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14/09/1999 | CJUE | N°C-78/98

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 14 septembre 1999., Shirley Preston e.a. contre Wolverhampton Healthcare NHS Trust e.a. et Dorothy Fletcher e.a. contre Midland Bank plc., 14/09/1999, C-78/98


Avis juridique important

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61998C0078

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 14 septembre 1999. - Shirley Preston e.a. contre Wolverhampton Healthcare NHS Trust e.a. et Dorothy Fletcher e.a. contre Midland Bank plc. - Demande de décision préjudicielle: House of Lords - Royaume-Uni. - Politique sociale

- Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Egalité de rémunérat...

Avis juridique important

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61998C0078

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 14 septembre 1999. - Shirley Preston e.a. contre Wolverhampton Healthcare NHS Trust e.a. et Dorothy Fletcher e.a. contre Midland Bank plc. - Demande de décision préjudicielle: House of Lords - Royaume-Uni. - Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Egalité de rémunération - Affiliation à un régime de pensions professionnel - Travailleurs à temps partiel - Exclusion - Modalités procédurales nationales - Principe
d'effectivité - Principe d'équivalence. - Affaire C-78/98.
Recueil de jurisprudence 2000 page I-03201

Conclusions de l'avocat général

1 Par les questions qu'elle vous soumet, la House of Lords (Royaume-Uni) vous invite à dire si le droit communautaire s'oppose à l'application de deux règles de procédure nationales à des recours formés au titre de l'article 119 du traité CE (les articles 117 à 120 du traité CE ont été remplacés par les articles 136 CE à 143 CE) par des travailleurs qui estiment avoir été victimes d'une discrimination fondée sur le sexe en raison de leur exclusion de régimes professionnels de pensions.

La première règle de procédure impose à ces travailleurs d'introduire leur recours dans un délai de six mois à compter de la fin de leur emploi. La seconde règle limite aux deux années précédant la date de l'introduction du recours la période pour laquelle ils peuvent obtenir le droit à être affiliés rétroactivement au régime de pensions dont ils ont été exclus.

I - Le cadre juridique

A - L'article 119 du traité

2 Aux termes de l'article 119, premier alinéa, du traité, les États membres sont tenus d'assurer et de maintenir «l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail».

3 Le deuxième alinéa de ce texte précise que, par «rémunération», il faut entendre «le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier».

4 L'article 119 du traité énonce un principe qui fait partie des fondements de la Communauté (1). Il produit des effets directs et engendre donc, dans le chef des particuliers, des droits que les juridictions nationales doivent sauvegarder (2).

5 A la différence des régimes légaux de sécurité sociale (3), les régimes «professionnels» de pensions entrent dans le champ d'application de l'article 119 du traité (4). Relèvent ainsi de l'interdiction de discrimination édictée par cette disposition non seulement le droit aux prestations servies par un régime professionnel de pensions (5), mais également le droit à être affilié à un tel régime (6).

B - Les dispositions nationales

6 Au Royaume-Uni, l'application du principe de l'égalité des rémunérations est assurée par l'Equal Pay Act (loi sur l'égalité des rémunérations, ci-après l'«EPA»). Adoptée le 29 mai 1970, cette législation est entrée en vigueur le 29 décembre 1975 (7).

7 L'EPA institue, en faveur des salariés, un droit légal à des conditions d'emploi aussi favorables que celles dont bénéficie un salarié de sexe opposé accomplissant le même travail, un travail considéré comme équivalent ou un travail de valeur égale.

8 L'article 1er, paragraphe 1, de l'EPA dispose que tout contrat au titre duquel une femme est employée dans un établissement en Grande-Bretagne est réputé contenir une «clause d'égalité» (8).

9 En vertu de l'article 2, paragraphe 4, de ce texte, un recours tendant à obtenir l'application d'une clause d'égalité doit, à peine de forclusion, être introduit dans un délai de six mois à compter de la fin de l'emploi visé par la requête.

10 L'article 2, paragraphe 5, de l'EPA prévoit que, dans le cadre d'une procédure engagée pour violation d'une clause d'égalité, une femme ne peut prétendre à des arriérés de rémunération ou à des dommages et intérêts que pour les deux années précédant la date de l'introduction de son recours.

11 S'agissant des recours visant à obtenir l'égalité de traitement quant au droit à l'affiliation à un régime professionnel de pensions, l'article 2, paragraphe 5, de l'EPA a été modifié par les Occupational Pension Schemes (Equal Access to Membership) Regulations 1976 [règlements relatifs aux régimes professionnels de pensions (égalité du droit à l'affiliation), ci-après les «Occupational Pension Regulations»].

12 Les Occupational Pension Regulations offrent au salarié qui a été illégalement exclu de l'affiliation à un régime professionnel de pensions une réparation en nature. En vertu de leur article 12, le juge national, s'il estime le recours fondé, délivre une déclaration reconnaissant au demandeur le droit à être affilié au régime de pensions litigieux. Toutefois, l'effet rétroactif de cette déclaration est limité aux deux années qui ont précédé la date de l'introduction du recours.

II - Les faits et la procédure

13 Le 28 septembre 1994, votre Cour a rendu les arrêts Vroege et Fisscher, précités.

14 Dans ces arrêts, elle a confirmé que le droit à l'affiliation à un régime professionnel de pensions relevait du champ d'application de l'article 119 du traité (9). De même, elle a confirmé que l'exclusion des travailleurs à temps partiel de l'affiliation à de tels régimes constituait une discrimination indirecte contraire à l'article 119 lorsqu'elle frappait un nombre beaucoup plus élevé de femmes que d'hommes, à moins qu'elle ne soit justifiée par des facteurs objectifs et étrangers à toute
discrimination fondée sur le sexe (10).

15 En outre, votre Cour a jugé que «la limitation des effets dans le temps de l'arrêt Barber ne s'applique pas au droit à l'affiliation à un régime de pensions professionnel...» (11). Elle en a conclu que «l'effet direct de l'article 119 peut être invoqué afin d'exiger rétroactivement l'égalité de traitement quant au droit à l'affiliation à un régime de pensions professionnel, et ce depuis le 8 avril 1976, date de l'arrêt [Defrenne II] qui a reconnu pour la première fois l'effet direct dudit
article» (12).

16 La presse et les organisations syndicales ont assuré à ces arrêts une large publicité au Royaume-Uni.

17 Dans les mois qui suivirent leur prononcé, quelque 60 000 travailleurs à temps partiel (ou anciens travailleurs à temps partiel) ont introduit des recours devant les Industrial Tribunals de cet État.

18 Se fondant sur l'article 119 du traité, ces travailleurs font valoir qu'ils ont été illégalement exclus de l'affiliation à différents régimes professionnels de pensions. Les défendeurs à ces procédures sont les employeurs ou, le cas échéant, les anciens employeurs des demandeurs.

19 Toutes ces affaires concernent des régimes de pensions «conventionnellement exclus» (13) qui, à diverses époques par le passé, excluaient l'affiliation des travailleurs à temps partiel.

Sont, plus particulièrement, visés par le présent renvoi préjudiciel les régimes de pensions suivants:

- le National Health Service Pension Scheme (14);

- le Teachers' Superannuation Scheme (15);

- le Local Government Superannuation Scheme (16);

- l'Electricity Supply (Staff) Superannuation Scheme Pension Scheme et l'Electricity Supply Pension Scheme (17), et

- le Midland Bank Pension Scheme et le Midland Bank Key-Time Pension Scheme (18).

20 Entre 1986 et 1995, ces régimes de pensions ont été modifiés afin de garantir le droit à l'affiliation aux travailleurs à temps partiel. En particulier, les Occupational Pension Schemes (Equal Access to Membership) (Amendment) Regulations 1995 [règlements relatifs aux régimes professionnels de pensions (égalité du droit à l'affiliation) (amendement)] ont interdit, à compter du 31 mai 1995, toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe en matière d'affiliation à un régime
professionnel de pensions.

21 Néanmoins, par leur recours, les demandeurs entendent faire reconnaître leur droit à l'affiliation rétroactive aux régimes de pensions litigieux pour les périodes d'emploi à temps partiel qu'ils ont accomplies avant les modifications susvisées. Certaines périodes d'emploi remontent, d'ailleurs, au 8 avril 1976.

22 Parmi les 60 000 procédures engagées devant les juridictions nationales, 22 recours (19) ont été retenus comme «affaires-test» en vue de trancher certaines questions liminaires de droit.

23 Ces questions portent sur la compatibilité avec le droit communautaire des règles de procédure instituées par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et par l'article 12 des Occupational Pension Regulations.

24 Les «affaires-test» permettent d'identifier l'existence de trois séries de problèmes (20).

25 Premièrement, certaines demanderesses ont déposé leur requête auprès de l'Industrial Tribunal compétent plus de six mois après avoir quitté leur emploi. En application de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA, ces requérantes sont forcloses et donc privées de tout recours permettant de faire reconnaître leurs anciennes périodes d'emploi à temps partiel aux fins du calcul de leurs droits à pension.

26 Deuxièmement, certaines demanderesses exigent l'égalité de traitement quant au droit à l'affiliation à un régime professionnel de pensions pour des périodes d'emploi à temps partiel qu'elles ont accomplies plus de deux ans avant l'introduction de leur recours. En vertu de l'article 12 des Occupational Pension Regulations, ces demandes sont écartées puisque l'effet rétroactif de la déclaration d'affiliation que prononcent les Industrial Tribunals est limité aux deux années qui précèdent la date de
l'introduction du recours.

27 Troisièmement, certaines demanderesses se trouvent dans une situation particulière.

Il s'agit de professeurs ou de chargés de cours qui travaillent de manière régulière, mais au titre de contrats successifs et juridiquement distincts. A cet égard, l'ordonnance de renvoi (21) distingue trois catégories d'enseignants: ceux qui enseignent dans le même établissement au titre d'une succession de contrats couvrant l'année académique, interrompus pendant les vacances d'été (les «sessional contracts»); ceux qui enseignent dans le même établissement au titre d'une succession de contrats
couvrant les périodes de cours, interrompus pendant les périodes de vacances (les «termly contracts») (22), et ceux qui enseignent par intermittence (23).

Il ressort de l'ordonnance de renvoi (24) qu'une telle succession de contrats peut parfois être couverte par un contrat-cadre (un «umbrella contract»). En vertu de ce contrat, les parties sont tenues de renouveler leurs différents contrats de travail.

En l'absence de contrat-cadre, le délai prévu par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA commence à courir à compter de la fin du contrat de travail et non à compter de la fin de la relation d'emploi entre l'enseignant et l'établissement concernés (25). Il en résulte qu'une enseignante ne peut faire reconnaître ses périodes d'emploi à temps partiel aux fins du calcul de ses droits à pension qu'à la condition d'avoir introduit un recours dans les six mois suivant la fin de chaque contrat au titre duquel
elle a effectué l'emploi litigieux.

28 Lors de la procédure au principal, les demanderesses ont soutenu que l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et l'article 12 des Occupational Pension Regulations étaient incompatibles avec le droit communautaire. D'une part, ces dispositions rendraient pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits que leur confère l'article 119 du traité. D'autre part, ces modalités procédurales seraient moins favorables que celles qui régissent des recours similaires de nature interne et,
notamment, les recours fondés sur le Sex Discrimination Act 1975 (loi relative aux discriminations fondées sur le sexe) ou sur le Race Relations Act 1976 (loi sur les relations entre les races).

29 L'Industrial Tribunal de Birmingham était chargé d'examiner les «affaires-test» en première instance. Il a rendu sa décision le 4 décembre 1995 (26). En substance, il a considéré que les modalités instituées par les dispositions litigieuses étaient conformes au droit communautaire en ce qu'elles ne rendaient pas excessivement difficile ou pratiquement impossible l'exercice des droits conférés aux demanderesses par l'ordre juridique communautaire.

30 En appel, cette décision fut confirmée par l'Employment Appeal Tribunal. Dans son jugement du 24 juin 1996, ce dernier a, en outre, considéré que les modalités procédurales litigieuses n'étaient pas moins favorables que celles qui concernent des recours similaires de nature interne. En effet, l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et l'article 12 des Occupational Pension Regulations s'appliqueraient indifféremment aux recours fondés sur la violation de l'article 119 du traité et aux recours fondés
sur la méconnaissance des principes édictés par l'EPA.

31 Le jugement de l'Employment Appeal Tribunal fut, à son tour, confirmé par un arrêt de la Court of Appeal du 13 février 1997.

32 Conformément au pouvoir discrétionnaire que leur reconnaît l'article 177, deuxième alinéa, du traité CE (devenu article 234, deuxième alinéa, CE), ces juridictions ont tranché le litige au principal sans vous soumettre de questions préjudicielles.

33 En revanche, la House of Lords, appelée à se prononcer en dernier ressort, a estimé qu'elle était tenue de saisir votre Cour.

III - Les questions préjudicielles

34 En conséquence, elle a décidé de surseoir à statuer et de vous déférer les questions suivantes:

«Lorsque:

a) une demanderesse s'est vu refuser le droit de s'affilier à un régime de retraite professionnel au motif qu'elle travaille à temps partiel; et que,

b) en conséquence, elle n'a pas constitué de droits à pension correspondant aux périodes d'emploi accomplies, en vue de l'obtention d'une pension devenant payable une fois qu'elle aura atteint l'âge de la retraite; et que

c) la demanderesse fait valoir qu'un tel traitement comporte une discrimination indirecte fondée sur le sexe, contraire à l'article 119 du traité CE,

les trois questions suivantes se posent:

1) Est-ce que:

a) une règle de procédure nationale exigeant qu'une demande concernant l'affiliation à un régime de retraite professionnel (d'où découlent les droits à pension) adressée à l'Industrial Tribunal parvienne à ce dernier dans un délai de six mois à compter de la fin de l'emploi visé par la demande;

b) une règle de procédure nationale prévoyant que les périodes d'emploi ouvrant un droit à pension accomplies par une demanderesse doivent être calculées uniquement par référence aux périodes d'emploi postérieures à une date non antérieure de plus de deux ans à celle de la demande (indépendamment du point de savoir si la pension devient payable avant ou après la date à laquelle la demande est introduite)

sont compatibles avec le principe de droit communautaire selon lequel les règles de procédure nationales concernant les violations du droit communautaire ne doivent pas rendre en pratique excessivement difficile ou impossible l'exercice par la demanderesse des droits que lui confère l'article 119?

2) Dans des circonstances où:

a) les droits conférés par l'article 119 doivent, en vertu du droit national, être mis en oeuvre par le biais d'une loi qui a été adoptée en 1970, soit avant l'adhésion du Royaume-Uni à la Communauté européenne, et est entrée en vigueur le 29 décembre 1975 et qui, avant le 8 avril 1976, a déjà conféré le droit à l'égalité quant à la rémunération et quant aux autres conditions contractuelles;

b) la loi nationale contient les règles de procédure visées dans la question 1 ci-dessus;

c) d'autres lois interdisant les discriminations en matière d'emploi et la législation nationale relative aux contrats prévoient des délais différents,

i) la mise en oeuvre de l'article 119 par le biais de cette loi nationale est-elle conforme au principe de droit communautaire selon lequel les règles de procédure nationales concernant les violations du droit communautaire ne doivent pas être moins favorables que celles applicables à des recours similaires de nature interne?

ii) sinon, quels sont les critères pertinents à appliquer pour déterminer si un recours ouvert par le droit national est un recours de nature interne analogue à celui visant à faire valoir les droits conférés par l'article 119?

iii) si une juridiction nationale identifie un tel recours similaire, répondant aux critères visés au point ii) ci-dessus, quels sont, au regard du droit communautaire, les éventuels critères pertinents à appliquer pour déterminer si les règles de procédure applicables à ce (ou ces) recours similaire(s) sont plus favorables que les règles de procédure valant pour la mise en oeuvre des droits conférés par l'article 119?

3) Dans des circonstances où:

a) une salariée a été occupée par le même employeur au titre de plusieurs contrats de travail distincts couvrant des périodes déterminées séparées par des intervalles;

b) à l'expiration d'un contrat, aucune des parties n'est tenue de conclure un nouveau contrat de ce type, et

c) elle introduit une demande dans un délai de six mois à compter de l'expiration d'un contrat (ou de contrats) postérieur(s), mais omet d'introduire une demande dans un délai de six mois à compter de l'expiration d'un contrat (ou de contrats) antérieur(s),

est-ce qu'une règle de procédure nationale qui a pour effet d'exiger qu'une demande concernant l'affiliation à un régime de retraite professionnel, affiliation dont découle le droit à pension, soit introduite dans un délai de six mois à compter de l'expiration de tout contrat (ou de tous contrats) de travail visé(s) par la demande et qui, donc, fait obstacle à ce que les périodes d'emploi accomplies au titre d'un contrat (ou de contrats) antérieur(s) soient prises en considération en tant que
périodes d'emploi ouvrant un droit à pension est compatible avec:

i) le droit à l'égalité des rémunérations pour un même travail, garanti par l'article 119 du traité CE, et

ii) le principe de droit communautaire selon lequel les règles de procédure nationales concernant les violations du droit communautaire ne doivent pas rendre en pratique excessivement difficile ou impossible l'exercice par la demanderesse des droits que lui confère l'article 119?»

IV - L'objet du renvoi préjudiciel

35 Il ressort de l'exposé du cadre factuel que les «affaires-test» portent exclusivement sur des questions d'ordre procédural (27). Le présent renvoi préjudiciel vise à permettre à la House of Lords d'apprécier la compatibilité avec le droit communautaire des règles de procédure édictées par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et par l'article 12 des Occupational Pension Regulations.

A la lumière de cette appréciation, les juridictions nationales statueront sur la recevabilité des recours dont elles sont saisies. Elles fixeront également l'étendue des périodes pour lesquelles les demandeurs peuvent invoquer leur droit à l'affiliation rétroactive aux régimes professionnels de pensions litigieux.

36 Au stade actuel de la procédure, les Industrial Tribunals n'ont pas encore déterminé si l'exclusion des travailleurs à temps partiel de l'affiliation à ces régimes de pensions constituait une discrimination indirecte fondée sur le sexe, contraire à l'article 119 du traité. Aucune interprétation n'est donc sollicitée quant aux éléments constitutifs d'une telle discrimination.

37 Néanmoins, pour les seuls besoins de notre raisonnement, nous supposerons que l'existence de cette discrimination est établie. En effet, la réponse aux questions préjudicielles implique une évaluation des effets que produisent les modalités procédurales litigieuses sur les droits conférés par l'article 119 aux demanderesses au principal. Or, en vue d'apprécier correctement ces effets, il convient de partir de l'hypothèse que ces requérantes bénéficient effectivement du droit à être affiliées
rétroactivement aux régimes de pensions litigieux pour l'ensemble des périodes d'emploi à temps partiel qu'elles ont accomplies depuis le 8 avril 1976.

V - La réponse aux questions préjudicielles

A - Introduction

38 Il résulte d'une jurisprudence constante (28) que, en l'absence de réglementation communautaire en la matière, il appartient à l'ordre juridique interne de chaque État membre de déterminer les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent de l'effet direct du droit communautaire.

39 Cependant, cette autonomie procédurale rencontre deux limites.

40 D'une part, en vertu du «principe de l'équivalence», les modalités des recours permettant aux particuliers d'exercer les droits conférés par l'ordre juridique communautaire ne peuvent être moins favorables que les modalités qui régissent les recours similaires de nature interne.

41 D'autre part, en vertu du «principe d'effectivité», les modalités des recours internes ne peuvent être aménagées de manière à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire.

B - Sur la première question

42 La première question préjudicielle vous invite à préciser la portée du principe d'effectivité. Elle comporte deux parties.

1) Sur la première partie de la première question

43 Dans la première partie de sa première question, la House of Lords demande si le délai de forclusion institué par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA a pour effet de rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice, par les demanderesses au principal, de leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions.

44 Les motifs qui sous-tendent cette question sont simples. Plusieurs requérantes ont omis d'introduire leur recours dans les six mois suivant la fin de leur emploi (29). En application de la disposition litigieuse, elles sont privées de la possibilité de faire reconnaître leurs états de service passés aux fins du calcul de leurs droits à pension. La juridiction de renvoi souhaite vérifier que le principe d'effectivité ne s'oppose pas à l'irrecevabilité de ces recours.

45 Votre jurisprudence permet de répondre brièvement à cette question.

46 En effet, de manière constante, votre Cour «reconn[aît] la compatibilité avec le droit communautaire de la fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion...» (30). Elle estime que «de tels délais ne sauraient être considérés comme étant de nature à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire, même si, par définition, l'écoulement de ces délais entraîne le rejet, total ou partiel, de l'action
intentée...» (31).

47 La forclusion résultant de l'écoulement de ces délais de recours constitue l'application du principe fondamental de la sécurité juridique qui protège à la fois le justiciable et l'administration concernés (32). Elle «correspond à la nécessité d'éviter que la légalité des décisions administratives soit mise en cause indéfiniment» (33).

48 En outre, le délai prévu par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA peut être qualifié de «raisonnable» au regard de votre jurisprudence. En effet, par le passé, vous avez reconnu la compatibilité de délais nationaux de forclusion nettement plus courts (34).

49 En conséquence, nous estimons que le principe d'effectivité ne s'oppose pas à l'application de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA aux recours au principal.

2) Sur la seconde partie de la première question

50 Par la seconde partie de sa première question, la House of Lords demande si l'article 12 des Occupational Pension Regulations a pour effet de rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice, par les demanderesses au principal, de leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions.

51 Au cours de la procédure, les débats ont essentiellement porté sur votre arrêt du 11 décembre 1997, Magorrian et Cunningham (35) (ci-après l'«arrêt Magorrian»).

52 Dans cet arrêt, la sixième chambre de votre Cour a examiné une règle de procédure identique à celle de l'article 12 des Occupational Pension Regulations (36). Elle a dit pour droit que le principe d'effectivité s'opposait à l'application d'une telle règle de procédure à des recours formés au titre de l'article 119 du traité par des travailleurs à temps partiel qui faisaient valoir leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions (37).

53 Il convient donc de vérifier si cette conclusion peut également s'appliquer aux recours au principal.

54 A cet effet, nous déterminerons la portée de la solution dégagée dans l'arrêt Magorrian. Nous examinerons ensuite les circonstances factuelles des litiges au principal à lumière de cette solution.

a) Sur la solution dégagée dans l'arrêt Magorrian

55 Le cadre factuel de l'affaire Magorrian peut être résumé comme suit.

Le régime professionnel de pensions en cause garantissait à tous les affiliés le versement d'une somme forfaitaire ainsi qu'une pension de retraite de base. En outre, il comportait un régime spécifique (38), le régime «Mental Health Officer» (ci-après le régime «MHO»), qui accordait des prestations complémentaires aux personnes ayant travaillé un minimum de vingt années à temps plein.

Mme Magorrian avait accompli neuf années de service à temps plein et l'équivalent de onze années sous le régime du temps partiel. Mme Cunningham avait accompli quinze années de service à temps plein et l'équivalent de onze années sous le régime du temps partiel. Toutes deux avaient donc accompli l'équivalent d'un minimum de vingt années de service à temps plein. Néanmoins, en raison de leur travail à temps partiel, elles avaient été exclues de l'affiliation au régime MHO (39).

Lors de leur départ à la retraite, elles ont perçu une somme forfaitaire ainsi que la pension de retraite de base. Cependant, elles n'ont pu prétendre au versement des prestations complémentaires garanties par le régime MHO. Elles ont donc introduit un recours visant à faire prendre en compte leurs périodes d'emploi à temps partiel aux fins du calcul de ces prestations. Bien que la juridiction nationale ait considéré qu'elles avaient été victimes d'une discrimination indirecte fondée sur le sexe,
l'article 12 des Occupational Pension Regulations (Northern Ireland) ne permettait de prendre en considération que leurs états de service accomplis moins de deux années avant la date de l'introduction de leur recours.

C'est dans ces circonstances que la sixième chambre de votre Cour a jugé que le droit communautaire s'opposait à l'application d'une règle nationale qui, en cas de succès du recours, limite aux deux années précédant la date de l'introduction de ce recours les effets du droit des demanderesses à être affiliées rétroactivement à un régime professionnel de pensions et à percevoir les prestations complémentaires découlant de ce régime (40).

56 Le gouvernement du Royaume-Uni et les défendeurs au principal soutiennent que la solution dégagée dans l'arrêt Magorrian est justifiée par les circonstances propres à cette affaire, de sorte qu'elle ne saurait être transposée aux cas d'espèce.

Ils soulignent que, en s'opposant à la prise en compte de l'ensemble des états de service passés des intéressées, l'article 12 des Occupational Pension Regulations (Northern Ireland) a empêché Mmes Magorrian et Cunningham de satisfaire à la condition requise pour pouvoir s'affilier au régime MHO. Partant, cette disposition privait totalement les demanderesses des prestations complémentaires découlant de ce régime. C'est uniquement en ce sens que la règle litigieuse rendait impossible en pratique
l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire.

En revanche, dans les affaires au principal, l'article 12 des Occupational Pension Regulations ne priverait pas totalement les demanderesses de leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions. Il se bornerait à limiter la période, préalable à l'introduction du recours, pour laquelle elles peuvent obtenir cette affiliation.

Or, selon une jurisprudence constante (41), le principe d'effectivité ne s'opposerait pas à l'application d'une règle de droit interne qui se borne à limiter les effets rétroactifs de demandes introduites en vue d'obtenir une prestation déterminée.

57 Nous ne pouvons souscrire à cette analyse.

58 Certes, les circonstances de l'affaire Magorrian étaient particulières. Néanmoins, les termes dans lesquels votre Cour a raisonné dépassent largement les circonstances propres à cette affaire.

59 Examinons ce raisonnement.

60 En réponse à la première question préjudicielle, votre Cour a dit pour droit que «Les périodes de service des travailleurs ... à temps partiel ... victimes d'une discrimination indirecte fondée sur le sexe doivent être prises en compte à partir du 8 avril 1976, date de l'arrêt [Defrenne II], aux fins du calcul des prestations ... auxquelles ils ont droit» (42).

Par cette considération, votre Cour a logiquement tiré les conséquences de sa jurisprudence antérieure et, notamment, des arrêts Vroege, Fisscher et Dietz, précités.

En effet, aux termes de ces arrêts, l'article 119 du traité confère aux travailleurs à temps partiel, victimes d'une discrimination indirecte fondée sur le sexe, le droit à être affiliés rétroactivement au régime professionnel de pensions litigieux et à percevoir les prestations découlant de ce régime. La consécration de ce droit constitue la mise en oeuvre d'une exigence plus générale selon laquelle, «dans le cas où une telle discrimination a été subie, le rétablissement de l'égalité de traitement
doit replacer le travailleur discriminé dans la même situation que celle des travailleurs de l'autre sexe» (43). Le rétablissement de la situation non discriminatoire implique donc que le travailleur discriminé puisse exiger la prise en compte, aux fins du calcul de ses droits à pension, de l'ensemble des périodes d'emploi à temps partiel qu'il a accomplies depuis le 8 avril 1976.

61 Dans le cadre de l'examen de la seconde question préjudicielle, votre Cour a souligné que «la demande ne vise pas à obtenir certaines prestations complémentaires avec effet rétroactif, mais tend à faire reconnaître le droit des intéressées à s'affilier pleinement à un régime professionnel...» (44).

De la sorte, votre Cour a opéré une distinction entre deux catégories de recours: ceux par lesquels les demandeurs visent à obtenir des arriérés de prestations et ceux par lesquels les requérants exigent la reconnaissance de leur droit à l'affiliation rétroactive (à la «pleine» affiliation) à un régime professionnel de pensions.

En ce qui concerne la première catégorie de recours, vous avez confirmé que le principe d'effectivité ne s'opposait pas à l'application d'une règle de droit interne qui «se born[e] à limiter la période, préalable à l'introduction de la demande, pour laquelle des arriérés de prestations p[e]uv[ent] être obtenus...» (45).

En revanche, s'agissant de la seconde catégorie de recours, vous avez estimé que «la règle litigieuse dans l'affaire au principal empêche la prise en compte de tous les états de service des intéressées depuis le 8 avril 1976 jusqu'[aux deux années qui ont précédé la date de l'introduction de leur recours] aux fins du calcul des prestations complémentaires qui seraient dues même après la date de la demande» (46).

62 Votre Cour n'entendait pas limiter cette constatation aux circonstances propres de l'affaire Magorrian. Au contraire, elle a souligné que la règle de procédure litigieuse portait atteinte à l'essence même du droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions.

En effet, elle a indiqué que, «à la différence des règles ... qui se born[ent] à limiter, dans l'intérêt de la sécurité juridique, la portée rétroactive d'une demande visant à obtenir certaines prestations et ne port[ent] donc pas atteinte à l'essence même des droits conférés par l'ordre juridique communautaire, une règle telle que celle qui fait l'objet de l'affaire au principal rend l'action des justiciables qui invoquent le droit communautaire pratiquement impossible» (47).

A l'effet de confirmer cette analyse, vous avez ajouté que «cette dernière règle nationale revient à limiter dans le temps l'effet direct de l'article 119 du traité dans des cas où une telle limitation n'a été prévue ni par la jurisprudence de la Cour ni par le protocole n_ 2 annexé au traité sur l'Union européenne [le protocole `Barber']» (48).

Votre Cour considère donc que, à l'instar d'une limitation dans le temps des effets directs de l'article 119 du traité, la règle de procédure litigieuse prive les justiciables, qui seraient normalement en mesure d'exercer les droits qu'ils tirent de la disposition communautaire en cause, de la faculté de s'en prévaloir à l'appui de leurs demandes.

63 Il résulte de ces considérations que la solution dégagée dans l'arrêt Magorrian n'est pas limitée aux circonstances propres à cette affaire.

64 Au demeurant, cette solution nous semble devoir être transposée aux cas d'espèce.

En effet, tout comme dans l'affaire précitée, l'article 12 des Occupational Pension Regulations «empêche la prise en compte de tous les états de service des intéressées depuis le 8 avril 1976 jusqu'[aux deux années qui ont précédé la date de l'introduction de leur recours] aux fins du calcul des prestations ... qui [leur] seraient dues même après la date de la demande» (49).

Soulignons en outre que, dans l'affaire Magorrian, les intéressées cherchaient à faire reconnaître leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime de pensions en vue de percevoir des prestations complémentaires. Quelle que fût l'issue du litige, elles étaient donc assurées de bénéficier de la somme forfaitaire et de la pension de base garanties par le régime général pensions professionnel.

En revanche, dans les présentes affaires, les demanderesses tendent à faire établir leur droit à l'affiliation rétroactive aux régimes de pensions litigieux en vue de percevoir des pensions de retraite de base. Or, si le principe d'effectivité s'oppose à l'application d'une règle de procédure qui empêche la prise en compte de tous les états de service des intéressées depuis le 8 avril 1976 aux fins du calcul de prestations complémentaires, il doit, à plus forte raison, s'opposer à l'application de
cette règle lorsqu'elle empêche la prise en compte desdits états de service aux fins du calcul de pensions de retraite de base.

65 Les défendeurs au principal estiment qu'une telle solution serait inconciliable avec votre jurisprudence et, notamment, avec les arrêts Fisscher et Dietz, précités. Ils rappellent que, aux termes de ces arrêts, «les règles nationales relatives aux délais de recours de droit interne sont opposables aux travailleurs qui font valoir leur droit à l'affiliation à un régime professionnel de pensions...» (50).

66 Cet argument n'emporte pas notre conviction.

En effet, dans les arrêts précités, votre Cour n'était pas invitée à dire si le principe d'effectivité s'opposait à l'application des règles de procédures concernées. Au contraire, compte tenu de l'objet des questions qui lui étaient soumises, elle s'est limitée à rappeler, dans des termes généraux, sa jurisprudence relative à l'autonomie procédurale des États membres. Ainsi, elle a réaffirmé que les règles relatives aux délais de recours de droit interne étaient opposables aux travailleurs qui font
valoir leur droit à l'affiliation à un régime professionnel de pensions, « condition ... qu'elles ne rendent pas en pratique impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire» (51). Cependant, à la différence de l'affaire Magorrian, votre Cour n'a pas examiné si les règles de procédure litigieuses satisfaisaient à cette exigence.

En outre, les règles de procédure en cause dans les arrêts Fisscher et Dietz, précités, étaient différentes de celle qui a fait l'objet de l'arrêt Magorrian. Elles se bornaient à fixer des délais «classiques» de forclusion ou à contenir des principes de droit équivalents (à savoir la «rechtsverwerking» de droit néerlandais) (52), mais ne limitaient pas, en cas de succès du recours, le droit des intéressés à être affiliés rétroactivement au régime professionnel de pensions dont ils avaient été
exclus.

67 Enfin, nous ne sommes pas davantage convaincu par l'argument selon lequel l'article 12 des Occupational Pension Regulations inciterait les demandeurs à faire preuve de diligence en les invitant à introduire leur recours dans les mois - et, au plus tard, dans les deux années - qui suivent leur exclusion de l'affiliation à un régime professionnel de pensions.

En effet, à la différence des délais de forclusion, la règle de procédure litigieuse n'est pas de nature à contribuer à la sécurité juridique puisqu'elle s'applique même à des demandeurs qui, conformément à l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA, ont déposé leur recours dans les six mois suivant la fin de l'emploi visé par la requête introductive d'instance (53).

b) Sur les circonstances factuelles des litiges au principal

68 Il convient, à présent, d'examiner les circonstances factuelles des litiges au principal.

69 Sur les 60 000 recours introduits auprès des juridictions nationales, nous ne disposons que d'informations très limitées. Il est donc impossible d'imaginer l'ensemble des circonstances factuelles susceptibles de se présenter dans le cadre de ces procédures.

70 Néanmoins, le dossier permet d'identifier l'existence d'au moins trois catégories de situations litigieuses (54).

71 Premièrement, l'application de l'article 12 des Occupational Pension Regulations peut être de nature à priver certaines demanderesses de la possibilité de remplir les conditions requises pour bénéficier de prestations de retraite.

Le cas de Mme Foster illustre ce premier type de situations.

Entre le mois de mai 1979 et le mois de mai 1994, Mme Foster a travaillé à temps partiel pour la Midland Bank. Elle a été autorisée à s'affilier au régime de pensions de son employeur le 1er septembre 1992. En mai 1994, elle a pris sa retraite. Cependant, elle ne bénéficie d'aucune pension. En effet, le régime de la Midland Bank subordonne le droit aux prestations de retraite à la condition que l'intéressé ait été affilié pendant une période minimale de deux ans. Or, Mme Foster ne remplit pas cette
condition puisqu'elle n'a été affiliée que pendant une période de vingt mois.

Le 23 décembre 1994, elle a introduit un recours visant à faire reconnaître son droit à l'affiliation rétroactive au régime litigieux (55). A cet égard, l'article 12 des Occupational Pension Regulations ne lui permet d'obtenir une déclaration d'affiliation que pour ses périodes d'emploi accomplies depuis le 23 décembre 1992, soit postérieurement à son affiliation effective au régime de la Midland Bank. En s'opposant à la prise en compte de ses états de service antérieurs à son affiliation, la règle
de procédure litigieuse prive Mme Foster de la possibilité de remplir la condition requise pour bénéficier d'une pension de retraite.

Cette règle rend donc impossible l'exercice des droits conférés à la demanderesse par l'article 119 du traité.

72 Deuxièmement, certaines requérantes invoquent leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions pour des périodes d'emploi à temps partiel qu'elles ont accomplies plus de deux ans avant la date de l'introduction de leur recours.

C'est le cas de Mme Wainsborough (56).

Mme Wainsborough travaille à temps partiel pour la Midland Bank depuis le mois de mai 1973. Elle a été autorisée à s'affilier au régime de pensions de son employeur le 1er septembre 1992. Le 8 décembre 1994, elle a introduit un recours visant à faire établir son droit à l'affiliation rétroactive à ce régime, pour ses périodes d'emploi antérieures au 1er septembre 1992. Néanmoins, en vertu de l'article 12 des Occupational Pension Regulations, une déclaration d'affiliation ne pourrait porter que sur
ses périodes d'emploi accomplies depuis le 8 décembre 1992, soit postérieurement à son affiliation au régime de la Midland Bank. En conséquence, le recours de Mme Wainsborough est purement et simplement écarté.

Dans ce type de situations, l'article 12 des Occupational Pension Regulations rend impossible tout recours visant à faire reconnaître le droit des demanderesses à être affiliées rétroactivement à un régime professionnel de pensions et à percevoir les prestations découlant de ce régime. Il porte ainsi atteinte à l'essence même des droits conférés par l'ordre juridique communautaire.

73 Troisièmement, certaines demanderesses font valoir leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions pour différentes périodes d'emploi à temps partiel: celles qu'elles ont accomplies plus de deux ans avant l'introduction de leur recours et celles qu'elles ont accomplies moins de deux ans avant cette date.

C'est le cas de Mme Jones (57).

Mme Jones travaille en qualité d'enseignante à temps partiel depuis le mois d'avril 1977. Depuis le mois d'août 1993, elle est affiliée au Teachers' Superannuation Scheme. Le 6 décembre 1994, elle a déposé un recours visant à faire établir son droit à l'affiliation rétroactive à ce régime de pensions. En application de l'article 12 des Occupational Pension Regulations, la déclaration d'affiliation ne peut porter que sur ses périodes d'emploi accomplies depuis le 6 décembre 1992. Le recours est donc
écarté dans la mesure où il concerne les périodes comprises entre le mois d'avril 1977 et le 5 décembre 1992.

Dans ce type de situations, l'article 12 des Occupational Pension Regulations ne rend pas l'action des demanderesses impossible. En revanche, il la rend excessivement difficile puisqu'il s'oppose à la prise en compte des états de service accomplis par les intéressées depuis le début de leur emploi jusqu'aux deux années qui ont précédé la date de l'introduction de leur recours.

74 Nous estimons que, dans les trois situations susvisées, l'article 12 des Occupational Pension Regulations a pour effet de rendre impossible en pratique ou excessivement difficile l'exercice, par les demanderesses au principal, de leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions.

75 En conséquence, nous invitons votre Cour à dire que le principe d'effectivité s'oppose à l'application de la disposition litigieuse aux recours au principal.

C - Sur la deuxième question

76 La deuxième question préjudicielle vous invite à préciser la portée du principe de l'équivalence.

77 A la lumière des conclusions que nous avons dégagées précédemment, l'examen de cette question ne se justifierait qu'à l'égard de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA. En effet, si, comme nous le pensons, le principe d'effectivité s'oppose à l'application de l'article 12 des Occupational Pension Regulations aux recours au principal, les juridictions nationales seront amenées à écarter cette disposition, conformément à votre jurisprudence (58). Dans ce cas, l'étude du principe de l'équivalence
deviendrait sans objet en ce qui concerne cette seconde règle de procédure.

78 Néanmoins, par souci d'exhaustivité, nous examinerons ce principe en tenant compte des deux dispositions nationales litigieuses.

79 Le principe de l'équivalence pose une exigence de «non-discrimination»: l'exercice d'un droit communautaire à travers le cadre juridique national ne peut être soumis à des conditions plus strictes que l'exercice du droit purement national correspondant.

80 La House of Lords cherche donc à déterminer si les modalités procédurales instituées par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et par l'article 12 des Occupational Pension Regulations, applicables aux recours introduits par les demanderesses au principal sur le fondement de l'article 119 du traité, sont moins favorables que d'autres modalités procédurales applicables à des recours similaires de nature interne.

81 A cet effet, elle vous soumet trois questions. Dans la première question, elle demande s'il est conforme au principe de l'équivalence de mettre en oeuvre, par le biais de l'EPA, les droits conférés aux justiciables par l'article 119 du traité. Par la deuxième question, elle vise à connaître les critères de droit communautaire qui permettent d'identifier un «recours similaire de nature interne». Par la troisième question, elle cherche à connaître les critères de ce droit permettant de déterminer
si les modalités régissant ce recours similaire de nature interne sont «plus favorables» que celles qui s'appliquent aux recours fondés sur la violation de l'article 119 du traité.

82 Postérieurement à la réception de la présente demande d'interprétation, votre Cour a rendu son arrêt dans l'affaire Levez. Comme le relève la House of Lords (59), les questions de principe soulevées par cette affaire sont analogues à celles qui nous occupent aujourd'hui (60). En conséquence, nous reprendrons, dans une large mesure, le raisonnement que vous avez développé dans l'arrêt précité.

1) Sur la première partie de la deuxième question

83 En premier lieu, la House of Lords demande si, afin d'assurer le respect du principe de l'équivalence, elle peut considérer qu'un recours fondé sur la méconnaissance de l'EPA constitue un recours interne, similaire à un recours fondé sur la violation de l'article 119 du traité.

84 Dans nos conclusions sous l'arrêt Levez (61), nous avons exposé les raisons pour lesquelles, à notre avis, les recours exercés au titre de l'EPA et au titre de l'article 119 du traité devaient être considérés non pas comme similaires mais comme identiques.

85 Votre Cour partage notre opinion puisque, dans l'arrêt précité, elle a jugé:

«... il y a lieu de constater que l'EPA constitue la législation nationale qui met en oeuvre le principe communautaire de non-discrimination en raison du sexe en ce qui concerne les rémunérations tel qu'il résulte de l'article 119 du traité et de la directive [75/117/CEE du Conseil, du 10 février 1975, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins (JO L
45, p. 19)].

Dès lors ... il ne suffit pas ... pour assurer le respect du principe de l'équivalence, que les mêmes modalités procédurales ... soient applicables à deux types de demandes comparables, l'une fondée sur le droit communautaire, l'autre fondée sur le droit national, puisqu'il s'agit d'une seule et même voie de recours.

En effet, depuis l'adhésion aux Communautés, l'EPA constitue la législation par laquelle le Royaume-Uni s'acquitte des obligations qui lui incombent en vertu d'abord de l'article 119 du traité et ensuite de la directive [75/117]. Elle n'est donc pas susceptible d'être le fondement approprié de la comparaison afin d'assurer le respect du principe de l'équivalence» (62).

86 En l'espèce, nous vous proposons de confirmer cette analyse et, partant, de répondre par la négative à la question soumise par le juge de renvoi.

2) Sur la deuxième partie de la deuxième question

87 En deuxième lieu, la House of Lords souhaite connaître les critères de droit communautaire qui permettent d'identifier un recours similaire de nature interne.

88 A cet égard, l'arrêt Levez offre un exposé synthétique des principes applicables dans le cadre d'une telle recherche.

Ainsi, peuvent être considérés comme «similaires» des recours internes qui ont un objet et une cause semblables aux recours fondés sur la violation du droit communautaire (63).

Par ailleurs, à l'effet de vérifier si le principe de l'équivalence est respecté, la juridiction nationale doit examiner non seulement l'objet mais aussi les léments essentiels des recours internes prétendument similaires (64).

En outre, chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale est moins favorable que celles concernant des recours similaires de nature interne doit être analysé en tenant compte de la place de la disposition nationale dans l'ensemble de la procédure, de son déroulement et de ses particularités devant les instances nationales (65).

Enfin, le principe de l'équivalence ne saurait être interprété en ce sens qu'il oblige l'État membre à étendre son régime interne le plus favorable à l'ensemble des recours introduits dans le domaine du droit concerné (66).

89 A ce stade, un rappel des principes dégagés dans l'arrêt Levez suffirait à répondre à la question soumise par la House of Lords. En effet, votre Cour n'est interrogée que sur les seuls éléments tenant à l'interprétation du droit communautaire qui permettent d'identifier un recours similaire de nature interne. La juridiction de renvoi ne sollicite aucune désignation concrète de cette voie de recours.

D'ailleurs, vous considérez que: «Il appartient ... aux juridictions nationales de vérifier si les modalités procédurales destinées à assurer, en droit interne, la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit communautaire sont conformes au principe de l'équivalence...» (67).

La reconnaissance de cette compétence est justifiée par le fait que «la juridiction nationale ... est [la] seule à avoir une connaissance directe des modalités procédurales des recours dans le domaine du droit [interne]...» (68).

90 Néanmoins, le souci d'apporter une réponse utile au juge national conduit parfois votre Cour à formuler des observations plus précises quant aux éléments de comparaison possibles. Ainsi, dans l'arrêt Palmisani, précité (69), vous avez aidé la juridiction de renvoi à identifier, dans son droit national, les voies de recours internes susceptibles d'être comparées aux recours tendant à la réparation du préjudice subi du fait de la transposition tardive d'une directive communautaire.

91 A priori, nous ne pouvons exclure que votre Cour décide d'adopter une démarche analogue dans la présente affaire.

92 Il convient donc de rechercher un recours de droit interne qui puisse être considéré comme similaire aux recours au principal.

93 Dans leurs observations écrites, les requérantes au principal ont avancé de nombreux éléments de comparaison. Elles ont soutenu que leurs demandes pouvaient être comparées à des recours fondés sur le Sex Discrimination Act 1975, des recours fondés sur le Race Relations Act 1976, des actions tendant au recouvrement d'arriérés de rémunération (70) ou des demandes visant à faire sanctionner des retenues illicites sur salaire (71).

94 Dans nos conclusions sous l'arrêt Levez (72), nous avons exposé les motifs pour lesquels, selon nous, les actions fondées sur le Sex Discrimination Act 1975 ou sur le Race Relations Act 1976 ne pouvaient être utilement comparées à des recours formés au titre de l'article 119 du traité. En substance, une telle comparaison participerait d'une approche dans laquelle le problème de la discrimination - qu'elle soit fondée sur le sexe ou sur la race - resterait au centre des débats. Nous avons donc
opté pour une comparaison dans le domaine du droit du travail, en désignant un recours interne dont l'objet était identique à celui du recours fondé sur la violation du droit communautaire.

95 En l'espèce, ce raisonnement nous conduit également à écarter, comme base de comparaison, les actions tendant au recouvrement d'arriérés de rémunération ou visant à faire sanctionner des retenues illicites sur salaire. En effet, les recours au principal n'ont pas pour objet le paiement d'arriérés de rémunération ou de salaire, mais l'affiliation rétroactive des demanderesses à un régime professionnel de pensions.

96 Eu égard à cet objet, nous pensons que les recours au principal devraient être comparés avec un recours de droit interne par lequel un travailleur vise à obtenir, sur un fondement étranger au droit communautaire, son affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions.

97 Cependant, une difficulté apparaît. En effet, on peut imaginer une multitude de raisons pour lesquelles un travailleur n'a pas été dûment affilié à un régime de pensions. Le défaut d'affiliation peut résulter d'une négligence imputable à l'employeur, d'une négligence du travailleur lui-même, d'une ignorance, par l'une ou l'autre partie, de ses droits et obligations, d'une tromperie de l'employeur, etc.

98 A cet égard, le critère de la «cause» du recours, posé par l'arrêt Levez, permet d'affiner notre recherche.

99 En l'espèce, les requérantes au principal se plaignent d'avoir été exclues de l'affiliation à un régime professionnel de pensions, alors qu'une disposition communautaire leur conférait expressément le droit à une telle affiliation. Par ailleurs, leurs employeurs devaient savoir que cette exclusion était contraire au droit communautaire puisque, depuis l'arrêt Bilka, précité, il est évident qu'une violation de la règle d'égalité dans la reconnaissance dudit droit à l'affiliation tombe sous le coup
de l'article 119 du traité (73).

100 Si l'on transpose ces paramètres à un recours purement interne, il semble que la juridiction de renvoi pourrait utilement se référer à la situation d'un travailleur à temps plein qui, en violation de dispositions contraignantes, a été exclu de l'affiliation à un régime professionnel de pensions, alors que son employeur savait ou devait raisonnablement savoir que cette exclusion était illégale.

101 En conséquence, nous pensons que, afin d'assurer le respect du principe de l'équivalence, la House of Lords pourrait considérer comme «similaire» aux recours au principal un recours interne introduit par un travailleur à temps plein qui, pour des motifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe ou sur la race, a été illégalement exclu de l'affiliation à un régime professionnel de pensions, alors que son employeur connaissait ou devait raisonnablement connaître le caractère illégal de
cette exclusion.

3) Sur la troisième partie de la deuxième question

102 En troisième lieu, la House of Lords vous interroge sur les critères de droit communautaire qui permettent de déterminer si les modalités procédurales régissant un recours similaire de nature interne sont plus favorables que les modalités qui s'appliquent à un recours fondé sur la violation de l'article 119 du traité.

103 Conformément à votre jurisprudence (74), les juridictions nationales sont seules compétentes pour procéder à la comparaison des règles de procédure applicables au recours similaire de nature interne et au recours fondé sur le droit communautaire.

104 Cependant, «en vue de l'appréciation à laquelle la juridiction nationale [doit] procéder, [votre] Cour peut lui fournir certains éléments tenant à l'interprétation du droit communautaire» (75).

105 Ainsi, dans l'arrêt Levez, vous avez indiqué que le principe de l'équivalence serait méconnu si le justiciable invoquant un droit conféré par l'ordre juridique communautaire devait s'exposer à des frais et à des délais supplémentaires par rapport à un demandeur fondant son recours sur un droit purement interne (76).

106 En l'espèce, la House of Lords est appelée à déterminer si les modalités instituées par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et par l'article 12 des Occupational Pension Regulations sont plus strictes que celles qui s'appliquent au recours similaire de nature interne qu'elle aura identifié à l'aide des critères précédemment dégagés (77) (ci-après le «recours interne»).

107 Dans ce cadre, la présente affaire soulève deux questions particulières (78).

108 Premièrement, les règles régissant le recours interne pourraient contenir des modalités procédurales à la fois plus favorables et plus strictes que celles qui s'appliquent aux recours au principal.

109 En effet, l'introduction du recours interne pourrait être soumise à un délai de forclusion plus court que le délai institué par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA. En revanche, en cas de succès de ce recours, l'intéressé pourrait obtenir son affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions pour une période plus longue que les deux années prévues par l'article 12 des Occupational Pension Regulations.

110 Dans ce cas, il convient de déterminer si la comparaison doit porter sur chacune des modalités procédurales (une comparaison individuelle) ou, au contraire, si elle doit porter sur l'ensemble des règles de procédure en cause (une comparaison globale).

111 A cet égard, votre Cour considère que «chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale est moins favorable que celles concernant des recours similaires de nature interne doit être analysé par la juridiction nationale en tenant compte de la place de cette disposition dans l'ensemble de la procédure, de son déroulement et de ses particularités...» (79).

112 Il en résulte que les différents aspects des modalités procédurales ne peuvent être examinés isolément, mais doivent être replacés dans leur contexte général (80).

113 Dès lors, afin de déterminer si les règles de procédure instituées par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et par l'article 12 des Occupational Pension Regulations sont moins favorables que celles qui régissent le recours interne, la House of Lords sera invitée à procéder à une comparaison globale des différents aspects des modalités procédurales applicables.

114 La seconde question se pose en raison du nombre de procédures engagées devant les juridictions nationales.

115 En effet, le caractère «plus favorable» des modalités régissant le recours interne pourrait varier selon les circonstances factuelles des recours au principal. Ainsi, les modalités procédurales régissant le recours interne pourraient être considérées comme étant plus favorables que les modalités applicables aux recours au principal à l'égard de certaines demanderesses, mais moins favorables que les modalités applicables aux recours au principal à l'égard d'autres demanderesses (81).

116 Une telle divergence pourrait conduire certaines requérantes à réclamer, au nom du principe de l'équivalence, l'application à leur demande des modalités procédurales régissant le recours interne. En revanche, d'autres demanderesses pourraient solliciter, au nom du même principe de l'équivalence, l'application à leur demande des règles de procédure édictées par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA et par l'article 12 des Occupational Pension Regulations.

117 Tout comme le gouvernement du Royaume-Uni, nous pensons qu'admettre une telle application du principe de l'équivalence serait inconciliable avec le principe de la sécurité juridique.

118 En effet, les juridictions nationales seraient contraintes de statuer sur les recours au principal en vertu de règles de droit divergentes. En outre, tant les autorités compétentes que les justiciables - demandeurs ou défendeurs - ne seraient plus en mesure de connaître précisément les règles de droit national applicables aux litiges.

119 En conséquence, nous invitons votre Cour à dire que, dans le cadre du principe de l'équivalence, les modalités procédurales régissant un recours similaire de nature interne et les règles de procédure applicables au recours fondé sur la violation du droit communautaire doivent être comparées de manière objective et abstraite, et non de manière subjective en fonction des circonstances factuelles propres aux différentes demanderesses au principal.

D - Sur la troisième question

120 La troisième question préjudicielle concerne la situation particulière de certaines requérantes au principal.

121 Rappelons qu'il s'agit de professeurs ou de chargés de cours qui travaillent de manière régulière, mais au titre de contrats successifs et juridiquement distincts [ci-après le(s) «enseignante(s)»]. Leurs contrats couvrent, selon le cas, une année académique, un trimestre ou même la durée spécifique du cours. Ils sont interrompus pendant les périodes de vacances ou les périodes durant lesquelles l'intéressée n'enseigne pas.

122 Il ressort de l'ordonnance de renvoi (82) que la succession de contrats d'une enseignante peut, dans certains cas, être couverte par un contrat-cadre (un «umbrella contract»). En vertu de ce contrat, l'enseignante et l'établissement concernés ont l'obligation de reconduire leurs différents contrats de travail. Les parties instaurent ainsi une relation permanente d'emploi. Dans cette hypothèse, le délai de forclusion prévu par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA commence à courir à compter de la
fin de la relation d'emploi entre l'enseignante et l'établissement (83).

123 En revanche, en l'absence de contrat-cadre, l'enseignante et l'établissement concernés recouvrent leur liberté contractuelle à l'issue de chaque contrat de travail. Ils sont donc libres de donner suite ou non à leur relation d'emploi. La House of Lords a jugé que, dans cette hypothèse, le délai prévu par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA commençait à courir à compter de la date d'expiration de chaque contrat de travail (84).

124 La question soumise par la House of Lords concerne, plus particulièrement, des enseignantes dont la succession de contrats n'est pas couverte par un contrat-cadre, mais qui ont néanmoins travaillé continuellement dans le même établissement (85).

125 La juridiction de renvoi souhaite vérifier que, dans ces circonstances, le fait de fixer le point de départ du délai de forclusion de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA à la date d'expiration de chaque contrat de travail est compatible avec le droit communautaire.

126 A cet effet, elle vous soumet deux questions.

1) Sur la première partie de la troisième question

127 En premier lieu, la House of Lords demande si l'application de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA dans les circonstances susvisées «est compatible avec le droit à l'égalité des rémunérations pour un même travail, garanti par l'article 119 du traité CE».

128 Cette question laisse perplexe.

129 En effet, l'article 119 du traité se limite à conférer aux particuliers des droits «matériels». Il n'impose aux États membres aucune obligation quant à l'institution de règles de procédure déterminées. Dès lors, cette disposition n'est pas, en soi, susceptible de s'opposer à l'application d'une règle de procédure nationale.

130 Selon nous, le problème de l'application de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA dans les circonstances décrites ci-dessus doit être examiné au regard du principe d'effectivité. Ce principe fait précisément l'objet de la seconde question de la House of Lords.

2) Sur la seconde partie de la troisième question

131 En deuxième lieu, la House of Lords demande si l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA a pour effet de rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice, par les enseignantes, de leur droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions.

132 Dans ses observations écrites, la Commission a soutenu que l'application de la règle de procédure litigieuse aux recours introduits par ces enseignantes était incompatible avec le principe d'effectivité à deux égards.

D'une part, cette règle de procédure contraindrait les enseignantes, qui souhaitent faire reconnaître leurs futures périodes d'emploi à temps partiel aux fins du calcul de leurs droits à pension, à introduire une succession ininterrompue de recours, pour chaque contrat au titre duquel elles effectueront l'emploi litigieux.

D'autre part, la règle litigieuse empêcherait la prise en compte de l'ensemble des états de service passés des enseignantes aux fins du calcul de leurs prestations de retraite, alors même que ces états de service s'inscrivent dans une relation continue d'emploi. Les enseignantes qui ont introduit leur premier recours en justice dans les six mois suivant la fin de leur dernier contrat de travail seraient privées de la possibilité de faire reconnaître les états de service afférents à leurs contrats
antérieurs.

133 Nous ne partageons pas l'analyse de la Commission.

134 S'agissant des futures périodes d'emploi des enseignantes, il convient de rappeler que les Occupational Pension Schemes (Equal Access to Membership) (Amendment) Regulations 1995 ont interdit, à compter du 31 mai 1995, toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe en matière d'affiliation à un régime professionnel de pensions. Dès lors, depuis cette date, les employeurs ont l'obligation légale de garantir aux enseignantes qui travaillent à temps partiel le droit à l'affiliation aux
régimes de pensions concernés. Ces enseignantes ne seront donc pas contraintes de faire «valider» leurs futures périodes d'emploi à temps partiel par une succession de recours en justice.

135 Quant à leurs états de service passés, l'application de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA empêche effectivement la prise en compte des périodes d'emploi à temps partiel afférentes aux contrats de travail antérieurs au(x) contrat(s) pour le(s)quel(s) les intéressées ont introduit un recours en justice.

136 Cependant, nous rappellerons que votre Cour «reconn[aît] la compatibilité avec le droit communautaire de la fixation de délais ... de recours à peine de forclusion dans l'intérêt de la sécurité juridique...» (86).

137 Or, comme l'a souligné le gouvernement du Royaume-Uni (87), fixer le point de départ du délai de forclusion de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA à la date d'expiration de chaque contrat de travail répond à des impératifs de sécurité juridique.

138 En effet, en l'absence de contrat-cadre, l'enseignante et l'établissement concernés sont libres de reconduire ou non leurs différents contrats de travail. Dans ces conditions, il est impossible de déterminer avec précision le moment où leur relation d'emploi prend fin. Corrélativement, il devient impossible de connaître précisément le point de départ du délai du recours en justice. Pour des raisons de sécurité juridique, il est donc nécessaire de considérer que la relation d'emploi entre
l'enseignante et l'établissement concernés prend fin à l'expiration de chaque contrat de travail et, partant, de fixer le point de départ du délai de forclusion à la date d'expiration de chacun de ces contrats.

139 Par ces motifs, nous concluons que le principe d'effectivité ne s'oppose pas à l'application, aux recours introduits par les enseignantes dont la succession de contrats n'est pas couverte pas un contrat-cadre, d'un délai national de forclusion de six mois commençant à courir à compter de la date d'expiration de chaque contrat de travail.

VI - Sur une éventuelle limitation des effets de l'arrêt à intervenir

140 Dans leurs observations, le gouvernement du Royaume-Uni et les défendeurs au principal ont attiré votre attention sur les implications financières de la présente affaire. Ils estiment que, si l'ensemble des demandeurs devaient se voir reconnaître un droit à être affiliés rétroactivement aux régimes de pensions litigieux à compter du 8 avril 1976, la dette globale de ces régimes de pensions s'élèverait à plusieurs dizaines de milliards de GBP. Leur équilibre financier serait à ce point menacé que
certains employeurs, ou anciens employeurs, se trouveraient dans l'impossibilité de s'acquitter de leurs obligations pécuniaires.

141 A l'audience, le gouvernement du Royaume-Uni a expressément évoqué la possibilité, pour votre Cour, de limiter dans le temps les effets de l'arrêt à intervenir, dans l'hypothèse où le principe d'effectivité serait interprété en ce sens qu'il s'oppose à l'application de l'article 12 des Occupational Pension Regulations aux recours au principal.

142 Dans la mesure où nous vous proposons de répondre en ce sens à la première question préjudicielle, il convient d'examiner si les conditions requises pour prononcer une telle limitation dans le temps sont réunies.

143 Conformément à une jurisprudence constante, votre «Cour peut, à titre exceptionnel, par application d'un principe général de sécurité juridique inhérent à l'ordre juridique communautaire, compte tenu des troubles graves que son arrêt pourrait entraîner pour le passé dans des relations juridiques établies de bonne foi, être amenée à limiter la possibilité pour tout intéressé d'invoquer une disposition qu'elle a interprétée en vue de remettre en cause ces relations juridiques...» (88).

144 A cet effet, votre «Cour [s'attache] à vérifier l'existence des deux critères essentiels pour qu'une telle limitation puisse être décidée, à savoir la bonne foi des milieux intéressés et le risque de troubles graves» (89).

145 L'examen de votre jurisprudence révèle, en outre, l'existence d'un troisième critère tout aussi essentiel: «une éventuelle limitation des effets dans le temps d'un arrêt préjudiciel d'interprétation ne peut être admise que dans l'arrêt même qui statue sur l'interprétation sollicitée...» (90).

146 Ces trois critères retiendront notre attention.

147 Premièrement, au titre de l'existence de «troubles graves», vous avez déjà reconnu le risque de voir «l'équilibre financier de nombre de régimes de pensions conventionnellement exclus ... rétroactivement bouleversé» (91). En l'espèce, l'existence d'une perturbation rétroactive des régimes de pensions concernés semble certaine. En revanche, l'ampleur de cette perturbation est plus malaisée à saisir. Lors de l'audience, le gouvernement du Royaume-Uni a, d'ailleurs, exposé les difficultés
rencontrées par ses actuaires lorsque ceux-ci ont tenté d'évaluer précisément les enjeux financiers de la présente affaire. L'ignorance du niveau global de la dette éventuelle des régimes de pensions litigieux doit inciter à la prudence (92). Nous considérerons donc que la première condition requise pour prononcer une limitation des effets de l'arrêt à intervenir est satisfaite.

148 Deuxièmement, la condition relative à la «bonne foi» exige que les milieux intéressés n'aient pu raisonnablement se méprendre quant à l'applicabilité (93) ou à la portée (94) de la disposition communautaire interprétée. En l'espèce, deux principes de droit communautaire entrent en ligne de compte: celui de l'égalité des rémunérations et le principe d'effectivité.

S'agissant du principe de l'égalité des rémunérations, vous avez constamment jugé que: «En ce qui concerne le droit à l'affiliation aux régimes professionnels ... aucun élément ne permettait d'estimer que les milieux concernés avaient pu se méprendre quant à l'applicabilité de l'article 119. En effet, depuis l'arrêt ... Bilka [précité], il est évident qu'une violation de la règle d'égalité dans la reconnaissance dudit droit tombe sous le coup de l'article 119...» (95).

En revanche, la question de savoir si les milieux concernés pouvaient douter de la portée du principe d'effectivité prête à discussion. En effet, on pourrait soutenir que, depuis les arrêts Bilka, Vroege et Fisscher, précités, il est évident qu'un travailleur à temps partiel, victime d'une discrimination indirecte fondée sur le sexe, jouit du droit à être affilié rétroactivement au régime professionnel de pensions litigieux à compter du 8 avril 1976. Dès lors, les milieux concernés devaient prévoir
qu'une règle de procédure limitant la rétroactivité de cette affiliation soulèverait des difficultés au regard du droit communautaire. A l'inverse, on pourrait penser que, jusqu'au 11 décembre 1997, date de l'arrêt Magorrian, les milieux intéressés ignoraient que le principe d'effectivité était susceptible de s'opposer à l'application d'une règle de procédure telle que celle de l'article 12 des Occupational Pension Regulations.

149 Laissons cette discussion pour aborder l'examen de la troisième condition.

150 De manière constante, votre Cour estime que, à défaut d'avoir limité dans le temps les effets de l'arrêt qui a statué pour la première fois sur l'interprétation sollicitée, une telle limitation ne saurait intervenir dans un arrêt ultérieur (96). En conséquence, si votre Cour avait jugé nécessaire de limiter dans le temps le principe selon lequel le droit communautaire s'oppose à l'application d'une règle de procédure telle que celle de l'article 12 des Occupational Pension Regulations, elle
n'aurait pu le faire que dans l'arrêt Magorrian (97). Or, l'arrêt Magorrian n'a prévu aucune limitation de ce genre.

151 Dans ces circonstances, nous estimons que, sauf à revenir sur votre jurisprudence constante, les effets de l'arrêt à intervenir ne peuvent être limités dans le temps.

152 La réalité des conséquences financières de l'arrêt que vous rendrez ne peut être niée. Toutefois, nous pensons que la crainte de ces conséquences peut être tempérée.

153 En effet, il est constant que «le fait, pour un travailleur, de pouvoir prétendre à l'affiliation rétroactive à un régime de pensions professionnel ne lui permet pas de se soustraire au paiement des cotisations afférentes à la période d'affiliation concernée» (98).

En l'espèce, l'ensemble des régimes de pensions visés par l'ordonnance de renvoi, à l'exception de celui de la Midland Bank, sont des régimes «contributifs», c'est-à-dire des régimes dans lesquels les travailleurs sont tenus de payer des cotisations.

Il en résulte que les demanderesses ne pourront obtenir leur affiliation rétroactive aux régimes litigieux - et le versement des prestations qui en découlent - que si elles acquittent préalablement les cotisations afférentes à l'ensemble des périodes d'emploi à temps partiel qu'elles entendent faire reconnaître.

En outre, de telles cotisations «rétroactives» peuvent représenter une somme considérable pour un particulier. On doit donc s'attendre à ce que bon nombre de demanderesses se trouvent dans l'impossibilité de faire face à une dépense aussi importante qu'imprévue. De même, certaines requérantes pourraient tout simplement refuser de consentir à une telle dépense.

Conclusion

154 Sur la base des considérations qui précèdent, nous vous proposons de dire pour droit:

«1) Le droit communautaire ne s'oppose pas à l'application, à un recours formé au titre de l'article 119 du traité CE (les articles 117 à 120 du traité CE ont été remplacés par les articles 136 CE à 143 CE) par un travailleur qui fait valoir son droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions, d'un délai national de forclusion de six mois commençant à courir à compter de la fin de l'emploi visé par la requête introductive d'instance.

En revanche, le droit communautaire s'oppose à l'application, à un recours formé au titre de l'article 119 du traité par un travailleur qui fait valoir son droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions, d'une règle de procédure nationale qui, en cas de succès du recours, limite aux deux années précédant la date de l'introduction dudit recours les effets du droit du demandeur à être affilié rétroactivement au régime professionnel de pensions dont il a été exclu.

2) Aux fins d'assurer le respect du principe de l'équivalence, un recours fondé sur la méconnaissance des principes édictés par l'Equal Pay Act 1970 (Royaume-Uni) ne peut être considéré comme un recours de nature interne, similaire à un recours fondé sur la violation de l'article 119 du traité.

Sous réserve du point 1 ci-dessus, le droit communautaire ne s'oppose pas à l'application, à un recours formé au titre de l'article 119 du traité par un travailleur qui fait valoir son droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions, des règles de procédure nationales visées audit point 1 ci-dessus, à la condition que ces règles de procédure ne soient pas moins favorables que celles qui concernent des recours similaires de nature interne. Il appartient à la juridiction
nationale d'apprécier si tel est le cas, à la lumière des critères dégagés dans l'arrêt du 1er décembre 1998, Levez (C-326/96), et dans le présent arrêt.

3) Sous réserve du point 2 ci-dessus, le droit communautaire ne s'oppose pas à l'application, à un recours formé au titre de l'article 119 du traité par un enseignant

a) qui travaille de manière régulière pour le même employeur au titre de contrats successifs et juridiquement distincts; et

b) dont la succession de contrats de travail n'est pas couverte par un contrat-cadre de droit britannique (un `umbrella contract'), et

c) qui fait valoir son droit à l'affiliation rétroactive à un régime professionnel de pensions,

d'un délai national de forclusion de six mois commençant à courir à compter de la date d'expiration de chaque contrat de travail.»

(1) - Arrêts du 8 avril 1976, Defrenne (43/75, Rec. p. 455, point 12, ci-après l'«arrêt Defrenne II»); du 28 septembre 1994, Coloroll Pension Trustees (C-200/91, Rec. p. I-4389, point 26), et Van den Akker e.a. (C-28/93, Rec. p. I-4527, point 21).

(2) - Voir, notamment, les arrêts précités Defrenne II, point 24, Coloroll Pension Trustees, point 26, et Van den Akker e.a., point 21.

(3) - Arrêt du 25 mai 1971, Defrenne (80/70, Rec. p. 445, points 7 et 8).

(4) - Tel est notamment le cas des régimes complémentaires d'entreprises (arrêt du 13 mai 1986, Bilka, 170/84, Rec. p. 1607, points 10 à 22), des régimes dont les règles constituent le résultat d'une concertation entre partenaires sociaux (arrêt du 6 octobre 1993, Ten Oever, C-109/91, Rec. p. I-4879, points 7 à 14) et des régimes professionnels «conventionnellement exclus» de droit britannique (arrêt du 17 mai 1990, Barber, C-262/88, Rec. p. I-1889, points 21 à 30).

(5) - Arrêts précités Barber, points 28 à 30, et Ten Oever, points 7 à 12.

(6) - Arrêts Bilka, précité, points 24 à 31; du 28 septembre 1994, Vroege (C-57/93, Rec. p. I-4541, points 11 à 18); Fisscher (C-128/93, Rec. p. I-4583, points 8 à 15), et du 24 octobre 1996, Dietz (C-435/93, Rec. p. I-5223, points 11 à 17).

(7) - Ce délai s'explique par la nécessité d'aménager une période suffisamment longue pour permettre aux milieux concernés de s'adapter aux principes édictés par l'EPA (point 2.2 des observations du gouvernement du Royaume-Uni).

(8) - Aux termes de l'article 1er, paragraphe 13, de l'EPA, les dispositions qui font référence aux femmes s'appliquent également aux hommes.

(9) - Arrêts précités Vroege, points 15 et 18, et Fisscher, points 12 et 15.

(10) - Arrêt Vroege, précité, point 17.

(11) - Arrêts précités Vroege, point 32, et Fisscher, point 28. Rappelons que, «en vertu de l'arrêt ... Barber, l'effet direct de l'article 119 du traité ne peut être invoqué, afin d'exiger l'égalité de traitement en matière de pensions professionnelles, que pour les prestations dues au titre de périodes d'emploi postérieures au 17 mai 1990...» (arrêt Ten Oever, précité, point 20).

(12) - Arrêts précités Vroege, point 30, et Fisscher, point 27 (souligné par nous).

(13) - Pour une description de ce type de régimes de pensions, voir les conclusions de l'avocat général M. Van Gerven sous l'arrêt Barber, précité, point 17, qui renvoient à l'arrêt du 3 décembre 1987, Newstead (192/85, Rec. p. 4753, point 3).

(14) - Jusqu'au 1er avril 1991, les travailleurs à temps partiel accomplissant moins de la moitié du nombre d'heures constituant un emploi à temps plein n'avaient pas le droit de s'affilier à ce régime de pensions. Depuis le 1er avril 1991, tous les travailleurs occupés par le National Health Service sont autorisés à s'y affilier.

(15) - Jusqu'au 1er mai 1995, les enseignants travaillant à temps partiel n'avaient pas le droit de s'affilier à ce régime de pensions si leur rémunération était calculée sur une base horaire ou s'ils percevaient déjà une pension d'enseignant. Ils avaient, toutefois, la possibilité de s'y affilier si leur rémunération était calculée sur la base d'une fraction de la rémunération d'un travailleur à temps plein. Depuis le 1er mai 1995, les travailleurs rémunérés sur une base horaire sont autorisés à
s'affilier au Teachers' Superannuation Scheme.

(16) - Jusqu'au 1er avril 1986, les travailleurs accomplissant moins de 30 heures par semaine étaient exclus de l'affiliation à ce régime de pensions. A compter du 1er avril 1986, le droit à l'affiliation fut accordé aux travailleurs à temps partiel accomplissant un minimum de 15 heures par semaine et de 35 semaines par an. Le 1er janvier 1993, la condition selon laquelle l'intéressé devait accomplir un minimum de 15 heures par semaine fut abrogée. Depuis le 1er mai 1995, tous les travailleurs à
temps partiel peuvent s'affilier au Local Government Superannuation Scheme.

(17) - Jusqu'au 1er octobre 1980, les travailleurs accomplissant moins de 34 heures et demie par semaine étaient exclus de l'affiliation à ce régime de pensions. A compter du 1er octobre 1980, le droit à l'affiliation fut accordé aux travailleurs à temps partiel accomplissant un minimum de 20 heures par semaine. Depuis le 1er avril 1988, tous les travailleurs à temps partiel peuvent s'affilier à l'Electricity Supply Pension Scheme.

(18) - Jusqu'au 1er janvier 1989, les travailleurs à temps partiel étaient exclus de l'affiliation à ce régime de pensions. Le 1er janvier 1989, la Midland Bank a institué un régime de retraite complémentaire, le Midland Bank Key-Time Pension Scheme. Furent autorisés à s'affilier à ce régime les travailleurs à temps partiel accomplissant au moins 14 heures par semaine. A compter du 1er septembre 1992, le droit à l'affiliation fut ouvert à tous les travailleurs à temps partiel. Le 1er janvier 1994,
les deux régimes de pensions ont fusionné. Toutefois, les périodes d'emploi accomplies avant le 1er janvier 1989 ne sont pas prises en considération pour le calcul de la pension des travailleurs à temps partiel. En outre, le droit à une pension au titre du régime est subordonné à la condition que l'intéressé ait accompli une période d'emploi valable pour la retraite d'au moins deux années.

(19) - Il s'agit de recours introduits par des femmes travaillant dans le secteur public (à savoir des employées du Wolverhampton Healthcare NHS Trust, des ministères de la Santé, de l'Éducation, de l'Emploi et de l'Environnement et d'un certain nombre d'autorités locales) ainsi que dans le secteur privé (à savoir des employées de la Midland Bank).

(20) - Ainsi qu'il résulte du rapport d'audience (p. 5 et 6).

(21) - Pages 34 et 35 de la traduction en français.

(22) - Il peut s'agir de contrats conclus pour un trimestre ou même pour la durée spécifique du cours dispensé.

(23) - Il s'agit d'enseignants qui travaillent lorsqu'ils y sont invités par l'autorité locale compétente en matière d'éducation.

(24) - Page 35 de la traduction en français.

(25) - Telle est l'interprétation que la House of Lords a faite de l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA (p. 17 à 21 de la traduction en français de l'ordonnance de renvoi).

(26) - Annexe 3 des observations déposées au nom de Birmingham City Council, Wolverhampton Metropolitan Borough Council, Manchester City Council, Stockport Metropolitan Borough Council, Lancashire County Council et North East Lincolnshire Council.

(27) - Voir également la page 7 de la traduction en français de l'ordonnance de renvoi ainsi que les points 3 et 4 de la décision de l'Industrial Tribunal de Birmingham du 4 décembre 1995.

(28) - Voir, en particulier, les arrêts du 16 décembre 1976, Rewe (33/76, Rec. p. 1989, point 5); Comet (45/76, Rec. p. 2043, point 13); du 27 février 1980, Just (68/79, Rec. p. 501, point 25); du 5 mars 1980, Ferwerda (265/78, Rec. p. 617, point 10); du 27 mars 1980, Denkavit (61/79, Rec. p. 1205, point 25); du 12 juin 1980, Express Dairy Foods (130/79, Rec. p. 1887, point 12); du 9 novembre 1983, San Giorgio (199/82, Rec. p. 3595, point 12); du 29 juin 1988, Deville (240/87, Rec. p. 3513, point
12); du 25 juillet 1991, Emmott (C-208/90, Rec. p. I-4269, point 16); Fisscher, précité, point 39; du 6 juillet 1995, BP Soupergaz (C-62/93, Rec. p. I-1883, point 41); du 14 décembre 1995, Peterbroeck (C-312/93, Rec. p. I-4599, point 12); Van Schijndel et Van Veen (C-430/93 et C-431/93, Rec. p. I-4705, point 17); Dietz, précité, point 36; du 10 juillet 1997, Palmisani (C-261/95, Rec. p. I-4025, point 27); du 17 juillet 1997, Haahr Petroleum (C-90/94, Rec. p. I-4085, point 46); du 2 décembre 1997,
Fantask e.a. (C-188/95, Rec. p. I-6783, point 47); du 15 septembre 1998, Edis (C-231/96, Rec. p. I-4951, point 19), et du 1er décembre 1998, Levez (C-326/96, Rec. p. I-7835, point 18, ci-après l'«arrêt Levez»).

(29) - Tel est le cas de Mmes Kynaston, Fletcher, Foster, Harrison et Lee (points 92 à 96 de la décision de l'Industrial Tribunal de Birmingham du 4 décembre 1995).

(30) - Arrêt Fantask e.a., précité, point 48. Voir également les arrêts précités Rewe, point 5; Comet, points 16 à 18; Just, point 22; Denkavit, point 23; Palmisani, point 28; Haahr Petroleum, point 48; Edis, point 20, et Levez, point 19.

(31) - Arrêt Fantask e.a., précité, point 48.

(32) - Voir, notamment, les arrêts précités Rewe, point 5; Comet, point 18, et Palmisani, point 28.

(33) - Arrêt du 27 octobre 1993, Steenhorst-Neerings (C-338/91, Rec. p. I-5475, point 22).

(34) - Dans l'affaire Rewe, précitée, le délai de «réclamation» prévu par la législation allemande était fixé à un mois. Dans l'affaire Comet, précitée, le délai de recours institué par la législation néerlandaise était fixé à 30 jours (conclusions présentées par l'avocat général M. Warner dans ces deux affaires, Rec. 1976, p. 2001 et 2002).

(35) - C-246/96, Rec. p. I-7153.

(36) - Il s'agissait de l'article 12 des Occupational Pension Schemes (Equal Access to Membership) Regulations (Northern Ireland) 1976 [règlements relatifs aux régimes professionnels de pensions (égalité du droit à l'affiliation) (Irlande du Nord), ci-après les «Occupational Pension Regulations (Northern Ireland)»]. Cette disposition prévoit que, dans les procédures concernant l'affiliation aux régimes professionnels de pensions, le droit à être admis au bénéfice du régime ne peut avoir d'effet pour
une période antérieure aux deux années qui ont précédé la date de l'introduction du recours (arrêt Magorrian, point 5).

(37) - Point 2 du dispositif.

(38) - Ainsi qu'il a été jugé au point 32 de l'arrêt Magorrian.

(39) - Arrêt Magorrian, point 32.

(40) - Ibidem, point 47.

(41) - Arrêts Steenhorst-Neerings, précité, point 16; du 6 décembre 1994, Johnson (C-410/92, Rec. p. I-5483, point 23); du 23 novembre 1995, Alonso-Pérez (C-394/93, Rec. p. I-4101, point 30), et Levez, point 20.

(42) - Arrêt Magorrian, point 1 du dispositif.

(43) - Arrêt Fisscher, précité, point 35.

(44) - Arrêt Magorrian, point 42 (souligné par nous).

(45) - Ibidem, point 43 (souligné par nous).

(46) - Ibidem (souligné par nous).

(47) - Ibidem, point 44.

(48) - Ibidem, point 45.

(49) - Ibidem, point 43.

(50) - Arrêt Dietz, précité, point 37. Voir également l'arrêt Fisscher, précité, point 40.

(51) - Arrêt Dietz, précité, point 37 (souligné par nous).

(52) - Voir les conclusions de l'avocat général M. Van Gerven sous les arrêts Vroege et Fisscher, précités, point 31, ainsi que les conclusions de l'avocat général M. Cosmas sous l'arrêt Dietz, précité, point 30.

(53) - Voir, en ce sens, l'arrêt Magorrian, point 46.

(54) - Nous nous fondons essentiellement sur les pages 26 à 34 de la traduction en français de l'ordonnance de renvoi ainsi que sur les points 92 à 96 de la décision de l'Industrial Tribunal de Birmingham du 4 décembre 1995.

(55) - En réalité, Mme Foster a introduit son recours plus de six mois après la fin de son emploi. Ce recours est donc irrecevable. Néanmoins, pour les besoins de notre raisonnement, nous supposerons qu'il a été déposé dans le délai prévu par l'article 2, paragraphe 4, de l'EPA.

(56) - Ou encore de Mmes Preston, Maltby, Cockrill, Nuttall, Barron, Gilbert, Walker, Culley et Guerin.

(57) - Ou encore de Mme Harris.

(58) - Notamment votre arrêt du 9 mars 1978, Simmenthal (106/77, Rec. p. 629).

(59) - Pages 13 et 14 de la traduction en français de l'ordonnance de renvoi.

(60) - En l'espèce, vous étiez notamment invités à préciser la portée du principe de l'équivalence afin de dire s'il s'opposait à l'application de l'article 2, paragraphe 5, de l'EPA à un recours formé au titre de l'article 119 du traité par une salariée qui visait à obtenir des arriérés de rémunération.

(61) - Points 41 à 48.

(62) - Points 46 à 48 (souligné par nous).

(63) - Arrêts précités Palmisani, points 34 à 38; Edis, point 36, et Levez, point 41.

(64) - Arrêts précités Palmisani, points 34 à 38, et Levez, point 43.

(65) - Arrêts précités Peterbroeck, point 14; Van Schijndel et Van Veen, point 19, et Levez, point 44.

(66) - Arrêts précités Edis, point 36, et Levez, point 42.

(67) - Arrêt Levez, point 39. Voir également l'arrêt Palmisani, précité, point 33.

(68) - Arrêt Levez, point 43.

(69) - Points 33 à 38.

(70) - Elles invoquent le Limitation Act 1980 et l'Industrial Tribunals Extension of Jurisdiction (England and Wales) Order 1994 (point 6.11 des observations des requérantes au principal).

(71) - Elles invoquent l'Employment Rights Act 1996 (point 6.14 des observations des requérantes au principal).

(72) - Points 50 à 69.

(73) - Voir les arrêts précités Vroege, points 28 et 29; Fisscher, points 25 et 26; Dietz, point 20, et Magorrian, points 28 et 29.

(74) - Arrêts précités Palmisani, point 33, et Levez, point 39.

(75) - Arrêt Levez, point 40.

(76) - Point 51.

(77) - Dans la suite de notre raisonnement, nous supposerons que ce «recours similaire de nature interne» est celui que nous avons défini au point 101 des présentes conclusions.

(78) - Voir, à cet égard, les observations du gouvernement du Royaume-Uni (points 5.34 à 5.40) et les observations déposées au nom de Southern Electric plc, South Wales Electricity Company plc, Electricity Pension Trustee Ltd, Midland Bank plc, Sutton College, Preston College, Grimsby College et Hull College (points 54 à 56).

(79) - Arrêt Levez, point 44. Voir également les arrêts précités Peterbroeck, point 14, et Van Schijndel et Van Veen, point 19.

(80) - Voir également les conclusions de l'avocat général M. Cosmas sous l'arrêt Palmisani, précité, points 22, 26 et 27.

(81) - Soulignons que la notion de «recours similaire de nature interne» ne peut, quant à elle, varier selon les circonstances propres aux différentes demanderesses au principal. En effet, ce recours est identifié à l'aide de critères objectifs (voir point 88 des présentes conclusions). Le «recours similaire de nature interne» sera donc identique pour l'ensemble des requérantes au principal.

(82) - Page 35 de la traduction en français.

(83) - Point 62 des observations déposées au nom de Southern Electric plc, South Wales Electricity Company plc, Electricity Pension Trustee Ltd, Midland Bank plc, Sutton College, Preston College, Grimsby College et Hull College.

(84) - Pages 17 à 21 de la traduction en français de l'ordonnance de renvoi.

(85) - Voir la troisième question préjudicielle, sous a) et b).

(86) - Arrêt Fantask e.a., précité, point 48 (souligné par nous).

(87) - Au point 6.6 de ses observations. Voir également les observations déposées au nom de Southern Electric plc, South Wales Electricity Company plc, Electricity Pension Trustee Ltd, Midland Bank plc, Sutton College, Preston College, Grimsby College et Hull College (points 67 et 68).

(88) - Arrêts précités Vroege, point 21, et Fisscher, point 18. Voir également les arrêts Defrenne II, points 69 à 75; Denkavit, précité, point 17; du 27 mars 1980, Salumi e.a. (66/79, 127/79 et 128/79, Rec. p. 1237, point 10); du 10 juillet 1980, Mireco (826/79, Rec. p. 2559, point 8); du 2 février 1988, Barra (309/85, Rec. p. 355, point 12), et Barber, précité, point 41.

(89) - Arrêts précités Vroege, point 21, et Fisscher, point 18.

(90) - Arrêt Vroege, précité, point 31. Voir également les arrêts précités Salumi e.a., point 11; Denkavit, point 18; Mireco, point 8; Barra, point 13, et Barber, point 41.

(91) - Arrêt Barber, précité, point 44.

(92) - Comme semble l'exiger votre jurisprudence (voir l'arrêt Defrenne II, point 74).

(93) - Voir, notamment, l'arrêt Barber, précité, point 43.

(94) - Voir, notamment, l'arrêt Denkavit, précité, points 19 à 21.

(95) - Arrêt Dietz, précité, point 20. Voir également les arrêts précités Vroege, points 28 et 29; Fisscher, points 25 et 26, et Magorrian, points 28 et 29.

(96) - Voir, en particulier, les arrêts précités Barra, point 14, et Vroege, point 31.

(97) - Voir, mutatis mutandis, l'arrêt Vroege, précité, point 31.

(98) - Arrêt Fisscher, précité, point 37.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-78/98
Date de la décision : 14/09/1999
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: House of Lords - Royaume-Uni.

Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Egalité de rémunération - Affiliation à un régime de pensions professionnel - Travailleurs à temps partiel - Exclusion - Modalités procédurales nationales - Principe d'effectivité - Principe d'équivalence.

Politique sociale


Parties
Demandeurs : Shirley Preston e.a.
Défendeurs : Wolverhampton Healthcare NHS Trust e.a. et Dorothy Fletcher e.a.

Composition du Tribunal
Avocat général : Léger
Rapporteur ?: Kapteyn

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1999:410

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