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25/07/2019 | FRANCE | N°18BX02258

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 25 juillet 2019, 18BX02258


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la majoration de 40 % dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de prélèvement sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1600647, 1601732 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Pau a accordé à M. B...la décharge de la majoration de 40 % assortissant les cotisations supplémentaires d'imp

t sur le revenu auxquelles il a été assujetti.

Procédure devant la cour :

Par un ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la majoration de 40 % dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de prélèvement sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1600647, 1601732 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Pau a accordé à M. B...la décharge de la majoration de 40 % assortissant les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 5 juin 2018 et des mémoires enregistrés le 28 novembre 2018 et le 20 juin 2019, le ministre de l'action et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest) demande à la cour d'annuler ce jugement du 1er mars 2018 du tribunal administratif de Pau.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- M. B...s'est abstenu de déclarer la plus-value à long terme réalisée à l'occasion de la cession de son activité d'agent d'assurance ;

- or il ne pouvait ignorer le caractère imposable de la plus-value réalisée et l'importance tant de la minoration du revenu imposable que des droits éludés ; il a sciemment manqué à ses obligations déclaratives ;

- la mention de la plus-value sur la déclaration catégorielle de revenus non commerciaux ne permet pas de regarder l'absence de report sur la déclaration d'ensemble des revenus comme une erreur involontaire dans la mesure où l'obligation déclarative était expressément mentionnée sur la déclaration de revenus non commerciaux, et ce quand bien même un délai de seize mois s'est écoulé entre le dépôt des deux déclarations ; agent d'assurance depuis 2002, il connaissait les règles fiscales et n'a pu manquer de s'interroger sur le suivi de la plus-value réalisée ; il s'est d'ailleurs abstenu de régulariser sa situation à réception de son avis d'imposition, à peu près similaire aux années précédentes, alors qu'il avait perçu un revenu exceptionnel de plus de trois fois l'ensemble de ses autres revenus ;

- l'intéressé avait déjà méconnu ses obligations déclaratives par le passé ;

- c'est donc à tort que le tribunal a estimé qu'il n'a pas délibérément cherché à se soustraire à l'impôt ;

- le jugement attaqué doit être interprété comme déchargeant également le contribuable de la majoration de 40 % assortissant les prélèvements sociaux, comme l'a confirmé le tribunal administratif par un jugement du 16 mai 2019 ; en conséquence, cette majoration doit être également rétablie.

Par un mémoire enregistré le 14 novembre 2018, M. B...conclut au rejet du recours et, par la voie de l'appel incident, demande la réformation du jugement du 1er mars 2018 en ce qu'il n'a pas fait intégralement droit à ses conclusions aux fins de décharge de la majoration de 40 % ayant assorti les cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti. Il demande en outre qu'une somme de 3 600 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- il a bien déclaré la plus-value sur la déclaration n° 2035, le mois suivant sa réalisation ; ce n'est qu'un an plus tard, lors du dépôt de sa déclaration d'ensemble, qu'il a omis de reporter ce montant dans la case prévue à cet effet ;

- l'administration n'établit pas sa mauvaise foi et l'intention délibérée d'éluder l'impôt ;

- le tribunal a omis de préciser dans son dispositif du jugement du 1er mars 2018 que la décharge prononcée porte également, nécessairement, sur la majoration de 40 % assortissant les suppléments de cotisations sociales et de contribution sur les hauts revenus.

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées par des courriers des 6 mars et 21 juin 2019 de ce que la cour était susceptible de relever d'office des moyens d'ordre public.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.

- et les observations formulées lors du premier audiencement de l'affaire, le 20 mai 2019 par M.C..., représentant le ministre de l'action et des comptes publics, et par MeA..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B...a exercé à titre individuel la profession d'agent d'assurance jusqu'au 13 janvier 2012, date à laquelle il a fait apport de son activité à la SARL BRT Assur, réalisant une plus-value d'un montant de 409 677 euros. Lors du contrôle de sa déclaration de revenus établie au titre de l'année 2012, l'administration a constaté que M. B...avait omis de déclarer cette plus-value. Après rectification, il en est résulté pour l'intéressé des rehaussements d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et de contribution sur les hauts revenus. Les droits rappelés ont été assortis de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts. M.B..., qui a contesté en vain auprès de l'administration l'application de cette majoration, en a demandé la décharge au tribunal administratif de Pau.

2. Celui-ci, par un jugement du 1er mars 2018, a estimé que l'administration n'apportait pas la preuve d'un manquement délibéré de la part du contribuable et lui a accordé en conséquence une décharge. Si le dispositif du jugement n'évoque cette décharge qu'en ce qui concerne la majoration de 40 % assortissant les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, il y a cependant lieu de la regarder comme s'appliquant également aux suppléments de prélèvements sociaux notifiés à M. B..., ainsi qu'il le demande et comme l'a d'ailleurs confirmé le tribunal administratif dans un jugement en interprétation du 16 mai 2019. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 1er mars 2018 ainsi interprété, en tant qu'il prononce cette décharge. Par la voie de l'appel incident, M. B...sollicite la réformation de ce même jugement en ce qu'il n'a pas fait intégralement droit à ses conclusions aux fins de décharge de la majoration visée à l'article 1729 du code général des impôts.

Sur la recevabilité de l'appel incident :

3. Des conclusions incidentes portant sur une pénalité qui assortit une imposition différente de celle sur laquelle porte l'appel principal soulèvent un litige distinct et ne sont, dès lors, pas recevables après l'expiration du délai d'appel.

4. En l'occurrence, le tribunal administratif, ainsi qu'il a été dit, a accordé au contribuable la décharge de la majoration de 40 % assortissant les seuls rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, et a rejeté le surplus de sa demande. Il est constant que, dans le délai de deux mois qui a couru à compter de la notification du jugement, M. B... n'a pas formé un appel contre le jugement en tant qu'il lui est défavorable, ainsi qu'il lui était loisible de le faire. Aussi, en vertu de ce qui a été dit au point 3, l'appel incident formé par M. B...dans son mémoire enregistré devant la cour le 14 novembre 2018, en ce qu'il vise à la décharge de la majoration ayant assorti la contribution sur les hauts revenus, est irrecevable et doit être rejeté.

Sur l'appel principal :

5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

6. Pour justifier l'application de la majoration prévue par les dispositions précitées, l'administration a relevé que M. B...s'est abstenu de déclarer la plus-value de cession de son activité d'agent d'assurance lors du dépôt de sa déclaration globale de revenus de l'année 2012, puis de régulariser sa situation après l'envoi de l'avis d'imposition émis le 31 juillet 2013, alors que, compte tenu de l'importance de la majoration de ses revenus résultant de cette plus-value, il n'a pu commettre de bonne foi une erreur sur ses obligations déclaratives et fiscales. Ce faisant, ainsi que le soutient le ministre, l'administration établit le caractère délibéré du manquement. La circonstance que le contribuable a déclaré la plus-value sur le formulaire n° 2035 afférent aux revenus non commerciaux, retenue par le tribunal pour accorder à M. B...la décharge de la majoration litigieuse, n'est pas de nature à traduire l'absence d'intention de sa part d'éluder l'impôt dès lors qu'il n'a pas reporté ladite plus-value sur le formulaire de déclaration n° 2042 C dans la rubrique prévue à cet effet alors même qu'il avait été informé de cette obligation par les mentions de la déclaration 2035, que ses revenus de l'année 2012 ont été portés par l'effet de la plus-value à un montant plus de trois fois supérieur à ceux perçus au cours des années antérieures, que l'intéressé, professionnel avisé, n'a pu manquer de s'interroger sur le traitement fiscal de ce revenu exceptionnel et que, pour autant, il s'est abstenu de toute déclaration rectificative, y compris après notification de l'avis d'imposition pour 2012. Par suite, l'administration a appliqué à bon droit aux rappels d'impôt assignés à M. B...la majoration de 40 % prévue au a) de l'article 1729 du code général des impôts.

7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a accordé à M. B... la décharge de la majoration de 40 % assortissant les rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui lui ont été assignés au titre de l'année 2012 à raison de la réintégration de la plus-value de cession de son activité d'agent d'assurance.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1600647, 1601732 du 1er mars 2018 du tribunal administratif de Pau, interprété comme accordant à M. B...une décharge de la majoration de 40 % assujettissant les rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux notifiés au titre de 2012, est annulé.

Article 2 : La majoration de 40 % assortissant les rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux assignés à M. B...au titre de l'année 2012 est remise à sa charge.

Article 3 : Les conclusions d'appel de M. B...sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. D... B....

Délibéré après l'audience publique du 4 juillet 2019 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président-rapporteur,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 25 juillet 2019.

Le premier assesseur,

Florence MADELAIGUELe président-rapporteur,

Laurent POUGETLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 18BX02258


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02258
Date de la décision : 25/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-03 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations. Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. POUGET L.
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS QUESNEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-07-25;18bx02258 ?
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