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28/05/2009 | FRANCE | N°07VE02329

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 28 mai 2009, 07VE02329


Vu l'ordonnance en date du 9 août 2007, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 5 septembre 2007, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application de l'article R. 351-3 alinéa 1er du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SARL PARTNER, la SCI la PISCOPOISE et le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU DOMAINE DE CHATEAUVERT, dont les sièges sociaux sont situés 2 et 8 rue de l'Eglise, à Piscop (95350), et pour M. Pascal X, demeurant ..., par Me

Le Port ;

Vu ladite requête, enregistrée à la Cour admin...

Vu l'ordonnance en date du 9 août 2007, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 5 septembre 2007, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application de l'article R. 351-3 alinéa 1er du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SARL PARTNER, la SCI la PISCOPOISE et le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU DOMAINE DE CHATEAUVERT, dont les sièges sociaux sont situés 2 et 8 rue de l'Eglise, à Piscop (95350), et pour M. Pascal X, demeurant ..., par Me Le Port ;

Vu ladite requête, enregistrée à la Cour administrative d'appel de Paris le 1er août 2007 ; les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305100 / 0305620 / 0509786 / 0510360 / 0510370 en date du 31 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de la décision implicite de la commune de Piscop relative à l'indemnisation du préjudice subi à la suite des agissements fautifs de cette commune ainsi qu'à la condamnation de cette dernière à leur verser les sommes respectives de 1 642 401 euros, 448 201 euros et 150 000 euros ;

2°) de condamner la commune de Piscop à leur verser les sommes respectives de 1 642 401 euros, 448 201 euros et 150 000 euros majorées des intérêts de droit à compter du 28 juillet 2003 ;

Ils soutiennent que :

- les agissements fautifs de la commune, caractérisés par les multiples contentieux que cette collectivité a engagés à leur encontre, justifient qu'il leur soit accordé réparation compte tenu de l'acharnement qu'ils révèlent ; les différents arrêtés de périls pris successivement par le maire ont ainsi été annulés ; par ailleurs, la commune s'est opposée de manière abusive aux travaux nécessaires pour l'entretien des immeubles du domaine ; enfin, il a été abusivement refusé aux requérants de procéder à un branchement sur le réseau public d'assainissement ;

- le refus de cette collectivité d'exécuter la chose jugée constitue également une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- les préjudices subis résultent, pour un montant de 1 751 868 euros, de la perte des revenus escomptés des loyers, pour un montant de 448 201 euros, de l'impossibilité d'entretenir et de mettre en valeur le château de Chateauvert et, s'agissant de

M. X, des troubles dans ses conditions d'existence et du préjudice moral, qui doivent être évalués ensemble à la somme de 150 000 euros ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2009 :

- le rapport de M. Lenoir, président assesseur,

- les conclusions de M. Davesne, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Port, pour la SOCIETE PARTNER, la SCI la PISCOPOISE, le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU DOMAINE DE CHATEAUVERT et M. X, et de Me Ritz-Caignard, pour la commune de Piscop ;

Vu, enregistrées les 19 et 20 mai 2009 au greffe de la Cour, les notes en délibéré présentées pour la SARL PARTNER, la SCI la PISCOPOISE, le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU DOMAINE DE CHATEAUVERT et M. X, et pour la commune de Piscop ;

Considérant que la SARL PARTNER, dont le gérant est M. X, a acquis, par jugement d'adjudication du 4 octobre 1990, la propriété du lot n° 2 du domaine de Châteauvert, situé sur le territoire de la commune de Piscop (Val-d'Oise) et d'une superficie de 4 hectares 50 ares ; que, le 17 janvier 1994, M. X a acquis les parts de la société civile immobilière LA PISCOPOISE , propriétaire du lot n° 1 du même domaine, d'une superficie de 1 hectare 50 ares ; que ces deux sociétés sont les seuls membres du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU DOMAINE DE CHATEAUVERT chargé de gérer l'ensemble du domaine ; que les intéressés relèvent appel du jugement susvisé du 31 mai 2007 en tant que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'a pas fait droit à leur demande de condamnation de la commune de Piscop à les indemniser du préjudice résultant des agissements fautifs de cette collectivité ;

Sur la responsabilité :

S'agissant de la mise en jeu de la responsabilité pour faute de la commune de Piscop :

Considérant qu'à l'appui de leur demande de condamnation de la commune de Piscop, les requérants ont fait valoir, tant en première instance qu'en appel, que cette collectivité engageait sa responsabilité en raison des illégalités fautives dont étaient entachées les décisions du maire de la commune déclarant différents ouvrages du domaine de Chateauvert en état de péril imminent ou non imminent, refusant aux copropriétaires la possibilité de procéder à un deuxième branchement sur le réseau public d'assainissement et s'opposant à leurs déclarations de travaux ; qu'outre la faute résultant de l'existence d'une illégalité, les requérants ont également fait valoir que la répétition de ces mêmes illégalités traduisait une méconnaissance, par la commune, de l'autorité de la chose jugée et révélait une volonté de nuire à leurs intérêts ; que, dès lors qu'étaient mentionnées, dans les écritures des requérants, les différentes décisions juridictionnelles censurant les arrêtés pris par le maire de Piscop, les premiers juges ne pouvaient écarter leurs demandes au motif qu'ils n'apportaient pas la preuve de l'existence d'un fait précis de nature à engager la responsabilité de la commune ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leurs conclusions tendant à ce que soit engagée la responsabilité de la commune de Piscop ;

S'agissant de l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Piscop :

Considérant, en premier lieu, que, par deux décisions en date des 5 janvier et 14 mars 1995, le maire de la commune de Piscop a indiqué aux requérants qu'il s'opposait à leur déclaration de travaux portant sur un immeuble dont la construction avait été interrompue, en 1972, en raison de l'illégalité de l'autorisation implicite de construire dont avaient alors bénéficié les propriétaires du domaine, alors qu'un permis de construire était nécessaire ; que la demande d'annulation de cette décision a été rejetée par un jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 23 novembre 2000, l'appel dirigé contre ce jugement étant lui-même rejeté par une ordonnance du président de la Cour administrative d'appel de Paris en date du 3 mai 2001 ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir d'une illégalité fautive affectant cette décision pour demander que soit mise en jeu la responsabilité de la commune de Piscop ;

Considérant, en deuxième lieu, que les requérants font valoir que la décision du maire de la commune de Piscop en date du 12 décembre 1996 refusant de donner suite à leur demande de deuxième raccordement au réseau public d'assainissement serait fautive en raison de son illégalité ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le maire de la commune a, à la fin de l'année 2003, pris une nouvelle décision accordant aux intéressés le droit de se raccorder au réseau ; que l'illégalité éventuelle affectant la première décision n'a pas été définitivement constatée, dès lors que le jugement du Tribunal administratif de Versailles du 17 décembre 2002 annulant cette décision a fait l'objet d'un sursis à exécution prononcé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 14 octobre 2003 ; que, dès lors, les requérants ne sont pas davantage fondés à se prévaloir de l'existence d'une décision illégale fautive en la matière pour demander que soit mise en jeu la responsabilité de la commune de Piscop ;

Considérant, en troisième lieu, que les requérants font valoir que la commune de Piscop a également engagé sa responsabilité en raison des illégalités fautives entachant six arrêtés de péril imminents et non imminents pris par le maire de cette commune les 13 mai 1992, 18 juin 1992, 9 février 1995, 24 avril 1995, 28 juillet 2003 et 6 septembre 2005 ; que, toutefois, en ce qui concerne les arrêtés pris les 13 mai et 18 juin 1992, les actes en cause ont été rapportés sans avoir reçu un commencement d'exécution ; que, s'agissant des autres arrêtés de péril, si les illégalités les affectant sont de nature, contrairement à ce que soutient la commune, à engager la responsabilité pour faute de cette dernière, il ressort des pièces du dossier, notamment des conclusions des trois rapports d'expertise sur le fondement desquels ils ont été pris et qui ne sont pas contestées par les requérants, que les dégradations affectant les ouvrages en cause justifiaient les mesures ordonnées par le maire de Piscop ; qu'ainsi, et compte tenu de la nécessité d'assurer la sécurité des personnes et des biens, les illégalités fautives affectant les décisions litigieuses ne sont pas à l'origine d'un préjudice dont les requérants seraient en droit de demander l'indemnisation ;

Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes raisons que celles-ci-dessus évoquées, la réitération des décisions défavorables opposées aux requérants ne révèlent ni une volonté du maire de la commune de Piscop de méconnaître l'autorité de la chose jugée, ni son intention de leur nuire ; que les conclusions tendant à ce que la responsabilité de la commune soit engagée en raison des agissements fautifs de son maire doivent, en conséquence, être rejetées ;

Considérant, en revanche, que, par une décision en date du 23 décembre 1996, le maire de Piscop s'est opposé à une nouvelle déclaration de travaux communiquée par les requérants et concernant des opérations de ravalement de différents bâtiments du domaine ; que cette décision a été annulée par un jugement en date du 17 décembre 2002 du Tribunal administratif de Versailles ; que, par un arrêt en date du 8 mars 2006, la Cour a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur l'appel présenté par la commune dès lors que le maire de la commune de Piscop avait indiqué ne pas s'opposer aux travaux de même nature envisagés par les requérants dans une nouvelle déclaration présentée le 12 juin 2003 ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l'illégalité fautive entachant la décision précitée du 23 décembre 1996 est de nature à engager la responsabilité de la commune de Piscop ;

Sur le préjudice :

S'agissant de l'exception de prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968 : Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes (...) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) ;

Considérant que, si la commune fait valoir que la créance dont se prévalent les requérants serait prescrite en application des dispositions de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968, l'existence de la créance résultant de l'illégalité fautive commise par le maire de Piscop en raison de la décision du 23 décembre 1996 portant opposition à déclaration de travaux n'a, toutefois, été révélée qu'à la suite du jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 17 décembre 2002 annulant cette décision ; que, par suite, les droits à indemnisation du fait de cette décision fautive n'ont été acquis qu'à compter de cette date ; que, dès lors, la commune n'est pas fondée à soutenir que la créance en résultant aurait été prescrite lorsque les requérants ont présenté leur demande d'indemnisation le 28 juillet 2003 ;

S'agissant de l'existence d'un préjudice indemnisable :

Considérant qu'à l'appui de leur requête, les requérants font valoir qu'en raison de l'opposition du maire de la commune de Piscop, durant sept années, aux travaux de ravalement qui étaient envisagés, s'agissant du château implanté à l'intérieur du domaine et destiné à devenir un hôtel restaurant, la SCI LA PISCOPOISE, propriétaire dudit château, a subi un préjudice évalué à un montant de 448 201 euros résultant du non-paiement des loyers escomptés ainsi que des travaux supplémentaires qui ont dû être engagés à raison des dégradations résultant du retard des opérations de rénovation de l'immeuble ; que, toutefois, les requérants ne produisent, à l'appui de leurs allégations, aucun élément de nature à établir ni qu'ils pouvaient raisonnablement prétendre obtenir les loyers dont ils font état, ni l'existence des dégradations, ni la nature et le coût des travaux supplémentaires nécessaires pour remédier auxdites dégradations ; que, par suite, et faute de l'existence d'un préjudice certain, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, ces conclusions indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant, en revanche, que M. X, gérant de la SCI LA PISCOPOISE et qui exerce la profession de restaurateur-hôtelier, est fondé à se prévaloir des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice moral résultant de l'impossibilité à laquelle il s'est heurtée, et pendant une période de sept années, de procéder aux travaux de ravalement du château ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble de ces préjudices en lui allouant la somme de 10 000 euros, cette somme portant intérêt à compter du 29 juillet 2003, date de la demande préalable d'indemnisation présentée par les requérants ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 4 du jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 31 mai 2007 est annulé.

Article 2 : La commune de Piscop est condamnée à verser à M. X une somme de 10 000 euros. Cette somme portera intérêt à compter du 29 juillet 2003.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 07VE02329 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE02329
Date de la décision : 28/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Hubert LENOIR
Rapporteur public ?: Mme GRAND d'ESNON
Avocat(s) : LE PORT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2009-05-28;07ve02329 ?
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