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27/01/1995 | FRANCE | N°93PA01179

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 27 janvier 1995, 93PA01179


VU le recours présenté par le MINISTRE DU BUDGET, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT ; il a été enregistré au greffe de la cour le 4 octobre 1993 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 1er, 2, 3 et 5 du jugement n° 8904982/2 du 9 février 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 1982 et 1983, dans les rôles de la ville de Paris, la réduction de 42.800 F de sa base imposable de l'année 1981 et a condamné l'

Etat à lui verser une somme de 20.000 F en application des dispositions...

VU le recours présenté par le MINISTRE DU BUDGET, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT ; il a été enregistré au greffe de la cour le 4 octobre 1993 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 1er, 2, 3 et 5 du jugement n° 8904982/2 du 9 février 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 1982 et 1983, dans les rôles de la ville de Paris, la réduction de 42.800 F de sa base imposable de l'année 1981 et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 20.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) de rétablir Mme X... au rôle de l'impôt sur le revenu des années 1981 à 1983 à raison de l'intégralité des droits qui lui avaient été assignés, assortis des intérêts de retard ;
3°) d'ordonner le sursis à exécution de l'article 5 du jugement ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 13 janvier 1995 :
- le rapport de M. DUHANT, conseiller,
- et les conclusions de Mme BRIN, commissaire du Gouvernement ;

Sur la recevabilité du recours du ministre :
Considérant que par décret du 6 mars 1961, modifié en dernier lieu par décret du 21 décembre 1988, le directeur général des impôts a reçu, en toutes matières entrant dans ses attributions, délégation permanente de signature du ministre dont il relève pour la présentation des recours formés par l'administration devant le Conseil d'Etat ; que ce même décret l'autorise à déléguer cette signature à des fonctionnaires de ses services ayant au moins le grade d'administrateur civil de 2ème classe ou un grade équivalent ; que par un arrêté du 18 mars 1993 pris en application de ce décret et publié au Journal officiel du 28 mars 1993, le directeur général des impôts a donné délégation permanente de signature, pour tous les litiges intéressant la direction générale des impôts autres que ceux concernant le domaine, notamment à M. Y... ; qu'il n'est pas contesté que ce dernier a au moins un grade équivalent à celui d'administrateur civil de 2ème classe ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que M. Z... n'avait pas qualité pour signer le recours du ministre et que ce recours était par suite irrecevable ;
Sur le recours principal du ministre :
Considérant qu'aux termes de l'article L.16 du livre des procédures fiscales : "En vue de l'établissement de l'impôt, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements ... Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ..." ; qu'aux termes de l'article L.69 du même livre " ... sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications ainsi prévus ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X... n'a fait état dans ses déclarations d'aucune ressource imposable au titre de l'année 1981 et qu'elle a déclaré des revenus bruts de 85.000 F et 78.000 F respectivement au titre des années 1982 et 1983 ; que l'administration a constaté que les crédits inscrits sur ses comptes bancaires, abstraction faite des virements de compte à compte qui s'annulent, se montaient pour les mêmes années à 88.053 F, 99.805 F et 135.000 F ; que pour mettre en oeuvre, au titre desdites années, la procédure de demandes de justifications prévues à l'article L.16 du livre des procédures fiscales précité, le vérificateur a également établi, pour chacune des années en cause, des balances de trésorerie, lesquelles ont fait apparaître, respectivement, pour 1981, 1982 et 1983, des soldes créditeurs de 42.800 F, 94.200 F et 115.000 F ;
En ce qui concerne 1982 et 1983 :

Considérant qu'au titre des années 1982 et 1983 la discordance apparue entre les crédits bancaires et les revenus déclarés nettement inférieure au double n'autorisait pas l'administration à mettre en oeuvre la procédure d'interrogation susmentionnée ; que les soldes des balances de trésorerie, résultant essentiellement de la prise en compte de dépenses de train de vie, évaluées forfaitairement, réglées en espèces en sus de celles réglées par chèques, ne pouvaient être à elles seules regardées, compte tenu du caractère approximatif d'une telle évaluation, comme des éléments suffisants pour permettre d'établir que la contribuable pouvait avoir eu, pour les années en cause, des revenus plus importants que ceux qu'elle avait déclarés ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Paris a accordé à Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1982 et 1983 ;
En ce qui concerne 1981 :
Considérant qu'en l'absence de mentions dans la déclaration des ressources imposables, les crédits apparus sur les comptes bancaires autorisaient à eux seuls l'administration à mettre en oeuvre l'article L.16 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne tant les crédits bancaires que le solde de la balance des espèces établie par le vérificateur, celui-ci fût-il, quant à lui insuffisamment justifié comme ceux susrappelés des années postérieures ; que c'est par suite à tort que le tribunal administratif a estimé que la procédure ne pouvait être valablement mise en oeuvre qu'en ce qui concerne les crédits bancaires ; qu'il y a lieu pour la cour saisie par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés au titre de 1981 par Mme X... devant le tribunal administratif et devant la cour en tant qu'ils concernent ladite année ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que la requérante n'ayant pas répondu dans le délai de 30 jours à une demande de justifications du 16 janvier 1984 ne saurait utilement se prévaloir du caractère circonstancié de ses réponses qui auraient interdit au service de la taxer d'office sans poursuivre la procédure, alors même que celle-ci a été en fait poursuivie au-delà dudit délai de 30 jours ;
Considérant que s'agissant d'une taxation d'office au titre des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales, Mme X... ne peut utilement se prévaloir de l'insuffisante motivation de la réponse de l'administration à ses observations sur la notification de redressement ;
Considérant qu'ayant été ainsi régulièrement taxée d'office, il incombe à la requérante d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition litigieuses ;
Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'eu égard au caractère nécessairement approximatif de la balance des espèces seule établie par le vérificateur, la requérante établit, d'une part, que le poste "loisirs, vacances, week-ends" des disponibilités engagées doit être ramené de 30.000 F à 10.000 F compte tenu des modalités de ses vacances et loisirs auprès de parents et d'amis et de ses conditions de vie qui n'impliquaient pas les achats retenus par l'administration en "dépenses diverses" pour le montant qu'elle allègue ; que de même s'agissant de l'habillement eu égard à l'activité de son concubin, président-directeur général d'une entreprise de confection de vêtements et aux relations professionnelles et amicales que celle-ci implique, elle établit que l'évaluation de 7.000 F pour ses vêtements et ceux de son jeune enfant est exagérée et peut être ramenée à 2.000 F ; qu'elle justifie également de ce que le poste nourriture pour elle-même et l'enfant doit être raisonnablement ramené de 30.000 F à 15.000 F ; que dans ces conditions la discordance inexpliquée entre espèces engagées et dégagées s'établit à 3.000 F ; que compte tenu du caractère insignifiant de cette discordance et de celui, comme il a été dit, nécessairement approximatif de la technique de la balance des espèces, la requérante doit être regardée comme apportant la preuve que le solde créditeur de cette balance ne peut être pris en compte ;
Sur le recours incident de la requérante :
Considérant que Mme X... demande par la voie d'un recours incident, que la base d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'année 1980 soit diminuée de 30.000 F ; que ces conclusions sont étrangères aux conclusions du recours principal, qui concernent seulement les impositions des années 1981, 1982 et 1983 et ne sont pas, par suite, recevables ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à verser à Mme X... la somme de 5.000 F ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT est rejeté.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme X... la somme de 5.000 F.
Article 3 : Le recours incident de Mme X... est rejeté ainsi que le surplus de ses conclusions au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 93PA01179
Date de la décision : 27/01/1995
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ARTICLES L.16 ET L.69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES)


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L16, L69
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret du 06 mars 1961
Décret du 21 décembre 1988


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. DUHANT
Rapporteur public ?: Mme BRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1995-01-27;93pa01179 ?
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