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15/04/2009 | FRANCE | N°07MA03382

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 5, 15 avril 2009, 07MA03382


Vu la requête, enregistrée le 10 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n°07MA03382, présentée pour le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) CINARCA LIAMONE, dont le siège est à Sari D'Orcino (20151), représenté par son président en exercice, par Me Durand, avocat ;

Le SIVOM CINARCA LIAMONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0600658 du 28 juin 2007 par lequel Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 23 mai 2006 par laquelle le préfet de C

orse-du-Sud a rejeté la demande d'indemnisation qu'il lui avait présentée, et ...

Vu la requête, enregistrée le 10 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n°07MA03382, présentée pour le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) CINARCA LIAMONE, dont le siège est à Sari D'Orcino (20151), représenté par son président en exercice, par Me Durand, avocat ;

Le SIVOM CINARCA LIAMONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0600658 du 28 juin 2007 par lequel Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 23 mai 2006 par laquelle le préfet de Corse-du-Sud a rejeté la demande d'indemnisation qu'il lui avait présentée, et à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 430 063,28 euros en réparation du préjudice subi du fait de la carence du contrôle de légalité sur une délibération ayant institué une redevance relative à la distribution d'eau potable à des usagers résidant en dehors du territoire des communes adhérentes ;

2°) d'annuler la décision du préfet de Corse-du-Sud en date du 23 mai 2006 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 430 063,28 euros, ainsi que les intérêts au taux légal ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 modifiée ;

Vu la loi n°82-213 du 2 mars 1982 modifiée ;

Vu la loi du 22 juillet 1982 modifiée ;

Vu le code des communes en vigueur lorsqu'a été constitué le fait générateur de la créance revendiquée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'article 1er du décret du 27 janvier 2009 qui autorise la Cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l'intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2009 :

- le rapport de M. Antonetti, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Paix, rapporteur public;

- et les observations de Me Février de la Selarl Pech de Laclause et Associés, avocat du SIVOM CINARCA LIAMONE ;

Considérant que le SIVOM CINARCA LIAMONE, par délibération de son comité syndical du 8 juin 1986, avait institué une redevance à raison de la distribution d'eau potable aux usagers domiciliés dans les communes n'ayant pas adhéré au syndicat ; que le caractère illégal de cette délibération a été reconnu par la Cour administrative d'appel de Marseille par un arrêt définitif du 26 février 2002 ; que, saisi par les usagers concernés, le Tribunal de grande instance d'Ajaccio a, par jugement du 29 juillet 2005, condamné le SIVOM CINARCA LIAMONE à leur rembourser le montant des redevances recouvrées sur le fondement de la délibération du 8 juin 1986 ; que le syndicat, estimant qu'en ne déférant pas cette délibération au titre du contrôle de légalité, le préfet de la Corse-du-Sud avait commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il a saisi le Tribunal administratif de Bastia d'une demande tendant à la réparation du préjudice constitué par la charge des remboursements auxquels il a du procéder en exécution du jugement du 29 juillet 2005 ; que par jugement du 28 juin 2007, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté cette demande ; que le SIVOM CINARCA LIAMONE relève appel de ce jugement ; que le préfet de Corse-du-Sud présente, pour sa part, des conclusions incidentes ;

Sur la recevabilité des conclusions incidentes présentées par le préfet de Corse-du-Sud :

Considérant qu'aux termes de l'article R.811-10 du code de justice administrative: Devant la cour administrative d'appel, l'Etat est dispensé de ministère d'avocat soit en demande, soit en défense, soit en intervention. Sauf dispositions contraires, les ministres intéressés présentent devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat. ; que l'article R.811-10-1 du même code énumère les matières pour lesquelles le préfet est substitué au ministre ; que le présent litige ne se rapporte à aucune de ces matières ; que, par suite, le préfet de Corse-du-Sud n'a pas qualité pour y représenter l'Etat en défense ; que dés lors les conclusions incidentes qu'il a présentées sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées par le SIVOM CINARCA LIAMONE :

En ce qui concerne le caractère fautif des agissements des services de l'Etat :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 72 de la Constitution de la France : Les collectivités territoriales de la République (...) s'administrent librement par des conseils élus et dans les conditions prévues par la loi. Dans les départements et les territoires, le délégué du Gouvernement, a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois. ; qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi du 2 mars 1982, dans sa rédaction issue de la loi du 22 juillet 1982 : le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés au paragraphe II de l'article précédent qu'il estime contraire à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission ; que l'article L.163-11 du code des communes, alors en vigueur, disposait que : Les lois et règlements qui concernent le contrôle administratif et financier des communes sont applicables aux syndicats de communes ;

Considérant que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, le principe de libre administration des collectivités territoriales ne s'oppose pas à ce que la responsabilité de l'Etat pour carence dans l'exercice du contrôle de légalité des actes des collectivités locales et des organismes qui y sont assimilés puisse être utilement engagée par la collectivité qui a elle même commis, en toute connaissance de cause, l'illégalité à l'origine d'un préjudice dont elle a dû assumer la réparation ;

Considérant qu'aux termes des 1er et 2ème alinéa de l'article L.163-1du code des communes alors en vigueur : Le syndicat de communes est un établissement public de coopération intercommunale associant des communes en vue d'oeuvres ou de services d'intérêt communal ; qu'il résulte des dispositions du même code applicables en cas d'extension des attributions initiales d'un syndicat de communes qu'une telle extension, qui ne peut intervenir que par décision du représentant de l'Etat dans le département, est subordonnée à l'accord d'une majorité qualifiée des communes adhérentes du syndicat ; qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier qu'aux termes de l'arrêté du préfet de Corse en date du 17 mars 1964, le SIVOM CINARCA LIAMONE a pour objet la construction et l'entretient des chemins ruraux, l'assainissement, l'irrigation, l'aménagement et la mise en valeur de la région ; qu'il n'est ni soutenu ni a fortiori établi que cet objet aurait été étendu postérieurement à l'entrée en vigueur de cet arrêté ; qu'ainsi l'adduction et la distribution de l'eau potable n'entraient pas, à la date de la délibération du 8 juin1986, dans les compétences du syndicat ; qu'il est, en outre, constant que ce service était assuré pour les communes d'Alata, d'Appietto, et de Villanova qui n'avaient ni adhéré au SIVOM CINARCA LIAMONE, ni conclu de convention avec lui ; que dés lors, et ainsi que l'a jugé la Cour administrative d'appel de Marseille, la délibération du comité syndical du 8 juin 1986 instituant une redevance en matière d'adduction d'eau potable distribuée aux usagers domiciliés notamment dans les communes citées, est entachée d'incompétence ; que le SIVOM CINARCA LIAMONE soutient en outre sans être valablement contredit que, dés l'origine et avec l'accord des services de l'Etat, son organe délibérant a méconnu les compétences matérielles et territoriales résultant de ses statuts et ce, jusqu'en 1997 ;

Considérant qu'il suit de là que le préfet de Corse-du-Sud, en s'abstenant de déférer au tribunal administratif une délibération dont le caractère illégal ressortait avec évidence de la simple lecture d'un arrêté qu'il avait lui même signé, a commis, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SIVOM CINARCA LIAMONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ;

En ce qui concerne le montant du préjudice résultant des agissements fautifs des services de l'Etat :

Considérant que le SIVOM CINARCA LIAMONE a été condamné à rembourser la somme de 430 063,28 euros, par jugement du 29 juillet 2005 du Tribunal de grande instance d'Ajaccio ; que le syndicat soutient sans être valablement contredit qu'il a déjà procédé à l'exécution de ce jugement devenu définitif à hauteur de 359 851 euros ; qu'il n'est pas contesté que le préjudice résultant de cette condamnation résulte directement du caractère illégal de la délibération du comité syndical du 8 juin 1986 et s'élève donc à a somme de 430 063,28 euros;

En ce qui concerne l'atténuation de la responsabilité de l'Etat:

Considérant toutefois que l'incompétence du comité syndical à délibérer sur une matière qui n'était pas mentionnée dans l'arrêté instituant l'établissement public et concernant des communes qui n'y adhéraient pas présentait un caractère évident ; que les délégués des communes adhérentes constituant le comité syndical n'ont donc pas fait preuve de la vigilance qui leur incombait ; qu'ainsi la faute du syndicat est de nature à atténuer la responsabilité de l'Etat ; qu'il sera fait une juste appréciation de cette responsabilité en limitant la condamnation de l'Etat à la moitié du montant du préjudice supporté par le SIVOM CINARCA LIAMONE ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de condamner l'Etat à verser au SIVOM CINARCA LIAMONE la somme de 2 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions incidentes présentées par le préfet de Corse-du-Sud sont rejetées.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Bastia du 28 juin 2007 est annulé.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser au SIVOM CINARCA LIAMONE la somme de 215 031,64 euros (deux cent quinze mille trente et un euros et soixante-quatre centimes) majorée des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande adressée à l'administration.

Article 4 : L'Etat (ministère de l'intérieur) versera au SIVOM CINARCA LIAMONE une somme de 2 500 (deux mille cinq cents) euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête du SIVOM CINARCA LIAMONE est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au SIVOM CINARCA LIAMONE, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et au préfet de la région Corse, préfet de la Corse-du-Sud.

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N° 07MA03382 5

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Jacques ANTONETTI
Rapporteur public ?: Mme PAIX
Avocat(s) : DURAND

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 5
Date de la décision : 15/04/2009
Date de l'import : 22/01/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07MA03382
Numéro NOR : CETATEXT000021924340 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-04-15;07ma03382 ?
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