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04/06/2010 | FRANCE | N°09NT01712

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 04 juin 2010, 09NT01712


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2009, présentée pour la SOCIETE JC DECAUX, dont le siège est 17, rue Soyer à Neuilly-sur-Seine (92200), par Me Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; la SOCIETE JC DECAUX demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-64 en date du 20 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Rennes et de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole à lui verser solidairement ou, à titre subsidiaire, chacune pour sa part, la somme de 2 75

0 000 euros, quitte à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à ...

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2009, présentée pour la SOCIETE JC DECAUX, dont le siège est 17, rue Soyer à Neuilly-sur-Seine (92200), par Me Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; la SOCIETE JC DECAUX demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-64 en date du 20 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Rennes et de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole à lui verser solidairement ou, à titre subsidiaire, chacune pour sa part, la somme de 2 750 000 euros, quitte à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2004, en réparation du préjudice qu'elle a subi en raison de son éviction du marché passé en vue de la fourniture de mobiliers urbains d'information municipale, d'une part, et d'abris voyageurs pour les usagers des transports en commun, d'autre part ;

2°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles le maire de Rennes et le président de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole ont rejeté ses demandes indemnitaires et de condamner lesdites commune et communauté d'agglomération à lui verser solidairement ou, à titre subsidiaire, chacune pour sa part, la somme de 2 750 000 euros HT, quitte à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2004 et de leur capitalisation à compter du 27 décembre 2007 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Rennes, d'une part, et de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, d'autre part, le versement de la somme de 4 000 euros chacune au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mai 2010 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;

- les observations de Me Bigas substituant Me Thiriez, avocat de la SOCIETE JC DECAUX ;

- et les observations de Me Mokhtar substituant Me Kern, avocat de la commune de Rennes et de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 mai 2010, présentée pour la SOCIETE JC DECAUX ;

Considérant qu'au mois de juillet 1996, la commune de Rennes et le district de l'agglomération rennaise ont lancé, sous la forme d'un groupement d'achat public, un appel d'offres sur performances pour la fourniture de mobiliers urbains d'information municipale, d'une part, et d'abris voyageurs pour les usagers des transports en commun, d'autre part ; que, le 12 novembre 1997, la SOCIETE JC DECAUX, qui était titulaire du précédent marché, a saisi le Tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de la délibération du 15 septembre 1997 du conseil municipal de Rennes et de celle du 26 septembre 1997 du conseil du district de l'agglomération rennaise autorisant la signature du marché en cause avec la société More Group France ainsi que des décisions du maire et du président du conseil du district de signer ledit marché ; que, par un jugement en date du 29 juillet 2002, confirmé en appel le 30 juillet 2003, le Tribunal administratif de Rennes a annulé lesdites délibérations et décisions et enjoint au maire de Rennes et au président de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, venant aux droits du district de l'agglomération rennaise, de saisir le juge du contrat en vue d'en faire prononcer la nullité ; que, par courriers du 9 septembre 2004, demeurés sans réponse, la SOCIETE JC DECAUX a demandé à la commune de Rennes et à la communauté d'agglomération de Rennes Métropole de lui verser solidairement la somme de 2 750 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison de son éviction irrégulière dudit marché ; que ladite société interjette appel du jugement en date du 20 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de ces collectivités à lui verser également solidairement ou, à titre subsidiaire, chacune pour sa part, la même somme, quitte à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2004 et de leur capitalisation à compter du 27 décembre 2007 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande qui lui avait été soumise par la SOCIETE JC DECAUX en se fondant notamment sur l'argumentation présentée en défense par la commune de Rennes et la communauté d'agglomération de Rennes métropole dans leur mémoire enregistré au greffe de ce tribunal le 17 novembre 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que ce mémoire n'a pas été communiqué à la SOCIETE JC DECAUX ; qu'il suit de là que les premiers juges ont méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué et, par la voie de l'évocation, de statuer sur la demande présentée par la SOCIETE JC DECAUX devant le tribunal administratif ;

Sur les conclusions indemnitaires présentées par la SOCIETE JC DECAUX :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de prescription opposée par la commune de Rennes et la communauté d'agglomération de Rennes Métropole ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, par un jugement en date du 29 juillet 2002, confirmé en appel par un arrêt de la Cour du 30 juillet 2003, le Tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 15 septembre 1997 du conseil municipal de Rennes et celle du 26 septembre 1997 du conseil du district de l'agglomération rennaise autorisant la signature du marché litigieux avec la société More Group France ainsi que les décisions du maire et du président du conseil du district de signer ledit marché ;

Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce marché, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; que, dans le cas où l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché, elle a droit à l'indemnisation de l'intégralité du manque à gagner qu'elle a subi ; que la circonstance que, par une demande enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Rennes le 12 juillet 2006, la commune de Rennes et la communauté d'agglomération de Rennes Métropole ont saisi le juge du contrat aux fins de faire constater la nullité dudit marché, ainsi que le jugement du 29 juillet 2002 les y invitait, et que, par un jugement en date du 13 avril 2010, le Tribunal administratif de Rennes a déclaré les contrats de mise à disposition de mobiliers urbains conclus en septembre 1997 par la commune de Rennes et le district urbain de l'agglomération rennaise avec la société More Group France nuls et de nul effet, ne fait pas obstacle à ce que la SOCIETE JC DECAUX sollicite la réparation du préjudice résultant selon elle de son éviction irrégulière de ce marché ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'article 1er du règlement de la consultation, que l'objet du marché litigieux, passé sous la forme d'un appel d'offres sur performances, était la fourniture gratuite de mobiliers urbains d'information municipale, d'une part, et d'abris-voyageurs pour les usagers des transports en commun, d'autre part ; que ce même règlement prévoyait la possibilité pour les candidats de présenter des variantes ; que, toutefois, la mise à disposition pour les usagers des transports en commun de 200 vélos, correspondant à la variante n° 2 proposée par la société More Group, laquelle a été retenue, ne constituait pas, contrairement à ce que prétendent la commune de Rennes et la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, un service annexe répondant à l'objet du marché ; que si la Cour a estimé, dans son arrêt en date du 30 juillet 2003, devenu définitif, que lesdites collectivités avaient recouru à tort à la procédure de l'appel d'offres sur performances, cette variante aurait également été étrangère à l'objet du marché s'il avait été passé dans le cadre d'un appel d'offres ouvert ou restreint selon la procédure non dérogatoire ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que ladite variante ne correspondait pas à l'objet du marché et n'aurait pas dû être retenue ;

Considérant qu'aux termes de l'article 9 du règlement de la consultation du marché les critères de choix des offres par ordre décroissant d'importance sont : 1°) Performance technique de l'offre, déclinée, notamment, sous les aspects suivants : esthétique et intégration des mobiliers dans le tissu urbain, robustesse et traitement des matériaux utilisés (...). 2°) performance de l'offre sur ses aspects, autres que techniques, notamment au regard des propositions variantes éventuellement proposées, 3°) performance du dispositif prévu pour garantir en permanence le meilleur service en ce qui concerne la maintenance et le nettoyage des mobiliers. ; qu'aucune disposition du code des marchés publics alors en vigueur ne faisait obstacle à ce que ces critères de choix soient retenus par le groupement d'achat dans le cadre d'un appel d'offres ouvert ou restreint passé selon la procédure non dérogatoire ; que, contrairement à ce que soutient la SOCIETE JC DECAUX, le critère 2°) laissait la possibilité aux candidats de proposer des variantes à caractère financier ; que, dans l'hypothèse où ces derniers avaient un doute sur cette faculté, ils leur étaient possible de solliciter de plus amples précisions auprès des représentants des collectivités concernées ; qu'au demeurant, il résulte du procès-verbal de la réunion d'information qui s'est tenue le 10 avril 1997, en présence de représentants de la SOCIETE JC DECAUX, qu'il a été indiqué aux candidats qu'ils avaient la possibilité de proposer les solutions, à la fois techniques et/ou financières de leur choix (...) ; que, par ailleurs, si la société requérante entend se prévaloir de la circonstance que l'article 16 du cahier des clauses particulières valant programme fonctionnel détaillé rappelait que l'occupation du domaine communal rennais était effectuée à titre gratuit, ces stipulations ne faisaient pas obstacle à ce que l'un des candidats, en l'occurrence la société More Group, propose, ainsi que celle-ci l'a fait sous la forme de la variante n° 1, de reverser un pourcentage de son chiffre d'affaires auxdites collectivités à partir de la 4ème année, lequel ne pouvait être regardé comme constituant une redevance d'occupation du domaine public communal dès lors que lesdites sommes n'étaient pas fixées par la collectivité propriétaire du domaine public concerné et ne constituaient que le reversement d'une partie des recettes commerciales de la société titulaire du marché ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la SOCIETE JC DECAUX, la proposition de variante n° 1 de la société More Group n'était pas contraire au règlement de la consultation du marché tel qu'il aurait pu être repris dans le cadre d'un appel d'offres passé selon la procédure non dérogatoire ;

Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, la SOCIETE JC DECAUX ne peut être regardée comme ayant été privée d'une chance sérieuse d'emporter le marché ; que si la société requérante, qui disposait d'une expérience certaine dans le domaine faisant l'objet du marché, et dont l'offre avait été classée deuxième, n'était pas dépourvue de toute chance de remporter le marché litigieux, il est constant qu'elle n'a pas sollicité le remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre et ne saurait, par voie de conséquence, obtenir une indemnisation de ce chef ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Rennes et de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement à la SOCIETE JC DECAUX de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE JC DECAUX le versement à la commune de Rennes, d'une part, et à la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, d'autre part, d'une somme de 1 000 euros chacune au titre des frais de même nature qu'elles ont exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 05-64 du 20 mai 2009 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SOCIETE JC DECAUX devant le Tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : La SOCIETE JC DECAUX versera à la commune de Rennes, d'une part, et à la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, d'autre part, la somme de 1 000 euros (mille euros) chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE JC DECAUX, à la commune de Rennes et à la communauté d'agglomération de Rennes Métropole.

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N° 09NT01712

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT01712
Date de la décision : 04/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. VILLAIN
Avocat(s) : THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-06-04;09nt01712 ?
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