La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/04/2017 | FRANCE | N°13VE00645

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 20 avril 2017, 13VE00645


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me Sicot, pour la société GECINA.

1. Considérant que la société GECINA, société foncière, a opté le 26 septembre 2003, avec effet au 1er janvier de l'ann

e, pour le régime fiscal des sociétés d'investissements immobiliers cotées prévu par l'article 208 C du code général des ...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me Sicot, pour la société GECINA.

1. Considérant que la société GECINA, société foncière, a opté le 26 septembre 2003, avec effet au 1er janvier de l'année, pour le régime fiscal des sociétés d'investissements immobiliers cotées prévu par l'article 208 C du code général des impôts ; que l'exercice de cette option ayant entraîné une cessation d'entreprise, la société GECINA a souscrit, le

25 novembre 2003, une déclaration de cessation d'entreprise au 1er janvier 2003 ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société a fait l'objet, le service a procédé à des rehaussements de ses résultats imposables au titre de l'exercice de cessation, et a notamment remis en cause l'option exercée par la société GECINA pour le report en arrière de ses déficits des exercices clos en 2003, 2004 et 2005 ; que la société GECINA relève appel du jugement du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions à fin de décharge de ces rehaussements et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'expression du désaccord du contribuable sur les redressements qui lui sont notifiés doit être formulée par écrit dans le délai précité ;

3. Considérant qu'en réponse à la proposition de rectification, la société GECINA a adressé le 21 décembre 2006 un courrier se bornant à demander à titre conservatoire que fût noté son refus des différentes rectifications envisagées ; qu'elle n'a adressé des observations circonstanciées à l'administration qu'à la date du 25 juillet 2007, soit postérieurement au délai de trente jours courant à compter de la réception le 13 décembre 2006 de la proposition de rectification ; que la société GECINA doit, dès lors, être regardée comme ayant accepté tacitement les redressements ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en l'absence de réponse à ses observations concernant le point qu'elle évoque, relatif à la réintégration des provisions, la procédure suivie par l'administration serait irrégulière ;

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 208 C du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. - Les sociétés d'investissements immobiliers cotées s'entendent des sociétés par actions cotées sur un marché réglementé français, dont le capital social n'est pas inférieur à 15 millions d'euros, qui ont pour objet principal l'acquisition ou la construction d'immeubles en vue de la location, ou la détention directe ou indirecte de participations dans des personnes visées à l'article 8 et aux 1, 2 et 3 de l'article 206 dont l'objet social est identique. / II. - Les sociétés d'investissements immobiliers cotées visées au I (...) peuvent opter pour l'exonération d'impôt sur les sociétés pour la fraction de leur bénéfice provenant de la location des immeubles et des plus-values sur la cession à des personnes non liées au sens du 12 de l'article 39 d'immeubles, de participations dans des personnes visées à l'article 8 ou dans des filiales soumises au présent régime. / Les bénéfices exonérés provenant des opérations de location des immeubles sont obligatoirement distribués à hauteur de 85 % avant la fin de l'exercice qui suit celui de leur réalisation. (...) " ; qu'aux termes du 2 de

l'article 221 du même code : " En cas de dissolution, de transformation entraînant la création d'une personne morale nouvelle, d'apport en société, de fusion, de transfert du siège ou d'un établissement à l'étranger, l'impôt sur les sociétés est établi dans les conditions prévues aux 1 et 3 de l'article 201. / Il en est de même, sous réserve des dispositions de l'article 221 bis, lorsque les sociétés ou organismes mentionnés aux articles 206 à 208 quinquies, 239 et 239 bis AA cessent totalement ou partiellement d'être soumis à l'impôt sur les sociétés au taux prévu au deuxième alinéa du I de l'article 219. " ; qu'aux termes du 1 de l'article 201 de ce code : " Dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, ou d'une exploitation agricole dont les résultats sont imposés d'après le régime du bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi. (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 221 bis du code précité :

" En l'absence de création d'une personne morale nouvelle, lorsqu'une société ou un autre organisme cesse totalement ou partiellement d'être soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal, les bénéfices en sursis d'imposition et les plus-values latentes incluses dans l'actif social ne font pas l'objet d'une imposition immédiate, à la double condition qu'aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et que l'imposition desdits bénéfices et plus-values demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable à la société ou à l'organisme concerné. / La première condition n'est pas exigée des entreprises lors de leur option pour le régime prévu à l'article 208 C pour leurs immobilisations autres que celles visées au IV de l'article 219, si elles prennent l'engagement de calculer les plus-values réalisées ultérieurement à l'occasion de leur cession d'après la valeur qu'elles avaient, du point de vue fiscal, à la clôture de l'exercice précédant l'entrée dans le régime. (...) " ;

En ce qui concerne la déduction d'une moins-value constatée sur les titres de la société AIC :

Sur le terrain de la loi fiscale :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 39 quindecies du code général des impôts :

" I. 1. Sous réserve des dispositions des articles 41, 151 octies et 210 A à 210 C, le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 16 %. / Il s'entend de l'excédent de ces plus-values sur les moins-values de même nature constatées au cours du même exercice. (...) 2. L'excédent éventuel des moins-values à long terme ne peut être imputé que sur les plus-values à long terme réalisées au cours des dix exercices suivants " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société GECINA détenait des titres de participation dans le capital de la société par actions simplifiées Aménagement Innovation Construction (AIC), pour une valeur inscrite au bilan de 5 455 527 euros au 31 décembre 2002 ; qu'elle a constaté la dépréciation, pour un montant de 3 697 726 euros, de la valeur de ces titres, a inscrit à cette fin une dotation au compte " écarts de réévaluation " puis, au titre de l'exercice clos le 1er janvier 2003, a déduit de manière extra-comptable de ses résultats imposables une somme de 2 107 706 euros, calculée en multipliant le montant de la dépréciation par le rapport existant entre le taux d'imposition de 19 % et celui de 33,1/3 % ; que, ce faisant, la société GECINA a estimé se conformer aux dispositions du paragraphe 26 de l'instruction 4 H-5-03 du 25 septembre 2003, paragraphe relatif aux moins-values à long terme non utilisées par une société avant option pour le régime fiscal en cause ;

7. Considérant qu'il est constant que la moins-value évoquée par la société GECINA au sujet des titres AIC précités était, à la clôture de l'exercice en litige, une moins-value latente, et non une moins-value constatée ; que s'il lui était loisible de constater, à la clôture de l'exercice en litige, une dépréciation de ces titres par rapport à leur valeur d'origine, étant observé qu'elle avait déjà procédé à une première dépréciation de 3 037 274 euros par rapport à cette valeur d'origine, laquelle était de 8 492 801 euros, il résulte d'une part des dispositions précitées de l'article 39 quindecies 2 du code général des impôts qu'elles n'autorisent pas la déduction à laquelle la société GECINA a procédé et, d'autre part, que seule une moins-value à long terme constatée, par opposition à une moins-value à long terme latente, peut être imputée sur les plus-values à long terme réalisées au cours des dix exercices suivants ; que les écritures comptables de la société GECINA tendant à l'enregistrement d'une moins-value professionnelle d'un montant de 3 697 726 euros s'analysaient donc, ainsi que la société GECINA en convient expressément, comme une réévaluation libre des éléments d'actifs, décision de gestion opposable à la contribuable ; que l'administration a donc pu à bon droit procéder à la réintégration de cette somme dans le bénéfice imposable de la société GECINA, celle-ci, comme l'a jugé le tribunal administratif, ne pouvant se prévaloir d'aucune base légale pour procéder à la déduction litigieuse ; que la société GECINA n'apporte, pas plus en cause d'appel que dans le cadre de la procédure de première instance, d'élément dont il résulterait que la somme de 2 107 706 euros pourrait être admise en déduction de ses résultats imposables de l'exercice clos le

31 décembre 2003, c'est-à-dire le premier exercice réalisé dans le cadre du régime des SIIC ;

Sur le terrain de la doctrine :

8. Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, la société GECINA indique, en premier lieu, qu'elle n'a jamais entendu demander le bénéfice des dispositions du paragraphe 26 de l'instruction 4 H-5-03 du 25 septembre 2003 ; qu'en tout état de cause, il résulte des termes du deuxième alinéa du point 26 de l'instruction précitée que ne sont visées que les moins-values relatives à des cessions effectivement réalisées avant l'exercice de l'option pour le régime des SIIC, et non les moins-values latentes, comme c'est le cas en l'espèce ;

9. Considérant que la société GECINA revendique, en deuxième lieu, l'application des règles générales applicables aux plus-values réalisées et moins-values subies en fin d'exploitation ; qu'elle se réfère, à cet égard, à la doctrine administrative 4 B-361 du 7 juin 1999, et notamment à ses points 9 et 10, aux termes desquels : " 9. Lorsque, pour l'exercice clos par la cession ou la cessation d'entreprise, la compensation entre les plus-values et les moins-values à long terme se solde par une moins-value nette à long terme, cette moins-value peut être déduite pour une fraction de son montant des bénéfices de cet exercice. / 10. Il en est de même pour les moins-values à long terme encore imputables en vertu de l'article 39 quindecies-I-2,

1er alinéa. " ; qu'il résulte toutefois des termes même de cette doctrine qu'elle concerne uniquement la moins-value pouvant résulter de la compensation entre des plus-values à long terme et des moins-values à long terme constatées et ne traite pas du cas des moins-values latentes ;

En ce qui concerne la déduction de primes de remboursement d'emprunts obligataires convertibles :

10. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu du I de l'article 209 du même code :

" Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; qu'en vertu de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt " ; que les règles fixées par le plan comptable général permettent aux sociétés soit de n'inscrire en comptabilité que le montant nominal d'un emprunt obligataire convertible en actions et de constituer une provision pour risque correspondant aux primes de remboursement, soit de procéder à l'étalement des primes de remboursement relatives à cet emprunt ; que le choix de l'une ou l'autre méthode de comptabilisation constitue une décision de gestion que l'administration est en droit d'opposer au contribuable ;

11. Considérant que la société GECINA a émis, le 3 octobre 1997, un emprunt obligataire convertible en actions venant à échéance le 1er janvier 2004, et prévoyant le versement aux porteurs d'une prime de remboursement en cas de non conversion en actions ; que la société GECINA a opté pour la seconde des deux méthodes précitées, soit la méthode dite " prime de remboursement incluse " et a, conformément aux dispositions de l'article 441-16 du plan comptable général, après avoir crédité le compte 163 " emprunt obligataire ", comptabilisé les primes de remboursement prévues par les stipulations du contrat d'émission pour leur totalité, au passif de son bilan, dès l'émission de l'emprunt, débitant le compte 169 " primes de remboursement des obligations " ; que la société GECINA a, parallèlement, procédé à l'amortissement des primes de remboursement sur la durée de l'emprunt, de manière linéaire, conformément aux dispositions de l'article 361-2 du plan comptable général, sans toutefois déduire ces charges d'amortissement de son bénéfice imposable ; qu'au 31 décembre 2002, le montant cumulé des amortissements ainsi pratiqués par la société s'élevait à 11 200 482 euros ; que la société GECINA a ensuite, au titre de l'exercice de cessation, procédé à la déduction de la totalité des charges d'amortissement ainsi comptabilisées au titre des exercices antérieurs, pour un montant de 11 200 482 euros ; que le service a remis en cause cette déduction, au motif que la probabilité que la société GECINA ait à supporter la charge du remboursement des primes attachées aux obligations convertibles était presque nulle ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est pas contesté par la

société GECINA, qu'à la clôture de l'exercice 2003, plus de 99 % des obligations émises avaient été converties en actions et qu'en définitive, la charge qui a réellement incombé à la

société GECINA au titre du remboursement des primes a été limitée à un montant de 55 652 euros, correspondant aux primes de remboursement de 5 436 obligations dont les porteurs n'ont pas exercé leur option de conversion ;

13. Considérant que la société GECINA fait valoir qu'en procédant de la manière qui vient d'être décrite, elle n'a pas entendu revenir sur le traitement fiscal relatif à l'emprunt qu'elle avait initialement retenu, mais qu'elle a cherché à déterminer la valeur réelle de la dette qu'elle allait transmettre à la nouvelle société du fait de la cessation d'entreprise ;

S'agissant du droit à déduction :

14. Considérant que les primes qui résultent du droit des porteurs des obligations à recevoir un capital supérieur au montant des fonds versés par eux constituent, pour eux, un produit des sommes prêtées, et, pour la société émettrice, une charge financière qu'elle est en droit d'imputer sur les résultats de l'exercice au cours duquel les primes doivent être versées ;

15. Considérant, toutefois, qu'il résulte des dispositions susénoncées de l'article 39 du code général des impôts que si une entreprise peut porter en provision au passif du bilan de clôture d'un exercice des sommes correspondant à des charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, cette faculté est subordonnée à la condition que les charges dont il s'agit soient nettement précisées quant à leur nature et évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent en outre comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de clôture de l'exercice et se rattachant aux opérations déjà effectuées à cette date par l'entreprise ; qu'ainsi les justifications d'une provision doivent être appréciées à la date à laquelle ladite provision a été inscrite au bilan ;

16. Considérant que si la société GECINA entendait déduire de son bénéfice imposable, au titre des charges, les dotations aux amortissements inscrites au titre des primes de remboursement, il lui appartenait, pour chaque exercice considéré, de passer une provision pour charges dans les conditions précisées par les dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du

code général des impôts ; que la société GECINA n'établit ni même n'allègue s'être conformée aux dispositions précitées ; qu'elle a, au contraire, ainsi qu'il a été rappelé au point 11, adopté la méthode dite " prime de remboursement incluse ", aux termes d'une décision de gestion qui lui est opposable ; qu'elle a ensuite de sa propre initiative renoncé à cette méthode à une date à laquelle la durée de l'emprunt touchait à son terme et alors qu'il était avéré que, du fait d'un flux massif de demandes de conversion des obligations en actions, le risque lié au remboursement des primes était, ainsi qu'il a été rappelé au point 12, devenu nul ; que si, pour demander à bénéficier de la possibilité qu'elle aurait eu en 1997 de constituer au titre de ces primes une provision pour risque, elle se prévaut de la valeur réelle de sa dette obligataire, celle-ci, compte tenu de ce qui vient d'être dit, doit être appréciée à partir de la seule valeur nominale des obligations convertibles à la date de cette demande, sans qu'il y ait lieu d'y inclure le montant des primes de remboursement ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que l'administration a réintégré aux résultats imposables de la société GECINA au titre de l'exercice de cessation d'entreprise au

1er janvier 2003 la somme litigieuse de 11 200 482 euros ;

S'agissant de la demande subsidiaire de la société GECINA :

17. Considérant que la société GECINA demande, à titre subsidiaire, et en application du principe de correction symétrique des erreurs et d'intangibilité du bilan d'ouverture, que l'erreur qu'elle a commise en ne donnant pas de traduction fiscale aux amortissements pratiqués en comptabilité soit corrigée par une déduction de son résultat fiscal au titre de la première période d'imposition vérifiée, soit au 1er janvier 2003 ; que si la société GECINA fait valoir, dans ses dernières écritures, qu'elle n'a à tort pas pris en compte, dans ses résultats imposables des exercices antérieurs à celui de sa cessation, la fraction des primes de remboursement attachées aux emprunts obligataires convertibles en actions, elle n'apporte, pas plus en appel qu'en première instance, de précision permettant d'apprécier si et comment la non déduction au cours de ces exercices de cette fraction aurait eu pour conséquence une surestimation de l'actif net ressortant du bilan de l'entreprise et quelle serait l'incidence de cette surestimation sur la variation de l'actif net au cours de l'exercice 2003, premier exercice non prescrit ;

En ce qui concerne la plus-value latente sur les parts de la société Beaugrenelle :

18. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société GECINA détenait la totalité des titres de la société civile immobilière Beaugrenelle et les avait inscrits à son bilan de clôture de l'exercice 2002 pour un montant de 11 216 000 euros ; que, par acte du 17 janvier 2003,

la société GECINA a cédé à la société Apsys la moitié des parts de cette société, avec effet au 1er janvier 2003, pour un montant de 13 millions d'euros, transaction dont il résulte que la valeur vénale de la totalité des parts à cette date était de 26 millions d'euros ; que le service, s'appuyant sur le court laps de temps séparant ces deux valorisations, a estimé que la société GECINA a, au titre de son bilan de clôture de l'exercice 2002, artificiellement minoré la valeur des titres en cause, réduisant ainsi son imposition au titre de la plus-value latente ;

19. Considérant que la valeur vénale des titres non admis à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

20. Considérant que la société GECINA soutient que le prix de vente des parts litigieuses était encore en cours de négociation au 1er janvier 2003 et que la différence entre le prix des parts tel qu'il résulte de l'inscription au bilan et le prix de la cession à la société Apsys s'explique par un droit d'entrée consenti par cette dernière dans la perspective de contrôler le projet de rénovation du centre commercial Beaugrenelle ; que la société GECINA n'assortit toutefois son argumentation d'aucune précision permettant de déterminer, notamment, si la prise de participation de la société Apsys dans la SCI Beaugrenelle a eu pour effet de donner à celle-ci un pouvoir de contrôle, circonstance qui aurait pu être de nature à conduire la société Apsys à proposer un supplément de prix ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a rehaussé le montant de la plus-value latente constatée sur les titres de la société Beaugrenelle ;

En ce qui concerne la déduction de travaux d'entretien :

21. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société GECINA a effectué des travaux d'entretien dans un certain nombre d'immeubles lui appartenant et qu'elle envisageait de céder ; qu'elle a, au titre de l'exercice clos en 2002, comptabilisé le montant de ces travaux en charges constatées d'avance ; que la société GECINA a en outre, au titre de l'exercice clos le 1er janvier 2003, intégré le montant de ces travaux dans le prix de revient de ces immeubles, minorant ainsi la plus-value latente dont ces derniers étaient porteurs ;

22. Considérant que, dans le cadre de la vérification, l'administration a rappelé la règle selon laquelle les charges doivent être prises en compte dans le résultat de l'exercice au cours duquel elles ont été engagées, soit en l'espèce au titre de l'exercice clos en 2002 ; que l'administration a, en outre, en ce qui concerne la détermination du montant des plus-values latentes, refusé la prise en compte du montant de ces travaux dans le prix de revient d'immeubles ;

23. Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, la société GECINA indique qu'elle ne s'est pas opposée au rehaussement de la base d'impôt sur les sociétés dont elle s'est acquitté au titre des plus-values latentes, mais qu'elle demande l'application à son profit du principe d'intangibilité du bilan d'ouverture ; qu'elle valoir, à cet égard, que si son bilan fiscal au

31 décembre 2002 était surestimé du fait de la présence du poste de charges constatées d'avance mentionné au point précédent, alors le résultat de l'exercice clos le 1er janvier 2003, premier exercice non prescrit, doit être corrélativement diminué à due concurrence ;

24. Considérant, toutefois, que la société GECINA, qui n'apporte cependant aucune précision permettant de déterminer la consistance et l'étendue des travaux qu'elle mentionne, n'établit ni même n'allègue que ces travaux auraient eu pour effet de prolonger de manière notable la durée d'utilisation des immeubles en cause et, par suite, d'entraîner une augmentation de la valeur pour laquelle ces éléments immobilisés figuraient au bilan de l'entreprise au

31 décembre 2002 ; que, dès lors, ses prétentions doivent être rejetées ;

En ce qui concerne la demande de report en arrière des déficits :

25. Considérant qu'aux termes de l'article 220 quinquies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa

du I de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du

1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ce bénéfice (...) Cette option porte, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1985, sur les déficits reportables à la clôture d'un exercice en application du troisième alinéa du I de l'article 209. / Le déficit imputé dans les conditions prévues au premier alinéa cesse d'être reportable sur les résultats des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté. / (...) II. L'option visée au I ne peut pas être exercée au titre d'un exercice au cours duquel intervient une cession ou une cessation totale d'entreprise, une fusion de sociétés ou une opération assimilée, ou un jugement prononçant la liquidation des biens ou la liquidation judiciaire de la société. (...). " ;

26. Considérant qu'ainsi qu'il a été indiqué au point 1, la société GECINA a exercé l'option pour le régime prévu par les dispositions de l'article 208 C du code général des impôts avec effet au 1er janvier 2003 ; que l'exercice de cette option doit, en application des dispositions du 2ème alinéa du 2 de l'article 221, être regardé comme une cessation d'entreprise, la circonstance que la société GECINA aurait continué à se livrer aux mêmes activités étant sans incidence à cet égard ; qu'ainsi, l'intervention de la cessation d'entreprise au cours de l'exercice clos le 1er janvier 2003, soit l'exercice précédant celui clos le 31 décembre 2003, était, à elle seule, de nature à priver la société GECINA de la faculté d'obtenir le report en arrière de ses déficits constatés au titre des exercices clos les 31 décembre 2003 et 2005 sur les bénéfices des exercices 2001 et 2002, exercices clos antérieurement à la cessation, par application des dispositions précitées du II. de l'article 220 quinquies du code général des impôts ; que, par suite, l'administration était fondée pour ce motif à remettre en cause l'option exercée par la

société GECINA au titre des exercices clos en 2003 et 2005 pour le report en arrière de ses déficits sur les bénéfices des exercices précédents ;

Sur les pénalités :

27. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...). " ;

28. Considérant que, pour établir la volonté délibérée de la société GECINA d'éluder l'impôt, l'administration s'est notamment fondée sur l'objet social de la requérante, à savoir l'acquisition et la construction d'immeubles, et sur l'importance de la minoration du prix des parts de la société civile immobilière Beaugrenelle ; que, toutefois, si la minoration de la

plus-value portait sur un montant important d'une valeur de 14 millions d'euros, l'administration, eu égard à l'importance des aléas pesant sur l'opération immobilière en cause et sur la valeur des titres cédés, n'apporte pas d'éléments de nature à établir que la société GECINA aurait eu l'intention d'éluder l'impôt, intention qui aurait seule été de nature à justifier la majoration contestée ; que, par suite, la société GECINA est fondée à demander la décharge de ces pénalités ;

29. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société GECINA est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des pénalités afférentes à la minoration de la valeur des titres de la société civile immobilière Beaugrenelle ;

30. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 5 000 euros à verser à la société GECINA ;

DÉCIDE :

Article 1er : La société GECINA est déchargée des pénalités correspondant à la minoration du prix de vente des parts de la société civile immobilière Beaugrenelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions à fin de décharge de la société GECINA est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 5 000 euros à la société GECINA en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 13VE00645


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00645
Date de la décision : 20/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement) - Proposition de rectification (ou notification de redressement) - Motivation.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Cession d'entreprise - cessation d'activité - transfert de clientèle (notions).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Évaluation de l'actif - Plus et moins-values de cession.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Amortissement.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Provisions.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Report déficitaire.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : AARPI BREDIN PRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-04-20;13ve00645 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award