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30/05/2013 | CJUE | N°C-50/12

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Kendrion NV contre Commission européenne., 30/05/2013, C-50/12


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 30 mai 2013 ( 1 )

Affaire C‑50/12 P

Kendrion NV

contre

Commission européenne

«Pourvoi — Concurrence — Entente — Marché des sacs industriels en plastique — Amendes — Violation du droit fondamental d’être entendu dans un délai raisonnable par le Tribunal»

Avant-propos

1. Le 16 novembre 2011, le Tribunal de première instance a rendu trois arrêts ( 2 ) rejetant les recours en annulation dirigés contre la dé

cision de la Commission européenne clôturant l’affaire COMP/38354 – sacs industriels ( 3 ). Dans cette décision, la Commission a constat...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 30 mai 2013 ( 1 )

Affaire C‑50/12 P

Kendrion NV

contre

Commission européenne

«Pourvoi — Concurrence — Entente — Marché des sacs industriels en plastique — Amendes — Violation du droit fondamental d’être entendu dans un délai raisonnable par le Tribunal»

Avant-propos

1. Le 16 novembre 2011, le Tribunal de première instance a rendu trois arrêts ( 2 ) rejetant les recours en annulation dirigés contre la décision de la Commission européenne clôturant l’affaire COMP/38354 – sacs industriels ( 3 ). Dans cette décision, la Commission a constaté que les entreprises prévenues s’étaient rendues coupables d’une violation grave et durable de ce qui était à l’époque l’article 81 CE (devenu article 101 TFUE) et elle a imposé de lourdes amendes à un certain nombre de sociétés
filiales et à leurs sociétés mères respectives. Plusieurs d’entre elles, dont Kendrion NV (ci-après «Kendrion»), ont engagé un pourvoi contre les arrêts du Tribunal ( 4 ).

2. Outre les questions de droit de la concurrence qu’ils soulèvent, ces pourvois font grief au Tribunal d’avoir enfreint l’article 47 de la charte des droits fondamentaux (ci-après la «Charte») en ne statuant pas dans un délai raisonnable. Dans ces conditions, il incombe évidemment à la Cour de s’employer à traiter les pourvois en toute diligence. Afin de me plier à cette contrainte sans perdre de vue le temps nécessaire à la traduction, j’ai réparti les questions auxquelles je voudrais apporter une
réponse entre les trois mémoires de conclusions de la manière suivante.

3. J’exposerai les principales dispositions de droit applicables, puis je décrirai l’entente ainsi que la procédure qui a précédé la décision de la Commission et les amendes infligées aux points 6 à 34 des conclusions que je présenterai dans l’affaire Gascogne Sack Deutschland/Commission ( 5 ). Chaque pourvoi soulevant des points légèrement différents en ce qui concerne les circonstances dans lesquelles les sociétés mères sont, ou ne sont pas, responsables des agissements des filiales qu’elles
détiennent à 100 %, j’aborderai cette question dans chacune des affaires distinctement. Quant aux questions soulevées par le grief fait au Tribunal de n’avoir pas statué dans un délai raisonnable, je développerai mon analyse (concernant, en particulier, les critères permettant de déterminer si le Tribunal a pris un retard excessif ainsi que les éventuelles corrections disponibles si tel a été le cas) aux points 70 à 150 des conclusions que je présenterai dans l’affaire Groupe
Gascogne/Commission ( 6 ). Quant aux arguments détaillés articulés par chacun des requérants à propos (par exemple) de la correction du raisonnement tenu par le Tribunal dans ses arrêts, je les examinerai séparément dans chacune de ces trois affaires ( 7 ).

Introduction

4. Kendrion et son ancienne filiale Fardem Packaging BV (ci-après «Fardem») sont deux des vingt-cinq entreprises auxquelles la décision a été adressée. Kendrion (qui s’appelait à l’époque Schuttersveld) a acheté Fardem le 8 juin 1995 en se portant acquéreuse de 100 % du capital de celle-ci. En 2003, Fardem a quitté le Groupe Kendrion lorsqu’elle a été rachetée par les employés de Fardem.

5. Fardem a reconnu sa participation à l’entente. Kendrion a contesté avoir exercé une influence décisive ou un quelconque contrôle sur les agissements de Fardem, mais elle n’a pas pu convaincre la Commission, qui l’a condamnée conjointement et solidairement pour les pratiques dont sa filiale s’était rendue coupable du 8 juin 1995 au 26 juin 2002.

6. Le présent pourvoi soulève la question de la définition de la notion d’entreprise aux fins de l’application des règles de concurrence et met en cause, en particulier, le principe suivant lequel les sociétés mères sont responsables des infractions commises par leurs filiales à 100 % ( 8 ). L’identité de l’entreprise a une forte incidence sur le calcul du montant des éventuelles amendes infligées, notamment en ce qui concerne l’application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires (ci-après le
«plafond de 10 %») prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1/2003 ( 9 ). L’application de cette disposition soulève des problèmes épineux lorsque l’entreprise coupable de l’infraction n’a plus la même structure au moment où le plafond de l’amende est calculé.

7. La question de savoir si le Tribunal a indument tardé à statuer a également été soulevée.

La décision

Introduction

8. Il est nécessaire de définir l’entreprise tenue pour responsable d’une violation de l’article 101 TFUE en identifiant une ou plusieurs personnes morales représentant l’entreprise en question. Il est de jurisprudence constante que le comportement d’une filiale peut être imputé à sa société mère, en particulier lorsque la filiale n’a pas le pouvoir de déterminer sa propre politique commerciale en toute indépendance. En pareil cas, une société mère et sa filiale constituent une seule et même
entreprise aux fins de l’application de l’article 101 TFUE. La Commission peut adopter une décision infligeant une amende à la société mère sans avoir à établir l’implication individuelle de celle‑ci dans l’infraction. Lorsqu’une société mère détient 100 % du capital, il existe une présomption qu’elle est en mesure d’exercer une influence décisive sur sa filiale ainsi qu’une présomption réfragable qu’elle exerce effectivement pareille influence (ci-après la «présomption d’influence décisive»).

Identifier l’entreprise

9. Aux points 577 à 583 de l’exposé des motifs de la décision, la Commission expose les principes qu’elle a appliqués pour identifier les destinataires de celle-ci. Après avoir rappelé les présomptions que je viens de décrire, elle explique au point 582 que, lorsqu’une entreprise enfreint l’article 101 TFUE, qu’elle se défait ensuite de la filiale qui avait effectivement pris une part active aux menées anticoncurrentielles et qu’elle se retire elle-même du marché concerné, elle demeure tenue de
répondre de l’infraction en question ( 10 ).

10. Au point 584, la Commission explique qu’elle a appliqué cette approche au cas par cas à chaque entreprise ayant participé à l’entente. Ce faisant, elle a établi une distinction entre les sociétés mères dont la participation à l’infraction était manifeste et les sociétés mères destinataires de la décision au seul motif qu’elles sont considérées comme étant conjointement et solidairement responsables du comportement anticoncurrentiel de leurs filiales.

Les amendes

11. Dans la décision, la Commission a fixé le montant de base de l’amende de Fardem à 20 millions d’euros ( 11 ). Elle a ensuite appliqué une majoration de 200 % à ce montant, c’est-à-dire une augmentation de 40 millions d’euros, qui reflète la durée considérable de vingt ans et cinq mois, comprise entre le 6 janvier 1982 et le 26 juin 2002, durant laquelle Fardem a participé à l’entente. Ajoutée au montant de base de 20 millions, cette majoration aboutit à une amende de 60 millions d’euros ( 12 ).

12. Voici ce que la Commission a déclaré au point 782 de la décision:

«Pour plusieurs sociétés tenues pour responsables en leur qualité de société mère, il doit être tenu compte de la durée réduite de leur responsabilité […]:

— Kendrion NV (à l’égard de Fardem Packaging) du 8 juin 1995 au 26 juin 2002, soit une période de 7 ans […]».

13. La décision ne mentionne pas expressément le montant de base de l’amende de Kendrion. Il est toutefois implicite que ce montant était de 20 millions d’euros, à savoir le montant de base de l’amende de Fardem, et que ce montant de base a été retenu pour Kendrion en raison de sa responsabilité conjointe et solidaire du paiement de l’amende de Fardem ( 13 ). Au titre des sept années durant lesquelles Kendrion avait détenu Fardem, la Commission a appliqué une majoration de 70 % à ce montant, ce qui
aboutit à la somme de 14 millions d’euros ( 14 ), qui, ajoutée aux 20 millions d’euros du montant de base, donne 34 millions d’euros, qui est le montant de l’amende infligée à Kendrion ( 15 ).

14. Aux points suivants de l’exposé des motifs de la décision, la Commission explique ensuite comment elle a appliqué le plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 ( 16 ):

«814. Le plafond de 10 %, lorsque plusieurs destinataires constituent l’‘entreprise’ au sens de l’entité économique responsable de l’infraction sanctionnée, et ce encore à la date d’adoption de cette décision, […] peut être calculé sur la base du chiffre d’affaires global de cette entreprise, c’est-à-dire de toutes ses composantes cumulées. En revanche, si cette unité économique a entre-temps été rompue, chaque destinataire de la décision a le droit de se voir appliquer individuellement le
plafond en cause.

[…]

820. Fardem Packaging BV est sortie du Groupe Kendrion qui a formé l’entité économique responsable de l’infraction en 2003. Il y a donc lieu de prendre pour référence le chiffre d’affaires global de Fardem Packaging BV pour le calcul de la limite de l’amende imputable à cette dernière. Le chiffre d’affaires réalisé à l’échelle mondiale par Fardem Packaging BV en 2004, dernière année complète précédant la présente décision, s’est élevé à 22 036 136 euros. L’amende infligée à Fardem Packaging doit
par conséquent être limitée au montant de 2,20 millions d’euros.»

Comme le chiffre d’affaires mondial de Kendrion excédait certain montant en deçà duquel les amendes sont plafonnées, la Commission ne lui a appliqué aucune réduction, le montant de son amende demeurant fixé à 34 millions d’euros.

15. La Commission a ajouté, au point 879 de la décision, que:

«En conclusion, les amendes à infliger en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 17 et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1/2003 doivent être les suivantes: […] Kendrion NV: 34 millions d’euros. Sur ce montant, Fardem Packaging BV est tenue conjointement et solidairement responsable à hauteur de 2,20 millions d’euros. […]».

16. À l’article 2, sous d), du dispositif de la décision, les amendes infligées sont les suivantes: «Kendrion NV: 34 millions d’euros. Sur ce montant, Fardem Packaging BV est tenue conjointement et solidairement responsable à hauteur de 2,20 millions d’euros».

Sommaire de l’arrêt entrepris

17. En première instance ( 17 ), Kendrion a demandé au Tribunal:

— d’annuler en tout ou en partie la décision qui lui a été adressée;

— d’annuler ou de réduire l’amende qui lui a été imposée;

— de condamner la Commission aux dépens.

18. À l’audience du Tribunal, Kendrion a dénoncé la durée excessive de la procédure, mais le Tribunal a rejeté cet argument comme étant inopérant. Il a jugé que sa juridiction couvrait uniquement la décision, laquelle doit être considérée à la lumière des faits et des circonstances dont la Commission avait connaissance à la date de son adoption, et que la durée de la procédure qui s’est déroulée devant lui n’avait aucune incidence sur la légalité de la décision.

19. Le premier moyen que Kendrion a articulé devant le Tribunal était déduit d’une violation des articles 101 TFUE et 296 TFUE ( 18 ) et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 en ce que le dispositif de la décision était incompatible avec ces motifs. Le deuxième moyen était déduit de l’erreur qu’aurait commise la Commission en considérant que Kendrion et Fardem constituaient une seule entité économique. Par son troisième moyen, Kendrion faisait grief à la Commission d’avoir, en
considérant que Kendrion était responsable de l’infraction commise par sa filiale à 100 % Fardem, enfreint un certain nombre de principes généraux du droit, notamment le principe d’égalité de traitement, et de ne pas s’être acquittée de l’obligation de motiver sa décision de manière adéquate.

20. Les quatrième, cinquième, sixième, septième et huitième moyens étaient dirigés contre l’amende. Par son quatrième moyen, Kendrion soutenait que l’amende qui lui avait été infligée par la décision ne pouvait pas être supérieure à celle qui avait été imposée à Fardem. Le cinquième moyen était pris d’une différence de traitement, Kendrion affirmant qu’elle avait été traitée différemment d’autres sociétés mères jugées conjointement et solidairement responsables des infractions commises par leurs
filiales. La Commission se serait ainsi rendue coupable d’une violation du principe d’égalité de traitement.

21. Le sixième moyen s’articulait en deux branches. Kendrion prétendait, en premier lieu, qu’imposer une amende de 60 millions d’euros à Fardem était incompatible avec les principes généraux du droit, notamment le principe de proportionnalité, étant donné que le chiffre d’affaires annuel de Fardem s’élevait à 20 millions, la décision étant en outre insuffisamment motivée sur ce point. Kendrion soutenait, en second lieu, que, si Fardem obtenait gain de cause dans l’affaire T‑51/06 ( 19 ) (ayant pour
objet un recours en annulation dirigé contre la décision) et que le Tribunal réduisait le montant de son amende, le montant de base de l’amende de Kendrion devrait forcément être réduit également.

22. Dans son septième moyen, Kendrion soulevait un certain nombre d’arguments dont il résultait qu’imposer une amende à une société mère qui n’avait pas participé elle-même à l’infraction était une décision sans précédent. Dans son huitième moyen, enfin, Kendrion faisait grief à la Commission de ne pas avoir observé ses lignes directrices de 1998 ( 20 ).

23. Le Tribunal a rejeté le recours de Kendrion en totalité.

Moyens du pourvoi

24. Kendrion a invoqué quatre moyens à l’appui de son pourvoi, qui peuvent être résumés de la manière suivante.

25. Premièrement, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant que la Commission avait exposé à suffisance de droit les raisons pour lesquelles elle a infligé à Kendrion une amende plus lourde qu’à Fardem, son ancienne filiale.

26. Deuxièmement, lorsqu’il a examiné le point de savoir si Kendrion devait être tenue pour conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à Fardem, i) le Tribunal aurait commis une erreur de droit en n’examinant pas les principaux éléments de preuve; ii) il aurait commis des erreurs de procédure, notamment en ce qui concerne la répartition de la charge de la preuve et iii) il aurait manifestement interprété les faits de façon erronée et apprécié les preuves de manière
incorrecte. De surcroît, le Tribunal n’aurait pas suffisamment motivé ses conclusions ni répondu à suffisance de droit aux arguments que Kendrion avait avancés.

27. Le troisième moyen du pourvoi s’articule en trois branches. Premièrement, Kendrion fait grief au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit lorsqu’il a considéré que, bien qu’elle n’eût pas elle‑même participé à l’infraction, Kendrion devait supporter une amende plus élevée que celle de son ancienne filiale. Deuxièmement, en retenant cette solution, le Tribunal aurait enfreint le principe d’égalité de traitement dès lors que Kendrion est la seule société mère destinataire de la décision à
laquelle a été infligée une amende plus élevée que celle de sa filiale. Troisièmement, le raisonnement tenu par le Tribunal serait contradictoire et inadéquat dans la mesure où il a jugé que Kendrion était conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à Fardem. L’amende infligée à celle-ci s’élève à 2,2 millions d’euros, alors que celle de Kendrion se monte à 34 millions d’euros.

28. Par le quatrième moyen qu’elle invoque à l’appui de son pourvoi, Kendrion fait grief au Tribunal d’avoir jugé à tort que l’argument qu’elle avait déduit de la durée excessive de la procédure était inopérant. En statuant ainsi, le Tribunal semble considérer n’être pas compétent à se prononcer sur les irrégularités de la procédure qui s’est déroulée devant lui. Même si le Tribunal n’a pas lui-même le pouvoir de réduire les amendes lorsqu’il a statué avec un retard excessif, la Cour serait, en tout
état de cause, tenue de statuer sur ce point, essentiel pour la sécurité juridique, et d’en tirer les conséquences appropriées.

29. Par le deuxième moyen qu’elle articule à l’appui de son pourvoi, Kendrion fait, en substance, grief au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit lorsqu’il a jugé qu’elle-même et Fardem constituaient une seule entreprise aux fins de l’application de l’article 101 TFUE. Si le pourvoi de Kendrion prospère sur ce point, les arguments formulés à l’appui des premier et troisième moyens du pourvoi (concernant le montant de l’amende) devraient nécessairement être accueillis eux aussi. C’est la raison
pour laquelle j’examinerai le deuxième moyen du pourvoi en premier lieu.

Deuxième moyen du pourvoi: l’identité de l’entreprise aux fins de l’application de l’article 101 TFUE

Résumé des arguments

Le pourvoi de Kendrion

30. Kendrion articule la démonstration de son argument général suivant lequel elle et Fardem ne constituaient pas une entreprise en cinq points principaux.

31. Premièrement, le Tribunal aurait commis des erreurs de procédure et des erreurs de droit lorsqu’il a constaté que Kendrion était conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à Fardem parce qu’il n’aurait pas examiné tous les éléments de preuve. En particulier, il aurait manifestement interprété les faits de manière erronée et apprécié de façon incorrecte celles des preuves qu’il a examinées. Il n’aurait pas suffisamment motivé ses conclusions et n’aurait analysé
les arguments de Kendrion que de façon insuffisante.

32. Deuxièmement, le Tribunal aurait, au point 53 de l’arrêt entrepris, commis une erreur de droit lorsqu’il a déclaré que c’est à Kendrion qu’il incombait de réfuter les quatre éléments supplémentaires indiquant qu’elle a exercé une influence décisive sur la politique commerciale de Fardem. Selon Kendrion, c’est à la Commission qu’il appartenait de démontrer i) que ces éléments existaient véritablement et ii) qu’ils démontraient que Kendrion exerçait une influence décisive.

33. Troisièmement, le Tribunal s’est trompé en déclarant que Kendrion n’avait réfuté aucun des quatre éléments supplémentaires sur lesquels la Commission se fondait pour démontrer que Kendrion avait effectivement exercé une influence décisive sur la politique commerciale de Fardem.

34. Quatrièmement, la solution retenue en l’espèce serait unique en ce qu’une société mère n’ayant pas participé à des agissements anticoncurrentiels s’est vu infliger une amende plus élevée que celle qui a été imposée à sa filiale coupable de l’infraction. En pareilles circonstances, le raisonnement développé dans la décision aurait dû être passé au crible avec une rigueur particulière, ce que le Tribunal n’aurait pas fait. Il aurait ainsi commis une erreur de droit et, en tout état de cause,
n’aurait pas fourni de motifs suffisants à l’appui de son arrêt.

35. Cinquièmement, Kendrion fait valoir à titre subsidiaire que, si la Cour devait juger suffisants les éléments supplémentaires invoqués par la Commission, la question se pose de savoir si le Tribunal a correctement apprécié les preuves qui lui ont été fournies pour démontrer le contraire. Selon Kendrion, le Tribunal aurait ignoré les preuves qui lui ont été fournies ou ne les aurait pas correctement examinées. Ces preuves auraient dû empêcher le Tribunal de conclure que la Commission avait
démontré que Kendrion et Fardem constituaient une entité économique. En tout état de cause, le Tribunal aurait commis une erreur en imputant à Kendrion la responsabilité de l’infraction commise par Fardem.

La réponse de la Commission

36. La Commission considère que le deuxième moyen du pourvoi est partiellement irrecevable et partiellement infondé.

37. En déclarant Kendrion responsable d’une infraction commise par Fardem, la Commission s’est fondée uniquement sur le fait que Fardem était une filiale de Kendrion à 100 % au moment des faits et sur la présomption d’influence décisive. Si quatre éléments supplémentaires ont bel et bien été mentionnés dans la décision, ils n’ont pas été retenus comme étant déterminants.

38. L’argument de Kendrion concernant la charge de la preuve serait inopérant. Seul le Tribunal serait compétent à apprécier les faits. Le grief que Kendrion fait au Tribunal d’avoir incorrectement apprécié les quatre éléments supplémentaires serait dès lors irrecevable.

Appréciation

39. Ce moyen du pourvoi s’articule autour de la notion d’entreprise en droit de la concurrence et des éléments de preuve nécessaires pour établir l’existence de pareille entité lorsqu’une société mère est propriétaire à 100 % de sa filiale.

40. L’article 101 TFUE interdit tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché intérieur. La notion d’«entreprise» n’est pas définie dans le traité, mais il est essentiel de la préciser pour déterminer si les règles de la concurrence du droit de
l’Union s’appliquent et comment établir la responsabilité d’une infraction. La question soulevée en l’espèce porte sur ce dernier point. Quelle est l’entreprise responsable de la violation des règles de la concurrence et de quelle manière l’amende éventuelle doit-elle être calculée?

41. La Cour a examiné la notion d’entreprise responsable à plusieurs occasions. La jurisprudence a évolué depuis que Kendrion a engagé son recours en annulation devant le Tribunal ( 21 ). La manière dont la Cour a interprété le terme «entreprise» est au centre d’une controverse ( 22 ). Quoi qu’il en soi, il est de jurisprudence constante que la notion d’entreprise désigne toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement.
Cette notion doit être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales. Lorsqu’une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction. En particulier, le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique
distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques. En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 101 TFUE, la Commission peut
adresser une décision imposant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction ( 23 ).

42. Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale coupable d’une infraction aux règles de la concurrence de l’Union, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une telle influence. Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue
par sa société mère pour qu’il puisse être présumé que cette dernière exerce effectivement une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon
autonome sur le marché. Il convient de souligner que la présomption est réfragable ( 24 ) et que la charge de la preuve en incombe à la société mère.

43. La Commission n’est pas tenue de se fonder exclusivement sur cette présomption. Rien ne l’empêche d’établir qu’une société mère a effectivement exercé une influence déterminante sur sa filiale au moyen d’autres éléments de preuve ou par une combinaison de pareils éléments et de la présomption (ci-après la «méthode combinée»).

44. Lorsque la Commission opte pour la méthode combinée, elle s’impose, par définition, des contraintes plus lourdes en matière de preuve ( 25 ). Lorsqu’il contrôle sa décision, le Tribunal doit alors examiner si la Commission a démontré le bien-fondé de ses conclusions d’une manière conforme à ces contraintes renforcées accrues. C’est donc à la Commission qu’il appartient, en premier lieu, d’apporter les éléments nécessaires à un niveau de preuve établissant les faits sur lesquels elle se fonde
pour démontrer l’influence décisive de la société mère. Si cette dernière conteste alors ces éléments, la charge de la preuve est renversée et c’est à elle qu’il appartiendra de les réfuter.

Appréciation du Tribunal

45. Au point 53 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a constaté que la Commission avait appliqué la méthode combinée pour fonder sa décision.

46. Il a ensuite identifié, au point 53 de l’arrêt entrepris, les quatre éléments supplémentaires invoqués par la Commission et déclaré que c’était à Kendrion qu’il appartenait de prouver que ces éléments n’établissaient pas qu’elle avait exercé une influence décisive sur Fardem:

«53 Dans la présente affaire, la Commission ne s’est pas limitée à invoquer la circonstance selon laquelle la requérante détenait 100 % du capital de Fardem Packaging. En effet, la décision […] se réfère également à quatre autres éléments supplémentaires, à savoir le courriel interne du 9 janvier 2002 de M. L. (considérant 595), le courriel interne de Fardem Packaging du 14 décembre 1999 relatif à une question d’assurance (considérant 596), une note manuscrite prise lors d’une réunion du
sous-groupe ‘Teppema’, dans laquelle il est fait référence à un responsable de Fardem Packaging chez la requérante (considérant 597), ainsi que le rapport fait par Fardem Packaging à la requérante sur la gestion courante (considérants 106 et 590). Il convient, dès lors, d’examiner d’abord si la requérante a réussi à réfuter ces quatre éléments supplémentaires» ( 26 ).

47. Aux points 54 à 60 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a examiné les preuves fournies à l’appui de ces quatre éléments supplémentaires. Il ressort du point 61 que le Tribunal a estimé que Kendrion n’était parvenue à réfuter qu’un seul d’entre eux. Il a dès lors conclu que Kendrion n’avait pas réfuté les trois autres éléments supplémentaires avancés par la Commission, lesquels démontraient que la société mère avait effectivement exercé une influence décisive sur Fardem.

48. Aux points 63 à 68 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a ensuite examiné les preuves que Kendrion avait fournies pour renverser la présomption d’influence décisive et constaté qu’il n’existait aucun lien entre Kendrion et Fardem sur le plan opérationnel: ces deux sociétés n’avaient pas les mêmes fournisseurs ni les mêmes clients et n’utilisaient pas les mêmes procédés de fabrication. Au point 64 de l’arrêt entrepris, il a néanmoins déclaré que: «Cette seule constatation ne suffit cependant pas à
établir que Fardem Packaging agissait de façon autonome par rapport à la requérante».

49. Aux points 65 et 67 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a ajouté que:

«65. […] On ne saurait dès lors déduire ni des rapports annuels ni de la taille relative de Fardem Packaging que celle-ci se comportait de façon autonome.

[…]

67. […] Il convient de préciser, à cet égard, que l’absence d’instruction de la part de la requérante sur la gestion quotidienne (dagelijks beheer) de Fardem Packaging ne signifie pas que celle-ci pouvait se comporter de façon autonome» ( 27 ).

Analyse

50. Il est de jurisprudence constante que l’obligation de motiver les arrêts, qui incombe au Tribunal en vertu des articles 36 et 53, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, n’impose pas à celui-ci de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties au litige. La motivation peut donc être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons sur lesquelles se fonde l’arrêt attaqué et à la Cour de disposer
des éléments suffisants pour exercer son contrôle dans le cadre d’un pourvoi ( 28 ).

51. Le Tribunal a constaté que la Commission avait procédé suivant la méthode combinée. Il s’agit d’un élément de fait, qui ne peut donc pas être contesté en instance de pourvoi. Eu égard à cette constatation et au fait que la Commission avait fourni des preuves à l’appui de chacun des quatre éléments supplémentaires qu’elle invoquait, la charge de la preuve s’est alors inversée et c’est à Kendrion qu’il appartenait de réfuter ceux-ci. C’est dans ce sens que je comprends la déclaration que fait le
Tribunal au point 53 de l’arrêt entrepris («Il convient, dès lors, d’examiner d’abord si la requérante a réussi à réfuter ces quatre éléments supplémentaires»).

52. Par conséquent, je ne considère pas que le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a attribué à Kendrion la charge de démontrer que les quatre éléments supplémentaires n’indiquaient pas qu’elle avait exercé une influence décisive sur la politique commerciale de Fardem. Après avoir examiné les preuves fournies par Kendrion à propos de chacun de ces éléments supplémentaires, le Tribunal a constaté que trois d’entre eux n’avaient pas été réfutés.

53. Pour renverser la présomption d’influence décisive, Kendrion a fourni de nouvelles preuves et déclaré, en particulier, qu’elle avait acheté Fardem à des fins d’investissement. Voici ce que le Tribunal a déclaré à ce sujet au point 66 de l’arrêt entrepris: «[…] le rachat par une société d’investissement dans le but d’une revente peut également plaider en faveur de l’existence d’une entité économique entre la société d’investissement et la filiale en question. Le fait que la société
d’investissement cherche à améliorer les résultats de la filiale à court terme implique, en principe, que la société mère doit s’immiscer dans les affaires de la filiale. En effet, un contrôle effectif et strict peut offrir plus de garanties pour une rentabilité accrue qu’une politique non interventionniste» ( 29 ).

54. Je suis d’accord avec le Tribunal. Le fait d’acquérir 100 % du capital d’une filiale à titre d’investissement financier et le fait que les activités de celle-ci ne relèvent pas du même secteur que les activités normales de la société mère ne sauraient démontrer que les deux sociétés ne constituent pas la même entreprise. Au contraire: étant entendu qu’un investissement a pour objet de fournir un bénéfice, il me paraît que n’importe quelle société mère soucieuse d’assurer une meilleure
rentabilité à son investissement aurait d’excellentes raisons d’exercer une influence décisive sur la politique commerciale de sa filiale.

55. Dans la mesure où Kendrion conteste les constatations de fait du Tribunal relatives aux preuves qu’elle avait avancées, elle soulève des points qui ne relèvent pas de la compétence de la Cour siégeant en instance de pourvoi ( 30 ). Je ne pense d’ailleurs pas que le Tribunal ait dénaturé la signification claire des preuves d’une manière qui imposerait à la Cour de contrôler la qualification juridique de ces faits ( 31 ).

56. Dès lors que ces points de l’arrêt entrepris permettent à Kendrion de connaître les raisons sur lesquelles il est fondé et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle dans le cadre d’un pourvoi, l’arrêt entrepris n’est entaché d’aucun défaut de motifs.

57. En résumé, je n’ai découvert aucune erreur qui anéantirait la constatation du Tribunal que Fardem n’était pas une entité économique indépendante et que, par conséquent, Fardem et Kendrion constituaient la même entreprise.

58. Je considère donc que le deuxième moyen du pourvoi devrait être rejeté comme étant infondé. Par conséquent, il est nécessaire d’examiner les premier et troisième moyens du pourvoi articulés par Kendrion.

Premier moyen du pourvoi: l’amende infligée à Kendrion est plus élevée que celle qui a été imposée à sa filiale

59. Par son premier moyen, Kendrion fait grief au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit et d’avoir motivé l’arrêt entrepris de façon contradictoire et insuffisante, dans la mesure où il a admis que la Commission avait démontré à suffisance de droit le bien‑fondé de sa décision d’infliger à Kendrion une amende plus élevée que celle de sa filiale Fardem.

Résumé des arguments

Le pourvoi de Kendrion

60. Kendrion observe que le Tribunal a reconnu lui-même (aux points 28 et 29 de l’arrêt entrepris) que la décision soulève des questions et qu’elle est ambiguë à certains égards. Kendrion soutient, en substance, que l’article 2, sous d), de son dispositif est incompatible avec le raisonnement développé dans l’exposé des motifs. Selon l’exposé des motifs, Kendrion, en tant que société mère, est conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à sa filiale, Fardem. Aux
termes du dispositif, néanmoins, Fardem est conjointement et solidairement responsable du paiement (d’une partie) de l’amende infligée à Kendrion. Si le Tribunal avait correctement appliqué le principe général d’interprétation selon lequel la décision devrait être interprétée globalement à la lumière de son exposé des motifs, il aurait donc constaté que le dispositif était incompatible avec les motifs qu’il avait exposés.

61. Selon Kendrion, il résulte des points 23 à 28 de l’arrêt entrepris (ainsi que des considérants 584, 779 et 782 de la décision) que ce n’est pas parce que Kendrion avait elle-même participé à l’infraction qu’une amende lui avait été infligée, mais parce qu’elle était conjointement et solidairement responsable en sa qualité de société mère. Kendrion se réfère en particulier au considérant 784 de la décision. Au point 24 de l’arrêt entrepris, le Tribunal constate qu’il «ressort», et, qui plus est,
qu’«il ressort clairement» du considérant 784 de la décision que c’est davantage à titre individuel que la Commission entendait sanctionner Kendrion que parce qu’elle la considérait tout simplement comme étant conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende de Fardem. Kendrion s’inscrit en faux contre cette constatation.

62. Selon elle, le droit de la concurrence ne contient aucune base qui permettrait de considérer qu’une filiale est conjointement et solidairement responsable du paiement d’une amende imposée à sa société mère. De surcroît, la décision a pour résultat que Fardem est conjointement et solidairement responsable du paiement d’une amende infligée à Kendrion, amende fondée elle-même sur la responsabilité conjointe et solidaire de Kendrion pour le paiement d’une amende infligée à Fardem, ce qui est
absurde. Le dispositif de la décision serait une «monstruosité juridique» incompatible avec l’exposé des motifs.

63. Contrairement à ce que le Tribunal constate au point 29 de l’arrêt entrepris, il en résulte que la portée et le contenu de l’article 2, sous d), du dispositif de la décision ne sont pas compréhensibles. Cette disposition serait en outre purement et simplement incompatible avec l’exposé des motifs, en particulier avec les considérants 577 à 584, 587 à 599, 779, 782, 784, 814 et 820 de celui-ci. Le raisonnement que le Tribunal a développé dans l’arrêt entrepris serait donc insuffisant et
contradictoire, de sorte que la décision devrait être annulée.

La réponse de la Commission

64. Pour la Commission, déclarer, comme le fait Kendrion, que le dispositif de la décision est incompatible avec le raisonnement tenu dans l’exposé des motifs de celle-ci est infondé. Le considérant 879 de l’exposé des motifs correspond mot pour mot à l’article 2, sous d), du dispositif.

65. Il n’y aurait aucune différence entre la responsabilité conjointe et solidaire d’une société mère et la responsabilité individuelle d’une filiale. L’une et l’autre seraient conjointement et solidairement responsables parce qu’elles font partie d’une entreprise qui a enfreint les règles de la concurrence.

66. Du 8 juin 1995 au 26 juin 2002, Fardem et Kendrion faisaient partie de la même entreprise, de sorte qu’elles seraient l’une comme l’autre responsables de l’infraction commise durant cette période. L’amende de Fardem a été fixée à 60 millions d’euros et celle de Kendrion à 34 millions d’euros. Si l’amende de Fardem a ensuite été plafonnée à 2,2 millions d’euros, c’est en application du plafond de 10 %. Le montant de l’amende imposée à Kendrion est demeuré inchangé à 34 millions d’euros, somme du
paiement de laquelle Fardem est conjointement et solidairement responsable à hauteur de 2,2 millions d’euros, comme la Commission l’a déclaré au point 879 de l’exposé des motifs de la décision. Ce serait à bon escient qu’au considérant 28 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a observé que la différence entre les montants des amendes des deux sociétés est le résultat de l’application du plafond de 10 %. Si ce plafond n’avait pas été appliqué, l’amende de Fardem se serait élevée à 60 millions d’euros
et Kendrion aurait été conjointement et solidairement responsable du paiement de celle-ci à hauteur de 34 millions d’euros. Ce serait également à bon droit qu’au point 29 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a jugé que le dispositif de la décision est compatible avec l’exposé des motifs et qu’il est compréhensible lorsqu’il est lu à la lumière du raisonnement développé dans celui-ci.

Appréciation

67. Deux questions se posent. Premièrement, pour quelle raison précise une amende a-t-elle été imposée à Kendrion? Deuxièmement, comment faut-il calculer le plafond de 10 % qui, conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, doit s’appliquer à toute amende?

68. Voici les principes que j’ai observés lorsque j’ai passé au crible l’arrêt entrepris.

69. Premièrement, la question de savoir si les motifs d’un arrêt du Tribunal sont contradictoires ou insuffisants est une question de droit qui, en tant que telle, peut être invoquée dans le cadre d’un pourvoi ( 32 ).

70. Deuxièmement, lorsqu’il a interprété la décision de la Commission, le Tribunal devait garder à l’esprit que la Commission est tenue de motiver ses décisions en mentionnant les éléments de fait dont dépend la justification légale de la mesure et les considérations qui l’ont amenée à prendre sa décision ( 33 ).

71. Troisièmement, l’exposé des motifs des décisions infligeant des amendes doit être considéré comme suffisant lorsqu’il indique de façon claire et cohérente les considérations de fait et de droit sur la base desquelles les amendes ont été imposées aux parties concernées de façon à ce que celles-ci et la Cour puissent avoir connaissance des éléments essentiels du raisonnement de la Commission ( 34 ).

72. Quatrièmement, le respect de l’obligation de motivation doit s’apprécier au regard non seulement du libellé de l’acte incriminé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée ( 35 ).

Les motifs de l’amende infligée à Kendrion

73. Aux points 22 à 25 de l’arrêt entrepris, le Tribunal se réfère notamment aux considérants 577 à 584, 779 et 782 de l’exposé des motifs de la décision ( 36 ). Il fait ensuite les constatations suivantes:

«26 Il ressort de ces explications que la Commission a imposé une amende à la requérante en raison du fait qu’elle a constitué une seule entité économique avec Fardem Packaging de 1995 à 2003. Dès lors que le comportement anticoncurrentiel de Fardem Packaging peut être imputé à la requérante en raison de leur appartenance à la même entité économique, ce qui reste à établir dans le cadre de l’appréciation des moyens suivants, la requérante est censée avoir commis elle-même l’infraction du fait de
cette imputation (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 novembre 2000, Metsä-Serla e.a./Commission, C-294/98 P, Rec. p. I-10065, point 28).

[…]

28 Ensuite, s’il est vrai que l’infliction d’une amende de 34 millions d’euros à la requérante, par rapport à l’amende de 2,20 millions d’euros infligée à Fardem Packaging, peut, à première vue, susciter quelques interrogations, il n’en demeure pas moins que les considérants 814 et [820] [ ( 37 )] de la décision […] indiquent que cette circonstance découle de l’application du plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, du [règlement no 1/2003] à Fardem Packaging.

29 Il convient dès lors de conclure que, en dépit de sa rédaction équivoque, la portée et le contenu de l’article 2, sous d), de la décision […] sont tout à fait compréhensibles à la lecture des considérants visés aux points 23 à 28 ci-dessus. Il ne saurait donc être question d’une quelconque contradiction entre les motifs de la décision attaquée et son dispositif» ( 38 ).

74. Comme les termes utilisés dans l’arrêt entrepris sont directement fondés sur ceux que la Commission a employés dans la décision, c’est à celle-ci que je me référerai dans mon analyse du raisonnement du Tribunal. Aux considérants 577 à 584 de la décision, la Commission déclare qu’une amende doit être infligée à Fardem et que Kendrion est conjointement et solidairement responsable du paiement de celle-ci. Il est vrai que toutes les étapes du raisonnement de la décision n’ont pas été expressément
exposées. Dans la mesure où le Tribunal n’a fait que suivre le raisonnement de cette décision, l’arrêt entrepris n’est donc pas aussi transparent qu’il aurait pu l’être, mais cela n’implique cependant pas que cette opacité relative rend l’arrêt incohérent ou incompréhensible.

75. Récapitulons le calcul de l’amende. Le montant de l’amende de Fardem avait été fixé à 20 millions d’euros. La Commission a alors appliqué une majoration de 200 % de façon à refléter la durée de l’infraction, qui s’est étendue sur une période de plus de vingt ans, majoration qui, ajoutée aux 20 millions d’euros initiaux, portait le montant de l’amende à 60 millions d’euros. Enfin, la Commission a appliqué à ce total le plafond de 10 % dérivé du chiffre d’affaires de Fardem (à savoir 22 millions
d’euros), comme le prévoit l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003. Le montant de l’amende effective s’est alors établi à 2,2 millions d’euros ( 39 ).

76. Comme elle a constaté que Kendrion est conjointement et solidairement responsable du comportement de Fardem, la Commission pouvait imposer la responsabilité du paiement de l’amende de celle-ci à son (ancienne) société mère pour la période durant laquelle les deux sociétés formaient une seule entreprise ( 40 ). Il résulte implicitement de l’arrêt entrepris (et de la décision) que la Commission a utilisé le même montant de base pour calculer l’amende de Fardem et celle de Kendrion, à savoir
20 millions d’euros. Si, dans le cas de Fardem, la Commission avait appliqué une majoration de 200 %, elle s’est, dans le cas de Kendrion, contentée d’une majoration de 70 %, qu’elle a appliquée à la somme de 20 millions d’euros de manière à refléter le fait que Fardem n’était pas aux mains de Kendrion pendant toute la durée de l’infraction. La somme de 14 millions d’euros ainsi détenue s’est ajoutée aux 20 millions d’euros initiaux, l’amende finale s’établissant à 34 millions d’euros. C’est à
ce moment-là qu’elle a calculé le plafond de 10 % afin de déterminer si l’amende de Kendrion devait être plafonnée. Elle n’a cependant appliqué aucune réduction parce que le chiffre d’affaires de Kendrion était supérieur au montant qui l’aurait obligée à réduire le montant à acquitter, lequel est demeuré fixé à 34 millions d’euros.

77. Cette analyse, étape par étape, de la méthode de calcul démontre que la Commission a calculé l’amende de Kendrion conformément aux règles relatives à la responsabilité conjointe et solidaire et à l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003.

78. Je conviens que l’expression déclarant Fardem conjointement et solidairement responsable, à hauteur de 2,2 millions d’euros, du paiement de l’amende de 34 millions d’euros infligée à Kendrion peut surprendre. Je n’ai connaissance d’aucune affaire dans laquelle une filiale a été jugée responsable du comportement de sa société mère. Un tel résultat est effectivement inattendu parce qu’il s’accommode mal de la notion de responsabilité personnelle de l’infraction litigieuse et de la présomption
d’influence décisive. C’est parce qu’elles sont réputées contrôler la politique commerciale de leurs filiales à 100 % que les sociétés mères sont tenues pour responsables des infractions commises par celles-ci ( 41 ). Les rapports de force ne sont (évidemment) pas les mêmes lorsque nous examinons la relation qui unit une filiale à 100 % à sa société mère. Une telle filiale ne peut pas être réputée exercer une influence décisive sur sa société mère parce qu’elle n’a pas le pouvoir de la contrôler
que lui conférerait la détention de son capital. La filiale est l’arbre et, comme chacun le sait, l’arbre ne peut pas cacher la forêt.

79. Mais le présent pourvoi est le pourvoi de Kendrion, pas celui de Fardem.

80. La responsabilité de Kendrion a-t-elle été correctement établie? Que Fardem soit décrite comme étant conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende de Kendrion ou que Kendrion soit déclarée conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende de Fardem n’a pas la moindre incidence sur les principes qui régissent l’attribution à une société mère (Kendrion) de la responsabilité des infractions commises par sa filiale à 100 % (Fardem) lorsque la présomption
d’influence décisive n’a pas été mise en pièces. Ce sont les actionnaires qui se partagent les gains qu’une entreprise réalise en violant les règles de la concurrence. À défaut pour eux de démontrer qu’ils n’avaient pas la haute main sur elle, il n’est donc que raisonnable d’exiger de ceux qui ont le pouvoir de la superviser qu’ils répondent des pratiques illégales dont leurs filiales se sont rendues coupables. C’est sur cette base-là, exprimée ici de la façon la plus simple qui soit, que
Kendrion a été déclarée responsable.

81. J’estime en conséquence que l’arrêt entrepris n’est entaché d’aucune erreur de droit lorsqu’il déclare Kendrion responsable de l’infraction commise par Fardem.

Le montant de l’amende

82. Les amendes de Kendrion et de Fardem sont inextricablement liées. Le montant de l’amende de Kendrion dépend nécessairement de celui qui a été calculé pour l’amende de Fardem ( 42 ).

83. Au point 28 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a déclaré que l’incohérence apparente entre l’exposé des motifs et le dispositif de la décision s’explique par l’application du plafond de 10 %. C’est précisément la manière dont ce plafond est appliqué qui détermine le montant qui doit effectivement être payé.

84. Au moment où le plafond de 10 % a été calculé, l’entreprise coupable de l’infraction avait changé de structure puisque Fardem ne faisait plus partie du Groupe Kendrion. Il faut donc se demander ce qu’est l’«entreprise» aux fins de l’application de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003. Le plafond de 10 % devrait-il être calculé sur la base du chiffre d’affaires mondial de la société mère ou bien le chiffre d’affaires de la filiale est-il le seul pertinent?

85. Au considérant 814 de l’exposé des motifs de la décision, la Commission se réfère à l’arrêt Tokai Carbon e.a./Commission ( 43 ). Dans cette affaire-là également, la filiale à 100 % qui avait commis l’infraction n’appartenait plus à la société mère à la date où le plafond de 10 % avait été calculé. La filiale et la société mère ne constituaient donc plus une seule et même entreprise à ce moment-là. Le Tribunal a donc annulé la décision dans la mesure où la Commission avait infligé à l’(ancienne)
filiale une amende dont le montant dépassait le plafond de 10 % calculé sur la base de son seul chiffre d’affaires ( 44 ).

86. Dans la présente affaire, le Tribunal n’a pas expliqué en termes exprès la manière dont le plafond de 10 % s’appliquait à l’amende de Kendrion aux fins de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003. Il apparaît néanmoins de façon implicite de l’arrêt que le Tribunal a tenu compte du fait qu’au moment d’appliquer le plafond de 10 %, Kendrion et Fardem étaient des entités distinctes ( 45 ).

87. Si je comprends bien son arrêt, le Tribunal a considéré que l’amende de 34 millions d’euros infligée à Kendrion tombait sous le plafond de 10 % appliqué à cette société. Comme le chiffre d’affaires de Fardem s’élevait à 20 millions d’euros environ au moment pertinent, le Tribunal a jugé i) que la Commission avait fait une distinction entre les chiffres d’affaires respectifs de Kendrion et de Fardem, et ii) qu’elle avait appliqué le plafond de 10 % à Fardem en tant qu’entité distincte ( 46 ),
raison pour laquelle elle a limité sa responsabilité à 2,2 millions d’euros ( 47 ).

88. Je considère donc que le premier moyen du pourvoi est infondé.

Quelques points encore

89. La Commission redoute que, si le plafond de 10 % est appliqué à chaque société séparément, alors qu’elles ne constituaient plus une seule et même entreprise au moment du calcul de l’amende, cette méthode leur permette de se soustraire au paiement d’une partie de l’amende légitime. Elle fait valoir que, lorsque la société mère et la filiale ne font pas partie de la même entreprise au stade où le plafond de 10 % est appliqué, ce plafond devrait être calculé sur la base du seul chiffre d’affaires
de la société mère, le chiffre d’affaires de la filiale n’étant pas pris en considération.

90. Donc, si la Commission avait calculé le plafond de 10 % sur la base du seul chiffre d’affaires de Fardem, toute amende du paiement de laquelle, en sa qualité de société mère, Kendrion aurait été déclarée conjointement et solidairement responsable aurait été plafonnée à 2,2 millions d’euros. Un tel résultat serait un message encourageant les entreprises qui se trouvent dans des situations similaires à se débarrasser de leurs filiales avant que la Commission leur impose une amende de manière à
éviter que le plafond de 10 % soit calculé sur la base du chiffre d’affaires mondial des sociétés constituant le groupe de la société mère holding.

91. Bien que cette objection ait été soulevée spécifiquement en réponse au troisième moyen du pourvoi de Kendrion, elle est tout aussi pertinente ici. C’est la raison pour laquelle je vais l’examiner dès à présent.

92. Il me semble que les craintes de la Commission ne sont pas justifiées. Lorsqu’une société mère est conjointement et solidairement responsable du comportement de sa filiale à 100 %, tout plafond appliqué à l’amende est calculé par référence au chiffre d’affaires de la société mère si les deux sociétés font partie de la même entreprise à ce moment-là. En pareilles circonstances, il n’est pas nécessaire de calculer l’amende globale sur la base du chiffre d’affaires de la filiale. La filiale n’est
conjointement et solidairement responsable que du paiement d’une portion de l’amende infligée à sa société mère.

93. Néanmoins, lorsque les sociétés ne constituent pas une seule et même entité au stade où le plafond de 10 % est appliqué, il me semble qu’il est nécessaire de faire une distinction entre elles et d’appliquer le plafond de 10 % à chacune séparément. Je crois que c’est précisément ce qu’a fait la Commission en l’espèce (bien qu’il se puisse que ce n’était pas ce qu’elle avait l’intention de faire si l’on en croit les observations qu’elle présente aujourd’hui).

94. Le montant de l’amende de la société mère n’est pas déterminé sur la base du montant que sa filiale doit payer après application du plafond de 10 % à l’amende qui lui avait été initialement infligée. Comme je viens de le démontrer, le calcul de ces deux montants implique deux exercices distincts. L’amende de Kendrion a été calculée à partir du montant de base de l’amende de Fardem, amende du paiement de laquelle Kendrion a été déclarée conjointement et solidairement responsable ( 48 ). Le
montant de 2,2 millions d’euros que Fardem doit payer représente uniquement la portion de sa propre amende qu’il lui incombe encore de payer après application du plafond de 10 %.

95. Pour la bonne mesure, je vais à présent examiner le troisième moyen du pourvoi.

Troisième moyen du pourvoi: l’amende est fondée sur des motifs contradictoires et insuffisants

96. Kendrion avance trois arguments à l’appui du troisième moyen de son pourvoi.

Résumé des arguments

Le pourvoi de Kendrion

97. Kendrion fait valoir, en premier lieu, que la responsabilité conjointe et solidaire signifie qu’une société mère doit uniquement répondre du paiement de l’amende infligée à sa filiale. Deuxièmement, le Tribunal n’aurait pas tenu compte du fait que la Commission n’a pas appliqué le principe d’égalité de traitement lorsqu’elle a défini les amendes. Troisièmement, Kendrion allègue que le raisonnement que le Tribunal a tenu dans son analyse de l’amende est contradictoire et insuffisant.

98. Les premier et troisième griefs recoupent ceux que Kendrion avait exposés à l’appui du premier moyen de son pourvoi. Je les ai déjà examinés aux points 82 à 88 des présentes conclusions et ne vais donc pas m’y atteler à nouveau ici. En revanche, il me faut aborder le grief que Kendrion déduit d’une violation du principe d’égalité de traitement par la Commission et de l’omission que le Tribunal aurait commise à ce propos.

99. Kendrion affirme être la seule des destinataires de la décision à qui a été infligée une amende plus élevée que celle de sa filiale coupable d’une violation à laquelle elle, société mère, n’a pas participé. La seule autre société mère à avoir été condamnée à une amende plus élevée que celle de sa filiale est Nordenia, mais, à la différence de Kendrion, celle‑ci s’est activement associée à l’infraction ( 49 ). Le principe d’égalité de traitement impose à la Commission de calculer les amendes
suivant la même méthode pour toutes les entreprises impliquées dans la même infraction. Kendrion soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a expliqué que la différence de traitement résulte de l’application du plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003. Le plafond de 10 % explique la différence de montant de l’amende, mais pas la différence de principe que la Commission a introduite entre Kendrion et d’autres sociétés mères. À titre
subsidiaire, Kendrion affirme que, si la Commission a le droit de fixer le montant de son amende de la manière dont elle l’a fait dans la décision, le raisonnement du Tribunal est contradictoire et insuffisant.

La réponse de la Commission

100. Selon la Commission, c’est à bon escient qu’au point 109 de l’arrêt entrepris, le Tribunal a déclaré que la Commission avait appliqué la même méthode de calcul de l’amende pour tous les destinataires de la décision.

Appréciation

101. Le principe général d’égalité de traitement impose que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié ( 50 ).

102. Voici ce que le Tribunal a déclaré dans l’arrêt entrepris:

«107 Au regard de la détermination des amendes, le respect du principe d’égalité de traitement exige que la Commission doive normalement utiliser une seule et même méthode de calcul du montant des amendes infligées aux entreprises sanctionnées pour avoir participé à une même infraction (arrêt Cascades/Commission, point 102 supra, point 65). […]

108 L’allégation de la requérante selon laquelle la Commission aurait violé ces principes ne saurait être retenue pour les raisons suivantes.

109 […] ?I?l ressort de la décision […] que la Commission a appliqué une seule et même méthode pour déterminer le montant des amendes applicables à tous les destinataires de la décision attaquée, y inclus la requérante, qui sont tenus responsables en tant que sociétés mères d’une filiale impliquée dans l’entente. […]» ( 51 ).

103. Kendrion prétend qu’elle est comparable à d’autres sociétés mères qui n’ont pas participé activement à l’infraction, mais portent la responsabilité des infractions commises par leurs filiales à 100 %. Ces compagnies ne sont responsables que du paiement d’une portion des amendes de leurs filiales. Si la Commission avait appliqué la même méthode pour calculer les amendes de toutes les sociétés mères de l’entente, l’amende de Kendrion aurait été inférieure à celle de Fardem, car elle n’aurait
alors été conjointement et solidairement responsable que du paiement d’une portion de l’amende de cette dernière.

104. Il me semble néanmoins que la situation de Kendrion présente une particularité dans la mesure où le plafond de 10 % a été calculé après la vente de Fardem. Les deux sociétés ne constituaient donc plus une seule entreprise à ce moment-là. Cette situation se distingue donc de celle d’autres sociétés mères et de leurs filiales respectives ( 52 ).

105. Il résulte de ce que j’ai dit, aux points 82 à 88 plus haut, à propos de l’application du plafond de 10 % que la Commission était, selon moi, fondée à appliquer l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 aux deux sociétés séparément. La situation de Kendrion n’est pas comparable à celle des autres sociétés mères auxquelles la décision a été adressée. Dans le cas de Kendrion, le plafond de 10 % devait être calculé deux fois, à savoir sur le chiffre d’affaires de Kendrion et sur celui de
Fardem pris séparément. Dans le cas des autres sociétés mères et de leurs filiales, en revanche, le plafond de 10 % a été calculé une seule fois sur la base du chiffre d’affaires mondial du groupe de la société mère.

106. Aux points 107 à 109 de l’arrêt entrepris, le Tribunal, après avoir interprété la décision, constate que la Commission a appliqué la même méthode pour calculer les amendes applicables à tous les destinataires de la décision, ce qui est conforme au principe de l’égalité de traitement. Néanmoins, c’est précisément parce que la situation de Kendrion diffère de celle d’autres sociétés mères que la Commission n’était pas tenue de calculer le plafond de 10 % applicable aux amendes de Kendrion et de
Fardem en utilisant la même méthode que celle qu’elle avait appliquée aux autres destinataires. Au stade où elle a appliqué le plafond de 10 %, la Commission devait traiter les deux sociétés comme étant des entités distinctes, parce qu’à ce moment-là, Fardem ne faisait pas partie du Groupe Kendrion.

107. C’est pourquoi je considère que le Tribunal a conclu à bon escient que la décision est compatible avec le principe d’égalité de traitement.

Quatrième moyen du pourvoi: défaut de statuer dans un délai raisonnable

L’arrêt entrepris

108. À l’audience de première instance, Kendrion a fait valoir que la durée de la procédure devant le Tribunal avait été excessive. Au point 18 de l’arrêt entrepris, celui-ci a déclaré que cet argument devait être rejeté d’emblée comme étant inopérant parce que le contrôle juridictionnel exercé par le Tribunal ne concerne que la décision. Par conséquent, même si le grief déduit de la durée excessive de la procédure était fondé, il ne saurait affecter l’issue de celle-ci.

Résumé des arguments

Le pourvoi de Kendrion

109. Kendrion prétend que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’examinant pas le grief déduit de son défaut de statuer dans un délai raisonnable. Elle conclut donc à l’annulation de l’arrêt entrepris.

110. À titre subsidiaire, Kendrion demande à la Cour de réduire le montant de l’amende qui lui a été imposée. Elle observe que l’issue du présent pourvoi est cruciale pour elle puisqu’elle conteste une amende de 34 millions d’euros. Pour complexes qu’étaient les questions soulevées devant le Tribunal, le temps que celui-ci a mis à statuer est excessif (puisque Kendrion le chiffre à six ans et neuf mois) ( 53 ). Kendrion demande donc à la Cour de réduire le montant de son amende d’au moins 5 % en
réparation de la durée excessive de la procédure devant le Tribunal ( 54 ).

La réponse de la Commission

111. La Commission estime, en premier lieu, que l’arrêt entrepris ne devrait pas être annulé pour ce motif. Deuxièmement, elle considère qu’il eût été inapproprié que le Tribunal examine, dans le cadre de la procédure d’annulation, le point de savoir s’il avait enfreint l’article 47 de la Charte, dès lors qu’un tel examen l’aurait nécessairement amené à s’interroger sur son propre comportement. Au besoin, il serait préférable que la question soit étudiée par une chambre différente du Tribunal dans
le cadre d’une procédure distincte. C’est donc à bon escient que le Tribunal a déclaré que le moyen de Kendrion était inopérant.

112. La Commission conteste l’évaluation que Kendrion a faite de la durée de la procédure devant le Tribunal. Selon elle, elle n’a duré que cinq ans et neuf mois. Elle déclare que, si la Cour devait dire pour droit que la procédure devant le Tribunal a été excessivement longue, un arrêt contenant une telle constatation serait une satisfaction équitable. Selon elle, une action en dommages et intérêts introduite séparément serait le recours approprié pour obtenir réparation de quelque perte matérielle
ayant pu résulter d’une violation de l’article 47 de la Charte. À Kendrion, qui affirme que, dans un souci d’économie de procédure, l’amende devrait être réduite de 5 %, la Commission rétorque que la présente affaire est différente de l’affaire Bavaria/Commission ( 55 ), parce que, à la différence de ce qui s’était passé dans cette affaire-là, la phase administrative de la procédure n’a pris aucun retard en l’espèce.

Appréciation

113. Le Tribunal a déclaré que le grief que lui fait Kendrion de n’avoir pas statué dans un délai raisonnable doit être rejeté comme étant inopérant ( 56 ). Ce jugement ne remet pas en question la recevabilité du grief en question, mais signifie uniquement que le recours en annulation que Kendrion a introduit contre la décision ne pouvait pas prospérer pour ce motif en première instance ( 57 ).

114. Je suis d’accord avec le Tribunal pour les raisons que voici.

115. Premièrement, le recours en annulation de la décision n’a rien à voir avec la question de savoir si le droit fondamental que puise Kendrion dans l’article 47 de la Charte a été violé. Selon moi, si le Tribunal avait constaté une telle violation de ce droit dans un arrêt où il aurait constaté que la décision est légitime pour le surplus, il ne lui aurait pas été loisible de l’annuler uniquement en raison de cette irrégularité de procédure ( 58 ).

116. Deuxièmement, Kendrion ne prétend pas que la longueur de la procédure aurait empêché le Tribunal de contrôler effectivement la décision, en raison du fait, par exemple, que des preuves auraient entre-temps été perdues ou que les témoins ne pourraient plus être retrouvés en raison de l’écoulement du temps. La position de Kendrion diffère donc de celle d’un plaignant qui prétendrait que ses droits de la défense ont été violés parce que la procédure a été indûment tirée en longueur.

117. Troisièmement, examiner l’irrégularité de procédure alléguée par Kendrion, qui fait grief au Tribunal de n’avoir pas statué dans un délai raisonnable, est un exercice distinct de celui qui consiste à analyser le bien-fondé d’une amende infligée par la décision. Par conséquent, l’examen de cette seule irrégularité de procédure ne relève pas de la compétence de pleine juridiction du Tribunal lorsqu’il contrôle les décisions par lesquelles la Commission inflige des amendes ( 59 ).

118. C’est pourquoi je ne considère pas que le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a dit pour droit que le moyen de Kendrion était inopérant. À supposer même qu’il ait été accueilli, le moyen de Kendrion n’aurait pas entamé la validité de la décision ( 60 ).

119. Bien entendu, rien n’empêche Kendrion de soulever cette question dans le cadre du pourvoi.

120. Kendrion a introduit son recours en annulation le 22 février 2006. La procédure écrite a été clôturée le 20 février 2007. Le 3 décembre 2010, Kendrion a été informée que l’affaire avait été inscrite au calendrier des audiences. Le 12 janvier 2011, Kendrion a répondu aux questions que le Tribunal lui avait adressées conformément à l’article 64 de son règlement de procédure à propos de l’arrêt que la Cour a rendu dans l’affaire Akzo Nobel e.a./Commission. L’audience du Tribunal a eu lieu le
9 mars 2011 et l’arrêt a été prononcé le 16 novembre de la même année. La durée globale de la procédure en première instance a donc été de cinq ans et neuf mois environ, une période de quatre ans environ s’étant écoulée entre la fin de la procédure écrite et l’audience.

121. Le recours de Kendrion était étroitement lié à celui de son ancienne filiale Fardem. Néanmoins, aucun élément ne suggère que le recours de Fardem ait entravé celui de son ex-société mère.

122. Si l’on applique les quatre critères que la Cour a dégagés dans son arrêt Baustahlgewebe/Commission, il est clair que l’affaire présente une importance considérable pour l’entreprise, puisque Kendrion doit faire face à une amende de 34 millions d’euros. Il est également manifeste que l’affaire soulève des questions complexes. Je ne crois pas que la durée de la procédure puisse être imputée au comportement de Kendrion.

123. Pour autant que je puisse juger, le Tribunal n’a pris aucune initiative visant à accélérer la procédure durant la période d’inertie apparente (de quatre ans environ) qui s’est écoulée entre la fin de la procédure écrite et l’audience. Nul n’a fourni à la Cour des éléments qui expliqueraient ou justifieraient cette période d’inertie. En l’absence de pareils éléments, il me paraît manifeste que cette affaire n’a pas été traitée dans un délai raisonnable. Comme je l’ai indiqué dans l’affaire
Groupe Gascogne/Commission ( 61 ), je considère que, globalement, cette phase de la procédure aurait pu durer jusqu’à deux ans sans que l’on puisse parler de retard «excessif». Il en résulte, si l’on prend des chiffres ronds, que le traitement de cette affaire en première instance a duré environ deux ans de plus qu’il n’aurait dû.

124. C’est pourquoi je conclus que le droit fondamental de Kendrion à ce que sa cause soit entendue par le Tribunal dans un délai raisonnable n’a pas été respecté.

125. Dans les conclusions que j’ai présentées dans l’affaire Groupe Gascogne/Commission ( 62 ), j’ai dit que, lorsqu’une violation de l’article 47 de la Charte est établie, une telle constatation ne devrait pas, à elle seule, entraîner l’annulation de l’arrêt entrepris.

126. Qui plus est, Kendrion n’a pas prétendu que ses droits de la défense avaient été enfreints en raison de cette irrégularité de procédure.

127. Je ne considère pas que l’arrêt entrepris doive être annulé.

128. À titre subsidiaire, Kendrion a demandé une réduction de l’amende. Cette prétention me semble davantage basée sur l’approche que la Cour a adoptée dans l’affaire Baustahlgewebe/Commission ( 63 ) que présentée à titre de demande séparée de réparation d’une perte matérielle ou d’un dommage moral.

129. Par conséquent, comme Kendrion n’a allégué ni perte matérielle ni dommage moral, la Cour lui accorderait une satisfaction équitable en déclarant dans son arrêt que le Tribunal a enfreint l’article 47 de la Charte ( 64 ).

130. Kendrion demande à la Cour de réduire de 5 % le montant de l’amende qui lui a été infligée par l’arrêt entrepris. C’est la réduction que le Tribunal avait accordée dans l’arrêt Bavaria/Commission ( 65 ). Dans cette affaire-là, la Commission avait reconnu être responsable de la durée excessive de la procédure administrative. La requérante avait estimé que la longueur de cette procédure avait porté atteinte à ses droits de la défense et que l’amende qui lui avait été infligée s’en était trouvée
alourdie parce que la Commission avait durci sa politique en matière d’amendes au cours de la procédure administrative. Elle avait donc prétendu que la réduction qui lui avait été accordée par la Commission en raison de la durée excessive de la procédure n’était pas suffisante.

131. La présente affaire doit être distinguée de l’affaire Bavaria/Commission. Premièrement, le grief de Kendrion ne concerne pas la phase administrative de la procédure menée par la Commission. Kendrion n’affirme pas davantage que le comportement de cette institution a entraîné une augmentation de l’amende qui lui a été infligée. Deuxièmement, Kendrion demande à la Cour de juger une irrégularité de procédure qui s’est produite durant la phase judiciaire de la procédure. Troisièmement, Kendrion ne
prétend pas que la longueur de la procédure devant le Tribunal a eu une incidence sur l’amende infligée en vertu de l’arrêt entrepris (ce qu’elle n’aurait pas pu faire puisque l’arrêt entrepris ne fait que confirmer la décision sur ce point).

132. Par conséquent, il me semble qu’il n’existe aucune base légale sur laquelle la Cour pourrait fonder une décision réduisant l’amende de Kendrion de 5 %. En l’absence de toute preuve établissant que Kendrion a subi une perte matérielle ou un préjudice moral (comme elle pourrait le prétendre dans une action en réparation distincte), le choix du pourcentage de 5 % (ou de n’importe quel autre) me paraît purement arbitraire ( 66 ).

133. Je considère, par conséquent, que la Cour ne devrait pas réduire le montant de l’amende de Kendrion.

134. J’en arrive donc à la conclusion que, dans la mesure où la requérante estime avoir subi une perte en raison du comportement du Tribunal, qui n’a pas statué sur sa cause dans un délai raisonnable, le saisir d’un recours en réparation est une solution plus appropriée et plus efficace aux fins de l’article 47 de la Charte, lu à la lumière des articles 6, paragraphe 1, et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qu’une éventuelle réduction du
montant de l’amende ( 67 ). Je propose donc à la Cour de déclarer que le Tribunal a accumulé un retard excessif avant de statuer sur le recours dont Kendrion l’avait saisi et d’indiquer clairement à celle-ci qu’il lui est loisible d’engager une action distincte en réparation si elle le juge bon.

Les dépens

135. Si la Cour souscrit à mon analyse, Kendrion, partie succombée en tous les moyens qu’elle a articulés, devrait être condamnée aux dépens en application des dispositions combinées des articles 137, 138, 140 et 184 du règlement de procédure.

Conclusion

136. Je considère en conséquence que la Cour devrait:

— rejeter le pourvoi;

— déclarer que le Tribunal n’a pas statué dans un délai raisonnable dans l’affaire, Kendrion/Commission (T‑54/06), et

— condamner Kendrion NV aux dépens.

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( 1 ) Langue originale: anglais.

( 2 ) Arrêts Kendrion/Commission (T‑54/06), Groupe Gascogne/Commission (T‑72/06) et Sachsa Verpackung/Commission (T‑79/06). Un sommaire de ces trois arrêts a été publié en anglais. La version intégrale en français est disponible pour les trois affaires sur le site Internet de la Cour. Pour l’affaire Kendrion/Commission, une version intégrale en néerlandais est également disponible.

( 3 ) Décision C(2005) 4634 final de la Commission, du 30 novembre 2005, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE (affaire COMP/38354 – sacs industriels) (ci‑après la «décision»). Un sommaire de la décision a été publié au JO 2007, L 282, p. 41.

( 4 ) Affaires Gascogne Sack Deutschland/Commission (C‑40/12 P), Kendrion/Commission (la présente affaire) et Groupe Gascogne/Commission (C‑58/12 P). Pour un exposé complet sur les recours engagés devant le Tribunal contre la décision et sur les pourvois formés ensuite devant la Cour, voir point 102 de mes conclusions dans l’affaire Groupe Gascogne/Commission.

( 5 ) Déjà citée à la note 4.

( 6 ) Déjà citée à la note 4.

( 7 ) Les conclusions seront présentées dans chacune des affaires le 30 mai 2013.

( 8 ) Voir points 40 à 44 plus bas.

( 9 ) Règlement du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO 2003, L 1, p. 1), qui a abrogé le règlement no 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81] et [82] du traité (JO 1962, 13, p. 204). L’article 43, paragraphe 1, du règlement no 1/2003 a abrogé le règlement no 17. Dans la partie 6 de la décision, la Commission cite ces deux règlements comme étant la base légale des
amendes imposées. Les dispositions pertinentes du règlement no 17 sont l’article 15, paragraphe 2, et l’article 17, qui sont reproduits à l’article 23, paragraphes 2 et 3, et à l’article 31 du règlement no 1/2003. Dans les présentes conclusions, je me référerai aux dispositions du règlement no 1/2003, qui devraient être lues comme couvrant également l’article 15, paragraphe 2, et l’article 17 du règlement no 17 puisque leur contenu n’a pas été modifié sur des points pertinents aux fins des questions
soulevées dans le présent pourvoi.

( 10 ) Voir points 73 à 81 plus bas.

( 11 ) Point 777 de l’exposé des motifs de la décision.

( 12 ) Points 779 et 781 de l’exposé des motifs de la décision.

( 13 ) Point 781 de l’exposé des motifs de la décision.

( 14 ) Point 783 de l’exposé des motifs de la décision.

( 15 ) Point 784 de l’exposé des motifs de la décision.

( 16 ) Arrêt du 17 juin 2010, Lafarge/Commission (C-413/08 P, Rec. p. I-5361, point 102). Les lignes directrices de la Commission pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 17 et de l’article 65, paragraphe 5, du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les «lignes directrices de la Commission de 1998») mentionnent, elles aussi, le chiffre d’affaires mondial à propos du plafond de 10 % institué par l’article 23, paragraphe 2.

( 17 ) Affaire Kendrion/Commission, déjà citée à la note 2 (ci-après l’«arrêt entrepris»).

( 18 ) Anciens articles 81 CE et 253 CE.

( 19 ) Arrêt du 16 novembre 2011, Fardem Packaging/Commission.

( 20 ) Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15 paragraphe 2 du règlement no 17 et de l’article 65 paragraphe 5 du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les «lignes directrices de 1998»). Voir point 21 des conclusions que j’ai présentées dans l’affaire Gascogne Sack Deutschland/Commission, déjà citée à la note 4.

( 21 ) Le 22 février 2006.

( 22 ) Voir, Wils, W. P. J., «Antitrust compliance programmes and optimal antitrust enforcement», Journal of Antitrust Enforcement, 2013, p. 12. Comparer, en sens contraire, Thomas, S., «Guilty of a fault that one has not committed», Journal of European Competition Law and Practice, 2012, p. 11.

( 23 ) Arrêt du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, points 42 à 44 inclus, ainsi que la jurisprudence citée à cet endroit, ci-après l’«arrêt Alliance One»).

( 24 ) Ibidem, points 46 à 48 inclus ainsi que la jurisprudence citée à cet endroit.

( 25 ) Arrêt Alliance One, points 49, 50 et 53.

( 26 ) Note sans objet dans la version française.

( 27 ) Note sans objet dans la version française.

( 28 ) Arrêt Alliance One, point 64.

( 29 ) Note sans objet dans la version française.

( 30 ) Arrêt Alliance One, point 84 ainsi que la jurisprudence citée à cet endroit.

( 31 ) Ibidem, point 85 ainsi que la jurisprudence citée à cet endroit.

( 32 ) Arrêt du 16 décembre 2008, Masdar (UK)/Commission (C-47/07 P, Rec. p. I-9761, point 76).

( 33 ) Voir article 296 TFUE; voir, également, arrêts du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma/Commission (41/69, Rec. p. 661, point 76), et du 11 juillet 1985, Remia e.a./Commission (42/84, Rec. p. 2545, point 26).

( 34 ) Arrêt Alliance One, point 64.

( 35 ) Arrêt du 4 octobre 2001, Italie/Commission (C-403/99, Rec. p. I-6883, point 41).

( 36 ) Voir points 8 à 10 plus haut.

( 37 ) Je suppose que la référence au considérant 815 de l’exposé des motifs de la décision est incorrecte et qu’il convient de lire «considérant 820», dès lors que c’est ce dernier qui concerne l’amende infligée à Fardem.

( 38 ) Note sans objet dans la version française.

( 39 ) Voir points 11 à 16 plus haut.

( 40 ) Voir points 40 à 44 plus haut.

( 41 ) Arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission (C-97/08 P, Rec. p. I-8237, points 58 à 61).

( 42 ) Voir point 13 plus haut.

( 43 ) Arrêt du 15 juin 2005 (T‑71/03, T‑74/03, T‑87/03 et T‑91/03). Un sommaire de l’arrêt a été publié en anglais. Des versions intégrales en allemand, en anglais et en français sont disponibles sur le site Internet du Tribunal.

( 44 ) Ibidem, points 391 et 392.

( 45 ) Voir considérant 820 de l’exposé des motifs de la décision et point 28 de l’arrêt entrepris.

( 46 ) Si le présent pourvoi avait été formé par Fardem, il faudrait, pour déterminer le montant de son amende, prendre en considération la période d’infraction pour laquelle elle était seule responsable (à savoir du 6 janvier 1982 au 8 juin 1995), c’est-à-dire avant qu’elle soit rachetée par Kendrion. Mais, comme c’est le pourvoi de Kendrion et que celle-ci est conjointement et solidairement responsable du paiement de l’amende de Fardem, il n’est pas nécessaire de procéder ainsi. Voir points 81
à 88 de mes conclusions dans l’affaire Gascogne Sack Deutschland/Commission, déjà citée à la note 4, où j’examine l’application du plafond de 10 % à une société mère et à une filiale à 100 % qui, ensemble, constituaient l’entreprise au moment où le plafond a été calculé: dans cette affaire-là, cependant, la date du début de l’infraction se situe avant l’acquisition de la filiale par la société mère, l’infraction se poursuivant au‑delà de cette acquisition.

( 47 ) Voir points 28 et 29 de l’arrêt entrepris, que j’ai cités au point 73 plus haut.

( 48 ) Voir points 11 à 13 plus haut.

( 49 ) Considérant 637 de l’exposé des motifs de la décision.

( 50 ) Arrêt du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantic et Lorraine e.a. (C-127/07, Rec. p. I-9895, point 23, ainsi que la jurisprudence citée à cet endroit).

( 51 ) Note sans objet dans la version française.

( 52 ) Bishof + Klein France SAS; FLS Smidth & Co A/s et FLS Plast AS, et Groupe Gascogne.

( 53 ) À l’appui de son grief, Kendrion cite l’arrêt du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C-185/95 P, Rec. p. I-8417).

( 54 ) À l’appui de sa demande, Kendrion cite l’arrêt du 16 juin 2011, Bavaria/Commission (T-235/07, Rec. p. II-3229).

( 55 ) Précitée.

( 56 ) Point 18 de l’arrêt entrepris.

( 57 ) Arrêt du 29 septembre 2011, Arkema/Commission (C‑520/09 PRec. p. I‑8901, point 31).

( 58 ) Voir point 117 ci-après.

( 59 ) Voir article 261 TFUE et article 31 du règlement no 1/2003. Voir, également, points 131 et 132 de mes conclusions dans l’affaire Groupe Gascogne/Commission.

( 60 ) Voir point 113 plus haut.

( 61 ) Voir points 91 à 94 de mes conclusions.

( 62 ) Déjà citée à la note 4.

( 63 ) Dans cet arrêt, que j’ai cité à la note 53, la Cour, pour des raisons d’économie de procédure et afin de mettre en place une solution immédiate et effective, a annulé la partie de l’arrêt entrepris qui était consacrée au montant de l’amende, mais elle a confirmé cet arrêt pour le surplus.

( 64 ) Voir point 148 de mes conclusions dans l’affaire Groupe Gascogne/Commission.

( 65 ) Déjà cité à la note 54.

( 66 ) Voir points 133 à 138 de mes conclusions dans l’affaire Groupe Gascogne/Commission.

( 67 ) Le grief que Kendrion articule actuellement en vue d’obtenir une réduction de son amende me semble exactement fondé sur la jurisprudence Baustahlgewebe/Commission: il n’a pas été présenté séparément au titre d’une perte matérielle ou d’un préjudice moral. La Cour ne serait d’ailleurs pas compétente à connaître d’une telle demande.


Synthèse
Formation : Grande chambre
Numéro d'arrêt : C-50/12
Date de la décision : 30/05/2013
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours contre une sanction, Recours en annulation

Analyses

Pourvoi - Concurrence - Ententes - Marché des sacs industriels en plastique - Imputabilité à la société mère de l’infraction commise par la filiale - Responsabilité solidaire de la société mère pour le paiement de l’amende infligée à la filiale - Durée excessive de la procédure devant le Tribunal - Principe de protection juridictionnelle effective.

Concurrence

Ententes


Parties
Demandeurs : Kendrion NV
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Sharpston

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2013:350

Source

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