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18/09/2008 | FRANCE | N°07VE01196

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 18 septembre 2008, 07VE01196


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2007 par télécopie et régularisée le 24 mai 2007 en original au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS, représentée par son président en exercice, par Me Guinot ; l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS (ADIV) demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505625 en date du 20 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2005 du préfet des Yvelines d

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Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2007 par télécopie et régularisée le 24 mai 2007 en original au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS, représentée par son président en exercice, par Me Guinot ; l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS (ADIV) demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505625 en date du 20 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2005 du préfet des Yvelines déclarant d'utilité publique le projet de déviation de la route départementale 154 entre Verneuil-sur-Seine et Vernouillet ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, sur la régularité du jugement, que celui-ci est insuffisamment motivé dès lors qu'en se bornant à vérifier l'existence de la déclaration de projet sans examiner si le contenu de cette déclaration satisfaisait aux exigences formelles posées par l'article L. 126-1 du code de l'environnement, le tribunal administratif n'a pas répondu à la critique formulée dans son mémoire en réplique ; sur la légalité de la décision litigieuse, en ce qui concerne la légalité externe, que l'étude d'impact n'est pas conforme aux dispositions du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 dès lors qu'il manque à cette étude une analyse complète et sérieuse du trafic routier, le trafic induit par les écoles n'étant pas pris en compte, les données relatives au trafic routier étant incomplètes et contradictoires et les tronçons nord et sud n'étant pas définis ; que l'étude d'impact n'a pas suffisamment analysé les conséquences du projet sur la faune et la flore dès lors qu'elle ne recense que seize espèces de papillons alors que, d'après une étude environnementale produite en première instance, il y en aurait plusieurs centaines ; en ce qui concerne la légalité interne, que l'utilité publique du projet n'est pas démontrée dès lors que le centre ornithologique d'Ile-de-France, l'agence des espaces verts d'Ile-de-France et la direction régionale de l'environnement (DIREN) d'Ile-de-France ont émis un avis défavorable au projet compte tenu du caractère négatif du bilan coûts-avantages ; que la réduction estimée de 13 % du trafic n'est pas établie et représente un passage quasi-anecdotique de 2 000 véhicules par jour sur la plus grande partie de la déviation alors même que l'emprise de la route est de 17 mètres dans les bois et de 35 mètres dans la plaine ; que le budget s'élève à 20 millions d'euros et suppose l'expropriation de plus de 12 000 m2 de terres agricoles ; que le projet induit un trafic supplémentaire au sein même de certains secteurs des communes qu'il entend délester ; que le projet cache l'intention de réaliser une liaison rapide entre les deux plus importantes autoroutes de l'ouest parisien ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 92/43 CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;

Vu le décret du 26 avril 1994 portant approbation du schéma directeur de la région Ile-de-France ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2008 :

- le rapport de Mme Agier-Cabanes, premier conseiller,

- les observations de Me Hourcabie pour l'ADIV et de Me Fabre-Luce pour le département des Yvelines,

- et les conclusions de Mme Grand d'Esnon, commissaire du gouvernement ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 septembre 2008, présentée pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 septembre 2008, présentée pour le département des Yvelines ;

Considérant que par arrêté en date du 25 avril 2005, le préfet des Yvelines a déclaré d'utilité publique le projet de déviation et d'aménagement de la route départementale (RD) 154 sur le territoire des communes de Chapet, Médan, les Mureaux, Verneuil-sur-Seine et Vernouillet ; que le projet retenu, qui comprendra deux voies, vise à délester le trafic des centres villes de Verneuil-sur-Seine et Vernouillet ; que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS fait appel du jugement du 20 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS fait valoir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé dès lors que le tribunal administratif n'aurait pas répondu à la deuxième branche du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 126-1 du code de l'environnement en omettant d'examiner si le contenu de la déclaration de projet satisfaisait aux exigences posées par cet article ; que, toutefois, il ressort de l'examen du jugement que, contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal ne s'est pas borné à vérifier l'existence de la déclaration de projet mais a également examiné la conformité de cette déclaration aux conditions prévues par l'article L. 126-1 du code de l'environnement ; que, dès lors et en tout état de cause, le moyen ainsi soulevé manque en fait ;

Sur la légalité de la déclaration d'utilité publique :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que si le 3 de l'article L. 11-1-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique prévoit que « l'acte déclarant l'utilité publique est accompagné d'un document qui expose les motifs et considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération », ces dispositions, qui exigent que l'auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l'ont fondée, ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la déclaration d'utilité publique qui serait une condition de légalité de cette dernière ; qu'ainsi, les dispositions de cet article ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'un acte déclarant d'utilité publique une opération ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, alors applicable : « Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. » ; que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS soutient que le contenu de l'étude d'impact méconnaîtrait ces dispositions dès lors que les données relatives au trafic seraient incomplètes et erronées et que les conséquences sur la faune et la flore auraient été insuffisamment analysées ;

Considérant, d'une part, que s'agissant des données relatives au trafic automobile, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'information mise à la disposition du public comporte des erreurs, des défaillances et des contradictions de nature à induire en erreur celui-ci sur l'objectif du projet de déviation dès lors qu'elle fait apparaître, d'une part, les difficultés de circulation actuelles et, d'autre part, la diminution attendue du trafic dans le centre de Verneuil et de Vernouillet et ses avantages ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, les tronçons nord et sud sont suffisamment identifiés dans le texte et les documents graphiques permettent de rendre compte de l'ensemble des aspects de l'évolution du trafic dans le secteur jusqu'en 2015 avec suffisamment de précision ; que, notamment, l'évolution du trafic routier sur les voies annexes a été analysée ; que l'étude n'avait pas à prendre en compte d'autres tracés possibles ; que l'association requérante n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que les prévisions énoncées dans l'étude d'impact seraient erronées ou dépourvues de caractère sérieux ;

Considérant, d'autre part, s'agissant des conséquences du projet sur la faune et la flore, que si l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS fait valoir que l'étude d'impact n'a pas recensé l'ensemble des espèces présentes sur le site, il n'appartenait pas aux auteurs de cette étude d'effectuer un tel recensement, mais d'examiner les caractéristiques essentielles du milieu naturel et leur évolution prévisible résultant de la réalisation du projet de déviation ; qu'ainsi, les données relatives à la faune et à la flore, issues d'observations menées de juin à octobre 2002 sur les différents milieux, longuement développées dans l'étude d'impact, doivent être regardées comme suffisantes nonobstant l'absence de référence à certaines espèces animales ; que les mesures compensatoires prévues sont clairement exposées ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact n'est pas fondé et doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que les travaux déclarés d'utilité publique visent, comme il a été dit, à la construction d'une déviation routière d'une longueur d'environ 5 km comportant seulement deux voies de circulation, de 3,50 mètres chacune ; qu'eu égard à sa faible ampleur, un tel projet ne peut s'analyser comme portant sur un « grand ouvrage » au sens du schéma directeur de la région Ile-de-France ; qu'en tout état de cause, celui-ci permet aux équipements constituant des grands ouvrages de traverser des espaces boisés dès lors que leur impact est limité, notamment par une adaptation desdits équipements à leur environnement forestier et par le rétablissement d'une continuité forestière satisfaisante ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le tracé de la déviation dans le bois de Verneuil emprunte l'axe d'une allée existante qui sera élargie et que le projet prévoit des compensations forestières ; que, dans ces conditions, ces travaux ne remettent en cause ni les options fondamentales du schéma directeur de la région Ile-de-France, ni la destination générale des sols, ni la protection des sites ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet litigieux aura une incidence significative sur l'habitat du « sphinx de l'Epilobe » ; qu'ainsi, et en tout état de cause, l'arrêté attaqué ne porte pas atteinte aux objectifs définis par la directive du 21 mai 1992 du Conseil des communautés européennes concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage ;

Considérant, en troisième lieu, qu'une opération ne peut légalement être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la déviation routière en litige tend à remédier aux graves nuisances et à l'insécurité générées par la route départementale 154, s'agissant notamment de l'importance du trafic de transit dans le centre des agglomérations de Verneuil-sur-Seine et Vernouillet ; que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que ce projet serait inutile en termes d'amélioration du trafic routier dès lors que celui-ci serait en tout état de cause amené à diminuer inexorablement à l'avenir et que, à l'intérieur des communes de Verneuil et de Vernouillet, il ne s'agirait pas d'un trafic traversant mais propre aux déplacements urbains ; qu'il ressort, en revanche, des pièces du dossier que ce trafic, par sa densité, est facteur d'accidents pour les automobilistes et de nuisances, notamment sonores, pour les riverains ;

Considérant, d'autre part, qu'il n'est pas établi que le coût financier du projet aurait été sous-estimé ou qu'il serait disproportionné aux avantages attendus ; que, s'agissant de l'évolution du trafic, il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions de celui-ci dans les communes avoisinantes, et notamment dans celle de Chapet, seraient aggravées par la réalisation du projet de déviation ; qu'il n'est pas davantage établi que la réalisation de la déviation accroîtrait la dangerosité de la circulation en augmentant la vitesse lors de la traversée des bois ou en déviant la circulation dans des quartiers pavillonnaires comportant des écoles ; que, s'agissant des conséquences sur la faune et la flore, la coulée verte et le secteur dit des Planes feront l'objet de déboisements et d'expropriation limités, alors même que les mesures compensatoires envisagées, notamment la création de mares et de passages pour les animaux et la mise en place d'une convention avec les propriétaires des Planes en vue de protéger la faune et la flore de ce secteur ainsi que la recréation de zones humides, doivent être regardées comme suffisantes ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'habitat de certaines espèces protégées, présentes dans la coulée verte, serait menacé de façon significative par le projet de déviation ; que la circonstance, à la supposer avérée, que les mesures préconisées par l'association requérante seraient plus protectrices que celles prévues par le département des Yvelines est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse ; qu'ainsi, et alors qu'il n'appartient pas au juge d'examiner l'opportunité d'autres tracés, les inconvénients liés à la déviation de la RD 154 ne peuvent être regardés comme excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente pour l'amélioration de la traversée des communes concernées ; que, dès lors, un tel projet, justifié en termes de sécurité et de salubrité publiques et d'amélioration du cadre de vie, présente un caractère d'utilité publique ; que, par suite, le préfet des Yvelines, qui n'était pas tenu de suivre les avis de la direction régionale de l'environnement et de l'Agence régionale des espaces verts, n'a pas entaché sa décision d'illégalité ;

Considérant, enfin, que si l'association requérante soutient que la déclaration d'utilité publique attaquée serait entachée d'un détournement de pouvoir, tenant à ce que le véritable objectif du projet serait la construction d'une route comportant deux fois deux voies, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des dimensions des ronds-points prévus et de la largeur des emprises de la route, laquelle est justifiée par les ouvrages complémentaires qu'appelle la réalisation de la voie, que le projet viserait un objectif différent de la déviation à deux voies décrite ci-dessus ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS le paiement au département des Yvelines d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS est rejetée.

Article 2 : L'ASSOCIATION DE DEFENSE DES INTERETS DES VERNOLIENS versera au département des Yvelines la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions du département des Yvelines tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE01196
Date de la décision : 18/09/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Isabelle AGIER-CABANES
Rapporteur public ?: Mme GRAND d'ESNON
Avocat(s) : CABINET H et G AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-09-18;07ve01196 ?
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