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16/12/2016 | FRANCE | N°15-26083

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 décembre 2016, 15-26083


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Vu les articles 2 et 386 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Levo Ag Wohlen (la société Levo) a interjeté appel d'un jugement rendu dans un litige l'opposant à la société Invacare Poirier (la société Invacare) ; que les parties ayant conclu, le conseiller de la mise en état les a avisées le 22 février 2013 de ce qu'il proposait de retenir une clôture de

l'instruction au 19 février 2015 et l'audience de plaidoiries au 16 avril 2015, ces da...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Vu les articles 2 et 386 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Levo Ag Wohlen (la société Levo) a interjeté appel d'un jugement rendu dans un litige l'opposant à la société Invacare Poirier (la société Invacare) ; que les parties ayant conclu, le conseiller de la mise en état les a avisées le 22 février 2013 de ce qu'il proposait de retenir une clôture de l'instruction au 19 février 2015 et l'audience de plaidoiries au 16 avril 2015, ces dates devenant impératives passé un délai de quinze jours ; que, le 19 février 2015, la société Invacare a soulevé la péremption de l'instance ;

Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant constaté la péremption de l'instance au 20 décembre 2014, l'arrêt retient que l'avis de fixation, adressé le 22 février 2013, a fixé la clôture de l'instruction de l'affaire au 19 février 2015 pour être plaidée le 16 avril 2015 de sorte qu'avant la clôture rien n'indique qu'elle était en l'état d'être jugée, cette information donnée sur la date de la clôture de l'instance ne dispensant pas les parties d'accomplir les diligences propres à éviter la péremption d'instance ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'à compter de la fixation, le 22 février 2013, de la date des débats, les parties n'avaient plus à accomplir de diligences de nature à faire progresser l'instance de sorte que le délai de péremption se trouvait suspendu, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y a ait lieu de statuer sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Invacare Poirier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Levo Ag Wohlen la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Levo Ag Wohlen

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance en ce qu'elle avait dit la péremption acquise ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 386 du Code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligence pendant deux ans ; que seules les diligences de nature à faire progresser l'instance peuvent être prises en compte au titre de cet article ; qu'entre le 10 janvier 2013 et le 9 janvier 2015 aucune des parties n'a accompli d'acte de procédure ; que la société Levo soutient que le conseiller de la mise en état a estimé, lorsqu'il a adressé le 22 février 2013 l'avis de fixation et de clôture qui fait référence à l'article 912 du Code de procédure civile qui prévoit « le conseiller de la mise en état examine l'affaire dans les quinze jours suivant l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces. Il fixe la date de clôture et celle des plaidoiries. Toutefois, si l'affaire nécessite de nouveaux échanges de conclusions, il en fixe le calendrier après avoir recueilli l'avis des avocats », que l'affaire était en état et ne nécessitait pas de nouveaux échanges de conclusions puisqu'il n'a fixé aucun calendrier ; que cependant, l'avis de fixation adressé le 22 février 2013, a fixé la clôture de l'instruction de l'affaire au 19 février 2015 pour être plaidée le 16 avril 2015 de sorte qu'avant la clôture rien n'indique qu'elle était en l'état d'être jugée alors qu'au contraire, l'affaire a de nouveau été appelée à une audience de mise en état du 20 mars 2014 pour « avancement éventuel du calendrier », ce qui a été refusé par les parties et que postérieurement, la société Levo a communiqué le 9 janvier 2015 deux pièces de procédure alors que le nouveau conseil n'avait toujours pas conclu au fond et que l'affaire n'était donc manifestement pas en état d'être jugée puisqu'il a de nouveau conclu au fond le 29 janvier 2015 et qu'il appartenait à la société Invacare Poirier d'y répliquer notamment sur la question des pièces communiquées tardivement ; que cette information données sur la date de la clôture de l'instance ne dispense pas les parties d'accomplir les diligences propres à éviter lu péremption d'instance lorsque, comme en l'espèce, elles estiment que des diligences apparaissent utiles à accomplir avant l'audience de plaidoirie et la clôture de l'affaire (…) ; que par ailleurs, si l'instance a été interrompue en application des dispositions de l'article 369 du Code de procédure civile en raison de la dissolution à compter du 22 décembre 2012 de la SCP d'avoués représentant la société Levo AG Wohlen et que de ce fait le délai de péremption avait été interrompu, la constitution aux lieu et place du nouveau conseil à la date du 10 janvier 2013 a fait partir un nouveau délai de péremption ; que la communication, le 9 janvier 2015, d'un arrêt rendu le 30 octobre 2014 dans une procédure étrangère et sa traduction, en l'absence de conclusions développant les conséquences résultant de cette pièce sur le présent litige, n'est pas de nature à faire progresser la procédure ; que celles-ci sont d'ailleurs intervenues le 29 janvier 2015, alors que le délai de péremption était acquis ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que le conseiller de la mise en état a constaté la péremption d'instance de la présente procédure ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE dès lors que la péremption est un mode d'extinction de l'instance fondé sur l'inertie procédurale des parties, seule une diligence émanant de l'une d'elles peut interrompre la péremption, comme cela résulte des termes mêmes de l'article 386 précité (« aucune des parties »), de sorte que l'acte émanant du juge ne peut, en principe, avoir un tel effet ; qu'un avis de fixation a, certes, été adressé aux parties le 22 février 2013 en leur fixant une date d'audience pour plaider l'affaire, à savoir le 6 avril 2015 à 14 heures ; que, pour autant, la société Levo ne peut valablement soutenir que dès lors que l'affaire avait été fixée pour plaider, les parties n'avaient plus aucune diligence à effectuer ; qu'en effet, dans la mesure où ce même bulletin fixait au 19 février 2015 la date à laquelle devait en être clôturée l'instruction, en application de l'article 779 du Code de procédure civile, auquel renvoie l'article 905 du même Code, ce n'est qu'à cette dernière date formalisant la fin de l'instruction que l'affaire pouvait être considérée comme en état d'être jugée ; qu'avant cette clôture, les parties avaient toute latitude pour permettre à leur litige de se trouver en état d'être jugé, le bulletin en cause contenant d'ailleurs des indications sur la formes et les modalités de communication requises des conclusions et la société Levo, dont l'avocat nouvellement constitué le 10 janvier 2013, a pris soin de préciser qu'il agissait « sans aucune approbation préjudicielle dudit appel mais au contraire sous réserve de développer tous moyens (…) », ayant elle-même conclu au fond le 29 janvier 2015 ; que ce bulletin du 22 février 2013 n'a donc pas eu pour effet de priver les parties de la possibilité d'accomplir des diligences et que la société Levo ne peut utilement en tirer argument ; que, par ailleurs, ce n'est pas sans pertinence que la société Invacare conteste l'effet interruptif de prescription de la simple communication, effectuée le 9 janvier 2015, d'un arrêt rendu le 30 octobre 2014 par la juridiction de Düsseldorf (et de sa traduction) en l'absence de conclusions notifiées dans le délai de péremption tendant à démontrer que cette pièce était de nature à faire progresser l'instance ;

1°) ALORS QUE, les parties n'ayant plus à accomplir de diligences de nature à faire progresser l'instance, le délai de péremption ne court plus à compter de la date de fixation de l'affaire pour être plaidée ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que, le 22 février 2013, l'affaire avait été fixée pour être plaidée, en sorte qu'à compter de cette date, le délai de péremption avait cessé de courir ; qu'en retenant, pour dire l'instance périmée à la date du 20 décembre 2014, que seules une diligence émanant d'une partie peut interrompre le délai de péremption, que malgré sa fixation pour être plaidée, l'affaire n'aurait pas été en état d'être jugée, les parties pouvant encore accomplir les diligences qui leur paraissaient utiles, et la société Levo ayant communiqué de nouvelles pièces le 9 janvier 2015 et pris de nouvelles conclusions au fond, le 29 janvier 2015, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 2, 386 et 912, alinéa 2, du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, dans la procédure avec représentation obligatoire devant la cour d'appel, l'affaire est en état d'être jugée lorsque le conseiller de la mise en état fixe la date de la clôture et celle des plaidoiries ; qu'il résulte de l'avis de fixation du 22 février 2013 que le conseiller de la mise en état avait fixé la date de la clôture et celle des plaidoiries sans fixer de calendrier pour de nouveaux échanges de conclusions ; qu'en retenant néanmoins que l'affaire n'aurait pas, alors, été en état d'être jugée, dès lors qu'elle avait été appelée à une audience de mise en état du 20 mars 2014 pour « avancement éventuel du calendrier », refusé par les parties, lesquelles, avant la clôture, pouvaient encore accomplir des diligences, et que la société Levo avait ensuite communiqué de nouvelles pièces et pris de nouvelles conclusions au fond, la Cour d'appel a violé les articles 908, 909, 911 et 912 du Code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, dans la procédure avec représentation obligatoire devant la cour d'appel, l'affaire est en état d'être jugée lorsque le conseiller de la mise en état fixe la date de la clôture et celle des plaidoiries ; qu'en retenant que, malgré la fixation de la date de la clôture et de la date des plaidoiries par le conseiller de la mise en état, le 20 février 2013, l'affaire n'aurait pas été en état d'être jugée dès lors qu'elle avait été appelée à une audience de mise en état du 20 mars 2014 pour « avancement éventuel du calendrier », refusé par les parties, que ces dernières avaient tout latitude pour accomplir des diligences avant la clôture, et que la société Levo avait communiqué de nouvelles pièces et pris de nouvelles conclusions au fond au mois de janvier 2015, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le conseiller de la mise en état, ayant fixé la date de la clôture et la date des plaidoiries, ne s'était pas abstenu de fixer un calendrier pour de nouveaux échanges de conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 908, 909, 911 et 912 du Code de procédure civile ;

4°) ALORS QU'en tout état de cause, le délai de péremption est de deux ans ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le délai de péremption avait été interrompu par la liquidation, le 22 décembre 2012, de la société d'avoués représentant la société Levo Ag Wohlen, et qu'un nouveau délai de péremption avait commencé à courir le 10 janvier 2013, lors de la constitution, en ses lieu et place, d'un nouveau conseil ; qu'en retenant que la péremption était acquise à la date du 20 décembre 2014, quand ce nouveau délai ne pouvait expirer avant le 10 janvier 2015, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 386 du Code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE la communication de pièces complémentaires venant au soutien des demandes d'une partie qui a déjà conclu au fond peut constituer un acte interruptif de péremption, en l'absence même de nouvelles conclusions exposant les conséquences de ces pièces sur le litige ; qu'en retenant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 386 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-26083
Date de la décision : 16/12/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Instance - Péremption - Suspension - Délai - Point de départ - Détermination - Portée

APPEL CIVIL - Procédure avec représentation obligatoire - Péremption d'instance - Suspension - Délai - Point de départ - Détermination - Portée

En procédure d'appel avec représentation obligatoire, le délai de péremption de l'instance ne court plus à partir de la fixation de l'affaire pour être plaidée par le conseiller de la mise en état


Références :

articles 2 et 386 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 juillet 2015

A rapprocher :2e Civ., 15 mai 2014, pourvoi n° 13-17294, Bull. 2014, II, n° 112 (cassation), et les arrêts cités ;2e Civ., 16 décembre 2016, pourvoi n° 15-27917, Bull. 2016, II, n° ??? (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 déc. 2016, pourvoi n°15-26083, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: Mme Kermina
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.26083
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