CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Murielle, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, du 15 mars 1990, qui, dans la procédure suivie contre Bernard Z..., définitivement condamné pour homicide involontaire, l'a déboutée de sa demande d'indemnisation.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 434-7 à L. 434-14, L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, 1382 du Code civil et 593 du Code de procédure pénale, violation de la loi, défaut et insuffisance de motifs, défaut de réponse à conclusions :
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Murielle X... de son action en réparation des préjudices moral et patrimonial qu'elle avait subis à la suite de l'accident mortel du travail dont avait été victime son concubin ;
" aux motifs que "le Tribunal a justement apprécié les éléments de la cause et plus particulièrement les éléments juridiques en décidant que la combinaison de l'article L. 451 du Code de la sécurité sociale qui prévoit qu'en matière d'accident du travail, l'action en réparation ne peut être exercée par la victime ou ses ayants droit conformément au droit commun et des articles L. 434-7 et suivants du même Code qui, ne qualifiant (sic) ni la concubine ni les frères et soeurs d'ayant droit, exclut de l'action en réparation la concubine et les frères et soeurs ; en l'espèce, il ne s'agit pas de l'interprétation de textes dont la rédaction est précise, qu'on ne saurait interpréter de façon extensive sans les dénaturer, le législateur ayant voulu à la fois limiter les bénéficiaires et les soumettre à une procédure dérogatoire au droit commun ; admettre l'action de la concubine devant la juridiction de droit commun en appliquant le système d'indemnisation visant l'épouse légitime aboutirait à donner à la concubine plus de droits qu'à l'épouse légitime alors qu'une modification législative incluant la concubine dans les bénéficiaires des articles L. 434-7 et suivants les mettrait en situation d'égalité. En ce qui concerne les frères et soeurs on ne peut qu'appliquer les mêmes arguments pour les débouter de leur action en réparation" ;
" alors que si en l'état actuel des dispositions combinées des articles L. 434-7 et suivants et L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, la concubine est exclue du bénéfice de l'indemnisation forfaitaire, en cas d'accident mortel du travail de son compagnon, l'indemnisation étant réservée aux seuls ayants droit de la victime tels qu'énumérés aux articles L. 434-7 à L. 434-14 dudit Code, il n'en résulte pas pour autant que le recours à l'action de droit commun pour la réparation de son préjudice personnel lui soit fermé ; qu'en décidant du contraire, la Cour a violé la loi par refus d'application ; "
Vu lesdits articles ;
Attendu que, selon l'article L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, en matière d'accident du travail seuls la victime ou ses ayants droit sont irrecevables à exercer contre l'employeur l'action en réparation de leur préjudice conformément au droit commun ;
Attendu qu'appelé à statuer sur les conséquences dommageables de l'accident du travail dont Bernard Z..., définitivement condamné pour homicide involontaire sur la personne de son préposé Philippe Y..., a été déclaré responsable, la cour d'appel était saisie, notamment, de la demande d'indemnisation de Murielle X... concubine de la victime ; que les juges du second degré, par les motifs reproduits au moyen, ont débouté cette partie civile de sa demande ;
Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte, alors que la concubine, qui ne figure pas parmi les bénéficiaires de prestations énumérés aux articles L. 434-7 à L. 434-14 du Code de la sécurité sociale, n'a pas la qualité d'ayant droit au sens de l'article L. 451-1 dudit Code, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes visés au moyen ;
Que la cassation est, dès lors, encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 15 mars 1990, mais en ses seules dispositions par lesquelles il a débouté la demanderesse de son action en réparation ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse.