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22/01/2009 | FRANCE | N°07NC01465

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 22 janvier 2009, 07NC01465


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 30 octobre 2007, complétée par mémoires enregistrés le 6 juin et le 29 septembre 2008, présentée pour la SOCIETE CERP LORRAINE, dont le siège est situé 2 allée des Tilleuls à Heillecourt (54182), par la société d'avocats Taj ;

La SOCIETE CERP LORRAINE demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement en date du 29 août 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la restitution de la somme de 46 503 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ses dépense

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 30 octobre 2007, complétée par mémoires enregistrés le 6 juin et le 29 septembre 2008, présentée pour la SOCIETE CERP LORRAINE, dont le siège est situé 2 allée des Tilleuls à Heillecourt (54182), par la société d'avocats Taj ;

La SOCIETE CERP LORRAINE demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement en date du 29 août 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la restitution de la somme de 46 503 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ses dépenses de réception et de représentation pour la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 2000 ;

2°) - d'ordonner la restitution de la somme de 46 503 euros, assortie des intérêts moratoires ;

3°) - de saisir en tant que de besoin la Cour de justice des communautés européennes ;

4°) - de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que les factures relatives aux frais de restauration et de réception n'avaient pas été établies en conformité avec l'instruction 3 D-2-00 du 17 novembre 2000 et

3D-3-02 du 15 juillet 2002 et qu'il n'était dès lors pas démontré que les dépenses litigieuses avaient été exposées dans son intérêt ;

- l'administration fiscale ne peut remettre en cause, en raison du principe de la hiérarchie des normes, le droit à déduction en se fondant sur une règle de forme non respectée ; elle ne peut davantage opposer cette règle de forme pour en conclure que les dépenses litigieuses n'ont pas été engagées dans l'intérêt de la société ;

- les principes communautaires de neutralité, de proportionnalité et de confiance légitime ont été méconnus ;

- en exigeant de faire figurer sur des factures émises entre 1996 et 2000 des mentions qui n'étaient pas exigées à l'époque, l'administration fiscale place le contribuable dans l'impossibilité de récupérer la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces dépenses et crée une distorsion de situation avec les autres contribuables ;

- les factures originales qui sont conservées par la société pour justifier les besoins de sa comptabilité, n'ont jamais été réclamées par l'administration ; ces pièces sont à la disposition de l'administration ; l'administration ne peut invoquer l'absence de production des factures pour refuser de faire droit à sa réclamation ;

- le comportement de l'administration fiscale constitue, du fait des circonstances particulières, un détournement de la loi fiscale caractérisant une faute lourde ; que l'existence de cette fraude à la loi permet d'écarter les règles de droit pour s'attacher aux règles de fond ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 31 mars, le 31 juillet et le 12 décembre 2008, présentés par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

Il soutient que les règles de facturation et la réglementation fiscale imposent l'apposition sur les factures de l'identité du bénéficiaire des prestations ; que la circonstance que ces dépenses n'ouvraient pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée à l'époque des faits est sans incidence sur le respect de cette obligation ; que l'article 224 de l'annexe III au code général des impôts et l'article 4 du décret n° 91-352 du 11 avril 1991 sont sans rapport avec les exigences formelles au regard du droit à déduction ; que l'exercice du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à une dépense est subordonné au respect cumulatif de plusieurs conditions ; que les justificatifs transmis par la société, outre l'absence du nom et de l'adresse du client, ne satisfont pas à la condition prévue à l'article 286 du code général des impôts tenant à la présentation d'une facture originale ; que l'instruction 3 E-1-06 du 10 avril 2006 qui confirme l'obligation de mention du client et de son adresse, est en tout état de cause postérieure à la date d'imposition litigieuse et celle n° 136 du 7 août 2003 ne s'applique qu'aux factures émises à compter du 1er juillet 2003 ; que l'administration n'a méconnu aucun principe de neutralité, de proportionnalité et de confiance légitime ; que les conclusions tendant à faire admettre la faute de l'Etat sont irrecevables ; qu'en l'absence de litige né et actuel, la demande tendant au remboursement d'intérêts moratoires est prématurée et irrecevable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, modifiée, en matière d'harmonisation des législations des états membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 décembre 2008 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE CERP LORRAINE qui exerce une activité de commerce en gros de produits pharmaceutiques, a présenté en décembre 2002 une réclamation en vue d'obtenir la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 95 000 euros, ultérieurement porté à 99 167 euros, ayant grevé les frais de restaurant et de réception exposés par elle au profit de tiers, de dirigeants et de salariés de la société, au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 2000 ; que l'administration fiscale a accordé la restitution d'un montant de 48 497 euros de droits de taxe et rejeté le surplus au motif que les pièces justificatives présentées à l'appui de la réclamation ne mentionnaient pas le nom et l'adresse du bénéficiaire des prestations ; que la SOCIETE CERP LORRAINE fait appel du jugement du Tribunal administratif de Nancy rejetant sa demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'époque des faits : « I. 1 La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. ( ...)» ; qu'aux termes de l'article 289 du même code : “ I. Tout assujetti doit délivrer une facture ou un document en tenant lieu pour les biens livrés ou les services rendus à un autre assujetti ou à une personne morale non assujettie (...) II. La facture ou le document en tenant lieu doit faire apparaître : 1° Par taux d'imposition, le total hors taxe et la taxe correspondante mentionnés distinctement (...) III. Un décret en Conseil d'Etat fixe les autres éléments d'identification des parties et données concernant les biens livrés ou les services rendus qui doivent figurer sur la facture (....) ; que l'article 242 nonies de l'annexe II à ce code dispose dans sa rédaction en vigueur pendant la période d'imposition : «Les mentions obligatoires qui doivent figurer sur les factures en application du II de l'article 289 du code général des impôts sont les suivantes : 1° le nom complet et l'adresse de l'assujetti et de son client (...)» ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 289 du code général des impôts, que le législateur a confié au pouvoir réglementaire le soin de fixer des éléments d'identification des parties et données concernant les biens livrés ou les services rendus qui doivent figurer sur la facture ; que, par suite, en prenant les mesures réglementaires prévues par la loi, le gouvernement n'a méconnu, contrairement à ce que soutient la SOCIETE CERP LORRAINE, aucune règle de valeur constitutionnelle, ni porté atteinte à la hiérarchie des normes ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'article 22 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 susvisée, dont les motifs rappellent l'objectif de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, que les états membres sont compétents dans la mise en oeuvre du droit à déduction par la détermination des critères permettant de qualifier un document de facture ; que les articles 289 et 242 nonies précités du code général des impôts et de son annexe II assurent la transposition des dispositions de l'article 22 selon des modalités dont la SOCIETE CERP LORRAINE n'établit pas, en se bornant à reprocher à l'administration de la contraindre à refaire ses factures, qu'elles seraient contraires au principe de neutralité ; que la requérante n'établit pas davantage qu'elle aurait fait l'objet d'un traitement différent de celui d'autres entreprises ayant recouru à des prestations de même nature que celles ayant fait l'objet de sa demande de restitution de taxe sur la valeur ajoutée ; que le moyen tiré de l'atteinte au principe de non discrimination ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que l'exigence de mention du nom du bénéficiaire de la prestation sur les factures vise à garantir que la dépense que soutient avoir engagé la SOCIETE CERP LORRAINE a effectivement été supportée par elle ; qu'une telle obligation qui a d'ailleurs été aménagée en permettant aux entreprises concernées de faire établir des bordereaux récapitulatifs, comportant l'ensemble des mentions prévues par les textes précitée, signés par le fournisseur n'est, en tout état de cause, pas contraire au principe communautaire de proportionnalité ;

Considérant, en quatrième lieu, que la suppression de l'exclusion du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a ouvert des droits au bénéfice des entreprises ayant engagé des dépenses de restaurant et de réception ne saurait constituer une atteinte au principe de confiance légitime ; qu'il en est de même, en tout état de cause, de l'application de règles de facturation qui préexistaient aux modifications intervenues et sont demeurées inchangées ;

Considérant, en cinquième lieu, que le motif pour lequel l'administration fiscale a refusé à la SOCIETE CERP LORRAINE la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée est lié au défaut de mentions obligatoires sur les factures présentées et non au fait que ces factures ne seraient pas des originaux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CERP LORRAINE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires :

Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel avec le comptable sur ce point, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires sont en tout état de cause irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SOCIETE CERP LORRAINE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE CERP LORRAINE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE CERP LORRAINE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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07NC01465


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01465
Date de la décision : 22/01/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés GILTARD
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS TAJ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-01-22;07nc01465 ?
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