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30/04/2002 | CJUE | N°C-181/01

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, N contre Commission des Communautés européennes., 30/04/2002, C-181/01


Avis juridique important

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62001O0181

Ordonnance de la Cour (troisième chambre) du 30 avril 2002. - N contre Commission des Communautés européennes. - Pourvoi - Fonctionnaires - Sécurité sociale - Article 73 du statut - Notion d'accident - Refus de reconnaître comme accident une contamination par le VIH. - Affaire C

-181/01 P.
Recueil de jurisprudence 2002 page I-04075

Sommaire
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Avis juridique important

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62001O0181

Ordonnance de la Cour (troisième chambre) du 30 avril 2002. - N contre Commission des Communautés européennes. - Pourvoi - Fonctionnaires - Sécurité sociale - Article 73 du statut - Notion d'accident - Refus de reconnaître comme accident une contamination par le VIH. - Affaire C-181/01 P.
Recueil de jurisprudence 2002 page I-04075

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

Fonctionnaires - Sécurité sociale - Assurance accidents et maladies professionnelles - Accident - Notion - Acceptation d'un risque ou faute - Exclusion

tatut des fonctionnaires, art. 73; réglementation relative à la couverture des risques d'accident et de maladie professionnelle, art. 2, § 1)

Sommaire

$$Les notions d'acceptation d'un risque ou de faute ne ressortent pas de la définition de l'accident visée à l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation relative à la couverture des risques d'accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires. Leur application à un cas d'espèce ne peut donc conduire à empêcher qu'un événement ou un facteur extérieur soit qualifié d'accident, mais seulement à exclure un accident au sens de ladite réglementation de la couverture prévue à l'article 73 du
statut.

( voir point 21 )

Parties

Dans l'affaire C-181/01 P,

N, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me G. Durazzo, avvocato,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (cinquième chambre) du 13 février 2001, N/Commission (T-2/00, RecFP p. I-A-37 et II-135), et tendant à l'annulation de cet arrêt,

l'autre partie à la procédure étant:

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme F. Macken, président de chambre, MM. C. Gulmann (rapporteur) et J.-P. Puissochet, juges,

avocat général: M. L. A. Geelhoed,

greffier: M. R. Grass,

l'avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 25 avril 2001, N a, en vertu de l'article 49 du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 13 février 2001, N/Commission (T-2/00, RecFP p. I-A-37 et II-135, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation de la décision de la Commission refusant de considérer comme accident, au
sens des articles 73 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») et 2 de la réglementation relative à la couverture des risques d'accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la «réglementation accident»), la contamination du requérant par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et, d'autre part, au paiement de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

Les faits et les antécédents du litige

2 Les faits et les antécédents du litige sont exposés dans les termes suivants aux points 10 à 30 de l'arrêt attaqué:

«10 Le requérant, fonctionnaire de la Commission, a, par lettre du 9 février 1996, fait savoir à l'administration que de récents examens cliniques avaient révélé qu'il avait été contaminé par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH). Le requérant a joint en annexe à cette lettre une déclaration d'accident du 6 février 1996 et un certificat médical du docteur Vandercam.

11 Dans cette lettre, considérant que sa contamination devait être qualifiée d'accident au sens de l'article 2 de la réglementation accident, le requérant demandait que lui soient appliquées les dispositions de l'article 73 du statut ainsi que le remboursement à 100 % de ses frais médicaux en application de l'article 10 de la réglementation accident ou, jusqu'à la reconnaissance de l'origine accidentelle de son affection, sur le fondement des dispositions de l'article 72, paragraphe 1, premier
alinéa, du statut, relatives aux maladies d'une gravité particulière.

[...]

16 Par décision du 4 juin 1996, il a été accordé au requérant, en application de l'article 72, paragraphe 1, du statut, le remboursement à 100 % de ses frais médicaux.

17 Par lettre du 17 juin 1996, le chef de l'unité IX.B.5 [unité 5 Assurance maladie et accidents de la direction B Droits et obligations de la direction générale Personnel et administration (DG IX) de la Commission] a informé le requérant qu'il ne pouvait faire droit à sa demande relative à l'application de l'article 73 du statut.

18 Le 29 août 1996, le requérant a introduit une réclamation à l'encontre de cette décision.

19 Par lettre du 7 novembre 1996, l'AIPN [autorité investie du pouvoir de nomination] a informé le requérant que la décision du 17 juin 1996 était annulée [...] Il y était également mentionné qu'un projet de décision relatif à l'éventuelle reconnaissance de l'origine accidentelle de l'événement en cause lui serait notifié et que, dans ces conditions, la réclamation qu'il avait introduite était devenue sans objet.

20 Un projet de décision refusant de considérer comme accident au sens de l'article 73 du statut et de la réglementation accident sa contamination par le VIH a été transmis au requérant le 18 novembre 1996. Ce projet était fondé sur les conclusions du docteur Dalem du 18 octobre 1996.

[...]

22 Par courrier du 10 janvier 1997, le requérant a demandé que soit consultée la commission médicale.

[...]

24 Le rapport de la commission médicale, en date du 4 décembre 1998, énonce notamment:

"S'agissant de relations sexuelles entre adultes consentants pratiquant un comportement à risque reconnu de transmission du VIH, même si la contamination par le VIH s'est peut-être déroulée à l'occasion de la rupture d'un préservatif lors du rapport sexuel passif de février 1995, deux membres de la commission médicale estiment que sur le plan médical cette contamination ne peut être considérée comme un accident pour les raisons suivantes:

- l'acte sexuel consentant ne peut être considéré comme un événement ou facteur extérieur et soudain ou violent ou anormal ayant porté atteinte à l'intégrité physique ou psychique du fonctionnaire. Dans la problématique de l'acquisition sexuelle d'un agent pathogène, seul le viol rentre dans cette catégorie;

- [le requérant] ayant eu d'autres partenaires sexuels durant la même période, il est impossible, même en cas d'usage de préservatif, de certifier que l'affection actuelle résulte bien du (et uniquement du) contact sexuel avec le partenaire incriminé. En effet, une autre rupture (passée inaperçue ou non notifiée par le patient) de préservatif peut avoir eu lieu à un autre moment et avoir conduit à la contamination.

Pour relier la contamination à l'épisode incriminé, il aurait fallu, dans les heures qui ont suivi cet épisode, pratiquer un test de dépistage VIH (qui aurait dû être négatif) et, ensuite, contrôler à intervalle régulier, pendant un minimum de trois mois, l'apparition de la séropositivité. Cette procédure est celle qui est appliquée en cas de piqûre accidentelle avec des aiguilles contaminées. Ne pouvant établir avec certitude la relation de cause à effet entre l'événement incriminé et l'infection
[par le] VIH, il est a fortiori impossible de considérer cet événement comme un accident."

25 En conclusion, la commission médicale considère:

"Après avoir entendu [le requérant] et avoir examiné tous les documents en sa possession, en ce [...] compris les copies des différents rapports médicaux et lettres au médecin traitant, la commission médicale estime à la majorité de deux membres sur trois (Pr N. Clumeck et Dr J. Dalem) que l'affection [due au] VIH dont souffre [le requérant] ne peut être considérée comme un accident. Il s'agit d'un événement de la vie privée survenu lors de rapports sexuels entre adultes consentants, au même titre
que les autres affections sexuellement transmissibles que le patient a présentées dans ses antécédents.

Un membre de la commission (Dr P. Joppart) estime, quant à lui, que l'infection [par le] VIH répond bien à la définition d'un accident et résulte d'un facteur extérieur, soudain et anormal portant atteinte à l'intégrité physique et psychique [du requérant]."

[...]

28 Par lettre du 15 mars 1999, l'AIPN a notifié au requérant sa décision de considérer comme définitif son projet du 18 novembre 1996 (ci-après la décision [litigieuse]). Les conclusions de la commission médicale étaient jointes à cette lettre ainsi que l'intégralité de son rapport.

29 Le 10 juin 1999, le requérant a introduit une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision [litigieuse]. Le 15 juin 1999, les conseils du requérant ont déposé en son nom une réclamation. La Commission a considéré que la réclamation du 15 juin 1999 constituait un complément de celle du 10 juin 1999.

30 Une réunion interservices a eu lieu le 22 septembre 1999. La réclamation a été rejetée par décision transmise au requérant le 7 janvier 2000.»

L'arrêt attaqué

3 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 10 janvier 2000, N a demandé au Tribunal, notamment, d'annuler la décision litigieuse, de condamner la Commission à lui rembourser les honoraires médicaux qu'il a réglés en exécution de la décision litigieuse et à lui payer des dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

4 Le Tribunal a, aux points 36 à 70 de l'arrêt attaqué, rejeté la demande en annulation de la décision attaquée, notamment pour les motifs suivants:

«36 Le requérant invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique tiré de la violation de l'article 2 de la réglementation accident. Ce moyen est divisé en trois branches tirées, premièrement, d'une erreur de droit quant au lien de causalité requis entre l'événement dommageable et le facteur extérieur y ayant donné lieu, deuxièmement, d'une erreur de droit quant à la définition des critères de l'accident et, troisièmement, d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des critères de
l'accident. Les parties ont également formulé des observations relatives à l'interprétation du rapport de la commission médicale.

[...]

Sur le moyen unique, tiré d'une violation de l'article 2 de la réglementation accident

45 Avant d'aborder les différentes branches du moyen invoquées par le requérant, il convient d'interpréter le rapport de la commission médicale.

46 Le requérant allègue, en substance, que l'accident dont il a été victime est constitué par la rupture de préservatif qui serait intervenue au cours d'une relation sexuelle de février 1995 et qui aurait provoqué le contact entre le sperme ou le sang porteur du VIH et son organisme. À cet égard, il affirme que la commission médicale a effectivement considéré, dans son rapport, que sa contamination résulte d'une rupture de préservatif, que ce soit ou non celle de février 1995.

47 Il convient de constater que la commission médicale expose dans son rapport, concernant les circonstances de la contamination du requérant:

[Le requérant] situe l'épisode de contamination par le VIH au début de l'année 1995 (probablement en février) où, lors d'un rapport passif avec un partenaire occasionnel, une rupture de préservatif a eu lieu. À la même époque, le patient fait état de rapports sexuels actifs, passifs ou oraux avec d'autres partenaires occasionnels. Le préservatif n'étant pas utilisé systématiquement en cas de rapport oral.

48 Ces informations ont été recueillies par la commission médicale lors de sa réunion du 11 août 1998, au cours de laquelle le requérant a été entendu sur les circonstances précises de sa contamination. À cet égard, le Tribunal estime qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande du requérant d'être autorisé à apporter la preuve, notamment par des témoignages, que la commission médicale n'a pas tenu compte, à la suite de son audition et des explications qu'il a fournies concernant les
circonstances de la contamination, du caractère incomplet de sa déclaration d'accident.

49 Le rapport de la commission médicale mentionne également ce qui suit:

"S'agissant de relations sexuelles entre adultes consentants pratiquant un comportement à risque reconnu de transmission du VIH, même si la contamination s'est peut-être déroulée à l'occasion de la rupture de préservatif lors du rapport sexuel passif de février 1995, deux membres de la commission médicale estiment que, sur le plan médical, cette contamination ne peut être considérée comme un accident pour les raisons suivantes:

[...]

- [le requérant] ayant eu d'autres partenaires sexuels durant la même période, il est impossible, même en cas d'usage de préservatif, de certifier que l'affection résulte bien du (et uniquement du) contact sexuel avec le partenaire incriminé. En effet, une autre rupture (passée inaperçue ou non notifiée par le patient) de préservatif peut avoir eu lieu à un autre moment et avoir conduit à la contamination."

50 Or, il ressort de ces passages que, contrairement à l'affirmation du requérant, la commission médicale n'a pas considéré que seule une rupture de préservatif pouvait être la cause de la contamination mais s'est contentée de l'envisager comme étant l'une des causes possibles.

51 S'il est vrai que la commission médicale envisage qu'une autre rupture ait pu se produire lors d'un autre rapport sexuel afin de répondre à l'exposé du requérant sur les circonstances de sa contamination, selon lequel la rupture de préservatif contaminante a eu lieu en février 1995, il n'en demeure pas moins que les circonstances précises de la contamination lors d'un rapport sexuel restent, selon la commission médicale et en considération de l'anamnèse sexuelle du requérant, indéterminables.

52 Dès lors, la commission médicale n'ayant pu déterminer la cause de nature accidentelle à l'origine de la contamination du requérant, la Commission était fondée à entériner l'appréciation juridique de ladite commission, à savoir que, "[n]e pouvant établir avec certitude la relation de cause à effet entre l'événement incriminé et l'infection [par le] VIH, il est a fortiori impossible de considérer cet événement comme un accident".

Sur la première branche du moyen, tirée de l'existence d'une erreur de droit quant au lien de causalité requis

53 Le requérant soutient que, la commission médicale ayant estimé que la contamination résultait d'une rupture de préservatif, il n'était pas nécessaire d'identifier précisément le rapport sexuel au cours duquel la rupture est intervenue.

54 Toutefois, il a été précédemment constaté que la commission médicale n'a pas considéré que la contamination du requérant par le VIH s'était nécessairement déroulée à l'occasion d'une rupture de préservatif.

55 Dès lors, la prémisse sur laquelle le requérant fonde son grief étant erronée, la première branche du moyen est inopérante.

56 Il y a donc lieu d'écarter la première branche du moyen.

Sur la deuxième branche du moyen, tirée d'une erreur de droit quant aux critères de l'accident

57 Le requérant soutient que les notions de risque assumé et de faute contenues dans les articles 4 et 7 de la réglementation accident sont étrangères à la définition de l'accident visée à l'article 2, paragraphe 1, de ladite réglementation et que la commission médicale ne devait, par conséquent, pas les appliquer en l'espèce.

58 Il convient de rappeler que la commission médicale se réfère également, dans son rapport, à la circonstance selon laquelle sont en cause, en l'espèce, des relations sexuelles entre adultes consentants pratiquant un comportement à risque reconnu de transmission du VIH et affirme que l'acte sexuel consentant ne peut être considéré comme un accident (voir extraits pertinents au point 24 ci-dessus).

59 Il est vrai, comme l'allègue le requérant, que les notions d'acceptation d'un risque ou de faute ne ressortent pas de la définition de l'accident visée à l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident. Leur application à un cas d'espèce ne peut donc conduire à empêcher qu'un événement ou un facteur extérieur soit qualifié d'accident, mais seulement à exclure un accident au sens de ladite réglementation de la couverture prévue à l'article 73 du statut.

60 Toutefois, il convient de rappeler que la commission médicale ayant constaté que les circonstances précises de la contamination ne pouvaient être déterminées, il est, en l'absence d'accident identifié, sans pertinence de s'interroger sur l'existence d'un comportement à risque ou d'une faute intentionnelle du requérant. Partant, l'argument du requérant est dénué de pertinence.

61 En tout état de cause, l'utilisation par la commission médicale des expressions risque assumé et acte sexuel consentant constituent des appréciations générales ne tendant qu'à souligner le caractère volontaire du rapport sexuel invoqué par le requérant.

62 Il échet, par conséquent, de rejeter la deuxième branche du moyen.

Sur la troisième branche du moyen, tirée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des critères de l'accident

63 Dans ses mémoires, le requérant affirme, à titre principal, que le fait qu'il ait été contaminé lors d'une relation sexuelle au cours de laquelle le préservatif s'est rompu est un accident au sens de l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident. Lors de l'audience, le requérant a toutefois soutenu que la rupture de préservatif ne pouvait en soi être qualifiée d'accident au sens de l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident. Ce sont la rupture de préservatif et la
contamination, prises ensemble, qui constitueraient l'accident.

64 Or, comme il a été indiqué ci-dessus, la commission médicale a constaté qu'il est impossible de conclure que la contamination du requérant s'était nécessairement déroulée à l'occasion d'une rupture de préservatif.

65 Dès lors, il est inopérant d'alléguer que la rupture de préservatif lors d'une relation sexuelle satisfait aux critères de l'accident de l'article 2, paragraphe 1, de ladite réglementation.»

5 Le Tribunal a également, aux points 71 à 80 de l'arrêt attaqué, débouté le requérant de sa demande en dommages-intérêts.

Le pourvoi

6 Par son pourvoi, à l'appui duquel il invoque quatre moyens, N demande à la Cour d'annuler l'arrêt attaqué et de faire droit aux demandes introduites en première instance.

7 La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner N aux dépens de la procédure de pourvoi.

8 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l'article 119 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, le rejeter par voie d'ordonnance motivée.

Sur le premier moyen

9 Par la première branche du premier moyen, N fait valoir que, au regard des pièces du dossier, l'interprétation du rapport de la commission médicale effectuée par le Tribunal aux points 50 à 52 de l'arrêt attaqué est manifestement entachée de constatations matériellement inexactes qui dénaturent le contenu de ce rapport. Contrairement aux affirmations du Tribunal, il ressortirait du rapport de la commission médicale que celle-ci a exclu toute autre cause de contamination qu'une rupture de
préservatif, que cette rupture soit celle déclarée par N ou celle envisagée de façon hypothétique par ladite commission.

10 À cet égard, il convient de rappeler que, aux points 45 à 52 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a interprété le rapport de la commission médicale afin, notamment, d'examiner l'affirmation du requérant selon laquelle cette commission avait effectivement considéré que sa contamination résultait d'une rupture de préservatif, que ce soit ou non celle de février 1995.

11 Le Tribunal a interprété ce rapport en ce sens que

- la commission médicale s'est contentée d'envisager une rupture de préservatif comme l'une des causes possibles de la contamination, et que

- les circonstances précises de la contamination lors d'un rapport sexuel restent, selon ladite commission et en considération de l'anamnèse sexuelle du requérant, indéterminables.

12 En interprétant ainsi les points pertinents du rapport de la commission médicale cités aux points 47 et 49 de l'arrêt attaqué, le Tribunal ne peut certes pas se voir reprocher d'avoir dénaturé le contenu du rapport.

13 Dans ces conditions, la première branche du premier moyen doit être rejetée comme manifestement non fondée.

14 Par la seconde branche du premier moyen, N soutient que la commission médicale aurait dû se poser la question de la comparaison des risques et des probabilités de contamination entre un rapport oral et un rapport avec pénétration au cours duquel se produit une rupture de préservatif. Le rapport de cette commission ne pourrait pas être considéré comme établissant un lien compréhensible entre les constatations médicales et ses conclusions tel qu'exigé par la jurisprudence de la Cour.

15 Il convient à cet égard de relever que ce moyen, en tant qu'il critique le rapport de la commission médicale, n'a pas été soulevé par le requérant en première instance et constitue donc un moyen qui a été invoqué pour la première fois au stade du pourvoi.

16 Or, selon une jurisprudence constante, les articles 113, paragraphe 2, et 116, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour s'opposent à ce que des moyens nouveaux, non contenus dans le recours, soient présentés lors du pourvoi (voir, notamment, arrêt du 21 juin 2001, Moccia Irme e.a./Commission, C-280/99 P à C-282/99 P, Rec. p. I-4717, point 67).

17 Il s'ensuit que la seconde branche du premier moyen est irrecevable.

Sur le deuxième moyen

18 Par son deuxième moyen, le requérant conteste le bien-fondé en droit de l'interprétation par le Tribunal, aux points 57 à 62 de l'arrêt attaqué, de la notion d'accident au sens de l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident.

19 Selon le requérant, il découle de ces points que, si le Tribunal avait constaté, comme il l'aurait dû, que l'accident à l'origine de la contamination était identifié par le rapport de la commission médicale, il aurait nécessairement jugé que le fait pour le requérant de s'être engagé volontairement dans un rapport sexuel à risque constituait une cause d'exclusion de la couverture de l'assurance. Or, une telle interprétation ne pourrait se fonder ni sur l'article 4 ni sur l'article 7 de la
réglementation accident, qui prévoient tous deux des cas d'exclusion de la couverture prévue à l'article 73 du statut.

20 À cet égard, il y a lieu de relever que, d'une part, ce moyen postule qu'il ait été fait droit au premier moyen du pourvoi. Or, tel n'est pas le cas.

21 D'autre part, ce moyen se fonde sur une lecture manifestement erronée de l'arrêt attaqué. En effet, au point 59 de celui-ci, le Tribunal a fait sienne l'analyse du requérant, en constatant que les notions d'acceptation d'un risque ou de faute ne ressortent pas de la définition de l'accident visée à l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident et que leur application à un cas d'espèce ne peut donc conduire à empêcher qu'un événement ou un facteur extérieur soit qualifié d'accident,
mais seulement à exclure un accident au sens de ladite réglementation de la couverture prévue à l'article 73 du statut.

22 Toutefois, rappelant que la commission médicale a constaté que les circonstances précises de la contamination ne pouvaient être déterminées, le Tribunal a considéré à juste titre qu'il était sans pertinence de s'interroger sur l'existence d'un comportement à risque ou d'une faute intentionnelle du requérant. Aussi, contrairement à ce que prétend le requérant, le Tribunal ne s'est nullement prononcé sur la question de savoir si son comportement constitue une cause d'exclusion de la couverture
prévue à l'article 73.

23 Par conséquent, le deuxième moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé.

Sur le troisième moyen

24 Par son troisième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal aurait dû prendre position sur la question de savoir si une rupture de préservatif constitue un accident au titre de l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident. Renvoyant au premier moyen, selon lequel le Tribunal aurait dénaturé les conclusions de la commission médicale, il soutient que les affirmations du Tribunal, aux points 64 et 65 de l'arrêt attaqué, selon lesquelles il est inopérant, en l'espèce, d'alléguer
qu'une rupture de préservatif lors d'une relation sexuelle satisfait aux critères de l'accident énoncés à l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident, sont dénuées de fondement.

25 Il suffit à cet égard de rappeler que, ainsi qu'il a été constaté aux points 11 et 12 de la présente ordonnance, le Tribunal, en jugeant, au point 51 de l'arrêt attaqué, que les circonstances précises de la contamination du requérant restaient indéterminables, n'a pas dénaturé le rapport de la commission médicale.

26 Le Tribunal a donc, à juste titre, considéré que, au vu de ces circonstances, il était inopérant de prendre position sur la question de savoir si une rupture de préservatif lors d'une relation sexuelle satisfait aux critères de l'accident énoncés à l'article 2, paragraphe 1, de la réglementation accident.

27 Le troisième moyen doit, dès lors, être rejeté comme manifestement non fondé.

Sur le quatrième moyen

28 Par son quatrième moyen, le requérant reproche au Tribunal d'avoir rejeté sa demande en indemnité. Il fait valoir que le comportement de l'AIPN et les irrégularités qu'elle a commises, ne serait-ce que pour le retard qu'elle a provoqué dans la conclusion de la procédure, ont eu sur lui un effet psychologique et de stress supérieur à celui supporté par une personne en parfait état de santé ou dans le cas d'un contentieux de fonction publique ordinaire.

29 À cet égard, il y a lieu de relever qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour qu'un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, ordonnance du 11 décembre 2001, Meyer/Commission, C-301/00 P, non encore publiée au Recueil).

30 Or, faute d'identifier l'erreur de droit que le Tribunal aurait commise en rejetant sa demande en indemnité, le requérant n'a pas indiqué de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt attaqué.

31 Il y a donc lieu de rejeter le quatrième moyen comme manifestement irrecevable.

32 Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté dans sa totalité.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

33 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de N aux dépens et celui-ci ayant succombé en son pourvoi, il y a lieu de le condamner aux dépens de la présente instance.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (troisième chambre)

ordonne:

1) Le pourvoi est rejeté.

2) N est condamné aux dépens.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : C-181/01
Date de la décision : 30/04/2002
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours de fonctionnaires

Analyses

Pourvoi - Fonctionnaires - Sécurité sociale - Article 73 du statut - Notion d'accident - Refus de reconnaître comme accident une contamination par le VIH.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : N
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Geelhoed
Rapporteur ?: Gulmann

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2002:274

Source

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