pour mauvaise foi :

Considérant, en premier lieu, que les bâtiments objet des travaux jouxtent l'habitation principale du bailleur, qu'il n'est pas démontré que lesdits bâtiments soient affectés à l'usage agricole, ce que le propriétaire ne pouvait ignorer ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que les dépenses relatives aux travaux engagées par M. X sont hors de proportion avec les revenus attendus des bâtiments rénovés dans le cadre de la présente location puisqu'elles représentent près de 5 années d'un fermage portant sur environ 400 hectares de terres ; que si M. X soutient qu'il dispose de nombreuses autres propriétés sur lesquelles il réalise des travaux selon un échéancier et qu'en conséquence les dépenses en cause auraient dues être mises en rapport avec l'ensemble de ses revenus fonciers, il ne l'établit pas ; que d'ailleurs, il résulte de l'instruction que le fermage en cause représente l'essentiel des revenus locatifs du requérant ;

Considérant, en troisième lieu, que du fait qu'il n'est pas contesté que le requérant a entendu réduire son déficit au titre de ses revenus fonciers pour l'année 2000, en déclarant, cette année-là, deux années de revenus locatifs, qu'il suit de là que, et compte tenu notamment du caractère somptuaire de ces dépenses, que l'administration fiscale rapporte la preuve, qui lui incombe, de la mauvaise foi de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2000, 2001 et 2002 ainsi qu'à la condamnation de l'Etat aux dépens de l'instance et au versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. René X ainsi qu'au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie en sera transmise au directeur départemental de la direction de contrôle fiscal du Nord.

2

N°07DA00718


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 07DA00718
Date de la décision : 06/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Xavier Larue
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SELARL CHRISTOPHE DE LANGLADE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-11-06;07da00718 ?
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