La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/07/1998 | CJUE | N°C-287/96

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Kyritzer Stärke GmbH contre Hauptzollamt Potsdam., 16/07/1998, C-287/96


Avis juridique important

|

61996J0287

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 16 juillet 1998. - Kyritzer Stärke GmbH contre Hauptzollamt Potsdam. - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Agriculture - Organisation commune des marchés - Restitutions à la production - Régime des garanties

- Délais - Exigence principale - Exigence subordonnée. - Affaire C-287/9...

Avis juridique important

|

61996J0287

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 16 juillet 1998. - Kyritzer Stärke GmbH contre Hauptzollamt Potsdam. - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Agriculture - Organisation commune des marchés - Restitutions à la production - Régime des garanties - Délais - Exigence principale - Exigence subordonnée. - Affaire C-287/96.
Recueil de jurisprudence 1998 page I-04729

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

Agriculture - Organisation commune des marchés - Céréales - Riz - Restitutions à la production - Régime de cautionnement - Utilisation régulière d'un produit relevant du code NC 3505 10 50 - Obligation constituant une exigence principale - Délai de preuve du respect de l'exigence

(Règlements de la Commission n_ 2220/85, art. 20, § 2, 22, § 1 et 2, et 28, et n_ 1722/93, art. 10, § 1)

Sommaire

L'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1722/93, portant modalités d'application des règlements n_s 1766/92 et 1418/76 en ce qui concerne les restitutions à la production dans le secteur des céréales et du riz respectivement, doit être interprété de la façon suivante:

- l'utilisation d'un produit relevant du code NC 3505 10 50, prescrite par ce texte, et consistant soit en sa transformation subséquente en un produit autre que de l'amidon ou de la fécule, soit en son exportation vers un pays tiers, constitue une exigence principale au sens de l'article 20, paragraphe 2, du règlement n_ 2220/85, fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles;

- son respect doit être prouvé dans les délais fixés à l'article 28 dudit règlement, sous peine d'entraîner l'acquisition de la totalité de la garantie, en application de l'article 22, paragraphes 1 et 2, de ce règlement.

Parties

Dans l'affaire C-287/96,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par le Bundesfinanzhof (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Kyritzer Stärke GmbH

et

Hauptzollamt Potsdam,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation du règlement (CEE) n_ 2220/85 de la Commission, du 22 juillet 1985, fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles (JO L 205, p. 5), lu en combinaison avec le règlement (CEE) n_ 1722/93 de la Commission, du 30 juin 1993, portant modalités d'application des règlements (CEE) n_ 1766/92 et (CEE) n_ 1418/76 du Conseil en ce qui concerne les restitutions à la production dans le secteur des céréales et
du riz respectivement (JO L 159, p. 112),

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. C. Gulmann, président de chambre, M. Wathelet, D. A. O. Edward, P. Jann (rapporteur) et L. Sevón, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

considérant les observations écrites présentées:

- pour Kyritzer Stärke GmbH, par Me Barbara Festge, avocat à Hambourg,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Klaus-Dieter Borchardt, membre du service juridique, en qualité d'agent,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Kyritzer Stärke GmbH et de la Commission à l'audience du 22 janvier 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 19 mars 1998,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par ordonnance du 4 juillet 1996, parvenue à la Cour le 26 août suivant, le Bundesfinanzhof a posé, en application de l'article 177 du traité CE, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation du règlement (CEE) n_ 2220/85 de la Commission, du 22 juillet 1985, fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles (JO L 205, p. 5), lu en combinaison avec le règlement (CEE) n_ 1722/93 de la Commission, du 30 juin 1993, portant modalités
d'application des règlements (CEE) n_ 1766/92 et (CEE) n_ 1418/76 du Conseil en ce qui concerne les restitutions à la production dans le secteur des céréales et du riz respectivement (JO L 159, p. 112).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Kyritzer Stärke GmbH (ci-après «Kyritzer») au Hauptzollamt Potsdam (ci-après le «Hauptzollamt») à propos de la libération de garanties constituées dans le cadre de demandes de restitutions à la production d'amidon.

Sur la réglementation communautaire

Le règlement n_ 2220/85

3 Il ressort de l'article 1er du règlement n_ 2220/85 que ce dernier fixe les dispositions régissant les garanties à fournir en vertu, entre autres, des règlements portant organisation commune des marchés dans le secteur des céréales et du riz, respectivement, ainsi que des règlements d'application.

4 L'article 20 définit et classe, en fonction de leur importance, les différents types d'exigences que peuvent comprendre les obligations pour le respect desquelles ces règlements exigent la constitution d'une garantie. Ses paragraphes 1 à 5 sont ainsi libellés:

«1. Une obligation peut comprendre des exigences principales, secondaires ou subordonnées.

2. Une exigence principale est une exigence, fondamentale pour les objectifs du règlement qui l'impose, d'accomplir ou de ne pas accomplir un acte.

3. Une exigence secondaire est une exigence de respect d'un délai imparti pour respecter une exigence principale.

4. Une exigence subordonnée est toute autre exigence prévue par un règlement.

5. Le présent titre ne s'applique pas lorsque la réglementation communautaire spécifique n'a pas déterminé la ou les exigences principales.»

5 L'article 21 définit les conditions de la libération de la garantie en ces termes:

«Dès que la preuve prévue à cet effet a été fournie que toutes les exigences principales, secondaires et subordonnées ont été respectées, la garantie est libérée.»

Les articles 22 et 24 précisent les conséquences, sur la garantie, de la violation d'une exigence principale ou subordonnée. S'agissant d'une exigence principale, l'article 22, paragraphes 1 et 2, prévoit:

«1. Une garantie est acquise en totalité pour la quantité pour laquelle une exigence principale n'a pas été respectée...

2. Une exigence principale est considérée comme n'ayant pas été respectée si la preuve correspondante n'est pas produite dans le délai imparti pour la production de cette preuve...»

6 S'agissant d'une exigence subordonnée, l'article 24, paragraphe 1, dispose:

«1. Le non-respect d'une ou de plusieurs exigences subordonnées entraîne l'acquisition de 15 % de la partie concernée du montant garanti...»

7 En ce qui concerne les délais de production des preuves, l'article 28 prévoit:

«1. Si aucun délai n'est prévu pour la production des preuves nécessaires pour obtenir la libération d'une garantie, ce délai est de:

a) douze mois à partir du délai limite spécifié pour le respect de la ou des exigence(s) principale(s)

ou

b) si un tel délai n'est pas spécifié, douze mois à compter de la date à partir de laquelle la ou les exigence(s) principale(s) ont été respectées.

2. Le délai prévu au paragraphe 1 ne peut pas dépasser trois ans à compter de la date à laquelle la garantie a été affectée à l'obligation en cause, sauf cas de force majeure.»

Le règlement n_ 2169/86

8 Le règlement (CEE) n_ 2169/86 de la Commission, du 10 juillet 1986, déterminant les modalités de contrôle et de paiement des restitutions à la production dans les secteurs des céréales et du riz (JO L 189, p. 12), pris en application des règlements portant organisation commune des marchés dans ces secteurs, prévoit, en son article 7, paragraphe 1, que la délivrance d'un certificat de restitution est subordonnée à la constitution, par le fabricant, auprès de l'autorité compétente, d'une garantie
égale à 25 écus par tonne d'amidon ou de fécule de base, multipliée le cas échéant par le coefficient correspondant au type d'amidon ou de fécule à utiliser, qui figure à l'annexe. Le règlement (CEE) n_ 3642/87 de la Commission, du 2 décembre 1987, modifiant le règlement n_ 2169/86 (JO L 342, p. 10), a ajouté à cette disposition un nouvel alinéa, aux termes duquel: «Toutefois, lorsque le produit indiqué dans le certificat relève de la sous-position 39.06 B I du tarif douanier commun (NC 3505 10 50),
la garantie est égale à 105 % de la restitution à la production payable pour la fabrication du produit en question».

9 L'article 7, paragraphe 2, première phrase, du règlement n_ 2169/86 précise:

«L'exigence principale, au sens de l'article 20 du règlement (CEE) n_ 2220/85, est constituée par la transformation de la quantité de fécule ou d'amidon indiquée dans la demande en produits agréés ainsi définis dans les limites de la période de validité du certificat.»

10 L'article 7, paragraphe 4, du règlement n_ 2169/86, dans sa version résultant du règlement (CEE) n_ 165/89 de la Commission, du 24 janvier 1989, modifiant le règlement n_ 2169/86 (JO L 20, p. 14), soumet la libération de la garantie à une exigence supplémentaire lorsque le produit concerné relève du code NC 3505 10 50:

«Sans préjudice du paragraphe 2, la garantie visée au paragraphe 1, deuxième alinéa, n'est libérée que si l'autorité compétente a reçu la preuve attestant que le produit relevant du code NC 3505 10 50 a été

a) utilisé pour fabriquer des produits autres que ceux énumérés à l'annexe I, ou a été

b) exporté vers les pays tiers».

Le règlement n_ 1722/93

11 Le règlement n_ 1722/93, pris également en application des règlements portant organisation commune des marchés dans les secteurs des céréales et du riz, reprend, comme l'indique son treizième considérant, en les adaptant à la situation actuelle du marché, les dispositions du règlement n_ 2169/86, qu'il abroge.

12 L'article 8, paragraphe 1, subordonne la délivrance d'un certificat de restitution à la constitution par le fabricant, auprès de l'autorité compétente, d'une garantie égale à 15 écus par tonne d'amidon ou de fécule de base, multipliée, le cas échéant, par le coefficient correspondant au type d'amidon ou de fécule à utiliser, qui figure à l'annexe II.

13 En vertu de l'article 8, paragraphe 2, la libération de cette garantie se fait conformément aux dispositions du règlement n_ 2220/85, l'exigence principale, au sens de l'article 20 dudit règlement, étant constituée par «la transformation de la quantité de fécule ou d'amidon indiquée dans la demande en produits agréés ainsi définis dans les limites de la période de validité du certificat».

14 Lorsque le produit en cause relève du code NC 3505 10 50, l'article 9, paragraphe 2, impose la constitution d'une seconde garantie distincte, égale à la restitution payable pour la fabrication du produit en question.

15 L'article 10, paragraphe 1, subordonne la libération de cette garantie à la condition que soit rapportée la preuve attestant que ledit produit est:

«a) utilisé pour fabriquer à l'intérieur du territoire douanier de la Communauté des produits autres que ceux énumérés à l'annexe II

ou

b) exporté vers les pays tiers. En cas d'exportation directe vers un pays tiers, la garantie n'est libérée que lorsque l'autorité compétente a reçu la preuve que le produit en question a quitté le territoire douanier de la Communauté.»

16 Le règlement n_ 1722/93 est entré en vigueur le 1er juillet 1993. Son article 14, second alinéa, prévoit à titre de disposition transitoire:

«En vue de la libération de la garantie au titre des dispositions de l'article 7 du règlement (CEE) n_ 2169/86, les dispositions de l'article 10 s'appliquent également aux dossiers encore ouverts au moment de l'entrée en vigueur du présent règlement.»

Sur le litige au principal

17 Kyritzer transforme de l'amidon natif en produits agréés au sens des règlements concernant les restitutions à la production dans les secteurs des céréales et du riz et, notamment, en amidon estérifié. A ce titre, elle perçoit des restitutions à la production.

18 En décembre 1991 et en janvier 1992, Kyritzer a obtenu la délivrance de certificats de restitution concernant la production d'amidon estérifié relevant du code NC 3505 10 50, pour lesquels elle a constitué des garanties au titre de l'article 7, paragraphe 1, du règlement n_ 2169/86.

19 En janvier et février 1992, Kyritzer a déclaré la fabrication de certaines quantités d'amidon estérifié.

20 Toutefois, comme la preuve de l'utilisation régulière de ce produit, c'est-à-dire soit de sa transformation subséquente en un produit autre que de l'amidon ou de la fécule, soit de son exportation vers un pays tiers (ci-après l'«utilisation régulière»), n'a été rapportée que pour une partie seulement de ces quantités, le Hauptzollamt a, dans le courant du mois de mai 1995, déclaré partiellement acquises les garanties constituées par Kyritzer.

21 Le recours introduit par Kyritzer contre ces décisions a été rejeté par le Finanzgericht. Le Bundesfinanzhof, saisi dans le cadre d'un pourvoi en «Revision», a estimé que le règlement n_ 2220/85 était applicable. Toutefois, éprouvant des doutes quant aux dispositions de ce règlement qui régissent les garanties en question, il a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions suivantes:

«1) L'utilisation que les dispositions combinées de l'article 10, paragraphe 1, et de l'article 14, paragraphe 2, du règlement n_ 1722/93 prescrivent pour les produits de transformation relevant du code NC 3505 10 50 constitue-t-elle une exigence principale au sens de l'article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement n_ 2220/85, dont le respect doit être prouvé dans le délai fixé à l'article 28, paragraphe 2, du règlement n_ 2220/85 sous peine d'entraîner, en application de l'article 22, paragraphes 1
et 2, de ce règlement, l'acquisition de la garantie fournie?

2) Dans le cas où il serait répondu par la négative à la première question: peut-on, à défaut, déduire du droit communautaire applicable l'existence d'un délai avant l'expiration duquel il convient d'apporter la preuve que les produits de transformation ont été utilisés conformément aux dispositions de l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1722/93, avec pour conséquence que la garantie est acquise en tout ou partie (dans quelle mesure?) lorsque cette preuve est produite tardivement?»

Sur la première question

22 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance de quel type d'exigence relève l'obligation d'utilisation régulière prévue pour les produits relevant du code NC 3505 10 50 et dans quel délai doit être rapportée la preuve de son respect, ces éléments permettant de déterminer le sort des garanties constituées.

Sur la qualification de l'exigence litigieuse

23 Kyritzer fait observer que le sixième considérant du règlement n_ 2169/86 et le douzième considérant du règlement n_ 1722/93 relèvent expressément qu'il est nécessaire de définir, dans ces deux règlements, les exigences principales qui incombent aux producteurs et qui sont couvertes par la constitution d'une garantie. Or, s'il a institué un régime spécial pour les produits relevant du code NC 3505 10 50, le législateur communautaire n'aurait nulle part indiqué que l'exigence supplémentaire que
représente l'utilisation régulière de ces produits constitue une exigence principale. Cette qualification serait expressément réservée à la transformation en produits agréés, laquelle s'achèverait avec la fabrication desdits produits.

24 La Commission explique que le régime propre aux produits relevant du code NC 3505 10 50 répond à un souci de prévention des fraudes et est commandé par la nature particulière desdits produits, qui peuvent être transformés à nouveau en produits de base et permettre ainsi au fabricant de cumuler indûment les restitutions à la production. L'utilisation régulière prescrite pour les produits en cause par l'article 7 du règlement n_ 2169/86 devrait être considérée comme la poursuite de la
transformation, et donc comme faisant partie intégrante de celle-ci. Si le règlement n_ 1722/93 opère une distinction entre le stade de la transformation, visé par l'article 8, et celui de l'utilisation régulière, visé par l'article 10, cette distinction ne remettrait pas en cause le classement, justifié par l'objectif poursuivi, de l'exigence d'utilisation régulière parmi les exigences principales.

25 A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, si la garantie litigieuse a été constituée en application de l'article 7 du règlement n_ 2169/86, sa libération est soumise, en vertu de l'article 14 du règlement n_ 1722/93, aux conditions fixées par l'article 10 de ce dernier règlement. Cette circonstance, à laquelle s'ajoutent les similitudes existant entre les deux règlements, justifie qu'ils soient pris conjointement en considération.

26 L'article 7, paragraphe 2, du règlement n_ 2169/86 et l'article 8, paragraphe 2, du règlement n_ 1722/93 qualifient expressément d'exigence principale la transformation en produits agréés. Par ailleurs, il ressort du premier considérant du règlement n_ 3642/87 et du premier considérant du règlement n_ 165/89, qui ont introduit dans le règlement n_ 2169/86 des dispositions spécifiques pour les produits relevant du code NC 3505 10 50, lesquelles ont été reprises en substance dans le règlement n_
1722/93, que l'exigence d'une utilisation régulière vise à tirer les conséquences de la nature particulière de l'amidon estérifié, lequel peut être retransformé en une matière première dont l'utilisation peut donner lieu à une nouvelle demande de restitution à la production.

27 Il apparaît ainsi que la transformation en produits agréés constitue l'opération essentielle recherchée par le législateur communautaire, et que le régime particulier applicable aux produits relevant du code NC 3505 10 50 a pour objectif de garantir le caractère irréversible de cette opération. Il s'ensuit que l'obligation d'utilisation régulière introduite à l'article 7, paragraphe 4, du règlement n_ 2169/86 et reprise à l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1722/93 doit être considérée,
quelle que soit la place qu'elle occupe dans la réglementation spécifique applicable, comme une composante de l'obligation de transformation. Dès lors, la qualification expresse d'exigence principale donnée par le législateur communautaire à cette dernière doit être interprétée comme s'étendant à l'obligation d'utilisation régulière.

28 Cette interprétation est corroborée par l'importance que revêt l'obligation d'utilisation régulière pour la réalisation des objectifs des règlements qui l'ont imposée. En effet, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 59 de ses conclusions, il n'est pas douteux que la lutte contre la fraude dans le domaine des opérations de transformation d'amidon ou de fécule en amidon estérifié est, depuis 1987, l'un des objectifs poursuivis par le législateur communautaire dans les règlements
applicables. L'utilisation régulière des produits transformés, moyen retenu pour atteindre cet objectif, répond dès lors à la définition de l'exigence principale donnée par l'article 20, paragraphe 2, du règlement n_ 2220/85, à savoir une exigence fondamentale pour les objectifs du règlement qui l'impose.

Sur le délai de preuve

29 Quant au délai dans lequel doit être rapportée la preuve de l'utilisation régulière, Kyritzer a fait valoir que, l'article 28 du règlement n_ 2220/85 n'édictant aucune sanction en cas de dépassement des délais qu'il fixe et l'article 24 ne prévoyant de sanction qu'en cas de non-respect d'une exigence subordonnée, la preuve du respect d'une telle exigence pourrait être rapportée ultérieurement.

30 Cet argument est sans pertinence, dès lors qu'il a été précédemment jugé que l'obligation litigieuse doit être considérée comme une exigence principale.

31 La Commission a fait valoir qu'il y a lieu d'appliquer à l'utilisation régulière le délai prévu pour la transformation en produits agréés, lequel, à la date de la constitution de la garantie litigieuse, était défini par l'article 7, paragraphe 2, du règlement n_ 2169/86 et correspondait à la durée de validité du certificat de restitution.

32 Cet argument repose sur une lecture trop restrictive de l'article 14, second alinéa, du règlement n_ 1722/93, dont il ressort clairement que l'article 10 dudit règlement s'applique, en ce qui concerne la libération d'une garantie constituée au titre de l'article 7 du règlement n_ 2169/86, à tous les dossiers qui - comme celui en cause au principal - étaient encore ouverts au 1er juillet 1993.

33 L'article 10 du règlement n_ 1722/93 modifie les modalités de preuve et de contrôle jusqu'alors en vigueur en ce qui concerne le respect de l'obligation d'utilisation régulière. Toutefois, il ne fixe pas de délai spécifique pour le respect de cette obligationni pour la production des preuves y afférentes. Il y a donc lieu d'appliquer les dispositions de portée générale de l'article 28 du règlement n_ 2220/85, qui règlent les hypothèses dans lesquelles aucun délai n'est prévu pour la production
des preuves nécessaires pour obtenir la libération d'une garantie.

34 Conformément à l'article 28, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement n_ 2220/85, la preuve de l'utilisation régulière doit donc être produite dans un délai de douze mois à compter de la date à laquelle il y a été satisfait et, au maximum, de trois ans à compter de la constitution de la garantie, sauf cas de force majeure. Si ces délais ne sont pas respectés, la garantie est acquise en totalité en application de l'article 22, paragraphes 1 et 2, du règlement n_ 2220/85.

35 Kyritzer a également soutenu que la perte de la garantie au cas de dépassement des délais prévus pour la production de la preuve de l'utilisation régulière constituait une discrimination des fabricants de produits relevant du code NC 3505 10 50 par rapport à ceux d'autres produits agréés.

36 A cet égard, il suffit de rappeler que la différence entre le traitement appliqué aux fabricants de produits relevant du code NC 3505 10 50 et celui réservé aux fabricants d'autres produits agréés est justifiée par les risques de fraude propres à l'activité des premiers. Les situations étant différentes, il est conforme au principe de non-discrimination qu'elles ne soient pas traitées de manière égale.

37 Kyritzer a enfin prétendu que la perte de la totalité de la garantie dans le cas où la preuve de l'utilisation régulière n'est pas rapportée dans un certain délai constituait une violation du principe de proportionnalité.

38 Cet argument doit être rejeté. D'une part, une telle sanction est incontestablement de nature à atteindre l'objectif de lutte contre la fraude poursuivi par le législateur. D'autre part, la fixation d'un délai au-delà duquel le défaut de présentation de la preuve requise est considéré comme valant non-respect de l'obligation est nécessaire pour pallier les inconvénients qu'engendrerait la prolongation indéfinie d'une situation d'incertitude quant au statut de la garantie constituée.

39 Il y a donc lieu de répondre à la première question que l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1722/93 doit être interprété en ce sens que l'utilisation d'un produit relevant du code NC 3505 10 50, prescrite par ce texte, constitue une exigence principale au sens de l'article 20, paragraphe 2, du règlement n_ 2220/85, dont le respect doit être prouvé dans les délais fixés à l'article 28 dudit règlement, sous peine d'entraîner l'acquisition de la totalité de la garantie, en application de
l'article 22, paragraphes 1 et 2, de ce règlement.

Sur la seconde question

40 Compte tenu de la réponse apportée à la première question, il n'y a pas lieu de répondre à la seconde question.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

41 Les frais exposés par la Commission, qui a soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR

(cinquième chambre),

statuant sur les questions à elle soumises par le Bundesfinanzhof, par ordonnance du 4 juillet 1996, dit pour droit:

L'article 10, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 1722/93 de la Commission, du 30 juin 1993, portant modalités d'application des règlements (CEE) n_ 1766/92 et (CEE) n_ 1418/76 du Conseil en ce qui concerne les restitutions à la production dans le secteur des céréales et du riz respectivement, doit être interprété de la façon suivante:

- l'utilisation d'un produit relevant du code NC 3505 10 50, prescrite par ce texte, constitue une exigence principale au sens de l'article 20, paragraphe 2, du règlement (CEE) n_ 2220/85 de la Commission, du 22 juillet 1985, fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles;

- son respect doit être prouvé dans les délais fixés à l'article 28 dudit règlement, sous peine d'entraîner l'acquisition de la totalité de la garantie, en application de l'article 22, paragraphes 1 et 2, de ce règlement.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-287/96
Date de la décision : 16/07/1998
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.

Agriculture - Organisation commune des marchés - Restitutions à la production - Régime des garanties - Délais - Exigence principale - Exigence subordonnée.

Céréales

Agriculture et Pêche


Parties
Demandeurs : Kyritzer Stärke GmbH
Défendeurs : Hauptzollamt Potsdam.

Composition du Tribunal
Avocat général : Léger
Rapporteur ?: Jann

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1998:371

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award