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31/01/2011 | FRANCE | N°08MA01172

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2011, 08MA01172


Vu I°), sous le n° 08MA01172, la requête, enregistrée le 7 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour la SOCIETE CICOM ORGANISATION, dont le siège est 300 route des Crêtes à Valbonne Sophia-Antipolis (06560), par Me Rizzo, avocat ;

la SOCIETE CICOM ORGANISATION demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0502252-0702296 du 8 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a condamné le département des Alpes-Maritimes à lui verser la somme de 179 370,74 euros et a rejeté le surplus de ses conclusions ;


2°) de désigner un expert avec notamment pour mission de prendre connaissance ...

Vu I°), sous le n° 08MA01172, la requête, enregistrée le 7 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour la SOCIETE CICOM ORGANISATION, dont le siège est 300 route des Crêtes à Valbonne Sophia-Antipolis (06560), par Me Rizzo, avocat ;

la SOCIETE CICOM ORGANISATION demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0502252-0702296 du 8 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a condamné le département des Alpes-Maritimes à lui verser la somme de 179 370,74 euros et a rejeté le surplus de ses conclusions ;

2°) de désigner un expert avec notamment pour mission de prendre connaissance des actes et contrats conclus avec le département des Alpes-Maritimes, de donner au tribunal tous les éléments d'appréciation utiles afin de déterminer les comptes entre les parties relatifs à l'exécution de la délégation de service public achevée au 30 novembre 2000 dès lors qu'aucune reddition des comptes contradictoire n'a eu lieu et que l'article 40 du contrat de délégation de service public en cause a été méconnu, et d'émettre un avis utile à effet d'apprécier les préjudices qu'elle a subis par la SOCIETE CICOM ORGANISATION du fait de son éviction illégale de la procédure d'appel d'offre ;

3°) de condamner le département des Alpes-Maritimes à lui verser :

- d'une part, sur le fondement de la responsabilité extra contractuelle, 2 467 976 euros au titre de la perte du bénéfice normalement attendu du marché dont elle estime avoir été irrégulièrement évincée, 600 000 euros au titre du préjudice commercial consécutif à son éviction illégale, 50 000 euros au titre des difficultés causées par le département des Alpes-Maritimes lors du transfert de l'exploitation du CICA à CARILLON SERVICES et des procédures abusives dont elle a été l'objet,

- d'autre part, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, 219 039 euros au titre du préjudice subi du fait du refus du département des Alpes-Maritimes de lui verser la prime variable et les indemnités de licenciement contractuellement dues, 195 836 euros au titre de la part de frais généraux liés à la location et à la maintenance des photocopieurs non repris par le successeur, 50 000 euros à titre de réparation pour le préjudice subi consécutivement aux émissions injustifiées des titres de recette ;

4°) de mettre à la charge du département des Alpes Maritimes la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu II°), sous le n° 08MA01241, la requête, enregistrée le 10 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES, dont le siège est à l'Hôtel du Département à Nice Cedex 03 (06201), par la Selarl Molas et associés ;

le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502252-0702296 du 8 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamné à verser à la société CICOM Organisation la somme de 179 370,74 euros ;

2°) de mettre à la charge de la société CICOM Organisation la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 janvier 2011 :

- le rapport de Mme E. Felmy, conseiller,

- les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;

- et les observations de Me Cazelles pour le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES ;

Considérant que les requêtes n° 08MA01241 présentée pour le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES, et n° 0801172 présentée pour la SOCIETE CICOM ORGANISATION sont dirigées contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a condamné le département des Alpes-Maritimes à verser à la SOCIETE CICOM, au titre de sa responsabilité contractuelle, la somme de 179 370,74 euros et rejeté la demande indemnitaire de celle-ci à la suite de l'annulation des décisions l'évinçant du marché de prestations de services relatif à la gestion et à l'animation du Centre International de Communication Avancée (CICA) ; qu'elles présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête de la société CICOM :

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que les demandes présentées par la SOCIETE CICOM étaient relatives, d'une part, à l'indemnisation des préjudices qu'elle exposait avoir subi du fait de l'engagement de la responsabilité contractuelle et extra contractuelle du département des Alpes-Maritimes concernant respectivement l'application du contrat de délégation de service public en date du 26 juin 1995 lui confiant la gérance du CICA à Sophia-Antipolis puis de son éviction du marché de prestations de services relatif à la gestion et à l'animation du CICA et, d'autre part, à la désignation d'un expert avec notamment pour mission de déterminer les comptes entre les parties relatifs à l'exécution de la délégation de service public achevée au 30 novembre 2000, et d'émettre un avis utile à effet d'apprécier les préjudices subis par la SOCIETE CICOM ORGANISATION du fait de son éviction illégale de la procédure d'appel d'offre ; qu'en indiquant, pour prononcer la jonction de ces requêtes, que les demandes de la requérante présentaient à juger des questions semblables et avaient fait l'objet d'une instruction commune, alors que ces demandes étaient relatives à la détermination de la responsabilité du Département des Alpes-Maritimes et de son étendue et présentaient donc un lien de connexité suffisant, le tribunal n'a pas commis une erreur de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué ;

Sur la demande d'expertise en référé :

Considérant que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions présentées à cette fin par la SOCIETE CICOM ORGANISATION dès lors qu'il a statué sur sa demande au fond et que l'expertise telle qu'elle a été demandée en référé n'avait plus d'utilité pour la résolution du litige ; que ce rejet ne privait toutefois pas le tribunal d'ordonner une expertise en tant que juge du fond ;

Sur la responsabilité contractuelle du DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES :

Considérant, d'une part, que la société CICOM Organisation demande, sur le fondement de la responsabilité contractuelle du département des Alpes-Maritimes dans l'exécution du contrat précité, les sommes de 219.039 euros au titre du préjudice subi du fait du refus du département de lui verser la prime variable et les indemnités de licenciement contractuellement dues, 195 836 euros au titre de la part de frais généraux liés à la location et à la maintenance des photocopieurs non repris par le successeur et 50 000 euros à titre de réparation pour le préjudice subi consécutivement aux émissions injustifiées des titres de recette ; qu'à ce titre, elle soutient notamment que le département a méconnu l'article 40 relatif à la procédure de conciliation des parties ; qu'en outre, le département demande également l'annulation du jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à la société CICOM la somme de 179 370,74 euros correspondant à la prime variable ;

Considérant que l'article 40 du marché en cause, relatif au règlement des contestations, stipule : Les parties au présent contrat conviennent que les contestations sur l'interprétation ou l'exécution de celui-ci seront soumises à un expert désigné conjointement par la collectivité et le gérant dans un délai de quinze jours après la déclaration d'un litige par l'une d'entre elles. Les frais relatifs à la conciliation seront partagés entre le gérant et la collectivité. A défaut de conciliation ou d'accord sur la désignation d'un expert, les contestations qui s'élèveront entre le gérant et la collectivité au sujet du présent contrat seront soumises au tribunal administratif de Nice ; que ces stipulations n'obligent pas le juge à désigner un expert ;

Considérant qu'aux termes de l'article 21-2 du contrat de gérance : Il sera éventuellement alloué au gérant une prime variable dont le montant est établi d'après les résultats obtenus par le gérant en matière de diminution des dépenses prévues ou d'accroissement des recettes d'exploitation prévisionnelles. Ce montant est déterminé comme suit : - en cas de diminution des coûts de fonctionnement de plus de 3% du montant des charges des comptes de l'exercice considéré par rapport au montant des charges prévues au compte d'exploitation prévisionnel accepté par la collectivité, 25% des économies supplémentaires ainsi réalisées seront attribués au gérant ; - en cas de dépassement du montant des recettes prévisionnelles approuvées par la collectivité, une somme égale à 15,5% des recettes totales perçues dans l'année sera attribuée au gérant. Le montant total de cette éventuelle prime variable est plafonné annuellement au montant T.T.C. de la rémunération du gérant. ; qu'il ressort de ces stipulations que, contrairement à ce que soutient le département, le versement de cette prime n'est pas réservé à l'appréciation de son opportunité par la collectivité mais qu'il est dû dans les hypothèses de diminution des dépenses ou de dépassement des recettes prévisionnelles ; que le département n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamné à payer cette prime ; que la société CICOM ne contestant pas le montant de la prime variable retenu par les premiers juges et initialement proposée par le département, la mesure d'expertise qu'elle demande est dépourvue d'effet utile ;

Considérant, d'autre part, que si la société CICOM soutient qu'elle s'est trouvée dans de graves difficultés financières du fait du non paiement des sommes dues par le département à l'issue du contrat, elle n'en précise ni la nature ni l'importance ; que si elle a également demandé, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, diverses sommes au titre du préjudice subi du fait du refus du département des Alpes-Maritimes de lui verser les indemnités de licenciement contractuellement dues, les frais généraux liés à la location et à la maintenance des photocopieurs non repris par le successeur au contrat, et la somme de 50 000 euros à titre de réparation pour le préjudice subi consécutivement aux émissions injustifiées des titres de recette, elle n'apporte au soutien de ces conclusions d'appel aucun moyen et, en tout état de cause, aucune justification de son préjudice ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter ces conclusions ;

Sur la responsabilité extra contractuelle du Département DES ALPES MARITIMES du fait de l'éviction de la société CICOM :

Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce marché, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; que, dans le cas où l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché, elle a droit à l'indemnisation de l'intégralité du manque à gagner qu'elle a subi ;

Considérant que la société CICOM a été illégalement évincée du marché de prestations de services relatif à la gestion et à l'animation du CICA ; que, toutefois, la requérante ne produit pas plus en appel qu'en première instance l'offre ou les principales caractéristiques de l'offre qu'elle avait présentée en qualité de candidate à l'attribution de ce marché, hormis le document intitulé acte d'engagement sur lequel elle a porté le prix du marché ; qu'en se bornant à soutenir que son bilan de l'exploitation du CICA pendant cinq années est extrêmement positif, ainsi qu'en témoignent plusieurs documents, que le contrat initial a d'ailleurs été prorogé à deux reprises et qu'elle a présenté toutes les garanties financières de l'exécution du marché, sans donner aucun élément sur les critères de qualité demandés par le règlement de consultation, ni sur les garanties en personnel et financières ou sur ses qualifications, la société requérante ne met pas la Cour à même d'apprécier la valeur de son offre et la qualité de celle-ci par rapport à celle de son concurrent, et par suite les chances sérieuses qu'elle avait d'emporter le marché, nonobstant le prix proposé, proche de celui du candidat retenu ; que si elle soutient que l'entreprise retenue présentait des compétences largement inférieures, elle ne met pas davantage la Cour en mesure d'en juger ; qu'ainsi, la société, qui avait seulement une chance d'emporter le marché, n'a droit qu'au remboursement des frais engagés pour présenter son offre et non à l'indemnisation de l'intégralité du manque à gagner qu'elle a subi ; que, toutefois, la société CICOM, qui avait nécessairement en sa possession tous les éléments de calcul des frais engagés pour présenter son offre, n'en produit aucune justification, y compris pour la part que ces frais représenteraient dans la somme de 2 467 976 euros demandée au titre de la perte du bénéfice attendu par l'exécution du marché ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise demandée à ce titre, ses conclusions sur ce point ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant, d'autre part, que si la société soutient que la décision d'éviction précitée, qui était illégale, ainsi que la délibération du conseil général des Alpes-Maritimes du 21 juin 2001 lui ont causé un préjudice commercial, elle ne l'établit pas ; que, par ailleurs, la société CICOM ne prouve pas l'atteinte à sa réputation qu'elle allègue, du fait de ces décisions ;

Considérant, enfin, que la société soutient qu'elle a subi un préjudice du fait de procédures introduites par le département devant les juridictions judiciaires après l'annulation de la procédure d'appel d'offres dont elle est à l'origine et demande à ce titre l'indemnisation des frais engagés pour assurer sa défense dans le cadre de ces procédures et de la mobilisation de cadres ; que, toutefois, ces frais, qui ne sont en tout état de cause pas justifiés, sont relatifs aux instances en cause et ne peuvent être alloués dans le cadre de la présente instance ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni le DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES ni la SOCIETE CICOM ORGANISATION, par les moyens qu'elle invoque, ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a condamné le département des Alpes-Maritimes à verser à la société la somme de 179.370,74 euros et a rejeté le surplus de leurs conclusions ; que, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions de ces deux parties tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la SOCIETE CICOM ORGANISATION et du DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE CICOM ORGANISATION, au DEPARTEMENT DES ALPES-MARITIMES et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 08MA01172, 08MA01241

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA01172
Date de la décision : 31/01/2011
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : SELARL MOLAS ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-01-31;08ma01172 ?
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