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07/04/2011 | FRANCE | N°09BX02214

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 07 avril 2011, 09BX02214


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 septembre 2009, présentée pour la SARL STAR VOYAGES ANTILLES, société à responsabilité limitée, dont le siège est Marina de la Pointe du Bout aux Trois Ilets (97229), par Me Delpeyroux ; la SARL STAR VOYAGES ANTILLES demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0300215 et 0300216 du Tribunal administratif de Fort-de-France en date du 30 juin 2009 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquels elle a

té assujettie au titre des exercices clos en 1995 et 1996 et des pénalités ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 septembre 2009, présentée pour la SARL STAR VOYAGES ANTILLES, société à responsabilité limitée, dont le siège est Marina de la Pointe du Bout aux Trois Ilets (97229), par Me Delpeyroux ; la SARL STAR VOYAGES ANTILLES demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0300215 et 0300216 du Tribunal administratif de Fort-de-France en date du 30 juin 2009 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995 et 1996 et des pénalités pour mauvaise foi y afférentes et, d'autre part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard et pénalités y afférents qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant à l'exercice clos en 1996 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2011 :

- le rapport de M. Braud, premier conseiller ;

- les observations de M. Bouffard, gérant de la SARL STAR VOYAGES ANTILLES et de Me Delpeyroux, pour la SARL STAR VOYAGES ANTILLES ;

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Considérant que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES, qui exploite au Marin (Martinique) une double activité d'achat-revente et de location de bateaux de plaisance, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 1996 ; qu'au terme de ce contrôle, la SARL STAR VOYAGES ANTILLES a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt au titre des exercices clos en 1995 et 1996 ainsi qu'au paiement d'une pénalité en application de l'article 1763 A du code général des impôts ; que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été également assignés au titre de la période comprise entre le 1er janvier 1996 et le 31 décembre 1996 ; que, par un jugement en date du 30 juin 2009, le Tribunal administratif de Fort-de-France, après avoir joint les demandes concernant l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée, a déchargé la SARL STAR VOYAGES ANTILLES du paiement de l'amende et a rejeté le surplus de ses demandes ; que cette dernière relève appel de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 295 du code général des impôts : 1. Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les transports maritimes de personnes et de marchandises effectués dans les limites de chacun des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion (...) ;

Considérant que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES fait valoir que le tribunal administratif n'a pas répondu, en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée, au moyen qu'elle avait invoqué tiré de ce que son activité de location de bateaux de plaisance était exonérée de taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 295-1-1° du code général des impôts ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction que l'activité exercée par cette société revêtait le caractère d'une activité de transport maritime de personnes au sens des dispositions de l'article 295-1-1° ; que, par suite, ce moyen était inopérant ; que, dès lors, en n'y répondant pas, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et la contribution sur cet impôt :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant qu'au cours de l'exercice 1996, la SARL STAR VOYAGES ANTILLES a passé au débit et au crédit du compte courant ouvert au nom de la société Star Voyages Paris des écritures afférentes à des remboursements d'assurance consécutifs aux sinistres causés par le passage de l'ouragan Luis ; que l'administration fiscale a constaté un passif injustifié d'un montant de 1 289 633 francs (196 603,28 euros) ; que, pour justifier ce passif, la société requérante se prévaut de plusieurs écritures en débit qui n'ont pas été prises en compte par l'administration fiscale et de la comptabilité de la société Star Voyages Paris où se trouve la contrepartie des débits enregistrés dans sa comptabilité comme le montre le rapport d'expertise qu'elle a fait réaliser joint à l'instruction ; que, toutefois, d'une part, le fait que les écritures de compte courant soient symétriques dans la comptabilité des deux sociétés ne constitue pas, en l'absence de pièces justificatives, un élément suffisant pour justifier de leur exactitude ; que, d'autre part, la circonstance que l'administration fiscale n'ait pas remis en cause, lors de la vérification de comptabilité de la société Star Voyages Paris concernant la période en litige, le caractère probant de ces écritures, ne saurait être regardée comme une interprétation formelle opposable à l'administration fiscale ; que, par suite, celle-ci a pu à juste titre considérer que le passif constaté n'était pas justifié et le réintégrer dans le résultat imposable de la société ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 217 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : I. Les résultats provenant d'exploitations situées dans les départements d'outre-mer ne sont retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés que pour les deux tiers de leur montant. II. Pour les exercices clos à compter du 1er janvier 1983, les dispositions du I ne sont applicables qu'aux exploitations appartenant aux secteurs de l'agriculture, de l'industrie, du tourisme et de la pêche (...) ;

Considérant que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES soutient que l'ensemble de son activité se rattache au secteur du tourisme et peut donc bénéficier de la règle de l'abattement du tiers prévue par les dispositions précitées de l'article 217 bis du code général des impôts dès lors que ses activités de location de bateaux de plaisance et d'achat-revente desdits bateaux sont indissociables, les bateaux, avant d'être vendus, devant être loués afin de pouvoir bénéficier du régime de défiscalisation ; que, toutefois, si la société tire un avantage économique de l'exercice de ces deux activités, elles sont cependant distinctes et seule l'activité de location relève du secteur du tourisme ; que, par suite, l'administration fiscale a pu légalement, en application des dispositions précitées de l'article 217 bis du code général des impôts n'appliquer la règle de l'abattement du tiers qu'à l'activité de location de voiliers de plaisance ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

S'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée :

Considérant, en premier lieu, que si la société requérante soutient que cette activité de location doit être regardée comme une activité de transport maritime de personnes au sens de l'article 295 du code général des impôts précité car les bateaux étaient loués avec la mise à disposition d'un personnel de navigation en vue des croisières, il résulte de l'instruction, et notamment des pièces qu'elle produit, que la mise à disposition d'un skipper constituait simplement une option ; que, dans ces conditions, les prestations proposées par la SARL STAR VOYAGES ANTILLES doivent être regardées non comme des prestations de transport mais comme des prestations de location d'un moyen de transport ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article 295 doit être écarté comme inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle ; que, selon l'article 259 A du même code dans sa rédaction applicable en l'espèce : Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France : 1° Les locations de moyens de transport : a. Lorsque le prestataire est établi en France et le bien utilisé en France ou dans un autre Etat membre de la Communauté ; b. Lorsque le prestataire est établi en dehors de la Communauté européenne et le bien utilisé en France (...) ; qu'enfin, aux termes des dispositions de l'article 172 de l'annexe II au code général des impôts : Pour les locations de moyens de transport mentionnées aux 1º et 1º bis de l'article 259 A du code général des impôts, et les prestations de services indiquées à l'article 259 C du même code, le prestataire est tenu d'apporter la preuve que les moyens de transports loués ou les prestations rendues ont été utilisés en totalité ou en partie, et, le cas échéant, dans quelle proportion : a. En France, dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou en dehors de la Communauté, s'il s'agit de la location de moyens de transport ; (...) A défaut, les locations de moyens de transport et les prestations ci-dessus sont considérées comme utilisées en France ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'il incombe au redevable éventuel d'apporter la preuve de l'utilisation hors de la Communauté européenne des moyens de transport, objet de la location, et ce, par tous moyens ;

Considérant que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES, qui estime que son activité de location de voiliers de plaisance est en dehors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, n'établit pas que, comme elle le soutient, les voiliers loués n'étaient utilisés qu'en dehors des eaux territoriales françaises ou d'un autre Etat membre de la Communauté européenne et qu'ainsi, ces moyens de transport auraient été utilisés dans des conditions n'entrant pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, en troisième lieu, que la société requérante est chargée de la commercialisation de bateaux dans le cadre d'un mandat de gestion signé avec leurs propriétaires ; qu'à ce titre, elle leur facture diverses prestations de service dont l'entretien, le gardiennage ou l'assurance tandis que ceux-ci lui facturent des honoraires de commercialisation de leurs bateaux ; que les premiers juges ont relevé qu'il est constant que la taxe sur la valeur ajoutée collectée afférente aux prestations de services rendues aux propriétaires n'a pas été portée sur la déclaration du mois de décembre 1996 alors qu'il n'est pas contesté qu'elle était légalement due ; qu'ils ont ajouté que la société n'a apporté ni devant l'administration ni devant eux la preuve que le solde de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 388 917,67 francs (59 290,12 euros) comptabilisé au 31 décembre 1996 correspondait à des factures réglées à cette même date concernant les prestations de services délivrées aux propriétaires des bateaux ; qu'ils en ont conclu que ce solde ne pouvait être imputé sur la taxe sur la valeur ajoutée collectée en cause ; qu'en appel, si la société requérante soutient que les factures concernant les prestations de services délivrées aux propriétaires des bateaux sont réglées par compensation avec les factures afférentes aux honoraires de commercialisation, elle ne fournit toujours pas d'élément permettant d'établir que le solde de taxe sur la valeur ajoutée déductible comptabilisé au 31 décembre 1996 concernait uniquement les factures se rattachant aux prestations de services délivrées aux propriétaires des bateaux ; qu'il y a donc lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ce moyen ;

S'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductible ;

Considérant, en premier lieu, que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de base 3 G 242 du 1er septembre 1998 qui, d'une part, est postérieure à la période d'imposition en cause, et, d'autre part, ne prévoit, pour les assujettis (autres que les exportateurs) la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée décomptée fictivement sur le prix d'achat que pour les matières premières et biens d'investissement spécialement exonérés et qui sont utilisés pour les besoins de leur exploitation taxée et non pour tous les biens acquis comme elle le soutient ;

Considérant, en second lieu, que la demande de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les acquisitions de bateaux importés durant le mois de novembre 1996 pour un montant de 276 542 francs (42 158,56 euros) a été rejetée par une décision du directeur des services fiscaux de la Martinique en date du 12 mai 1997 ; qu'il n'est ni établi ni même allégué que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES ait pu effectivement déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces acquisitions que ce soit en reportant ce crédit ou en présentant une nouvelle demande de remboursement ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification en date du 23 février 1999, que la vérificatrice a considéré que la société avait indûment déduit la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces acquisitions ; qu'ainsi, en l'absence de déduction réelle de ladite taxe, la société requérante est fondée à solliciter une réduction du rappel de taxe sur la valeur ajoutée à concurrence de ce montant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, que la SARL STAR VOYAGES ANTILLES est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la réduction de 276 542 francs du montant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1996 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de la SARL STAR VOYAGES ANTILLES ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le rappel de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL STAR VOYAGES ANTILLES au titre de la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 1996 est réduit de la somme de 276 542 francs (42 158,56 euros).

Article 2 : La SARL STAR VOYAGES ANTILLES est déchargée des pénalités correspondant à la réduction d'imposition définie à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Fort-de-France en date du 30 juin 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL STAR VOYAGES ANTILLES est rejeté.

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N° 09BX02214


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX02214
Date de la décision : 07/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : Mme TEXIER
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DELPEYROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-04-07;09bx02214 ?
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