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05/03/2015 | CANADA | N°2015_CSC_9

Canada | R. c. Grant


COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : R. c. Grant, 2015 CSC 9, [2015] 1 R.C.S. 475
Date : 20150305
Dossier : 35664

Entre :
Sa Majesté la Reine
Appelante
et
Mark Edward Grant
Intimé

Traduction française officielle

Coram : Les juges Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver, Karakatsanis, Wagner et Gascon

Motifs de jugement :
(par. 1 à 65)
La juge Karakatsanis (avec l'accord des juges Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver, Wagner et Gascon)




r. c. grant, 2015 CSC 9, [2015] 1 R.C.S. 475

Sa Majesté la Reine Appelante
c.
Mark Edward Grant Intimé
Répertorié : R. c. Grant
2015 CSC 9
N o du greffe : 35664.
20...

COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : R. c. Grant, 2015 CSC 9, [2015] 1 R.C.S. 475
Date : 20150305
Dossier : 35664

Entre :
Sa Majesté la Reine
Appelante
et
Mark Edward Grant
Intimé

Traduction française officielle

Coram : Les juges Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver, Karakatsanis, Wagner et Gascon

Motifs de jugement :
(par. 1 à 65)
La juge Karakatsanis (avec l'accord des juges Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver, Wagner et Gascon)




r. c. grant, 2015 CSC 9, [2015] 1 R.C.S. 475
Sa Majesté la Reine Appelante
c.
Mark Edward Grant Intimé
Répertorié : R. c. Grant
2015 CSC 9
N o du greffe : 35664.
2014 : 14 novembre; 2015 : 5 mars.
Présents : Les juges Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver, Karakatsanis, Wagner et Gascon.
en appel de la cour d'appel du manitoba
Droit criminel — Moyens de défense — Preuve — Admissibilité — Tiers suspect inconnu — Participation à l'enlèvement et au meurtre niée par l'accusé — Demande de l'accusé en vue de produire au procès la preuve qu'un tiers suspect inconnu aurait participé à un présumé enlèvement similaire que l'accusé n'aurait pas pu commettre — Conclusion du juge du procès, selon la prépondérance des probabilités, que le présumé enlèvement n'avait pas été commis, et refus par le juge d'admettre la preuve — Cadre permettant de déterminer l'admissibilité d'une preuve introduite par la défense concernant un tiers suspect inconnu — Mesure dans laquelle ce cadre oblige le juge du procès à examiner et apprécier la preuve de l'existence d'un tiers suspect inconnu.
En 2007, G a été accusé, sur la foi d'une preuve génétique récente, du meurtre au premier degré de D, un meurtre notoire non résolu. G a nié toute participation au meurtre et a cherché à produire une preuve portant à croire, du fait du modus operandi et d'autres éléments de preuve matérielle, que la personne qui avait enlevé D avait aussi enlevé W alors que G se trouvait sous garde.
Le juge du procès a estimé que le même critère juridique s'appliquait à l'admissibilité de la preuve d'un tiers suspect inconnu et à celle de la preuve d'un tiers suspect connu; il a donc conclu selon la prépondérance des probabilités que le présumé enlèvement de W n'avait pas été commis. Il a refusé d'admettre la preuve. Le jury a déclaré G coupable de meurtre au deuxième degré. La Cour d'appel du Manitoba a conclu que G aurait dû être autorisé à produire la preuve; elle a accueilli son appel et a ordonné la tenue d'un nouveau procès.
Arrêt : Le pourvoi est rejeté.
Les critères qui régissent la preuve d'un tiers suspect connu et la preuve de faits similaires peuvent donner un bon aperçu des préoccupations et des principes sous-jacents, mais ils devraient se limiter aux circonstances particulières auxquelles ils étaient censés s'appliquer. En fait, les premiers principes régissant l'admissibilité de la preuve établissent un juste équilibre entre les intérêts opposés qui sont soulevés lorsque la défense cherche à produire la preuve d'un tiers suspect inconnu.
La preuve présentée par la défense est admissible lorsque (1) cette preuve est pertinente à un fait en cause, et (2) ses effets préjudiciables ne l'emportent pas sensiblement sur sa valeur probante. Le juge du procès doit donc tout d'abord déterminer si la preuve est logiquement pertinente à l'égard d'un moyen de défense pouvant être invoqué. Lorsque la défense prétend qu'un tiers inconnu a commis le crime reproché, ce fondement factuel sera établi par l'existence d'un lien suffisant entre le crime pour lequel l'accusé est inculpé et l'incident que l'on dit être similaire et qui porte à croire que les crimes ont été commis par la même personne, conjugué à la preuve que l'accusé n'aurait pas pu commettre l'autre infraction. Une fois démontrée l'existence d'un lien suffisant, la preuve sera admissible à moins que ses effets préjudiciables l'emportent sensiblement sur sa valeur probante. Cette évaluation est intrinsèquement individualisée et permet de répondre aux divers degrés et aux diverses formes de préjudice. Elle n'exige pas que l'accusé satisfasse à un seuil d'admissibilité plus élevé ou que le juge entreprenne un exercice d'examen approfondi de la preuve. Le juge du procès ne doit pas s'immiscer dans la fonction du jury et déterminer la force probante de la preuve.
En l'espèce, le juge du procès a commis des erreurs de droit en considérant la preuve en lien avec le présumé enlèvement de W comme une preuve d'un tiers suspect connu et en obligeant G à établir selon la prépondérance des probabilités que W avait été enlevée. Ces erreurs autorisaient la Cour d'appel à effectuer sa propre appréciation de la preuve. La Cour d'appel pouvait conclure à l'existence d'éléments de preuve susceptibles d'amener le jury à conclure que le présumé crime contre W avait été commis et, compte tenu des similitudes, qu'il avait été commis par la même personne qui avait tué D. La preuve que G n'aurait pas pu commettre le crime contre W et la preuve des similitudes entre les deux infractions auraient fourni une preuve susceptible de donner de la vraisemblance au moyen de défense fondé sur un tiers suspect inconnu. Bien qu'une cour d'appel soit autorisée à se substituer au juge du procès si le dossier le permet, en l'espèce, la Cour d'appel n'était pas en mesure d'examiner et d'apprécier la portée de la valeur probante et la portée des effets préjudiciables de la preuve d'un tiers suspect inconnu. Les erreurs de droit du juge du procès n'étaient manifestement pas mineures et ne commandent pas l'application de la disposition réparatrice du sous-al. 686(1) b )(iii) du Code criminel . Le verdict n'aurait pas forcément été le même si le juge du procès avait appliqué les bons principes pour déterminer le critère d'admissibilité de cette preuve de la défense. Puisqu'un nouveau procès doit avoir lieu de toute façon, il est préférable de laisser au juge du procès le soin de mettre en balance la valeur probante et l'effet préjudiciable de la preuve.
Jurisprudence
Arrêt appliqué : R. c. Seaboyer , [1991] 2 R.C.S. 577; distinction d'avec l'arrêt : R. c. Handy , 2002 CSC 56, [2002] 2 R.C.S. 908; arrêts mentionnés : R. c. Grandinetti , 2005 CSC 5, [2005] 1 R.C.S. 27; R. c. L. (D.O.) , [1993] 4 R.C.S. 419; R. c. Corbett , [1988] 1 R.C.S. 670; R. c. Noël , 2002 CSC 67, [2002] 3 R.C.S. 433; Sweitzer c. La Reine , [1982] 1 R.C.S. 949; R. c. Harrer , [1995] 3 R.C.S. 562; R. c. Shearing , 2002 CSC 58, [2002] 3 R.C.S. 33; R. c. Arcangioli , [1994] 1 R.C.S. 129; R. c. Cinous , 2002 CSC 29, [2002] 2 R.C.S. 3; McMillan c. La Reine , [1977] 2 R.C.S. 824, conf. (1975), 7 O.R. (2d) 750; State c. Scheidell , 227 Wis.2d 285 (1999) ; United States c. Stevens , 935 F.2d 1380 (1991); Wiley c. State , 74 S.W.3d 399 (2002); United States c. McVeigh , 153 F.3d 1166 (1998); Caldwell c. State , 356 S.W.3d 42 (2011); Davis c. State , 413 S.W.3d 816 (2013); R. c. Arp , [1998] 3 R.C.S. 339; R. c. B. (C.R.) , [1990] 1 R.C.S. 717; R. c. Scopelliti (1981), 34 O.R. (2d) 524; R. c. Pollock (2004), 187 C.C.C. (3d) 213; R. c. Kendall (1987), 35 C.C.C. (3d) 105; R. c. Sims (1994), 28 C.R. (4th) 231; R. c. Hamilton , 2003 BCCA 490, 180 C.C.C. (3d) 80; R. c. Brousseau , 2006 QCCA 858; State c. Sullivan , 216 Wis.2d 768 (1998); R. c. Murphy , 2012 ONCA 573, 295 O.A.C. 281; R. c. Underwood , 2002 ABCA 310, 170 C.C.C. (3d) 500; R. c. Clarke (1998), 129 C.C.C. (3d) 1; R. c. Jackson , 2013 ONCA 632, 301 C.C.C. (3d) 358, conf. par 2014 CSC 30, [2014] 1 R.C.S. 672; R. c. C. (T.) (2004), 189 C.C.C. (3d) 473; R. c. Humaid (2006), 37 C.R. (6th) 347; R. c. Hart , 2014 CSC 52, [2014] 2 R.C.S. 544; R. c. Buzizi , 2013 CSC 27, [2013] 2 R.C.S. 248; R. c. Stinchcombe , [1991] 3 R.C.S. 326; R. c. Quesnelle , 2014 CSC 46, [2014] 2 R.C.S. 390; Housen c. Nikolaisen , 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235; R. c. Khelawon , 2006 CSC 57, [2006] 2 R.C.S. 787; R. c. Morin , [1988] 2 R.C.S. 345.
Lois et règlements cités
Code criminel , L.R.C. 1985, c. C-46 , art. 278.1 à 278.91 , 686(1) b )(iii).
Criminal Justice Act 2003 (R.-U.), 2003, c. 44, art. 100(1)(b), (3)(c), (d).
Doctrine et autres documents cités
Cross on Evidence , 9th Australian ed. by John D. Heydon, Chatswood (N.S.W.), LexisNexis Butterworths, 2013.
Phipson on Evidence , 18th ed. by Hodge M. Malek et al., London, Sweet & Maxwell, 2013.
POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel du Manitoba (le juge en chef Chartier et les juges Monnin et Hamilton), 2013 MBCA 95, 299 Man. R. (2d) 202, 590 W.A.C. 202, 302 C.C.C. (3d) 491, [2014] 2 W.W.R. 239, [2013] M.J. No. 322 (QL), 2013 CarswellMan 525 (WL Can.), annulant une déclaration de culpabilité pour meurtre au deuxième degré prononcée par le juge en chef adjoint Joyal et ordonnant la tenue d'un nouveau procès. Pourvoi rejeté.
Amiram Kotler et Rekha Malaviya , pour l'appelante.
Saul B. Simmonds , Vanessa Hébert et Laura Robinson , pour l'intimé.
Version française du jugement de la Cour rendu par
La juge Karakatsanis —
I. Introduction
[1] En 2007, l'intimé, Mark Edward Grant, a été accusé du meurtre au premier degré de Candace Derksen, un meurtre notoire non résolu commis à Winnipeg, au Manitoba, presque 23 ans auparavant. La preuve du ministère public reposait principalement sur l'analyse récente de petites quantités d'ADN trouvées sur les lieux du crime. Monsieur Grant a contesté la preuve génétique et a demandé à produire une preuve qui porterait à croire qu'un tiers suspect inconnu avait commis le crime. Le juge du procès a refusé d'admettre la preuve d'une infraction prétendument similaire commise quelques mois après le meurtre de M lle Derksen, alors que M. Grant était sous garde en lien avec une autre affaire [1] . Par la suite, le jury a déclaré M. Grant coupable de meurtre au deuxième degré. La Cour d'appel du Manitoba a conclu que M. Grant aurait dû être autorisé à produire la preuve. Elle a accueilli son appel et a ordonné la tenue d'un nouveau procès.
[2] En l'espèce, la Cour doit établir le cadre permettant de déterminer l'admissibilité d'une preuve introduite par la défense concernant un tiers suspect inconnu; elle doit aussi établir la mesure dans laquelle ce cadre oblige le juge du procès à examiner et apprécier la preuve.
[3] De toute évidence, l'identification d'un accusé comme auteur du crime reproché est essentielle pour établir la responsabilité criminelle. Il incombe directement au ministère public de prouver hors de tout doute raisonnable que le coupable est la personne traduite devant la cour. Conformément à la présomption d'innocence, l'accusé n'est jamais tenu de prouver son innocence. Le droit de l'accusé à une défense pleine et entière, garanti par la Charte , l'autorise à contester la preuve du ministère public et à produire des éléments de preuve afin de soulever un doute raisonnable quant à savoir si l'accusé a commis le crime.
[4] Toutefois, les droits de l'accusé ne sont pas les seuls intérêts en jeu. L'intégrité de l'administration de la justice exige que l'instance demeure axée sur le crime reproché et qu'elle ne se fractionne pas en plusieurs procès à l'intérieur d'un procès concernant des questions qui ne sont peut-être pas suffisamment reliées à l'affaire. Pareilles digressions risquent de causer des retards, de la confusion et des distractions qui minent la fonction de recherche de la vérité du procès. Ce risque est particulièrement élevé lorsque la défense cherche à introduire dans le procès d'autres présumés suspects ou crimes.
[5] Les parties conviennent que la mise en balance de ces intérêts oblige le juge du procès à apprécier la valeur probante de la preuve d'un tiers suspect inconnu produite par la défense au regard des risques élevés que cette preuve présente pour l'intégrité du procès, mais ne s'entendent pas sur les implications de cette appréciation. L'appelant, le service des poursuites du Manitoba (le ministère public), affirme que le juge du procès doit appliquer les critères stricts d'admissibilité élaborés à l'égard de la preuve d'un tiers suspect connu et de la preuve de faits similaires. La défense soutient que ces critères imposent un fardeau injuste à l'accusé et que les règles générales d'admissibilité traitent adéquatement de la pertinence, de la valeur probante et des effets préjudiciables.
[6] À mon sens, il est inutile de classer la preuve concernant un tiers suspect inconnu dans des catégories qui n'ont pas été adaptées pour elle. Les critères qui régissent la preuve d'un tiers suspect connu et la preuve de faits similaires peuvent donner un bon aperçu des préoccupations et des principes sous-jacents, mais ils devraient se limiter aux circonstances particulières auxquelles ils étaient censés s'appliquer.
[7] En fait, les premiers principes régissant l'admissibilité de la preuve établissent un juste équilibre entre les intérêts opposés qui sont soulevés lorsque la défense cherche à produire la preuve d'un tiers suspect inconnu. Dans de tels cas, la défense doit d'abord établir la pertinence logique de la preuve. Pour ce faire, elle peut établir entre le crime reproché et un autre crime que l'accusé n'aurait pas pu commettre un lien suffisant ― ou une similitude ― qui permet de déduire logiquement que la même personne a commis les deux crimes. Une fois cette condition préliminaire satisfaite, la preuve sera admissible à moins que ses effets préjudiciables l'emportent sensiblement sur sa valeur probante ( R. c. Seaboyer , [1991] 2 R.C.S. 577).
[8] En l'espèce, je conclus que le juge du procès a commis une erreur en évaluant et appréciant selon la prépondérance des probabilités la crédibilité de la preuve du tiers suspect inconnu. Je conviens avec la Cour d'appel que la tenue d'un nouveau procès est nécessaire.
II. Les faits
[9] Candace Derksen, une fille de 13 ans, a été portée disparue après avoir quitté l'école le vendredi 30 novembre 1984. Le 17 janvier 1985, son corps a été retrouvé ligoté dans une remise dans une cour d'usine. Elle est morte de froid.
[10] Au mois de mai 2007, M. Grant a été arrêté et accusé de meurtre au premier degré sur la foi d'une preuve génétique récente.
[11] Monsieur Grant a nié toute participation à l'enlèvement et au meurtre et a cherché à produire la preuve qu'un tiers suspect inconnu aurait pu commettre le crime. La preuve était liée au présumé enlèvement d'une fille de 12 ans (P.W.) après qu'elle eût quitté l'école le vendredi 6 septembre 1985, alors que M. Grant était sous garde. Monsieur Grant a fait valoir que le modus operandi et d'autres éléments de preuve matérielle portaient à croire que la même personne avait enlevé Candace Derksen et P.W.
A. La Cour du Banc de la Reine du Manitoba
[12] En examinant le cadre juridique applicable, le juge en chef adjoint Joyal de la Cour du Banc de la Reine a conclu que le critère juridique énoncé dans l'arrêt R. c. Grandinetti , 2005 CSC 5, [2005] 1 R.C.S. 27, s'applique autant à l'admissibilité de la preuve d'un tiers suspect inconnu qu'à celle de la preuve d'un tiers suspect connu. Ainsi, la preuve d'un tiers suspect inconnu pourrait être [ traduction ] « admise uniquement après qu'une preuve préliminaire ait établi un lien entre le tiers, connu ou non, et le crime soumis à l'examen du tribunal » (transcription du procès, d.a., vol. III, p. 48). Le juge du procès a également renvoyé à des arrêts de notre Cour portant sur la preuve de faits similaires et, spécifiquement, à R. c. Handy , 2002 CSC 56, [2002] 2 R.C.S. 908.
[13] Après examen de la preuve documentaire et testimoniale produite dans le cadre du voir-dire, le juge du procès a conclu qu'il n'était [ traduction ] « pas, même selon la prépondérance des probabilités, en mesure de conclure que la présumée infraction [à l'endroit de P.W.] a été commise » (d.a., vol. I, p. 8-9). Par conséquent, il a conclu qu'il ne pouvait y avoir de tiers suspect inconnu et qu'il n'y avait donc « aucune similitude utile » (p. 9). Le juge a conclu que la preuve n'était pas suffisamment probante pour justifier les effets que son admission aurait sur la durée et la complexité du procès et a ordonné que la défense ne fasse aucune mention de l'incident signalé par P.W.
B. La Cour d'appel du Manitoba, 2013 MBCA 95, 299 Man. R. (2d) 202
[14] Devant la Cour d'appel du Manitoba, M. Grant a interjeté appel de sa déclaration de culpabilité et a présenté une requête en production d'une nouvelle preuve liée à l'analyse génétique et à la partialité d'un juré. Après avoir rejeté plusieurs moyens d'appel liés à la déclaration de culpabilité, le juge Monnin, s'exprimant au nom de la cour, a conclu que le juge du procès avait commis une erreur en empêchant M. Grant de produire une preuve en lien avec un présumé tiers suspect inconnu (par. 9-10, 78).
[15] La Cour d'appel a conclu que le juge du procès avait tiré concernant les faits et la crédibilité des conclusions [ traduction ] « qu'il n'était pas habilité à tirer » lorsqu'il a déterminé l'admissibilité, et qu'il s'est fondé « presque exclusivement sur le témoignage de vive voix de P.W. en excluant tous les autres éléments de preuve à sa disposition, dont les deux déclarations antérieures de P.W. » (par. 68). Le juge du procès a commis une erreur en appliquant la norme de la prépondérance des probabilités pour déterminer si l'incident signalé par P.W. a eu lieu; il aurait dû plutôt appliquer le critère de l'arrêt Seaboyer qui régit de façon générale l'admissibilité de la preuve produite par la défense (par. 73-74). De plus, pour déterminer si la thèse de la défense était vraisemblable, il suffisait seulement de démontrer « l'existence d'une preuve » susceptible de semer dans l'esprit du jury un doute raisonnable quant à la culpabilité de l'accusé (par. 68).
[16] La Cour d'appel a indiqué que la preuve présentée en l'espèce [ traduction ] « ressemblait davantage à une preuve de faits similaires » qu'à une preuve d'un tiers suspect connu (par. 72). Toutefois, la cour a conclu que le critère applicable à la preuve de faits similaires présentée par le ministère public ne s'applique pas lorsque cette preuve est présentée par un accusé; en fait, la preuve de faits similaires présentée par la défense est admissible à moins que ses effets préjudiciables l'emportent sensiblement sur sa valeur probante, conformément à l'arrêt Seaboyer .
[17] La Cour d'appel a conclu que la preuve en lien avec l'incident signalé par P.W. était [ traduction ] « très pertinente » et « indiquait la possibilité que la même personne qui a assassiné Candace Derksen ait enlevé P.W., si le jury estime que cet enlèvement a eu lieu » (par. 70). Comme M. Grant était sous garde au moment de l'incident signalé par P.W., cette preuve « pouvait permettre à un jury raisonnable et adéquatement informé de prononcer l'acquittement » ( ibid. ). La cour a conclu que, puisque les effets préjudiciables de la preuve ne l'emportaient pas sensiblement sur sa valeur probante, M. Grant aurait dû être autorisé à présenter au jury la preuve de l'incident signalé par P.W. (par. 78). La cour a indiqué que cette preuve était également pertinente pour apprécier la preuve de l'expert de la défense en matière d'ADN qui écartait M. Grant comme suspect. L'accusé n'a pas eu la possibilité de présenter une défense pleine et entière, et cette erreur de droit était suffisante pour annuler la déclaration de culpabilité et ordonner la tenue d'un nouveau procès.
III. Analyse
A. Les principes régissant l'admission d'une preuve présentée par la défense dans un procès criminel
[18] La fonction de recherche de la vérité du procès introduit un principe de base selon lequel tous les éléments de preuve pertinents sont admissibles ( R. c. L. (D.O.) , [1993] 4 R.C.S. 419; R. c. Corbett , [1988] 1 R.C.S. 670). La preuve est logiquement pertinente lorsqu'elle tend à établir ou à réfuter un fait en cause ( Corbett , p. 715).
[19] Toutefois, les éléments de preuve pertinents ne sont pas tous admissibles. Le juge du procès doit également mettre en balance la valeur probante de l'élément de preuve et les effets préjudiciables qui pourraient découler de son admission ( R. c. Noël , 2002 CSC 67, [2002] 3 R.C.S. 433; Corbett ; Sweitzer c. La Reine , [1982] 1 R.C.S. 949; Seaboyer ; R. c. Harrer , [1995] 3 R.C.S. 562). La preuve présentée par le ministère public sera exclue si ses effets préjudiciables l'emportent sur sa valeur probante ( Seaboyer ). Lorsque la preuve est présentée par la défense, la présomption d'innocence de l'accusé amène la Cour à établir un équilibre différent. Comme notre Cour l'a expliqué dans l'arrêt Seaboyer , « [l]e juge ne pourra [. . .] écarter une preuve pertinente relativement à une défense autorisée par une règle de droit que dans le cas où l'effet préjudiciable de cette preuve l'emporte sensiblement sur sa valeur probante » (p. 611; voir aussi R. c. Shearing , 2002 CSC 58, [2002] 3 R.C.S. 33; R. c. Arcangioli , [1994] 1 R.C.S. 129).
[20] Pour que le juge puisse soumettre un moyen de défense à l'appréciation du jury, l'accusé doit signaler les éléments de preuve au dossier indiquant que le moyen de défense est vraisemblable ( R. c. Cinous , 2002 CSC 29, [2002] 2 R.C.S. 3). Le juge du procès doit déterminer s'il existe une preuve « raisonnablement susceptible d'étayer les inférences requises pour que le moyen de défense invoqué soit retenu » ( ibid. , par. 83). Le critère de la vraisemblance s'applique à tous les moyens de défense et agit comme condition préliminaire pour assurer que les moyens de défense « farfelus ou tirés par les cheveux » soient soustraits à l'appréciation du juge des faits (par. 84). Lorsqu'il applique ce critère, le juge du procès doit admettre la véracité de la preuve et s'abstient d'examiner la crédibilité ou de tirer des conclusions de fait (par. 54).
[21] Ces principes sont distincts mais peuvent être interreliés. Dans la plupart des cas, lorsque la preuve que soulève la défense a trait aux faits sur lesquels repose l'infraction reprochée, la pertinence de la preuve au plan de la logique et son admissibilité seront évidentes. Toutefois, lorsque la preuve a trait à un cadre factuel sans lien avec l'infraction reprochée, sa pertinence en rapport avec un fait en cause ou un moyen de défense possible peut s'avérer moins évidente. Dans ces cas, le rôle du juge du procès à titre de gardien peut l'obliger à déterminer si la preuve présentée est logiquement pertinente et reliée à un moyen de défense vraisemblable. Par exemple, bien que le degré de similitude puisse être logiquement pertinent à la question de savoir si la même personne a commis l'infraction, il n'aura pas de lien avec un fait en cause au procès sauf si le moyen de défense soulevé est vraisemblable. En l'espèce, la défense fondée sur l'existence d'un tiers suspect inconnu ne sera pas vraisemblable sans une preuve que l'accusé n'aurait pas pu commettre l'autre infraction. Ainsi, la pertinence au plan de la logique sera parfois examinée en rapport avec la question de savoir si la défense qu'appuie l'élément de preuve présenté peut être invoquée. Cela dit, le critère de la vraisemblance établi dans l'arrêt Cinous n'écarte pas le critère d'admissibilité établi dans l'arrêt Seaboyer . Le critère de la vraisemblance et le critère d'admissibilité de l'arrêt Seaboyer demeurent deux examens distincts.
[22] Ces principes sont fermement établis dans la jurisprudence de notre Cour et ne sont généralement pas contestés par les parties en l'espèce. Le différend concerne plutôt leur juste application à la preuve relative à un tiers suspect inconnu.
[23] Le ministère public fait valoir qu'il faut appliquer une version modifiée du cadre d'analyse retenu dans l'arrêt Seaboyer , qui incorpore divers aspects des critères régissant la preuve de faits similaires et la preuve d'un tiers suspect connu. Je ne suis pas d'accord. Comme je l'indique plus loin, ces critères sont conçus pour répondre aux risques et aux avantages précis que présentent des types de preuve en particulier . Lorsque la preuve n'entre pas dans ces catégories — lorsqu'elle ne présente pas ces risques et avantages précis ―, son admission est régie directement par les principes généraux d'admissibilité établis dans les arrêts Corbett et Seaboyer .
B. Le critère du tiers suspect connu ne fournit pas le bon cadre d'analyse pour déterminer la pertinence de la preuve d'un tiers suspect inconnu
[24] Pour que la preuve relative à un tiers suspect connu ait une quelconque valeur probante, elle doit démontrer l'existence d'un lien suffisant entre le tiers et le crime pour lequel l'accusé est inculpé ( Grandinetti , par. 47; McMillan c. La Reine , [1977] 2 R.C.S. 824). La défense invoque une telle preuve pour soulever un doute raisonnable qu'une autre personne a commis le crime en question. La preuve que cette autre personne avait le mobile et les moyens pour commettre le crime, ou qu'elle y était prédisposée, établira souvent ce lien suffisant.
[25] Comme l'a reconnu notre Cour dans l'arrêt McMillan , le critère du lien suffisant n'est rien de plus qu'une explication de l'analyse de la pertinence logique appliquée dans le contexte particulier d'allégations selon lesquelles une autre personne connue a commis le crime (p. 828-829). La juge Abella a confirmé ce point dans l'arrêt Grandinetti , où elle a écrit ce qui suit :
L'exigence d'un lien suffisant entre l'autre personne et le crime est essentielle. Faute d'un tel lien, l'élément de preuve offert n'a aucune pertinence ou valeur probante. L'élément peut reposer sur des inférences, mais celles-ci doivent être raisonnables au regard de la preuve et ne pas être spéculatives. [par. 47]
Faute d'un lien suffisant entre le tiers et le crime, la preuve d'un tiers suspect connu n'est tout simplement pas logiquement pertinente.
[26] Il n'existe aucun motif rationnel d'exiger que le lien soit établi par une preuve directement liée au tiers lorsque celui-ci est inconnu. Énoncer ainsi le critère ― conçu par exemple pour démontrer qu'un tiers connu avait un mobile, a eu l'occasion de commettre le crime et y était prédisposé ― imposerait à l'accusé un fardeau irréaliste. Comment l'accusé pourrait-il établir qu'une personne inconnue avait un mobile, qu'elle a eu l'occasion de commettre le crime ou qu'elle y était prédisposée? (Voir à ce sujet l'arrêt State c. Scheidell , 227 Wis.2d 285 (1999), par. 24-27.)
[27] Lorsque l'identité du tiers est inconnue, la nature du lien doit refléter un cadre factuel différent. Dans de telles circonstances, le lien suffisant ― pour ancrer la pertinence et la valeur probante de la preuve ― découle généralement des similitudes entre le crime reproché et un autre crime que l'accusé n'aurait pas pu commettre.
[28] Cette importance accordée aux similitudes entre les infractions ne constitue pas une formulation d'un critère catégorique nouveau. Elle reflète plutôt les principes sur lesquels repose l'arrêt Grandinetti qui s'appliquent de manière différente dans des contextes factuels différents. Tout comme la preuve d'un tiers suspect connu, [ traduction ] « en l'absence d'un quelconque lien avec l'infraction alléguée », la preuve d'un tiers suspect inconnu constituera de la pure spéculation ( R. c. McMillan (1975), 7 O.R. (2d) 750 (C.A.), p. 758, conf. par [1977] 2 R.C.S. 824). À moins que les circonstances de l'autre infraction et les similitudes présentes soient suffisantes pour donner à penser que la même personne a commis les deux crimes, la preuve d'un tiers suspect inconnu ne sera pas logiquement pertinente.
[29] Cela concorde avec les méthodes adoptées par d'autres pays de common law pour examiner la preuve de faits similaires présentée par la défense [2] .
[30] Le fait de conclure à la pertinence logique de la preuve ne met pas fin à l'examen de l'admissibilité. Même le critère du lien suffisant établi dans l'arrêt Grandinetti ne porte que sur l'aspect relatif à la valeur probante du critère établi dans l'arrêt Seaboyer . Une fois le critère de la pertinence satisfait, le juge du procès doit encore être convaincu que les effets préjudiciables de la preuve présentée par la défense ne l'emportent pas sensiblement sur sa valeur probante.
C. Le critère d'admissibilité de la preuve de faits similaires présentée par le ministère public ne s'applique pas à la preuve d'actes similaires d'une personne non accusée présentée par la défense
[31] La preuve de faits similaires est, le plus souvent, une preuve d'actes antérieurs répréhensibles de l'accusé présentée par le ministère public. La preuve de cette nature est présumée inadmissible, puisque ses effets très préjudiciables l'emportent généralement sur sa valeur probante ( R. c. Arp , [1998] 3 R.C.S. 339; Handy ). Comme l'a observé notre Cour dans l'arrêt R. c. B. (C.R.) , [1990] 1 R.C.S. 717, p. 732, présenter au jury la preuve que l'accusé a commis des « actes immoraux ou illégaux antérieurs » cause inévitablement un « préjudice grave » à l'accusé. La présomption d'inadmissibilité de cette preuve est liée tant à l'aspect moral de ce préjudice ― le danger que le juge des faits déclare l'accusé coupable à tort simplement afin de le condamner pour avoir commis des actes antérieurs répréhensibles ― qu'à l'aspect lié au raisonnement de ce préjudice ― le danger que le juge des faits se laisse influencer par la preuve d'actes répréhensibles similaires et lui accorde plus de poids qu'elle n'en mérite ( Handy , par. 139-147). Exceptionnellement, la preuve de faits similaires sera admise lorsque, compte tenu de la similitude entre les actes présumés, le ministère public « convain[c] le juge du procès, selon la prépondérance des probabilités, que [. . .] la valeur probante de la preuve relative à une question donnée l'emporte sur le préjudice qu'elle peut causer et justifie ainsi sa réception » ( Handy , par. 55). Lorsque le ministère public présente une preuve de faits similaires pour établir l' identité de l'auteur du crime , il doit convaincre le juge du procès, selon la prépondérance des probabilités, que « les actes similaires reprochés ont été commis par la même personne » ( Arp , par. 48).
[32] En plus d'appliquer le critère établi dans l'arrêt Grandinetti concernant les tiers suspects connus, le juge du procès en l'espèce a appliqué la norme de la « prépondérance des probabilités » pour déterminer si l'incident signalé par P.W. a vraiment eu lieu. Pour ce faire, il a fait référence au critère d'admissibilité applicable à la preuve de faits similaires présentée par le ministère public établi dans l'arrêt Handy . La Cour d'appel a conclu que la preuve en question était semblable [ traduction ] « à une preuve de faits similaires », mais a indiqué que, comme cette preuve est présentée par la défense, l'arrêt Seaboyer , et non l'arrêt Handy , régit son admissibilité (par. 73-74).
[33] Cette conclusion concorde avec la méthode retenue par les tribunaux d'appel canadiens lorsque l'on cherche à présenter une preuve de faits similaires d'une personne non accusée. Les tribunaux d'appel saisis de cette question ont systématiquement conclu qu'une telle preuve n'est pas régie par le critère applicable à la preuve d'actes similaires d'un accusé (voir, par exemple, R. c. Scopelliti (1981), 34 O.R. (2d) 524 (C.A.); R. c. Pollock (2004), 187 C.C.C. (3d) 213 (C.A. Ont.), par. 104; R. c. Kendall (1987), 35 C.C.C. (3d) 105 (C.A. Ont.); R. c. Sims (1994), 28 C.R. (4th) 231 (C.A.C.-B.); R. c. Hamilton , 2003 BCCA 490, 180 C.C.C. (3d) 80; R. c. Brousseau , 2006 QCCA 858).
[34] La preuve présentée par la défense concernant un tiers suspect inconnu constitue une preuve de faits similaires uniquement dans le sens où sa valeur probante découle de la similitude entre les incidents lorsqu'il est impossible que l'accusé ait commis l'infraction pour laquelle il n'est pas accusé. Un fardeau exigeant une preuve selon la prépondérance des probabilités n' est pas compatible avec le fardeau de présentation moins lourd qui incombe à l'accusé de soumettre un moyen de défense en présentant une preuve suffisante « [ qui] permettrait à un jury ayant reçu des directives appropriées et agissant raisonnablement de prononcer l'acquittement » ( Cinous , par. 49). Présumer l'inadmissibilité d'une telle preuve présentée par la défense imposerait à l'accusé le fardeau de prouver son innocence. Comme l'a relevé notre Cour dans l'arrêt Seaboyer , le critère applicable à la preuve présentée par la défense doit être assujetti au « principe fondamental de notre système judiciaire selon lequel une personne innocente ne doit pas être déclarée coupable » (p. 611).
[35] De plus, la preuve d'un tiers suspect inconnu ne risque pas de causer un préjudice moral à l'accusé. Pareille preuve se veut disculpatoire lorsqu'elle est invoquée par un accusé, comme c'était le cas en l'espèce. Bien que cette preuve suscite quelques-unes des mêmes préoccupations à l'égard du préjudice par raisonnement que la preuve d'actes antérieurs répréhensibles de l'accusé ( Arp , par. 40; Handy , par. 37), on peut redresser ce préjudice en appliquant directement le critère établi dans l'arrêt Seaboyer .
[36] En conclusion, la norme de la prépondérance des probabilités régissant l'admissibilité d'une preuve de faits similaires ne s'applique pas à la preuve d'un tiers suspect inconnu présentée par l'accusé. La similitude entre les actes démontre la pertinence de la preuve, mais le fait d'imposer à l'accusé le fardeau de satisfaire au critère établi dans l'arrêt Handy n'est ni conforme à la présomption d'innocence, ni nécessaire pour protéger l'accusé d'un préjudice moral. Il convient d'examiner la question du préjudice par raisonnement ou du risque à l'intégrité du procès que suscite cette preuve en appliquant directement le cadre d'analyse prévu dans l'arrêt Seaboyer .
D. Le critère établi dans l'arrêt Seaboyer s'applique à l'admission de la preuve d'un tiers suspect inconnu
[37] À mon sens, le meilleur moyen pour déterminer l'admissibilité de la preuve concernant un tiers suspect inconnu consiste à l'examiner en suivant la démarche plus large, fondée sur des principes, adoptée dans l'arrêt Seaboyer . Le fait d'évaluer l'admissibilité de cette preuve sur le fondement de l'arrêt Seaboyer , plutôt que par l'application de critères disparates qui ne tiennent pas compte de ses particularités, permet au juge du procès d'adapter au cadre factuel précis son évaluation et son appréciation de la valeur probante et des effets préjudiciables de la preuve. Conformément à l'arrêt Seaboyer , une fois qu'elle a été jugée pertinente, la preuve relative à un tiers suspect inconnu sera admise à moins que ses effets préjudiciables l'emportent sensiblement sur sa valeur probante.
[38] Comme je l'ai déjà dit, l'analyse fondée sur l'arrêt Seaboyer comporte deux volets. Premièrement, en appliquant l'arrêt Seaboyer , le juge du procès doit évaluer la valeur probante potentielle de la preuve. Lorsque la preuve a trait à un tiers suspect inconnu, la valeur probante dépendra en partie de la force du lien entre les deux événements ― c'est-à-dire le degré de similitude entre le crime dont la personne est accusée et l'incident que l'on dit être similaire. Comme la Cour suprême du Wisconsin l'a indiqué dans l'arrêt Scheidell , [ traduction ] « plus la similitude entre les événements est grande, et plus la complexité, la particularité et la fréquence relative des événements sont grandes, plus la balance penchera en faveur de l'admission » (par. 41, citant State c. Sullivan , 216 Wis.2d 768 (1998), par. 54).
[39] Deuxièmement, le critère fondé sur l'arrêt Seaboyer traite des effets préjudiciables potentiels de la preuve. La preuve d'un tiers suspect inconnu, comme la preuve de faits similaires présentée par le ministère public, présente un risque particulier de préjudice par raisonnement. Le fait d'introduire une preuve d'autres crimes suffisamment similaires au crime reproché peut risquer « d'empêcher les membres du jury de bien se concentrer sur l'accusation elle-même, [fait qui est] aggravé par le temps » ( Handy , par. 144).
[40] Toutefois, ces effets préjudiciables importants doivent néanmoins être évalués conformément aux principes fondamentaux qui régissent les poursuites criminelles. En conférant la protection constitutionnelle au droit de l'accusé à une défense pleine et entière, ainsi qu'à son droit d'être présumé innocent tant qu'il n'est pas déclaré coupable, nous devons accepter que le procès soit relativement complexe et long et que l'attention du jury risque d'être détournée de la preuve du ministère public. Il s'agit d'un compromis nécessaire à la matérialisation de ces droits. (Voir, par exemple, l'arrêt Scheidell , par. 65, le juge en chef Abrahamson, dissident quant au résultat.)
[41] Contrairement à ce qu'affirme le ministère public, appliquer l'arrêt Seaboyer ne fait pas [ traduction ] « reposer le critère d'admissibilité sur la question de savoir si le tiers est nommé ou non » (m.a., par. 44). La preuve d'un tiers suspect connu est déjà assujettie au critère d'admissibilité établi dans l'arrêt Seaboyer : les effets préjudiciables l'emportent-ils sensiblement sur la valeur probante? (Voir, par exemple, R. c. Murphy , 2012 ONCA 573, 295 O.A.C. 281 (preuve d'un tiers suspect); R. c. Underwood , 2002 ABCA 310, 170 C.C.C. (3d) 500 (preuve par ouï-dire d'un tiers suspect).) Certes, la preuve présentée par la défense est généralement assujettie à l'arrêt Seaboyer ( Shearing (contre-interrogatoire de la plaignante par la défense); R. c. Clarke (1998), 129 C.C.C. (3d) 1 (crédibilité de la plaignante); R. c. Jackson , 2013 ONCA 632, 301 C.C.C. (3d) 358, conf. par 2014 CSC 30, [2014] 1 R.C.S. 672 (condamnations criminelles de la victime décédée); R. c. C. (T.) (2004), 189 C.C.C. (3d) 473 (C.A. Ont.) (documents d'un tiers en la possession de l'accusé); Pollock (preuve de moralité d'un coaccusé); R. c. Humaid (2006), 37 C.R. (6th) 347 (C.A. Ont.) (preuve par ouï-dire de la défense); Hamilton (preuve de mauvaise moralité de la personne décédée)). Ainsi, alors que les principes de l'arrêt Seaboyer s'appliquent toujours, ils s'appliquent de manière différente dans des situations différentes.
[42] Comme le démontre cette analyse, bon nombre des préoccupations à l'origine des critères précis régissant l'admissibilité d'une preuve d'un tiers suspect connu et d'une preuve de faits similaires sont également examinées dans l'analyse fondée sur l'arrêt Seaboyer . Dans tous les cas, la preuve doit constituer plus que de simples spéculations ou conjectures. La valeur de la preuve doit être pondérée au regard des risques posés à l'intégrité du procès lorsqu'une partie cherche à élargir la portée du procès en y introduisant des personnes ou des événements qui ne sont pas directement liés au crime reproché.
E. Le rôle du juge du procès à titre de gardien de la preuve et le critère établi dans l'arrêt Seaboyer
[43] Le ministère public soutient que le juge du procès, à titre de gardien, doit examiner la qualité et la fiabilité de la preuve lorsqu'il évalue son admissibilité. Compte tenu des risques élevés que présente la preuve d'un tiers suspect inconnu, le ministère public plaide que la Cour d'appel a imprudemment imposé une condition préliminaire moins exigeante envers la preuve d'un tiers suspect en appliquant la norme de « l'existence d'une preuve » énoncée dans l'arrêt Cinous . Pour les motifs qui suivent, je ne saurais accepter cette affirmation.
[44] À titre de gardien de la preuve, le juge du procès joue un rôle fondamentalement important : il doit préserver tant le droit de l'accusé à une défense pleine et entière que l'intégrité du procès. Pour remplir cette mission, le juge du procès se livre à une appréciation limitée de la preuve pour s'assurer que le jury n'examine que la preuve (1) qui est pertinente à l'égard d'un fait en cause, y compris un moyen de défense pouvant être invoqué; et (2) dont les effets préjudiciables ne l'emportent pas sensiblement sur sa valeur probante. Ces examens se chevauchent souvent. Toutefois, le juge du procès n'est pas autorisé à s'immiscer dans la fonction du jury et à déterminer la force probante de la preuve ( R. c. Hart , 2014 CSC 52, [2014] 2 R.C.S. 544, par. 98).
[45] Le juge du procès doit déterminer si la preuve est logiquement pertinente à l'égard d'un moyen de défense pouvant être invoqué ― un moyen qui peut être soumis à l'appréciation du jury. Le critère de la vraisemblance oblige le juge du procès, tenant pour acquis le caractère très solide de la preuve proposée, à déterminer s'il pourrait exister au dossier « un fondement factuel qui permettrait à un jury convenablement instruit d'accueillir la défense » ( R. c. Buzizi , 2013 CSC 27, [2013] 2 R.C.S. 248, par. 16). Lorsque la défense prétend qu'un tiers inconnu a commis le crime reproché, ce fondement factuel sera établi par l'existence d'un lien suffisant entre le crime pour lequel l'accusé est inculpé et l'incident que l'on dit être similaire, conjugué à l'impossibilité que l'accusé ait commis l'autre infraction.
[46] Le juge du procès doit également examiner et pondérer l'étendue de la valeur probante et des effets préjudiciables de la preuve conformément à l'arrêt Seaboyer . Tout comme le critère de la « vraisemblance », le critère d'admissibilité établi dans l'arrêt Seaboyer ne permet pas au juge du procès de déterminer le poids qu'il convient d'accorder à la preuve ou de tirer des conclusions de fait. Il usurperait alors le rôle du jury et imposerait à l'accusé un fardeau de persuasion incompatible avec la présomption d'innocence.
[47] Le ministère public plaide que le préjudice important qui découle de la preuve relative à un tiers suspect inconnu exige que l'admissibilité du moyen de défense et sa présentation au jury soient assujetties à un seuil plus élevé. Cependant, le préjudice important n'exige pas un seuil plus élevé; il pèse simplement plus lourd dans la balance. Le critère d'admissibilité établi dans l'arrêt Seaboyer ne suppose pas que les effets préjudiciables ou la valeur probante de certaines catégories de preuve doivent atteindre un degré particulier; il oblige plutôt le juge du procès à effectuer une mise en balance contextuelle, fondée sur les particularités de la preuve dont il dispose. En tant qu'évaluation intrinsèquement individualisée, cette mise en balance permet de répondre aux divers degrés et aux diverses formes de préjudice. Aucun autre critère ni seuil plus élevé n'est requis pour protéger l'intégrité du procès.
[48] Il en est de même pour la condition préliminaire de « l'existence d'une preuve » utilisée dans le critère de la vraisemblance, laquelle, selon le ministère public, aurait été mal appliquée par la Cour d'appel en l'espèce. Cette norme n'impose pas indirectement une condition préliminaire moins exigeante relativement à la preuve d'un tiers suspect inconnu. En fait, lorsqu'appliquée conjointement avec l'exigence d'un lien suffisant entre les crimes, cette norme respecte les exigences des arrêts Corbett , Seaboyer et Cinous et établit un juste équilibre entre l'intégrité du procès et le droit de l'accusé à une défense pleine et entière.
[49] Contrairement à ce qu'affirme le ministère public, cette conclusion n'élargit pas la portée de ses éventuelles obligations de communication de la preuve, de sorte que le respect de ces obligations devienne impossible. Le ministère public reste tenu de communiquer à la défense tous les éléments de preuve pertinents ( R. c. Stinchcombe , [1991] 3 R.C.S. 326, p. 336-340). L'application du critère établi dans l'arrêt Stinchcombe dépend évidemment des circonstances de chaque cas et de chaque demande de communication.
[50] En l'espèce, la demande de communication était fondée sur les notes que l'enquêteur principal avait inscrites dans le dossier de la police sur le meurtre de M lle Derksen concernant un crime similaire (l'incident signalé par P.W.) qui avait [ traduction ] « fort probablement » un lien avec le meurtre de M lle Derksen (d.a., vol. II, p. 135). La preuve visée par la demande de communication était manifestement pertinente.
[51] Lorsque les similitudes ou les liens temporels ou géographiques entre le crime reproché et les crimes visés par la demande de communication sont insuffisants, la preuve ne sera pas pertinente et la communication ne sera pas requise. Permettre à la défense d'établir l'existence d'un lien suffisant en faisant référence aux crimes plutôt qu'au suspect n'élargit pas la portée de l'obligation de communication du ministère public.
[52] Cette conclusion ne compromet pas non plus la possibilité pour le ministère public de protéger les intérêts en matière de vie privée des personnes impliquées dans d'autres affaires criminelles ou la confidentialité des enquêtes en cours. Le critère de la communication demeure un critère de pertinence, et les mesures législatives qui limitent la communication pour protéger les intérêts en matière de vie privée des personnes impliquées dans des affaires criminelles continuent de s'appliquer (voir, par exemple, les art. 278.1 à 278.91 du Code criminel , L.R.C. 1985, c. C-46 ; R. c. Quesnelle , 2014 CSC 46, [2014] 2 R.C.S. 390). De plus, le ministère public exerce un pouvoir discrétionnaire quant à la forme et au moment de la communication, ce qui lui permet de retarder la communication afin d'assurer la sécurité des personnes impliquées dans une enquête en cours ( Stinchcombe , p. 339-340). Cette décision discrétionnaire, comme tous les autres exercices du pouvoir discrétionnaire du ministère public en matière de communication, doit être justifiée dans le cadre d'un contrôle judiciaire ( Stinchcombe , p. 340).
F. Résumé de l'analyse
[53] Pour résumer, tout risque élevé de préjudice qui survient lorsqu'un accusé cherche à introduire une preuve d'un tiers suspect inconnu n'exige pas que l'accusé satisfasse à un seuil d'admissibilité plus élevé ou que le juge procède à un examen approfondi de la preuve. Les règles actuelles établissent le juste équilibre permettant de maintenir l'intégrité du procès tout en protégeant le droit de l'accusé à une défense pleine et entière contre les accusations qui pèsent contre lui.
[54] Ainsi, la preuve présentée par la défense est admissible lorsque (1) elle est pertinente à un fait en cause; et (2) ses effets préjudiciables ne l'emportent pas sensiblement sur sa valeur probante. Lorsque le lien entre la preuve et un fait en cause au procès n'est pas évident, le critère de la vraisemblance peut aider le juge du procès à déterminer si la preuve tend à établir un moyen de défense qui pourra être invoqué. La preuve pertinente concernant un tiers suspect inconnu ne sera écartée que lorsque ses effets préjudiciables l'emportent sensiblement sur sa valeur probante.
G. Application aux faits
[55] Le juge du procès a commis une erreur de droit en considérant la preuve en lien avec l'incident signalé par P.W. comme une preuve d'un tiers suspect connu. Les liens qui rattachent un tiers connu au crime reproché ― en général le mobile, l'occasion et la propension ― ne conviennent pas au contexte d'un tiers suspect inconnu. Il a également commis une erreur en obligeant l'accusé à établir selon la prépondérance des probabilités qu'il y aurait eu un enlèvement. Il n'y a pas lieu d'imposer un tel fardeau de preuve à l'accusé lorsqu'il cherche à invoquer le moyen de défense fondé sur le fait qu'un tiers inconnu a commis le crime en question. Dans la mesure où le juge du procès a tiré des conclusions quant à la valeur probante et aux effets préjudiciables, ces conclusions sont intimement liées aux mauvais critères de pondération qu'il a appliqués, et on ne peut donc pas s'y fier.
[56] Ces erreurs autorisaient la Cour d'appel à effectuer sa propre appréciation de la preuve ( Housen c. Nikolaisen , 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235, par. 31-35). La cour a tenu compte du témoignage de vive voix de P.W. et de ses déclarations antérieures à la police, que le juge du procès avait acceptées (pour les besoins du voir-dire) comme faisant foi de leur contenu, conformément à l'arrêt R. c. Khelawon , 2006 CSC 57, [2006] 2 R.C.S. 787. La cour a également tenu compte d'autres déclarations qui avaient été admises au voir-dire comme faisant foi de leur contenu avec le consentement du ministère public, ainsi que d'autres éléments de preuve se rapportant à l'incident, dont les rapports de police dans lesquels on avait noté un lien possible entre l'incident signalé par P.W. et le meurtre de M lle Derksen.
[57] La Cour d'appel a conclu que la preuve était [ traduction ] « très pertinente » et que sa valeur probante découlait des similitudes frappantes entre le présumé enlèvement de P.W. et le crime pour lequel M. Grant est accusé. Dans les deux cas, les victimes avaient à peu près le même âge. Les deux victimes avaient quitté l'école au même moment de la journée, le même jour de la semaine, à neuf mois d'écart. Les deux avaient été laissées dans des bâtiments déverrouillés ressemblant à des remises dans le même secteur industriel de Winnipeg, à 2,6 kilomètres d'écart. Les deux victimes avaient été retrouvées mains et pieds ligotés avec des nœuds similaires. Dans aucun des cas, il n'y avait eu preuve d'agression physique ou sexuelle. Le même genre d'emballage de gomme a été trouvé sur les deux lieux du crime (quoique dans le crime reproché, il a été trouvé dans la poche de la victime, laissant croire qu'il aurait pu lui appartenir).
[58] Je ne saurais accepter l'affirmation du ministère public selon laquelle ces similitudes sont insuffisantes suivant tous les critères et que la preuve sur laquelle s'est fondée la Cour d'appel ne serait pas disponible au procès. Comme le ministère public ne peut se rétracter après avoir reconnu que les diverses déclarations étaient admissibles comme faisant foi de leur contenu afin de déterminer l'admissibilité de la preuve, la Cour d'appel pouvait se fonder sur cette preuve sur voir-dire lorsqu'elle a évalué sa valeur probante potentielle.
[59] La Cour d'appel pouvait conclure à l'existence d'éléments de preuve susceptibles d'amener le jury à estimer que le crime subséquent avait eu lieu et, compte tenu des similitudes, qu'il avait été commis par la même personne qui avait tué Candace Derksen. Comme la preuve indiquait que l'accusé n'aurait pas pu commettre l'autre crime, il existait une preuve susceptible de donner de la vraisemblance au moyen de défense fondé sur un tiers suspect inconnu.
[60] La Cour d'appel a appliqué l'arrêt Seaboyer de la manière suivante :
[ traduction ] Il reste à décider si cette preuve pertinente devrait être écartée parce que ses effets préjudiciables l'emportent sensiblement sur sa valeur probante. En l'espèce, le seul effet préjudiciable serait les répercussions qu'aurait eues cette preuve sur le déroulement du procès, lequel était déjà compliqué et long. Au vu de ses motifs, le juge était manifestement préoccupé par ces répercussions. À mon sens, cette préoccupation ne l'emportait pas sensiblement sur la valeur probante. [par. 78]
[61] L'arrêt Seaboyer oblige le tribunal à mesurer et à apprécier la portée de la valeur probante ainsi que la portée des effets préjudiciables de la preuve. De toute évidence, cet exercice de pondération est éminemment factuel et il vaut mieux que le juge du procès s'en charge. Les effets préjudiciables de cette preuve concernent principalement les répercussions sur la complexité, l'objet principal et la durée du procès. Dans une certaine mesure, le juge du procès peut établir un processus qui limitera ces effets préjudiciables. Toutefois, le juge du procès n'a pas examiné cette question en détail.
[62] Bien qu'une cour d'appel soit autorisée à se substituer au juge du procès si le dossier le permet, en l'espèce, la Cour d'appel n'était pas en mesure d'examiner et d'apprécier la portée de la valeur probante de la preuve d'un tiers suspect inconnu et la portée des effets préjudiciables de cette preuve.
[63] Les erreurs de droit du juge du procès n'étaient manifestement pas mineures et ne commandent pas l'application de la disposition réparatrice du sous-al. 686(1) b )(iii) du Code criminel . Le verdict n'aurait pas forcément été le même si le juge du procès avait appliqué les bons principes pour déterminer le critère d'admissibilité de cette preuve de la défense ( R. c. Morin , [1988] 2 R.C.S. 345, p. 374). Un nouveau procès doit avoir lieu de toute façon. Dans ces circonstances, il est préférable de laisser au juge du procès le soin de mettre en balance les facteurs énoncés dans l'arrêt Seaboyer .
[64] Devant notre Cour, M. Grant a également présenté une requête en présentation d'une nouvelle preuve concernant l'analyse génétique et la partialité d'un juré. Compte tenu de ma conclusion relative à l'admission de la preuve relative à un tiers suspect inconnu, il est inutile d'examiner cette requête.
IV. Dispositif
[65] Le pourvoi est rejeté, et la décision de la Cour d'appel du Manitoba d'ordonner la tenue d'un nouveau procès est confirmée.
Pourvoi rejeté.
Procureur de l'appelante : Procureur général du Manitoba, Winnipeg.
Procureurs de l'intimé : Gindin, Wolson, Simmonds, Roitenberg, Winnipeg.

[1] Transcription des motifs de jugements rendus de vive voix par le juge en chef adjoint Joyal (maintenant Juge en chef) de la Cour du Banc de la Reine du Manitoba, le 19 janvier 2011, d.a., vol. I, p. 90.
[2] En droit australien, la défense doit démontrer [ traduction ] « une similitude suffisante entre les deux actes pour permettre au jury de conclure qu'il est réellement possible que la même personne ait commis le crime » (J. D. Heydon, Cross on Evidence (9th Aust. 2013), p. 713). Au Royaume-Uni, la preuve de la mauvaise moralité d'une personne autre que le défendeur est admissible lorsque les similitudes donnent à la preuve une [ traduction ] « grande valeur probante » ( Criminal Justice Act 2003 (R.-U.), 2003, c. 44, al. 100(1)(b), (3)(c) et (d); H. M. Malek et autres, dir., Phipson on Evidence (18 e éd. 2013), par. 22-04, 22-24 à 22-27). De même, aux États-Unis, la jurisprudence fédérale et de certains États indique qu'une preuve d'actes similaires présentée par la défense sera admissible lorsqu'elle est [ traduction ] « suffisamment similaire au crime en question, de sorte qu'elle est pertinente » ( United States c. Stevens , 935 F.2d 1380 (3rd Cir. 1991), p. 1384; Scheidell , par. 39-41; Wiley c. State , 74 S.W.3d 399 (Tex. Crim. App. 2002), p. 406; United States c. McVeigh , 153 F.3d 1166 (10th Cir. 1998), p. 1191; Caldwell c. State , 356 S.W.3d 42 (Tex. Ct. App. 2011), p. 47 (citant Wiley et McVeigh ); Davis c. State , 413 S.W.3d 816 (Tex. Ct. App. 2013), p. 833 (citant Wiley )).


Synthèse
Référence neutre : 2015 CSC 9 ?
Date de la décision : 05/03/2015
Proposition de citation de la décision: R. c. Grant


Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2015
Fonds documentaire ?: Lexum
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;2015-03-05;2015.csc.9 ?

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