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18/12/1990 | FRANCE | N°89NC00916

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 18 décembre 1990, 89NC00916


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 5 décembre 1988 et 5 avril 1989 sous le n° 103650 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 31 janvier 1989 sous le n° 89NC00916 présentés pour M. Pierre X... demeurant ... - 51220 HERMONVILLE ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0310 en date du 4 octobre 1988 par lequel le tribunal administratif de CHALONS-SUR-MARNE a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de droit à la taxe sur la

valeur ajoutée d'un montant de 1 445 150 F auxquels il a été assujetti ...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 5 décembre 1988 et 5 avril 1989 sous le n° 103650 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 31 janvier 1989 sous le n° 89NC00916 présentés pour M. Pierre X... demeurant ... - 51220 HERMONVILLE ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0310 en date du 4 octobre 1988 par lequel le tribunal administratif de CHALONS-SUR-MARNE a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de droit à la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 1 445 150 F auxquels il a été assujetti pour la période allant du 1er avril 1979 au 31 mars 1982 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3°) d'ordonner une expertise ;
Vu la requête enregistrée le 1er septembre 1989 présentée pour M. X... tendant à ce qu'il soit ordonné par la Cour le sursis à exécution du jugement attaqué et des impositions en résultant ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 22 janvier 1990 présenté pour le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget, tendant :
1°) au rejet de la requête principale ;
2°) par la voie du recours incident, au rétablissement des pénalités de mauvaise foi pour les années 1980, 1981 et 1982 à concurrence respectivement de 81 403 F, 32 878 F et 37 492 F ;
Vu l'ordonnance du 27 janvier 1989 par laquelle le Président de la 8ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 04 décembre 1990 :
- le rapport de M. BONHOMME, Conseiller,
- et les conclusions de Mme FELMY, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X... a fait appel du jugement en date du 4 octobre 1988 par lequel le tribunal administratif de CHALONS-SUR-MARNE a rejeté partiellement sa demande en décharge des rappels de compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er avril 1979 au 31 mars 1982 ;
Sur la régularité de la procédure de vérification de comptabilité :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que conformément aux dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales, l'administration a adressé le 24 octobre 1983 à M. X... un avis l'informant qu'il allait faire l'objet d'une vérification de comptabilité et qu'en conséquence le vérificateur se présenterait le 10 novembre 1983 au siège de son principal établissement à CERNAY-LES-REIMS ; qu'à la suite d'une demande écrite de l'intéressé, le vérificateur a différé sa venue et s'est présenté pour la première fois le 15 novembre dans les locaux professionnels du comptable de M. X... ; que dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas disposé d'un délai suffisant pour présenter sa comptabilité et se faire assister d'un conseil ; que si un avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble (VASFE) lui a été également remis le jour du début de la vérification de comptabilité, il est constant que cette VASFE n'a, quant à elle, débuté qu'ultérieurement ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant a lui même demandé par écrit au vérificateur de procéder à ses contrôles dans les locaux de son comptable que dans ces conditions, ces locaux doivent être assimilés à ceux de l'entreprise et le requérant n'est dès lors pas fondé à prétendre, en se fondant sur les dispositions de l'article L.13 du L.P.F. en vertu desquelles les opérations de vérification de comptabilité doivent se dérouler au siège de l'entreprise vérifiée, que la consultation de la comptabilité de ses différentes activités dans les locaux de son comptable aurait contrevenu aux dispositions sus-mentionnées ;
Considérant, en troisième lieu, qu'au nombre des garanties que les contribuables tiennent des dispositions de l'article L.47 du L.P.F. figure la possiblité d'avoir sur place un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ; qu'il appartient au contribuable comme au vérificateur de favoriser l'instauration de ce dialogue ; que M. X... prétend n'avoir rencontré le vérificateur que le dernier jour des opérations de vérification de sa comptabilité ; que cependant cette allégation est contestée par l'administration qui fait valoir que si le vérificateur n'a procédé à l'examen de la comptabilité qu'en la présence du seul comptable du requérant l'absence de ce dernier durant les opérations du contrôle est imputable à son propre fait ; qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a cherché à avoir sur place un dialogue oral et contradictoire en demandant notamment à rencontrer personnellement M. X... ; qu'ainsi le moyen tiré de ce qu'il aurait été privé d'un débat oral et contradictoire doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le requérant n'établit pas qu'ainsi qu'il le soutient des pièces comptables auraient pu être emportées par le vérificateur ; que la circonstance que le vérificateur se soit vu remettre pendant 3 heures les clés du local où se trouvait la comptabilité du requérant ne peut être assimilée à un emport de document ; qu'ainsi le moyen tiré d'un emport irrégulier de documents doit être écarté ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L.51 du L.P.F. "Lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période." ; que ces dispositions n'ont pas pour objet d'enlever au service la faculté de réparer, à tout moment avant l'expiration du délai de répétition prévu par le code, les omissions ou erreurs apparues dans l'assiette de l'impôt, dès lors que celles-ci n'ont pas été découvertes à la suite d'une nouvelle vérification ; qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir procédé à la vérification de la comptabilité des activités commerciales du requérant du 17 novembre au 13 décembre 1983, l'administration lui a adressé des notifications de redressement en date des 12 décembre, 21 décembre 1983 et 13 février 1984 ; que le requérant expose que postérieurement à la vérification sus-invoquée, close par l'envoi de ces notifications de redressement, il aurait fait l'objet d'une deuxième vérification, ainsi qu'en attesterait l'envoi d'une nouvelle vérification de redressement datée du 4 mai 1989 ; que cependant, il ressort du dossier que le redressement complémentaire figurant dans cette notification n'est pas consécutif à une nouvelle vérification de comptabilité au sens des dispositions sus-rappelées de l'article L.51 du L.P.F., mais fait suite aux observations formulées par le requérant le 2 avril 1984, à l'exercice par le vérificateur du droit de communication auprès du principal client de l'entreprise et à un examen des pièces détenues par les services fiscaux ; que dès lors, M. X... n'est pas fondé à prétendre que la procédure serait irrégulière en raison de l'exécution d'une double vérification portant sur les mêmes impositions en méconnaissance des dispositions sus-rappelées de l'article L.51 du L.P.F. ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :

Considérant d'une part qu'aux termes de l'article L.75 du L.P.F. "Les bénéfices ou les éléments qui servent au calcul des taxes sur le chiffre d'affaires déclarés par les contribuables, peuvent être rectifiés d'office dans les cas suivant : a. En cas de défaut de présentation de la comptabilité ou des documents en tenant lieu ; b. Lorsque des erreurs, omissions ou inexactitudes graves et répétées sont constatées dans la comptabilisation des opérations effectuées par les contribuables ; c. Lorsque l'absence de pièces justificatives prive la comptabilité ou les documents en tenant lieu de toute valeur probante." ; qu'il résulte de l'instruction que la comptabilité tenue par M. X... pendant les quatre exercices litigieux ne comportait pas de livre d'inventaire à la date des opérations de vérifications ; que l'évaluation des travaux en cours à la fin de chaque exercice n'était assortie ni de pièces justificatives ni de précisions relatives à leur mode de détermination ; que les comptes clients comportaient de nombreuses inexactitudes ; qu'en outre, à partir de 1980, date à laquelle M. X... a adjoint à son activité principale de maçonnerie l'exploitation d'un bar brasserie, la détermination des stocks physiques des boissons du bar n'a pas été effectuée ; que la bande de la caisse enregistreuse dudit bar n'a pas été produite ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a estimé que la comptabilité du requérant pour l'ensemble des quatre années vérifiées n'était pas propre à justifier les résultats déclarés tardivement et qu'elle a rectifié d'office les bases d'imposition pour l'ensemble de la période ;
Considérant d'autre part que le contribuable dont les bénéfices ont ainsi été régulièrement rectifiés d'office n'est pas en droit de demander la saisie de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il ne peut obtenir la décharge ou la réduction des impositions contestées qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration ;
Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que le requérant se borne à contester le bien-fondé des impositions résultant des redressements affectant l'exploitation du bar-brasserie qu'il tenait à REIMS parallèlement à son entreprise de maçonnerie ; que la reconstitution du chiffre d'affaires de cet établissement, à laquelle s'est livrée l'administration a consisté à déterminer la marge brute globale pondérée en calculant le coefficient de marge brute propre à chaque boisson vendue au bar ; que, pour déterminer ces coefficients, le vérificateur a dépouillé de façon systématique les factures d'achats réalisés et a traduit en nombre de consommations les quantités par produits, en supposant à défaut d'inventaire physique, que tous les achats d'une année étaient consommés au cours de l'exercice ; que, pour fixer les coefficients, le vérificateur a tenu compte d'un taux de réfaction de 8 % au titre des offerts gratuits à la clientèle et des tarifs retenus au cours de la vérification ; que cette méthode ne peut être qualifiée de sommaire par le requérant ; que si celui-ci allègue, sans produire de justificatifs, que le taux des offerts était supérieur à 8 % et que les tarifs étaient inférieurs à ceux utilisés par le vérificateur, il ne prouve pas l'exagération des bases ainsi déterminées ; que par ailleurs, s'il se réfère aux coefficients multiplicateurs retenus par des monographies pour des débits de boisson du type de celui qu'il exploitait, cet élément d'appréciation ne saurait suffire en l'espèce pour établir le caractère exagéré des résultats reconstitués, dès lors que M. X... n'apporte pas d'éléments précis se rapportant aux conditions réelles d'exploitation de son établissement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit utile dans les circonstances de l'espèce d'ordonner une expertise, que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de CHALONS-SUR-MARNE a rejeté sa demande ;
Sur le recours incident du ministre du budget :
Considérant que par lettre des 17 mai 1984 et 5 juin 1984 le service a justifié l'application des sanctions fiscales pour mauvaise foi et manoeuvres frauduleuses par la nature même des infractions ; que le tribunal administratif a substitué à ces pénalités les intérêts de retard ; que le ministre, par la voie du recours incident, qui ne soulève pas de litige distinct, demande le rétablissement des majorations pour mauvaise foi en ce qui concerne les années non prescrites à la date de leur notification, en faisant valoir que la mauvaise foi du contribuable est établie en raison de la nature même des infractions ;
Considérant qu'il résulte du dossier que le requérant a sciemment et dans une proportion importante minoré les recettes déclarées et imputé dans le compte de l'entreprise des charges qui lui étaient étrangères ; que ce comportement est exclusif de la bonne foi ; que, par suite, il y a lieu de faire droit à la demande du ministre et de rétablir, en application des dispositions de l'article 1729 du C.G.I. les majorations pour mauvaise foi pour les impositions dues au titre de la période du 1er avril 1979 au 31 mars 1982 ;
Sur la demande de sursis à exécution :

Considérant que la Cour ayant statué sur le bien fondé de la requête de M. X..., il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution présentée par ce dernier ;
Article 1 : La requête de M. Pierre X... tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti en matière de T.V.A. est rejetée.
Article 2 : Les pénalités pour mauvaise foi sont remises à la charge de M. X... au titre de la période du 1er avril 1979 au 31 mars 1982.
Article 3 : L'article premier du jugement du tribunal administratif de CHALONS-SUR-MARNE est réformé en ce qu'il a de contraire aux dispositions de l'article II du présent arrêt.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution présentée par M. X.... DEBUT GROUPE
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre des finances, de l'économie et du budget, chargé du budget. FIN GROUPE


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 89NC00916
Date de la décision : 18/12/1990
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION DE COMPTABILITE


Références :

CGI 1729
CGI Livre des procédures fiscales L47, L13, L51, L75


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: BONHOMME
Rapporteur public ?: FELMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1990-12-18;89nc00916 ?
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