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08/04/2010 | FRANCE | N°08LY02464

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 08 avril 2010, 08LY02464


Vu, I. / enregistrée sous le n° 08LY02464, la requête, enregistrée le 10 novembre 2008 à la Cour, présentée pour M. Anosike A, domicilié chez M. Hervé B ...

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802244, en date du 10 juin 2008, du Tribunal administratif de Lyon, en ce qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions du 7 janvier 2008 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à

destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour l...

Vu, I. / enregistrée sous le n° 08LY02464, la requête, enregistrée le 10 novembre 2008 à la Cour, présentée pour M. Anosike A, domicilié chez M. Hervé B ...

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802244, en date du 10 juin 2008, du Tribunal administratif de Lyon, en ce qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions du 7 janvier 2008 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, et, d'autre part, de la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux formulé le 22 janvier 2008 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois jusqu'à ce qu'il soit statué à nouveau sur sa demande ou enfin, à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, de lui délivrer une assignation à résidence dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1400 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour et le rejet implicite de son recours gracieux méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il ne pourrait pas recevoir, au Nigéria, où il est par ailleurs sans nouvelle de sa famille, les soins requis par son état de santé ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et que le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 41 de la loi du 20 novembre 2007, qui dispense de motivation ces mesures de police, est contraire aux dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 et est entaché d'inconventionalité au regard des stipulations des articles 3, 6, 8 et 14 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; que cette disposition portant dispense de motivation est contraire aux recommandations de la Halde, crée une différence de traitement entre les administrés et est contraire au principe d'égalité devant le service public ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 16 janvier 2009, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour et la décision implicite rejetant le recours gracieux formulé par le requérant le 22 janvier 2008 ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation et ne méconnaissent pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'un défaut de motivation et que la dispense de motivation prévue au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas entachée d'inconventionalité ; que l'obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de cette même convention ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 mars 2009, présenté pour M. Anosike A, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2009 à la Cour, présenté par le préfet du Rhône, qui maintient ses conclusions tendant au rejet de la requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que les certificats médicaux produits ne permettent pas d'établir que le requérant serait dans l'impossibilité de bénéficier de soins appropriés au Nigéria ; que le coût financier du traitement médical et l'absence éventuelle de ressources financières suffisantes pour le prendre en charge sont sans incidence sur la légalité l'arrêté attaqué et que les pièces médicales versées par le requérant ne sont pas concordantes et font apparaître une amélioration de son état de santé ;

Vu le mémoire enregistré le 19 août 2009 à la Cour, présenté pour M. Anosike A, qui maintient ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 11 septembre 2009 à la Cour, présenté par le préfet du Rhône qui maintient ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que le requérant ne justifie pas être de nationalité nigériane ; que le traitement médical qui lui est prescrit peut être substitué par des médicaments équivalents ; qu'enfin, un contexte général de violence dans le pays de renvoi n'est pas de nature à justifier la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 octobre 2009 à la Cour, présenté pour M. Anosike A, qui maintient ses conclusions, par les mêmes moyens ;

Il fait valoir, en outre, qu'il est de nationalité nigériane ; que les médicaments qui pourraient éventuellement être substitués à ceux qui lui sont administrés sont très coûteux au Nigéria, où il existe par ailleurs un risque important de contrefaçon ;

Vu, II. / sous le n° 09LY01105, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 20 mai et 19 août 2009 à la Cour, présentés pour M. Anosike A, domicilié chez M. Hervé B ...

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806315, en date du 29 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 23 avril 2008, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois jusqu'à ce qu'il soit statué à nouveau sur sa demande ou, à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, de lui délivrer une assignation à résidence dans le délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1400 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour est entachée d'erreur de droit en ce que le préfet du Rhône s'est estimé en situation de compétence liée au regard de l'avis rendu par le médecin inspecteur de santé publique ; qu'il ne peut avoir un accès effectif à des soins appropriés à son état de santé au Nigéria ; que cette décision de refus méconnaît donc les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 12 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels telles qu'interprétées par une observation générale n° 14 du 11 août 2000 du Comité des droits économiques, sociaux et culturel et les énonciations de la circulaire ministérielle du 12 mai 1998 ; que cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 5 octobre 2009, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour n'est pas entachée d'erreur de droit, ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que cette décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît ni les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 octobre 2009, présenté pour M. Anosike A, qui maintient ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Petit, avocat de M. A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Petit ;

Considérant que les requêtes susvisées concernent le même requérant et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que M. A, ressortissant nigérian, a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 25 juillet 2005, confirmée par la Commission de recours des réfugiés le 20 mars 2006; que la demande de réexamen qu'il a présentée a également fait l'objet d'un rejet de la part de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 19 janvier 2006, confirmée par la Commission de recours des réfugiés le 16 novembre 2007 ; que, consécutivement à ces refus d'asile, le préfet du Rhône a, par décision du 7 janvier 2008, refusé à M. A la délivrance d'une carte de résident sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-13 du même code et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de renvoi ; que, par courrier du 17 janvier 2008, reçu par le préfet du Rhône le 22 du même mois, M. A a, d'une part, formé un recours gracieux contre les décisions susmentionnées du 7 janvier 2008 et, d'autre part, présenté une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code ; que, par arrêté du 23 avril 2008, le préfet du Rhône a refusé à M. A la délivrance d'un titre de séjour sur ces deux derniers fondements et a assorti sa décision de rejet d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de renvoi ; que, par requête enregistrée sous le n° 08LY02464, M. A fait appel du jugement du 10 juin 2008, du Tribunal administratif de Lyon, en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions susmentionnées du Préfet du Rhône en date du 7 janvier 2008 et du rejet implicite opposé à son recours gracieux déposé le 22 janvier 2008 ; que, par requête enregistrée sous le n° 09LY01105, M. A fait appel du jugement du 29 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions susmentionnées du préfet du Rhône en date du 23 avril 2008 ;

Sur la requête enregistrée sous le n° 08LY02464 :

En ce qui concerne la décision du 7 janvier 2008 portant refus de délivrance de titre de séjour et le rejet implicite du recours gracieux déposé contre cette décision :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A, de nationalité nigériane, soutient qu'il est entré irrégulièrement en France le 6 février 2005, que son habitation familiale a été incendiée, que son père est décédé, qu'il est sans nouvelles des autres membres de sa famille et que les troubles psychiatriques dont il souffre, qui sont liés aux évènements traumatisants qu'il a vécus au Nigéria, ne pourraient pas être soignés dans ce pays, où les infrastructures sanitaires sont défaillantes, où les médicaments qui lui sont administrés ne sont pas disponibles et où des médicaments similaires seraient d'un coût exorbitant et présenteraient un risque important de contrefaçon ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant, célibataire et sans enfant, est arrivé récemment sur le territoire national où il se trouve isolé, alors qu'il n'allègue pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans ; que les demandes, objet des refus litigieux, n'ont pas été formulées au regard de l'état de santé de M. A, dont il ne ressort au demeurant pas des pièces médicales produites par ce dernier qu'il exige que l'intéressé reste en France pour se faire soigner ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée du séjour du requérant en France, les décisions contestées n'ont pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs des refus ; qu'elles n'ont, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, que M. A n'est pas davantage fondé, au regard de ces mêmes circonstances, à soutenir que ces décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français du 7 janvier 2008 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 41 de la loi du 20 novembre 2007 : L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté comme inopérant ;

Considérant, d'autre part, que le requérant soutient que cette dispense de motivation issue de l'article 41 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 constitue une mesure discriminatoire, contraire aux dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, aux stipulations de l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civiles et politiques, au principe d'égalité devant le service public, aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, combinées avec celles des articles 3, 6 et 8 de cette même convention et aux recommandations de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, que le principe de non-discrimination qu'elles édictent ne concerne que la jouissance des droits et libertés reconnus respectivement par cette convention et par les protocoles additionnels à celle-ci ou par ce pacte ; que le requérant n'invoque pas de droit ou de liberté protégés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques dont la jouissance serait affectée par la discrimination alléguée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaîtraient les stipulations de l'article 26 du pacte est inopérant et ne peut qu'être écarté ; que, par ailleurs, le requérant n'établit pas que cette dispense de motivation introduirait une discrimination au sens de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, affectant un droit ou une liberté protégés par l'article 8 de cette même convention ou constituant un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de ladite convention ; qu'en outre, le requérant ne saurait utilement invoquer les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne sont pas applicables aux procédures administratives ; que le requérant ne peut davantage utilement faire valoir, à l'encontre des dispositions de nature législative du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, issues de l'article 41 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007, que cette dispense de motivation méconnaîtrait le principe d'égalité devant les services publics ; qu'il ne peut pas non plus utilement se prévaloir de la délibération n° 2007-370 du 17 décembre 2007 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, pour faire obstacle à l'application d'une disposition législative ; qu'enfin, le requérant ne saurait utilement invoquer les dispositions législatives de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public à l'encontre des dispositions de même nature du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est atteint d'un syndrome post-traumatique nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il soutient que son affection est en lien avec des évènements qu'il aurait vécus au Nigéria, où les infrastructures sanitaires seraient défaillantes, et qu'il produit des pièces médicales faisant état de l'indisponibilité, dans ce pays, des médicaments qui lui sont prescrits et de l'existence de médicaments similaires, mais à des prix élevés et présentant un risque important de contrefaçon ; que le lien entre les troubles dont est affecté le requérant et les éventuels évènements traumatisants que ce dernier aurait vécus au Nigéria n'est toutefois pas avéré, de même que la réalité desdits évènements traumatisants, et que l'impossibilité d'un accès effectif à des structures adaptées au suivi que requiert son état de santé et à des médicaments équivalents à ceux qui lui sont prescrits ne ressort pas davantage des pièces du dossier, alors que la circonstance qu'il pourrait rencontrer des difficultés financières à assumer le coût du traitement de sa maladie au Nigeria est, en tout état de cause, sans incidence sur l'existence de soins appropriés à sa pathologie dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par cette mesure d'éloignement, des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision du 7 janvier 2008 fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement du même jour :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. A soutient qu'il a rejoint les rangs du Niger Delta Vigilante (NDV) en 2003, afin de lutter contre l'expropriation des terres du delta du Niger pour l'exploitation pétrolière, qu'il a rapidement quitté ce mouvement, après avoir découvert les actions armées et le trafic d'armes auquel celui-ci se livrait et qu'il a alors été considéré comme un traître par les membres de ce mouvement, qui l'ont enlevé, au mois de juin 2004, violenté et séquestré jusqu'au mois de septembre 2004, dans la propriété d'un dirigeant du NDV, de sorte qu'il craint pour sa sécurité en cas de retour au Nigeria, les autorités de son pays n'étant pas, selon lui, en mesure de lui assurer la protection requise ; qu'outre des articles de presse et documents à caractère général, il produit en particulier un courrier d'un avocat de nationalité nigériane, en date du 30 mai 2006, le concernant, la copie d'une convocation policière en date du 8 août 2006 à lui adressée, concernant une affaire relative à une association et appartenance à un groupe ainsi que plusieurs photographies d'une maison qui aurait été incendiée en représailles après sa désertion ; que la teneur et la présentation de ces documents ne leur confèrent toutefois pas un caractère suffisamment probant pour établir la réalité des faits allégués et des risques personnels et actuels que M. A encourrait en cas de retour au Nigéria ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision désignant ce pays comme destination de la mesure d'éloignement contestée méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Sur la requête enregistrée sous le n° 09LY01105 :

En ce qui concerne la décision de refus de délivrance de titre de séjour du 23 avril 2008 :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet du Rhône a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A et a, en particulier, examiné la possibilité de le faire éventuellement bénéficier d'une régularisation administrative à titre exceptionnel avant de décider de ne pas faire droit à sa demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet se serait estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de santé publique pour refuser le titre de séjour sollicité et aurait, ainsi, commis une erreur de droit, n'est pas fondé ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11º A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) Le médecin inspecteur (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat ;

Considérant que la décision de refus de délivrance de titre de séjour du 23 avril 2008 a été prise au vu de l'avis émis le 27 mars 2008 par le médecin inspecteur de santé publique, selon lequel l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel il peut voyager sans risque muni de son traitement ; que le requérant soutient que son affection est en lien avec des évènements qu'il aurait vécus au Nigéria, où les infrastructures sanitaires seraient défaillantes, où les médicaments qui lui sont administrés ne seraient pas disponibles et où des médicaments similaires seraient vendus à des prix élevés et présenteraient un risque important de contrefaçon ; que, toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit, le lien entre les troubles dont est affecté le requérant et les éventuels évènements traumatisants que ce dernier aurait vécus au Nigéria n'est pas avéré, de même que la réalité desdits évènements traumatisants, et les pièces médicales produites par M. A ne permettent pas de remettre en cause l'avis susmentionné du médecin inspecteur de santé publique, confirmé au demeurant le 19 septembre 2008, quant à la possibilité pour M. A d'accéder effectivement à un traitement approprié au Nigéria, où l'existence de médicaments équivalents à ceux prescrits à l'intéressé n'est pas contestée et alors que les éventuelles difficultés financières de prise en charge du traitement requis sont, en tout état de cause, inopérantes ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que les stipulations de l'article 12 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 19 décembre 1966 aux termes desquelles les Etats parties (...) reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre sont dépourvues d'effet direct dans l'ordre juridique interne ; qu'en outre, M. A ne peut utilement se prévaloir des énonciations contenues dans la circulaire ministérielle du 12 mai 1998 qui est dépourvue de caractère réglementaire ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que, pour les mêmes motifs, précédemment retenus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision du 7 janvier 2008 portant refus de délivrance de titre de séjour, et en l'absence de changement dans les circonstances de droit ou de fait, la décision du 23 avril 2008 ayant le même objet n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français du 23 avril 2008 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) ;

Considérant que, pour les motifs indiqués ci-dessus, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire prise à son encontre le 23 avril 2008 a méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour les motifs précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour du 7 janvier 2008 et en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision du 23 avril 2008 portant obligation de quitter le territoire français a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A n'est pas davantage fondé, au regard de ces mêmes circonstances, à soutenir que le préfet du Rhône a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision du 23 avril 2008 portant désignation du pays de destination de la mesure d'éloignement prise le même jour :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment retenus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision ayant le même objet en date du 7 janvier 2008, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en désignant le Nigéria comme pays de renvoi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes dirigées contre les décisions susmentionnées ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes susvisées de M. A sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Anosike A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Fontbonne, président assesseur

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 avril 2010.

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N° 08LY02464 - 09LY01105


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : COUDERC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 08/04/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08LY02464
Numéro NOR : CETATEXT000023662661 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-04-08;08ly02464 ?
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