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25/03/2010 | FRANCE | N°07MA03002

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 25 mars 2010, 07MA03002


Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2007, présentée pour M. et Mme François A, demeurant à ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600930-0600931en date du 24 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en applicatio

n de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2007, présentée pour M. et Mme François A, demeurant à ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600930-0600931en date du 24 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................

Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 février 2010 ;

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme A demandent à la Cour d'annuler le jugement en date du 24 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 à la suite d'une vérification de comptabilité de l'activité d'exploitante d'une discothèque exercée par Mme A et d'un examen contradictoire d'ensemble de leur situation fiscale personnelle ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressements qui, selon l'article L. 48, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'en revanche, si, aux termes de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable aux opérations de contrôle menées à l'égard de M. et Mme A : Dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP), le dialogue joue également un rôle très important tout au long de la procédure. Il vous permet de présenter vos explications sur les discordances relevées par le vérificateur à partir des informations dont il dispose , contrairement à ce que soutiennent les requérants, ni ces dispositions ni aucune autre disposition de la charte dans sa rédaction précitée, n'imposent au vérificateur, préalablement à l'envoi d'une demande d'éclaircissements ou de justifications, d'engager un dialogue portant sur les discordances qu'il a relevées ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la chronologie des opérations de contrôle telle que retracée par l'administration et non contestée par M. et Mme A, que, par lettre du 21 janvier 2003, un rendez-vous a été proposé aux contribuables pour le 6 février suivant ; que le 5 février 2003, ceux-ci ont donné procuration à leur fils pour les représenter ; que, par lettre du 6 février 2003, M. et Mme A ont informé l'administration qu'ils souhaitaient répondre par écrit à d'éventuelles questions posées par le vérificateur ; qu'ils ont mandaté le 12 juin 2003 leur comptable pour les représenter ; que, le 20 juin 2003, une demande d'éclaircissements et de justifications a été remise par le vérificateur en mains propres au comptable ainsi mandaté ; qu'enfin, M. A s'est rendu à une réunion de synthèse le 9 octobre 2003 précédant l'envoi d'une notification de redressement le 10 octobre 2003 ; qu'il résulte de cette chronologie des faits que les conditions d'un véritable dialogue contradictoire ont été offertes aux requérants ; que, par suite, ceux-ci ne sont pas fondés à soutenir que l'administration les aurait privés de cette garantie ;

Considérant, en second lieu, qu'en application de l' article L. 16 du livre des procédures fiscales, l'administration peut demander au contribuable des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ; que si l'administration, pour établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, est fondée à se référer notamment aux sommes inscrites au crédit des comptes bancaires personnels ou des comptes bancaires retraçant indistinctement l'activité professionnelle du contribuable et les mouvements de fonds étrangers à cette activité, elle ne peut prendre en considération les crédits apparaissant sur des comptes bancaires retraçant exclusivement des opérations résultant de l'exercice de la profession ;

Considérant que, si M. et Mme A soutiennent que le compte bancaire n° 06321171156 dont ils disposaient à la Banque Populaire Provençale et Corse était utilisé de façon exclusivement professionnelle dans le cadre de l'activité de Mme A, il résulte de l'instruction et notamment de la réponse en date du 8 août 2003 faite par M. et Mme A à la demande de justifications du 19 juin 2003 que sur ce compte, qui recevait les paiements en espèces de la clientèle de la discothèque, était également conservée la totalité des économies personnelles du foyer ; que l'attestation de l'organisme bancaire, produite par les requérants, selon laquelle le compte bancaire concerné présentait un caractère professionnel, ne remet pas en cause la constatation qui précède ; que, par suite, le vérificateur a pu régulièrement estimer que ce compte bancaire présentait un caractère mixte et tenir compte des sommes portées à son crédit pour apprécier l'écart, dont il n'est pas contesté qu'il était au moins du double, entre les revenus déclarés et les sommes portées au crédit des comptes bancaires ;

Sur les rehaussements apportés aux bénéfices industriels et commerciaux de Mme A :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L.192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) ;

Considérant que l'administration rappelle, sans être contredite, qu'au cours des deux années en litige, la comptabilité de l'activité d'exploitante de discothèque exercée par Mme A a été rejetée comme non probante ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que la fraction des impositions procédant des rehaussements apportés aux bénéfices industriels et commerciaux de Mme A aurait été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, de ce fait, l'administration conserve la charge d'établir le bien-fondé des impositions ;

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

S'agissant de la reconstitution des recettes de l'année 2001 :

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au vérificateur d'utiliser plusieurs méthodes pour reconstituer les recettes d'une entreprise ; qu'à supposer que les requérants aient entendu invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les termes de l'instruction administrative référencée 13 L-7-88 du 6 mai 1988, qui préconise l'utilisation de plusieurs méthodes de reconstitution, cette instruction, qui formule de simples recommandations, ne comporte aucune interprétation formelle de la loi fiscale dont ils pourraient se prévaloir ; qu'en toute hypothèse, le vérificateur a utilisé en l'espèce deux méthodes de reconstitution, la première sous forme de reconstitution matière d'après les quantités revendues, corrigées par les pertes et offerts, la seconde en appliquant un coefficient multiplicateur aux produits revendus ;

Considérant, en second lieu, que, si les requérants entendent opposer à la reconstitution effectuée par le vérificateur, une autre reconstitution effectuée par un expert-comptable, cette dernière, qui s'appuie sur des hypothèses non étayées par une comptabilité régulière, ne présente pas un caractère plus probant que celle retenue par le vérificateur, dont les constatations ne sont pas utilement critiquées ; que l'administration doit, par suite, être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de la minoration par Mme A de ses bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2000 ;

S'agissant de la reconstitution des recettes de l'année 2001 :

Considérant que les requérants soutiennent, s'agissant de la reconstitution des recettes de l'année 2001, que la méthode utilisée par le vérificateur serait radicalement viciée dans la mesure où ont été comptabilisés au titre de l'année en cause des achats effectués en 2002 ; que, de fait, il résulte de l'instruction et notamment de l'examen de l'annexe II à la notification de redressement datée du 10 octobre 2003, que le vérificateur a intégré aux achats effectués au cours de l'année 2001 une cinquantaine de factures de l'année suivante ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, cette anomalie ne peut être regardée comme résultant de simples erreurs matérielles dans la date de saisie des factures ; qu'en outre, ce rattachement de factures de l'année 2002 à l'année précédente, qui porte sur des factures nombreuses et sur des quantités importantes d'achats de boissons, a été de nature à vicier de façon radicale les deux méthodes de reconstitution des recettes de l'année 2001 adoptées par le vérificateur ; que, dans ces conditions, M. et Mme A sont fondés à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la minoration par Mme A de ses bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2001 et à demander la décharge de la fraction des impositions procédant du rehaussement relatif à cette catégorie de revenus ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2001 procédant des rehaussements apportés aux bénéfices industriels et commerciaux de Mme A. ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme A sont déchargés, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2001 procédant des rehaussements apportés aux bénéfices industriels et commerciaux de Mme A.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 24 mai 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme François A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N° 07MA03002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA03002
Date de la décision : 25/03/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : FERRANDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-03-25;07ma03002 ?
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