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11/07/2019 | FRANCE | N°18VE02721

France | France, Cour administrative d'appel de Versailless, 7ème chambre, 11 juillet 2019, 18VE02721


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS SOCIETE NOUVELLE CAP MANAGEMENT (SNCM) a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'année 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1308441 du 8 octobre 2015, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15VE03250 du 28 février 2017, la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société SNCM contre ce jugement.

Par une

décision n° 410166 du 26 juillet 2018, le Conseil d'État a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS SOCIETE NOUVELLE CAP MANAGEMENT (SNCM) a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'année 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1308441 du 8 octobre 2015, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15VE03250 du 28 février 2017, la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société SNCM contre ce jugement.

Par une décision n° 410166 du 26 juillet 2018, le Conseil d'État a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Versailles.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 23 octobre 2015 et 14 avril 2016, et, après cassation, les 22 octobre et 3 décembre 2018, la SAS SOCIETE NOUVELLE CAP MANAGEMENT, représentée par la société d'avocats Walter et Garance Avocats, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1308441 du 8 octobre 2015 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

LA SAS SOCIETE NOUVELLE CAP MANAGEMENT soutient que :

- les titres apportés par M. A...doivent être inscrits à l'actif de son bilan à leur valeur d'apport ;

- la minoration d'un apport est sans incidence sur la détermination du bénéfice imposable ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'existence d'une libéralité.

.................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Tronel,

- et les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public.

1. Il résulte de l'instruction que dans le cadre de la restructuration du groupe à la tête duquel la SAS SOCIETE NOUVELLE CAP MANAGEMENT (SNCM) est placée, M. A... a apporté à cette société, le 4 février 2008, les 1 319 titres sociaux qu'il détenait dans la société Cap Management, correspondant à la moitié du capital social de cette dernière, dont il était également l'un des gérants. Conformément au protocole d'accord conclu le 2 octobre 2007 entre les actionnaires des sociétés parties au processus de restructuration, ces titres ont été évalués forfaitairement pour un montant de 500 000 euros et ont été inscrits pour cette valeur à l'actif du bilan de la société bénéficiaire. À la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a estimé que cet apport avait été sous-évalué, au regard du prix de 1 387 400 euros payé par la société requérante, le 7 mars 2008, pour l'acquisition auprès de M. B... des 1 319 autres titres de la société Cap Management, auquel s'était ajouté un complément de prix, d'un montant de 550 000 euros, payé en 2009. Compte tenu de la discordance constatée entre la valeur d'apport des titres de M. A... et le coût d'acquisition des titres détenus par M. B..., elle a regardé cette opération comme une acquisition à titre gratuit, constitutive d'un gain à concurrence de la somme résultant de cette discordance, soit 1 437 400 euros. Elle a, par conséquent, assujetti la société SNCM à un rehaussement d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008, procédant de la réintégration de cette somme dans ses bénéfices sur le fondement du 2 de l'article 38 du code général des impôts. Saisi par la société, par un jugement n° 1308441 du 8 octobre 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de décharge de ces cotisations supplémentaires. Par un arrêt n° 15VE03250 du 28 février 2017, la Cour administrative d'appel de Versailles, a rejeté l'appel formé par la société contre le jugement du 8 octobre 2015 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise. La société s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la Cour. Par une décision du 26 juillet 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles et lui a renvoyé l'affaire, où elle a été enregistrée sous le n° 18VE02721.

2. A l'appui de sa requête, la SAS SNCM soutient, d'une part, que les titres apportés par M. A...doivent être inscrits à l'actif de son bilan à leur valeur d'apport, d'autre part que la minoration d'un apport est sans incidence sur la détermination du bénéfice imposable et enfin que M. A...ne lui a consenti aucune libéralité.

3. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôts sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés (...) ". Aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. Cette valeur d'origine s'entend : a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux, du coût d'acquisition (...) b. Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale ; c. Pour les immobilisations apportées à l'entreprise par des tiers, de la valeur d'apport (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que si les opérations d'apport sont, en principe, sans influence sur la détermination du bénéfice imposable, tel n'est toutefois pas le cas lorsque la valeur d'apport des immobilisations, comptabilisée par l'entreprise bénéficiaire de l'apport, a été volontairement minorée par les parties pour dissimuler une libéralité faite par l'apporteur à l'entreprise bénéficiaire. Dans une telle hypothèse, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine des immobilisations apportées à l'entreprise pour y substituer leur valeur vénale, augmentant ainsi l'actif net de l'entreprise dans la mesure de l'apport effectué à titre gratuit. La preuve d'une telle libéralité doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien apporté et, d'autre part, d'une intention, pour l'apporteur, d'octroyer et, pour la société bénéficiaire, de recevoir une libéralité du fait des conditions de l'apport. Cette intention est présumée lorsque les parties sont en relation d'intérêts.

4. Ainsi qu'il a été exposé au point 1, la valeur d'apport des 1 319 titres de M. A...a été forfaitairement évaluée à 500 000 euros. Le prix d'acquisition par la société requérante des 1 319 autres titres détenus par M. B...s'est élevé à 1 387 400 euros auquel il faut ajouter le complément de prix de 550 000 euros, dans la mesure où il résulte de l'article 2 du protocole d'accord conclu le 2 octobre 2007 que ce complément de prix, versé en deux fois indépendamment des résultats à venir de l'entreprise, était ferme et certain dès la signature de ce protocole. Eu égard à la discordance constatée entre la valeur d'apport des titres de M. A... (500 000 euros) et le coût d'acquisition des titres détenus par M. B... (1 937 400 euros), l'administration établit l'existence d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale des titres apportés par M.A.... L'administration relève par ailleurs que M. A...est actionnaire de la société requérante à hauteur d'un tiers, à parts égales avec les deux autres actionnaires et qu'il est en outre son dirigeant. Elle démontre ainsi l'existence d'une relation d'intérêt présumant de l'intention libérale des parties.

5. Pour renverser cette présomption, la société requérante soutient que M. A...a bénéficié de contreparties dans la mesure où son apport s'est inscrit dans le contexte d'une restructuration qu'il a souhaitée en vue d'organiser le départ de la SARL Cap Management de son associé M.B..., avec lequel il ne s'entendait plus et qui exigeait pour le rachat de ses parts un prix excessif au regard de la situation de l'entreprise. La SAS SNCM relève que M. A... a dû trouver de nouveaux partenaires afin de pouvoir financer ce rachat, que son pouvoir de négociation était très restreint et que pour pérenniser l'activité de la société Cap Management, il a dû entrer dans le capital de la SAS SNCM à un niveau qui ne pouvait excéder le seuil d'un tiers imposé par ses nouveaux partenaires, correspondant à son apport de 500 000 euros. La société requérante produit, en outre, des courriels échangés en 2007 entre M. A...et M. B... ou des tiers dont les fonctions ne sont au demeurant pas toujours identifiées. Ces courriels font état d'une mésentente entre M. A...et M.B.... Il y est également indiqué que le prix proposé par celui-ci pour racheter ses parts dans la SARL aurait été surévalué. Ces éléments ne caractérisent pas l'existence d'une contrepartie accordée par la société requérante à M. A...pouvant justifier l'écart significatif entre la valeur des titres, fixée dans le protocole d'accord sus-évoqué et leur valeur vénale, ni, par voie de conséquence, l'intérêt du cédant à consentir un apport dans de telles conditions.

6. Il résulte de ce qui précède que l'administration apporte la preuve d'une libéralité faite par M. A...à la SAS SNCM à hauteur de 1 437 400 euros. Compte tenu de ce qui a été exposé au point 3, la société requérante est imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2008 à raison de ces sommes et les moyens susvisés qu'elle soulève doivent, par suite, être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS SOCIETE NOUVELLE CAP MANAGEMENT est rejetée.

2

N° 18VE02721


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Évaluation de l'actif.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. TRONEL
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : SELARL WALTER et GARANCE AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailless
Formation : 7ème chambre
Date de la décision : 11/07/2019
Date de l'import : 30/07/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18VE02721
Numéro NOR : CETATEXT000038809537 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailless;arret;2019-07-11;18ve02721 ?
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