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11/05/2010 | FRANCE | N°09BX02615

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 11 mai 2010, 09BX02615


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 novembre 2009, présentée pour M. Tarik A, demeurant chez Mme Adrianne B, ..., par Me Moura, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 5 juin 2009 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de renouveler son titre de séjour, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de

pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 novembre 2009, présentée pour M. Tarik A, demeurant chez Mme Adrianne B, ..., par Me Moura, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 5 juin 2009 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de renouveler son titre de séjour, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention étranger malade dans un délai d'un mois, et ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant la mention étranger malade dans un délai d'un mois, et ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

5°) de condamner l'Etat à verser à son avocat la somme de 1 200 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leur familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2010 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que M. A fait appel du jugement du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 5 juin 2009 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de renouveler son titre de séjour, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions dirigées contre le refus de renouvellement de titre de séjour :

S'agissant de la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I. - L'autorité administrative qui refuse (...) le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger (...) pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays de destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 312-1 du même code : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ; que l'article L. 312-2 dudit code rajoute : la commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser (...) de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ;

Considérant, en premier lieu, que la décision litigieuse portant refus de renouvellement d'un titre de séjour prononcé à l'encontre de M. A, de nationalité algérienne, se fonde sur ce que le médecin inspecteur départemental de santé publique a précisé le 19 mai 2009 que ce dernier peut avoir accès dans son pays d'origine à un traitement approprié aux problèmes de santé qu'il rencontre, sur ce que M. A est entré en France muni d'un visa n'ouvrant pas droit à délivrance d'un titre de séjour et n'établit pas se trouver en position d'obtenir de plein droit à un autre titre la délivrance d'un certificat de résidence et sur ce qu'il n'est pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par la décision attaquée au regard de la durée et des conditions de son séjour en France et de ce qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie ; que, par suite, la décision attaquée est suffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des ressortissants algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié susvisé, et auxquels il envisage de refuser de renouveler le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que, par suite, M. A qui n'est pas au nombre des étrangers concernés par ces dispositions, n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse ne pouvait être prise sans saisine préalable de la commission du titre de séjour ;

S'agissant de la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié susvisé : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5°/ au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) 7°/ au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment d'une lettre du 27 avril 2009 du médecin psychiatre qui assure le suivi médical de M. A que celui-ci présente des troubles névrotiques sévères avec des crises d'angoisse spontanées, que ces troubles s'accompagnent de somatisations et d'une dévalorisation assortie d'un sentiment d'échec et d'incapacité, que l'état de santé de l'intéressé nécessite donc une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que les possibilités thérapeutiques sont concentrées dans les grandes villes d'Algérie et que les médicaments utiles y sont disponibles ; qu'au vu de ce certificat médical, le médecin inspecteur de la santé publique du département des Pyrénées-Atlantiques, par un avis émis le 19 mai 2009, a considéré que M. A peut avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine ; que la circonstance que le médecin inspecteur de la santé publique ait préalablement estimé entre 2003 et 2008 que l'état de santé de M. A nécessitait des soins ne pouvant lui être dispensés dans son pays d'origine ne saurait établir que sa situation justifiait, à la date de la décision attaquée, le renouvellement de son certificat de résidence en qualité d'étranger malade ; que ni l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet, d'une part, de demander au médecin inspecteur de la santé publique les motifs de son avis, alors même que les années précédentes le même médecin inspecteur avait indiqué que le requérant ne pourrait avoir accès dans son pays d'origine à un traitement approprié, d'autre part, de communiquer les motifs de cet avis, alors même que l'état de santé du requérant n'aurait pas évolué de manière significative ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait pris sa décision au seul vu de l'avis du médecin inspecteur de la santé publique, sans procéder à un examen complet de la situation de M. A ; qu'en faisant état de l'absence de prise en charge financière de son traitement et du coût élevé des médicaments qui sont rendus nécessaires par son état de santé, M. A ne conteste pas non plus utilement l'appréciation du médecin-inspecteur départemental ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il avait droit au renouvellement de son certificat de résidence en qualité d'algérien malade, sur le fondement de l'article 6 -7° de l'accord franco-algérien susvisé ;

Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des stipulations de l'accord franco-algérien susvisé, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce même accord, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que M. A a présenté sa demande de renouvellement de certificat de résidence sur le seul fondement de l'article 6 -7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'était donc pas tenu d'examiner également la demande de l'intéressé sur le fondement de l'article 6 -5° du même accord ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait obtenir le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de ces stipulations ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. A soutient qu'il est entré en France en 2002 et qu'il vit en concubinage avec une ressortissante de nationalité française, il ressort des pièces du dossier, notamment des témoignages produits par le requérant lui-même, que cette relation n'est pas antérieure à un an à la date de la décision litigieuse ; qu'ainsi, eu égard aux conditions du séjour de M. A, et compte tenu qu'il ne conteste pas ne pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, ladite décision n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que la décision attaquée a été signée par M. C, secrétaire général de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques ; qu'il ressort des pièces du dossier que par arrêté du 16 juillet 2008, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques du 24 juillet 2008, le préfet de ce département a donné délégation à cette autorité à l'effet de signer toutes décisions à l'exception de celles au nombre desquelles l'acte attaqué ne figure pas ; que, par suite, ladite décision n'a pas été prise par une autorité incompétente ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi. 2. La mort n'est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d'un recours à la force rendu absolument nécessaire : a) pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale ; b) pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l'évasion d'une personne régulièrement détenue ; c) pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection. ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite convention : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; (...) ;

Considérant que la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour prononcée à l'encontre de M. A n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A peut bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié à son état de santé ; qu'il ne réunit donc pas toutes les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur de droit ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'égard de la décision qui ne fixe pas le pays de destination ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée se fonde sur ce que l'intéressé n'établit pas être exposé à des traitements inhumains et dégradants ; que, par suite, la décision attaquée satisfait aux exigences de motivation en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux développés à l'appui des conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux développés à l'appui des conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, enfin, que contrairement à ce qu'il allègue, M. A peut bénéficier en Algérie d'un traitement approprié à son état de santé ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 octobre 2009, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A doivent être également rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. A ou à son avocat la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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No 09BX02615


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Jean-Emmanuel RICHARD
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : MOURA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 11/05/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09BX02615
Numéro NOR : CETATEXT000022328890 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-05-11;09bx02615 ?
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