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19/10/2010 | FRANCE | N°09PA02715

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 19 octobre 2010, 09PA02715


Vu la requête, enregistrée le 12 mai 2009, présentée pour Mme Annie A, demeurant ...), par Me de Premare ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601856/5-1 en date du 5 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 70 023,80 euros au titre du préjudice résultant de la perte de sa rémunération entre le 1er avril 1991 et le 29 octobre 2001, la somme de 70 023,80 euros au titre du préjudice résultant de la privation d'avancement de carrière qu

'elle a subie, et de la minoration du montant de sa pension de retraite...

Vu la requête, enregistrée le 12 mai 2009, présentée pour Mme Annie A, demeurant ...), par Me de Premare ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601856/5-1 en date du 5 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 70 023,80 euros au titre du préjudice résultant de la perte de sa rémunération entre le 1er avril 1991 et le 29 octobre 2001, la somme de 70 023,80 euros au titre du préjudice résultant de la privation d'avancement de carrière qu'elle a subie, et de la minoration du montant de sa pension de retraite, à titre subsidiaire, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 67 153,80 euros au titre de l'indemnité compensatrice ;

2°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser, d'une part, une somme de 70 023,80 euros en réparation du préjudice résultant de sa perte de rémunération entre le 1er avril 1991 et le 29 octobre 2001 et, d'autre part, une somme de 70 023,80 euros en réparation du préjudice de la privation d'avancement de carrière et de la minoration du montant de sa pension de retraite, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 67 153,80 euros au titre de l'indemnité compensatrice ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la constitution du 4 octobre 1958, et notamment son préambule ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le conseil constitutionnel ;

Vu la loi nº 70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l'accès des militaires à des emplois civils ;

Vu la loi nº 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;

Vu la loi nº 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi nº 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires ;

Vu le décret n° 47-1457 du 4 août 1947 portant attribution d'une indemnité compensatrice aux fonctionnaires et aux agents de certains services qui sont l'objet d'une promotion ou d'une nomination, dans un cadre normal de fonctionnaires titulaires de l'Etat, à un grade comportant un traitement inférieur a celui qu'ils percevaient antérieurement ;

Vu le décret n° 70-1326 du 23 décembre 1970 relatif au statut particulier du corps administratif supérieur des services extérieurs du ministère de la défense ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2010 :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, ancien sous-officier de carrière, a été nommée à compter du 1er avril 1991, à l'issue de sa scolarité à l'institut régional d'administration de Lille, attachée de service extérieur de 2ème classe dans le corps administratif supérieur des services extérieurs du ministère de la défense, corps de catégorie A, et reclassée au 3ème échelon de son grade ; que, par une décision du 24 septembre 1991, le ministre de la défense a refusé de prendre en compte, pour le reclassement de l'intéressée, les services militaires, autres que le service national, accomplis par elle antérieurement à son intégration dans son nouveau corps ; que la demande d'annulation de cette décision a été rejetée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 22 octobre 1998, confirmée par le Conseil d'Etat dans une décision en date du 18 décembre 2002 ; que, le 7 septembre 2005, Mme A, ayant été admise à faire valoir ses droits à la retraite le 1er novembre 2001, a demandé au ministre de la défense une indemnité tendant à réparer le préjudice financier qu'elle estime avoir subi du fait de l'absence de prise en compte de ses années de service militaire ; que cette demande a été rejetée le 1er décembre 2005 ; que, par la présente requête, Mme A relève appel du jugement en date du 5 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes réparant ses préjudices de rémunération, de carrière et de retraite et, à titre subsidiaire, à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 67 153,80 euros au titre de l'indemnité compensatrice ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de la défense ;

Sur les conclusions présentées à titre principal :

En ce qui concerne la responsabilité sans faute de l'Etat :

Considérant que la responsabilité de l'Etat du fait des lois est susceptible d'être engagée sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de l'adoption d'une loi, à la condition que cette loi n'ait pas entendu exclure toute indemnisation et que le préjudice dont il est demandé réparation, revêtant un caractère grave et spécial, ne puisse, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés ;

Considérant qu'en raison de la généralité de leur champ d'application, ni l'article 97 de la loi du 13 juillet 1972, applicable lors du reclassement de Mme A, et qui n'imposait la prise en compte partielle des services militaires antérieurs qu'en cas d'intégration dans un corps de catégorie B, C ou D, ni l'article 61 de la loi du 24 mars 2005, qui accorde désormais aux militaires intégrés dans la fonction publique civile le droit d'être reclassé dans des conditions équivalentes à celles prévues pour un fonctionnaire, ne sont susceptibles d'avoir entraîné pour Mme A un préjudice spécial ; que la requérante n'est dès lors pas fondée à demander l'engagement de la responsabilité de l'Etat sur ce fondement ;

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de l'Etat :

Considérant, en premier lieu, que les fonctionnaires et agents non titulaires de l'Etat relevant des lois du 13 juillet 1983 et du 11 janvier 1984 susvisées sont dans une situation différente de celle des autres personnes intégrées dans le corps administratif supérieur des services extérieurs du ministère de la défense, et en particulier de celle des sous-officiers, soumis au statut général des militaires ; que cette différence de situation était de nature à justifier que des règles spéciales leur soient appliquées lors de leur titularisation dans ce corps, qui relève lui-même de la fonction publique civile de l'Etat ; que, par suite, les dispositions des articles 9 à 9-4 du décret du 23 décembre 1970 ont pu légalement réserver aux fonctionnaires civils et agents non titulaires de l'Etat le bénéfice d'une prise en compte partielle des services antérieurement accomplis ; que, dès lors, Mme A n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu les principes d'égalité de traitement des membres d'un même corps en refusant de prendre en compte, lors de son reclassement, ses services militaires antérieurement accomplis ;

Considérant, en deuxième lieu, que les militaires régis par la loi du 13 juillet 1972 n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 14 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée en vertu duquel la mobilité des fonctionnaires entre fonctions publiques constitue une garantie fondamentale de leur carrière ; que, dès lors, la requérante ne peut pas utilement invoquer la méconnaissance fautive du droit à la mobilité entre les fonctions publiques ;

Considérant, en dernier lieu, que Mme A, au soutien des ses conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité de l'Etat, fait valoir que l'article 97 de la loi du 13 juillet 1972 était contraire au principe constitutionnel d'égal accès aux emplois publics posé par l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et que l'Etat a négligé, jusqu'à l'adoption de la loi du 24 mars 2005, de mettre en conformité cette disposition avec ce principe constitutionnel ; que la requérante doit ainsi être regardée comme soutenant que l'Etat a commis une faute en remédiant tardivement à l'inconstitutionnalité d'une disposition législative ; que, toutefois, la responsabilité pour faute de l'Etat du fait d'une loi adoptée en méconnaissance de la Constitution n'est pas susceptible d'être engagée devant le juge administratif ; que, dès lors, Mme A ne peut prétendre rechercher la responsabilité pour faute de l'Etat sur ce fondement ;

Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire :

Considérant que Mme A, qui se borne à indiquer que l'administration n'a pas tenu compte de la perte constante de 56 points d'indice à compter de son intégration dans le corps administratif supérieur des services extérieurs du ministère de la défense jusqu'à sa mise à la retraite, n'établit pas que l'indemnité compensatrice de 2 870 euros qui lui a été versée ne correspond pas à la différence entre le traitement dont elle bénéficiait en qualité de sous-officier et le traitement correspondant à l'indice résultant de son intégration et son reclassement dans son corps d'accueil ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'administration a commis une faute dans l'application des dispositions des articles 1er et 5 du décret du 4 août 1947 susvisé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à la requérante la somme réclamée par celle-ci au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

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N° 09PA02715


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02715
Date de la décision : 19/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : DE PREMARE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-10-19;09pa02715 ?
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