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19/02/2015 | FRANCE | N°14-10622

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 février 2015, 14-10622


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu les articles 2240 et 2241 du code civil, ensemble l'article L. 137-2 du code de la consommation ;
Attendu que lorsqu'un acte de procédure est déclaré nul, il est non avenu et ses effets sont rétroactivement anéantis ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 14 avril 2008 la société Crédit foncier de France (la banque) a fait délivrer à M. et Mme X... un commandement de payer valant saisie immobilière, puis

une assignation à l'audience d'orientation le 25 juillet 2008 ; que l'adjudica...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu les articles 2240 et 2241 du code civil, ensemble l'article L. 137-2 du code de la consommation ;
Attendu que lorsqu'un acte de procédure est déclaré nul, il est non avenu et ses effets sont rétroactivement anéantis ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 14 avril 2008 la société Crédit foncier de France (la banque) a fait délivrer à M. et Mme X... un commandement de payer valant saisie immobilière, puis une assignation à l'audience d'orientation le 25 juillet 2008 ; que l'adjudication des biens immobiliers saisis étant intervenue, un juge de l'exécution a, par jugement du 16 novembre 2011 rendu sur la demande d'un surenchérisseur, prononcé la nullité du commandement et de tous les actes de procédure subséquents ; que la banque ayant fait délivrer à M. et Mme X... un nouveau commandement valant saisie immobilière le 26 avril 2012, ceux-ci l'ont contesté devant un juge de l'exécution en soutenant que l'action de la banque était prescrite ;
Attendu que pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription, soulevée par M. et Mme X..., de l'action de la banque à leur encontre et tendant à la poursuite de la vente aux enchères publiques de biens et droits immobiliers leur appartenant, la cour d'appel, après avoir rappelé que la déchéance du terme avait été prononcée le 28 mars 2008, et relevé, par des motifs non critiqués, que l'assignation du 25 juillet 2008 n'avait pas interrompu le délai de prescription comme ayant été annulée en conséquence de l'annulation du commandement du 14 avril 2008, retient par motifs propres que le délai a été interrompu par la reconnaissance par M. et Mme X... du droit de la banque à leur encontre dans leurs conclusions des 3 novembre 2009 et 6 avril 2011 et, par motifs adoptés, qu'il l'a été par leurs conclusions du 10 septembre 2012 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les conclusions des 3 novembre 2009 et 6 avril 2011 avaient été annulées, de sorte que la reconnaissance qu'elles contenaient ne pouvait avoir eu pour effet d'interrompre le délai de prescription biennal de l'article L. 137-2 du code de la consommation et que celles du 10 septembre 2012 étaient postérieures à l'expiration de ce délai, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du même code ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la dernière branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que l'action de la société Crédit foncier de France est prescrite ;
Condamne la société Crédit foncier de France aux dépens exposés tant devant les juges du fond que devant la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes tant devant les juges du fond que devant la Cour de cassation ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

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Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription, soulevée par monsieur et madame X..., de l'action du CREDIT FONCIER DE FRANCE à leur encontre et tendant à la poursuite de la vente aux enchères publiques des biens et droits leur appartenant sis à SAINT MARIN DE CRAU cadastrés section C, lieudit ..., numéros 4365, 4375, 4380, 4384 et 4434.
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'interruption de la prescription, la déchéance du terme ayant été prononcée à la date du 28 mars 2008, la prescription est acquise à défaut d'interruption le 28 mars 2010 ; que le commandement du 14 avril 2008, annulé par jugement du 16 novembre 2011, ne peut avoir d'effet interruptif contrairement à ce que soutient la banque le commandement n'étant pas périmé faute de publication mais expressément déclaré nul ; que l'assignation délivrée le 28 juillet 2008 annulée par le jugement précité, constitue une demande en justice et c'est cet acte que le premier juge a jugé interruptif de prescription au visa de l'article 2241 du Code civil et non pas ainsi que le soutiennent les appelants, le commandement, les motifs du jugement entrepris étant parfaitement clairs ; que, toutefois, l'annulation prononcée le 16 novembre 2011 ne portant pas sur une question de forme, l'irrégularité qui affectait l'assiette foncière des biens immobiliers saisis viciant le fond de la procédure de saisie immobilière, l'assignation ne peut entraîner les effets interruptifs de l'article 2241 du Code civil alinéa 2 in fine ; qu'il n'y a dès lors pas interruption jusqu'à extinction de l'instance et reprise du délai de prescription à compter du 17 novembre 2011 ainsi que le soutient le CREDIT FONCIER DE FRANCE ; que le délai de prescription peut valablement être interrompu, aux termes de l'article 2240 du Code civil par la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit ; qu'ainsi les écritures des époux X... des 3 novembre 2009 et 6 avril 2011 aux termes desquelles les débiteurs saisis concluent ne plus contester le titre exécutoire et le montant de la créance, et solliciter des délais de grâce aux fins de réalisation d'une vente amiable permettant l'apurement intégral de la créance, peu important que ces écritures aient été prises au cours d'instances conduisant à des décisions ultérieurement annulées, contiennent une reconnaissance non-équivoque du droit du créancier, effectuée librement et en toute connaissance de cause, les époux X... étant assistés de leur conseil conformément à la loi, et sont interruptives de prescription, de sorte que l'action du CREDIT FONCIER DE FRANCE n'est pas éteinte à la date de délivrance du commandement du 26 avril 2012 ; que l'examen des moyens tirés de la renonciation à la prescription sont dès lors sans objet ; que le jugement entrepris est confirmé en toutes ses dispositions.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt, également, le délai de prescription ; qu'en l'espèce, la procédure est émaillée de demandes de remise, de demandes de délais, d'engagements à payer émanant des époux X... au cours des différentes instances (jugement du 23 janvier 2009, arrêt du 8 janvier 2010, conclusions du 10 septembre 2012 ¿), de sorte qu'en application des dispositions de l'article 2240 du Code civil, que la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée doit être écartée.
1°) ALORS QUE sont nulles et de nul effet, les conclusions prises par une partie et les décisions rendues dans le cadre d'une procédure de saisie immobilière annulée en son entier ensuite de l'annulation pour vice de fond du commandement de payer valant saisie, délivré pour initier ladite procédure ; qu'il ne saurait donc être tiré aucune conséquence d'une reconnaissance par le débiteur, que ces écritures et décisions contenaient, du droit du créancier à son encontre ; qu'en l'espèce, par jugement du juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de TARASCON du 16 novembre 2011, le commandement de payer valant saisie délivré aux époux X... le 14 avril 2008 avait été déclaré nul pour vice de fond et de nul effet et, en conséquence, tous les actes de procédure subséquents avaient été jugés nuls et de nul effet ; qu'en affirmant par motifs propres que les écritures des époux X... des 3 novembre 2009 et 6 avril 2011 contenaient une reconnaissance du droit de la banque créancière et, par motifs adoptés, que « la procédure » était émaillée de demandes et d'engagements valant reconnaissance du droit du créancier (jugement du 23 janvier 2009, arrêt du 8 janvier 2010), ce pour opposer au débiteur l'interruption de la prescription, lorsque l'ensemble de ces écritures et de ces décisions s'inscrivaient dans le cadre de la procédure de saisie entièrement annulée et étaient dès lors nulles et de nul effet, la Cour d'appel a violé les articles 117 et s. et 122 du Code de procédure civile, 2219, 2240 et 2241 du Code civil, ensemble les articles L 141-2 et R 311-10 du Code des procédures civiles d'exécution et L. 137-2 du code de la consommation ;
2°) et ALORS QU'en statuant ainsi, la Cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 16 novembre 2011 qui avait jugé nuls et de nul effet le commandement du 14 avril 2008 et tous les actes de procédure subséquents et, partant, a violé l'article 1351 du Code civil ;
3°) ALORS QUE le commandement du 14 avril 2008 et les actes de procédure subséquents ayant été annulés par jugement du 16 novembre 2011, la prescription était réputée avoir couru à compter de la déchéance du terme prononcée à la date du 28 mars 2008 et réputée acquise le 28 mars 2010 (cf. arrêt p. 5 § 4) ; qu'en affirmant, par motifs adoptés (cf. jugement p. 5 § 1), que les conclusions du 10 septembre 2012 contenant reconnaissance du droit du créancier étaient interruptives de prescription, la Cour d'appel, qui a donné un effet interruptif à des conclusions déposées après que la prescription était acquise, a violé les articles 122 du Code de procédure civile, 2219, 2240 et 2241 du Code civil, ensemble l'article L 131-2 du Code de la consommation ;
4°) ALORS QUE l'absence de contestation du titre exécutoire du créancier et du montant de la créance ainsi que la demande de délais de grâce aux fins de réalisation d'une vente amiable prêtent à discussion lorsqu'elles interviennent sous la pression d'une procédure de saisie et ne valent en conséquence pas reconnaissance univoque des droits du créancier ; qu'en décidant le contraire quand, en l'espèce, l'absence de contestation du titre exécutoire du CREDIT FONCIER DE FRANCE et du montant de la créance et la demande de délais de grâce aux fins de réalisation d'une vente amiable permettant l'apurement intégral de la créance qui seraient résultées, notamment, des conclusions des époux X... des novembre 2009 et 6 avril 2011 n'avaient été formulées que sous l'inévitable pression de la procédure de saisie immobilière engagée et finalement annulée par jugement du Juge de l'exécution du 16 novembre 2011, peu important que les débiteurs aient pu être assistés de leur conseil, la Cour d'appel a violé l'article 2240 du Code civil et l'article 122 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-10622
Date de la décision : 19/02/2015
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Acte de procédure - Nullité - Effets - Détermination - Portée

PRESCRIPTION CIVILE - Interruption - Acte interruptif - Reconnaissance du droit du créancier - Reconnaissance contenue dans des conclusions annulées en conséquence de l'annulation d'un commandement valant saisie immobilière - Perte de l'effet interruptif - Portée

Lorsqu'un acte de procédure est déclaré nul, il est non avenu et ses effets sont rétroactivement anéantis. Viole en conséquence les articles 2240 et 2241 du code civil, l'arrêt d'une cour d'appel qui, après avoir relevé par des motifs non critiqués qu'un délai de prescription n'avait pas été interrompu par une assignation à comparaître à l'audience d'orientation, annulée en conséquence de l'annulation du commandement valant saisie immobilière, retient que ce délai a néanmoins été interrompu par une reconnaissance de dette contenue dans les conclusions ultérieures du débiteur saisi, alors que ces conclusions ayant été annulées en conséquence de l'annulation du commandement, la reconnaissance qu'elles contenaient ne pouvait avoir eu pour effet d'interrompre le délai de prescription


Références :

articles 2240 et 2241 du code civil

article L. 137-2 du code de la consommation

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 25 octobre 2013

Sur l'effet de la caducité d'un commandement valant saisie immobilière, à rapprocher :2e Civ., 19 février 2015, pourvoi n° 13-28445, Bull. 2015, II, n° ??? (cassation sans renvoi)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 fév. 2015, pourvoi n°14-10622, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: M. Liénard
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.10622
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