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15/04/2010 | FRANCE | N°08LY02891

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 avril 2010, 08LY02891


Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 2008, présentée pour la société anonyme (SA) CASINO GUICHARD-PERRACHON, dont le siège social est 1 esplanade de France à Saint-Etienne (42000) ;

La SA CASINO GUICHARD-PERRACHON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601953, en date du 14 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, de la contribution additionnelle à cet impôt et de la contribution temporaire auxquelles elle a été assujettie a

u titre de l'exercice clos le 31 décembre 1998 ;

2°) de prononcer la décharge to...

Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 2008, présentée pour la société anonyme (SA) CASINO GUICHARD-PERRACHON, dont le siège social est 1 esplanade de France à Saint-Etienne (42000) ;

La SA CASINO GUICHARD-PERRACHON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601953, en date du 14 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, de la contribution additionnelle à cet impôt et de la contribution temporaire auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1998 ;

2°) de prononcer la décharge totale de ces impositions ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction de ces impositions ;

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité, dans la mesure où la notification de redressement qui lui a été adressée est insuffisamment motivée en droit, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- le tribunal administratif a fait une interprétation inexacte des articles 33 et 33 ter du code général des impôts ; la remise des immeubles à l'issue du bail à construction passé avec la société civile immobilière (SCI) Economiques Troyens Barberey doit être regardée comme correspondant à un complément de loyer imposable sur la base de la valeur vénale des immeubles ;

- l'instruction 5 D-2-07 du 23 mars 2004, paragraphe n° 31, et la jurisprudence confirment cette analyse ;

- l'article 33 ter du code général des impôts, qui prévoit une exonération du profit ainsi généré par la remise de l'immeuble, partielle ou totale selon la durée du bail, ne conditionne pas cette exonération par l'inscription au bilan de la construction ainsi reçue à son prix de revient ;

- le tribunal administratif a fait une appréciation inexacte de la notion de coût d'acquisition au sens de l'article 38 quinquies de l'annexe II au code général des impôts ; ce coût d'acquisition n'est pas le prix de revient chez le preneur ; l'administration n'établit pas qu'elle a procédé à une écriture irrégulière en inscrivant à l'actif la valeur vénale des immeubles ; c'est au contraire par une exacte application des règles comptables et fiscales qu'elle a procédé à cette inscription dans sa comptabilité ; cette inscription n'est pas incompatible avec les dispositions de l'article 38 du code général des impôts et le jugement ne précise d'ailleurs pas en quoi résiderait une telle incompatibilité ; elle ne saurait faire échec au bénéfice des dispositions fiscales plus favorables prévues à l'article 33 ter du code général des impôts ; la doctrine 4 G-3327, nos 4 à 7, du 25 mai 1998, et 4 A-213, n° 1, du 9 mars 2001, non invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, confirme cette analyse ;

- en tout état de cause, si erreur il y avait sur ce point, cette erreur ne serait pas délibérée et elle est en droit d'en demander la rectification ;

- le principe selon lequel le résultat imposable est déterminé d'après les résultats d'ensemble de l'entreprise doit s'effacer pour permettre l'application de l'article 33 ter du code général des impôts ;

- à titre subsidiaire, si les dispositions de l'article 33 ter n'étaient pas applicables, le supplément de loyer en cause aurait dû être imposé au titre de la période pendant laquelle le loyer avait couru ; le tribunal administratif ne pouvait pas invoquer à cet égard, sans se contredire, les dispositions de l'article 33 ter du code général des impôts ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, tendant au rejet de la requête de la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ; il soutient que la notification de redressement est suffisamment motivée ; que les dispositions combinées des articles 33 ter du code général des impôts et 2 sexies de l'annexe III audit code impliquent que l'exonération d'imposition prévue ne peut porter que sur la base du prix de revient des immeubles ; que le tribunal administratif n'a donc commis aucune erreur d'interprétation en considérant que la société ne pouvait bénéficier que d'une exonération à hauteur, en base, du prix de revient des immeubles remis ; que la jurisprudence citée concerne des situations différentes ; que les dispositions de l'article 33 ter du code général des impôts impliquent que les immobilisations doivent être comptabilisées à leur prix de revient ; que la remise des immeubles en fin de bail doit être regardée comme constitutive d'un supplément de loyer imposable au titre de l'année durant laquelle le bail s'est achevé ; qu'un étalement rétroactif de l'imposition n'est pas possible ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 18 mars 2010, présenté pour la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, qualifié de note en délibéré , enregistré le 24 mars 2010, présentée par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 31 mars 2010, présentée pour la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2010 :

- le rapport de M. Montsec, président-rapporteur ;

- les observations de Me Hermet, avocat de la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ;

- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Hermet, avocat de la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ;

Considérant que la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON a consenti, le 9 octobre 1969, à la SCI Economiques Troyens-Barberey, un bail à construction sur un terrain dont elle était propriétaire, pour une durée de trente ans, à compter rétroactivement du 1er novembre 1968, à charge pour cette dernière société d'y construire un bâtiment à usage de supermarché et des emplacements de stationnement ; que ce bail, qui a fait l'objet le 30 novembre 1972 d'un avenant prévoyant l'agrandissement du supermarché, stipulait que les constructions et aménagements réalisés par le preneur devaient revenir, sans indemnité, au bailleur, au terme du bail ou en cas de résiliation amiable de celui-ci, et que le preneur serait exempté de paiement de tout loyer ; qu'en 1998, à l'expiration normale de ce bail, après une période de trente ans, la société requérante a constaté un produit de 32 700 000 francs (5 671 103,41 euros) correspondant selon elle à la valeur vénale des constructions ainsi réalisées et a entendu, sur le fondement des dispositions du II de l'article 33 ter du code général des impôts, déduire cette somme de son résultat imposable au titre de l'année 1998 ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, portant sur les exercices correspondant aux années 1996, 1997 et 1998, la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON s'est vue notifier, le 15 décembre 2000, des redressements liés, notamment, à la réintégration, dans son résultat imposable de l'exercice 1998, de la valeur totale de l'immeuble en litige, au motif que l'exonération d'imposition prévue par l'article 33 ter du code général des impôts ne pouvait porter que sur le prix de revient des constructions et non sur leur valeur vénale ; que la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON fait appel du jugement en date du 14 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, à la contribution additionnelle à cet impôt et à la contribution temporaire auxquelles elle a été en conséquence assujettie au titre de l'exercice 1998 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la société requérante reprend en appel le moyen déjà invoqué en première instance, relatif à l'insuffisance de motivation de la notification de redressement qui lui a été adressée par l'administration, au regard des exigences des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, par les motifs qu'il a retenus et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, le Tribunal administratif de Lyon aurait commis une erreur en écartant ce moyen ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicables en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 de ce même code : 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées (...) ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III audit code, dans sa rédaction alors applicable : Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition (...) ; Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale (...) ; qu'aux termes de l'article 33 bis du code général des impôts : (...) les loyers et prestations de toute nature qui constituent le prix d'un bail à construction (...) ont le caractère de revenus fonciers au sens de l'article 14 ; qu'aux termes de l'article 14 dudit code : ( ...) sont compris dans la catégorie des revenus fonciers, lorsqu'ils ne sont pas inclus dans les bénéfices d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale (...) : 1° Les revenus des propriétés bâties (...) ; qu'aux termes de l'article 33 ter de ce même code : I. Lorsque le prix du bail consiste, en tout ou partie, dans la remise d'immeubles ou de titres dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 251-5 du code de la construction et de l'habitation, le bailleur peut demander que le revenu représenté par la valeur de ces biens calculée d'après le prix de revient soit réparti sur l'année ou l'exercice au cours duquel lesdits biens lui ont été attribués et les quatorze exercices suivants. En cas de cession des biens, la partie du revenu visé au premier alinéa qui n'aurait pas encore été taxée est rattachée aux revenus de l'année ou de l'exercice de la cession. Le cédant peut, toutefois, demander le bénéfice des dispositions de l'article 163-0A (...) / II. Les dispositions du I s'appliquent également aux constructions revenant sans indemnité au bailleur à l'expiration du bail. / Toutefois, la remise de ces constructions ne donne lieu à aucune imposition lorsque la durée du bail est au moins égale à trente ans. Si la durée du bail est inférieure à trente ans, l'imposition est due sur une valeur réduite en fonction de la durée du bail dans les conditions fixées par décret ; qu'enfin, aux termes de l'article 2 sexies de l'annexe II audit code, issu de l'article 1er du décret n° 73-96 du 23 janvier 1978 : Lorsque la durée d'un bail à construction est comprise entre dix-huit et trente ans, le revenu brut foncier correspondant à la valeur des constructions remises sans indemnité au bailleur en fin de bail est égal au prix de revient de ces constructions, sous déduction d'une décote égale à 8 % par année de bail au-delà de la dix-huitième ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées susmentionnées que lorsque des immeubles reviennent sans indemnité au bailleur à l'issue d'un bail à construction, ce qui doit être considéré comme participant au prix de ce bail, la valeur de ces immeubles, dès lors constitutive d'un revenu foncier en principe imposable, doit être évaluée à leur prix de revient, déterminé d'après la seule prise en compte du coût de la construction ; que l'exonération d'imposition prévue par les dispositions susrappelées de l'article 33 ter ne peut, de la même façon, qu'être appliquée sur la base de ce prix de revient des immeubles, et non sur celle de leur valeur vénale, que cette exonération soit totale quand, comme en l'espèce, la durée du bail a été d'au moins trente ans, ou partielle, lorsque cette durée est comprise entre dix-huit et trente ans ; que la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ne peut ainsi soutenir que le supplément de loyer lié à la remise des immeubles en fin de bail était imposable sur la base de la valeur vénale desdits immeubles et qu'il aurait été fait en l'espèce une interprétation inexacte des dispositions de l'article 33 ter du code général des impôts, prévoyant les conditions dans lesquelles cette imposition pouvait faire l'objet d'une exonération partielle ou totale ;

Considérant, en deuxième lieu, que la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, d'une instruction 5 D-2-07, du 23 mars 2004, paragraphe n° 31, qui est postérieure à l'année d'imposition en litige et ne concerne, en tout état de cause, que l'impôt sur le revenu ;

Considérant, en troisième lieu, que, dès lors que seules sont en cause les modalités de calcul de la base d'imposition susceptible de faire l'objet de l'exonération d'imposition prévue par les dispositions susmentionnées de l'article 33 ter du code général des impôts, la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON ne peut pas, en tout état de cause, utilement invoquer des moyens relatifs à la régularité des inscriptions comptables auxquelles elle avait procédé en l'espèce ;

Considérant enfin, en quatrième et dernier lieu, que la valeur des biens remis à l'issue d'un bail à construction doit, même si elle doit être assimilée à un complément du prix de ce bail, être en principe imposée l'année de la remise, c'est-à-dire l'année même durant laquelle le bail vient à expiration, sous réserve d'une possibilité pour le contribuable d'en demander l'étalement sur l'année en question et les quatorze années suivantes ; qu'ainsi et alors d'ailleurs que l'application de l'article 33 ter du code général des impôts n'est pas en cause en l'espèce, mais seulement le mode de calcul du revenu pouvant faire l'objet d'une exonération totale ou partielle d'imposition sur le fondement de cet article, la société requérante ne peut pas, en tout état de cause, demander à titre subsidiaire, au cas où les dispositions dudit article 33 ter ne seraient pas applicables, que le supplément de loyer dont il s'agit aurait dû être imposé au titre de la période pendant laquelle le loyer avait couru ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA CASINO GUICHARD-PERRACHON et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2010, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

Mme Jourdan, premier conseiller,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 avril 2010.

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N° 08LY02891


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS PDGB

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 15/04/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08LY02891
Numéro NOR : CETATEXT000022203041 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-04-15;08ly02891 ?
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