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26/11/2010 | FRANCE | N°08PA05088

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 26 novembre 2010, 08PA05088


Vu le recours, enregistré le 6 octobre 2008, présentée par le MINISTRE DU BUDGET DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605073/3 en date du 17 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a accordé à la société Hôtel Grill de Villejuif la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2002, 2003, 2004 et 2005 à raison d'un hôtel qu'elle exploite sous l'enseigne Campanile à Villejuif (Val-de-Marne) ;

2°) de remettre la totalité de ce

s cotisations à la charge de la société Hôtel Grill de Villejuif ;

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Vu le recours, enregistré le 6 octobre 2008, présentée par le MINISTRE DU BUDGET DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605073/3 en date du 17 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a accordé à la société Hôtel Grill de Villejuif la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2002, 2003, 2004 et 2005 à raison d'un hôtel qu'elle exploite sous l'enseigne Campanile à Villejuif (Val-de-Marne) ;

2°) de remettre la totalité de ces cotisations à la charge de la société Hôtel Grill de Villejuif ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 novembre 2010, présentée pour la société Hôtel Grill de Villejuif ;

Vu le code général des impôts, notamment son article 1498 ;

Vu l'acte dit loi n° 371 du 15 mars 1942, ainsi que l'instruction du 1er octobre 1941 ;

Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental, notamment ses articles 2 et 7 ;

Vu l'ordonnance n° 59-108 du 7 janvier 1959 ;

Vu la loi n° 68-108 du 2 février 1968 ;

Vu la loi n° 73-1229 du 31 décembre 1973 ;

Vu l'acte dit décret du 18 février 1943 ;

Vu le décret n° 50-478 du 8 avril 1950 ;

Vu le décret n° 69-1076 du 28 novembre 1969 ;

Vu le décret n° 75-46 du 22 janvier 1975 ;

Vu le décret n° 75-47 du 22 janvier 1975 ;

Vu la décision du Conseil d'Etat n°339854 en date du 9 juillet 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2010:

- le rapport de M. Couvert-Castéra, rapporteur,

- les conclusions de Mme Larere, rapporteur public,

- et les observations de Me du Pasquier, pour la société Hôtel Grill de Villejuif ;

Sur la méthode de détermination de la valeur locative :

Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence (...) ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : La valeur locative est déterminée comme suit : 1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe... ; qu'aux termes de l'article 1498 dudit code : La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : - Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date ; - Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. ;

Considérant que la société Hôtel Grill de Villejuif , qui est propriétaire d'un hôtel restaurant sis au 39 avenue Camille Desmoulins à Villejuif (Val-de-Marne), construit en 1988, exploité sous l'enseigne Campanile , a été assujettie à la taxe professionnelle à raison de cet établissement, au titre des années 2002 à 2005 ; que, pour déterminer la valeur locative de ces locaux commerciaux à usage d'hôtel, d'une surface pondérée de 1 816 m², l'administration a, en vertu des dispositions précitées du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, retenu comme terme de comparaison le local-type n° 48 désigné sur le procès-verbal complémentaire établi le 13 mars 1986 des opérations de révision des évaluations foncières de la commune de Villejuif ; que le local type n° 48 a lui-même été évalué par comparaison avec le local-type n° 43 du procès-verbal des opérations d'évaluations foncières de la commune de Villejuif, dont le tarif initialement fixé à 63 F/m² a été porté à 150 F/m² par procès-verbal complémentaire du 14 février 1979 ; qu'il résulte de l'instruction que le bail du 22 juin 1968 conclu pour la location de ce local mettait à la charge du locataire toutes les réparations qui pourraient être nécessaires dans les lieux loués y compris celles définies à l'article 606 du code civil ; qu'il n'est pas établi qu'eu égard à ces stipulations, le bail aurait été conclu à des conditions de prix normales ; qu'ainsi, le local-type n° 43 du procès-verbal de la commune de Villejuif ne peut être retenu, que ce soit pour le tarif fixé en 1979 de 150 F/m² comme l'avait envisagé l'administration ou pour son tarif initial de 63 F/m² comme le sollicite la société Hôtel Grill de Villejuif , pour l'application du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, lequel ne permet de se référer qu'à des locaux loués à des conditions de prix normales ;

Considérant que la société Hôtel Grill de Villejuif propose dans le dernier état de ses écritures deux autres termes de comparaison, l'un situé à Issy-les-Moulineaux, l'autre à Villeneuve-Saint-Georges ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le local type n° 90 du procès-verbal 6670 C de la commune d'Issy-les-Moulineaux au tarif unitaire de 35 F (5,34 euros), correspond à un hôtel construit en 1926 de type traditionnel dont les caractéristiques au regard de sa construction, de sa structure et de son aménagement ne sont pas les mêmes que celle de l'établissement à évaluer ;

Considérant que le local type n° 55 du procès-verbal complémentaire de la commune de Villeneuve-Saint-Georges, d'un tarif de 60 F le mètre carré (9,15 euros), a été évalué en le comparant au local type n° 10 de la commune de Chennevières-sur-Marne ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la fiche de calcul de la valeur locative de ce local type et du procès-verbal de la commune de Chennevières-sur-Marne en date du 18 décembre 1973, que sa valeur locative unitaire de 60 F le mètre carré a été calculée sur la base d'une surface pondérée totale de 297 m² et d'une valeur locative totale de 18 000 francs qui a été déterminée par voie d'appréciation directe ; que les dispositions précitées de l'article 1498 du code général des impôts font obstacle à ce qu'un immeuble commercial dont la valeur locative a été fixée par voie d'appréciation directe puisse être retenu comme terme de comparaison pour déterminer, selon la méthode indiquée au 2° de cet article, la valeur locative d'un autre immeuble commercial ; qu'il s'ensuit que le ministre est fondé à soutenir que ce local type n° 55 de la commune de Villeneuve-Saint-Georges n'a pas été régulièrement évalué et ne peut être retenu comme terme de comparaison ;

Considérant qu'il y a lieu, en l'absence de termes de comparaison pertinents, de déterminer la valeur locative de l'immeuble litigieux par voie d'appréciation directe, sur le fondement des dispositions du 3° de l'article 1498 du code général des impôts, ainsi que l'administration le propose ;

Sur l'évaluation de la valeur locative de l'immeuble en cause :

En ce qui concerne les règles d'évaluation :

Considérant qu'aux termes de l'article 324 AB de l'annexe III au code général des impôts : Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation. /Le taux d'intérêt susvisé est fixé en fonction du taux des placements immobiliers constatés dans la région à la date de référence pour des immeubles similaires. ; qu'aux termes de l'article 324 AC de la même annexe : En l'absence d'acte et de toute autre donnée récente faisant apparaître une estimation de l'immeuble à évaluer susceptible d'être retenue, sa valeur vénale à la date de référence est appréciée d'après la valeur vénale d'autres immeubles d'une nature comparable ayant fait l'objet de transactions récentes, situés dans la commune même ou dans une localité présentant du point de vue économique une situation analogue à celle de la commune en cause. La valeur vénale d'un immeuble peut également être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation de ce bien ;

Considérant, en premier lieu, que la société Hôtel Grill de Villejuif soutient que les dispositions précitées, issues du décret n° 69-1076 du 28 novembre 1969 et codifiées par le décret n° 75-47 du 22 janvier 1975, dont l'administration propose de faire application, méconnaissent les dispositions à caractère législatif de l'instruction du 1er octobre 1941 sur les règles et principes à appliquer pour la révision des évaluations des propriétés bâties prescrite par le décret-loi du 14 juin 1938 et par la loi du 12 avril 1941, en tant qu'elles fixent au 1er janvier 1970 et non au 1er août 1939 la date de référence pour l'appréciation de la valeur vénale des immeubles évalués par voie d'appréciation directe à laquelle est appliquée un taux d'intérêt pour en déduire la valeur locative ; que, toutefois, si la détermination de la valeur locative par la voie de l'appréciation directe est réglée, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat par sa décision n° 317086 du 9 juillet 2010, par les dispositions législatives constituées de celles du 3° de l'article 1498 du code général des impôts ainsi que des règles et principes de l'instruction du 1er octobre 1941, ce n'est, s'agissant de ces règles et principes, que dans la mesure où, conformément aux dispositions du IV de l'article 14 de la loi susvisée du 31 décembre 1973, ils ne sont contraires ni aux dispositions de cette loi, ni à celles de la loi susvisée du 2 février 1968, ni à celles de l'ordonnance susvisée du 7 janvier 1959 ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1 à 4 de la loi susvisée du 2 février 1968, codifiés sous les articles 1496 et suivants du code général des impôts, que la valeur locative des locaux commerciaux, comme celle des locaux d'habitation et à usage professionnel, est déterminée à la date de référence de la précédente révision générale, laquelle a été fixée au 1er janvier 1970 par l'article 39 du décret susvisé du 28 novembre 1969 codifié à l'article 324 AK de l'annexe III au code général des impôts, pour être ensuite actualisée selon les modalités précisées par les articles 1 à 3 de la loi du 18 juillet 1974, codifiés aux articles 1516 et suivants du code général des impôts ; qu'il s'ensuit que la société Hôtel Grill de Villejuif ne saurait utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'instruction susvisée du 1er octobre 1941 en tant qu'elles fixent au 1er août 1939 la date de référence pour l'appréciation de la valeur vénale des immeubles évalués par voie d'appréciation directe, lesdites dispositions ayant été abrogées sur ce point ;

Considérant, en second lieu, qu'en vertu des articles précités de l'annexe III au code général des impôts, la valeur vénale des immeubles évalués par voie d'appréciation directe doit d'abord être déterminée en utilisant les données figurant dans les différents actes constituant l'origine de la propriété de l'immeuble si ces données, qui peuvent résulter notamment d'actes de cession, de déclarations de succession, d'apport en société ou, s'agissant d'immeubles qui n'étaient pas construits en 1970, de leur valeur lors de leur première inscription au bilan, ont une date la plus proche possible de la date de référence du 1er janvier 1970 ; que, si ces données ne peuvent être regardées comme pertinentes du fait qu'elles présenteraient une trop grande antériorité ou postériorité par rapport à cette date, il incombe à l'administration fiscale de proposer des évaluations fondées sur les deux autres méthodes comparatives prévues à l'article 324 AC de la même annexe, en retenant des transactions qui peuvent être postérieures ou antérieures aux actes ou au bilan mentionnés ci-dessus dès lors qu'elles ont été conclues à une date plus proche du 1er janvier 1970 ; que ce n'est que si l'administration n'est pas à même de proposer des éléments de calcul fondés sur l'une ou l'autre de ces méthodes et si le contribuable n'est pas davantage en mesure de fournir ces éléments de comparaison qu'il y a lieu de retenir, pour le calcul de la valeur locative, les données figurant dans les actes constituant l'origine de la propriété du bien ou, le cas échéant, dans son bilan ;

En ce qui concerne la détermination de la valeur locative de l'immeuble en cause :

Considérant que l'administration propose à titre principal, pour l'appréciation directe de la valeur locative des biens immobiliers de la société Hôtel Grill de Villejuif , de calculer cette valeur locative, en l'absence en l'espèce de coût d'acquisition du terrain, à partir de la seule valeur vénale du bâtiment lors de sa première inscription au bilan en 1988, année de la construction, valeur actualisée à la date du 1er janvier 1970 au moyen de l'indice INSEE du coût de la construction et diminuée d'un abattement de 30 % pour tenir compte de la dépréciation de l'immeuble, en appliquant à la valeur vénale ainsi obtenue un taux d'intérêt de 10 % représentatif du taux des placements immobiliers constaté dans la région à la date de référence pour la catégorie d'immeubles à usage d'hôtel ; que cette méthode, qui ne repose pas sur des données présentant une trop grande postériorité par rapport à la date de référence, est conforme aux dispositions précitées des articles 324 AB et 324 AC de l'annexe III au code général des impôts ; qu'en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que des transactions sur des biens comparables seraient intervenues à une date plus proche de la date de référence ; que, si la société Hôtel Grill de Villejuif se réfère à un taux d'intérêt de 6%, il n'apparaît pas que le taux d'intérêt de 10 % proposé par l'administration soit excessif ; qu'il est constant que la valeur locative déterminée dans ces conditions selon la méthode de l'appréciation directe est supérieure à la valeur locative retenue pour le calcul de l'imposition litigieuse ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a déchargé partiellement la société Hôtel Grill de Villejuif des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2002, 2003, 2004 et 2005 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Hôtel Grill de Villejuif demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0605073/3 rendu le 17 juin 2008 par le Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La société Hôtel Grill de Villejuif est rétablie aux rôles de la taxe professionnelle au titre des années 2002, 2003, 2004 et 2005 à raison de l'intégralité des droits auxquels elle avait été assujettie.

Article 3 : Les conclusions de la société Hôtel Grill de Villejuif tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 08PA05088


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA05088
Date de la décision : 26/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme LARERE
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS P.D.G.B.

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-11-26;08pa05088 ?
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