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20/12/2017 | CJUE | N°C-571/17

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Samet Ardic., 20/12/2017, C-571/17


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 20 décembre 2017 ( 1 ) ( 2 )

Affaire C‑571/17 PPU

Openbaar Ministerie

contre

Samet Ardic

[demande de décision préjudicielle formée par le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Mandat d’arrêt européen délivré aux fins de l’exécution d’une peine privative de liberté – Motifs de non-exécution facultative – Article

4 bis de la décision-cadre – Notion de « procès ayant mené à la décision » – Portée – Personne ayant été définitivement condamnée à une peine pri...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 20 décembre 2017 ( 1 ) ( 2 )

Affaire C‑571/17 PPU

Openbaar Ministerie

contre

Samet Ardic

[demande de décision préjudicielle formée par le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Mandat d’arrêt européen délivré aux fins de l’exécution d’une peine privative de liberté – Motifs de non-exécution facultative – Article 4 bis de la décision-cadre – Notion de « procès ayant mené à la décision » – Portée – Personne ayant été définitivement condamnée à une peine privative de liberté à l’issue d’un procès qui s’est déroulé en présence de l’intéressé – Sursis à exécution sous conditions d’une peine privative
de liberté partiellement purgée – Non-respect des conditions prévues – Procédure ultérieure ayant abouti à la révocation du sursis à exécution de la peine – Procédure s’étant déroulée sans que l’intéressé ait été présent »

I. Introduction

1. M. Samet Ardic, ressortissant allemand, fait l’objet d’un mandat d’arrêt européen (MAE) émis par une autorité judiciaire allemande. Cette autorité demande la remise de M. Ardic, détenu actuellement aux Pays-Bas, en vue de l’exécution du reste de la peine prévue par deux jugements ayant imposé chacun une peine privative de liberté. Après avoir purgé une partie de ces peines, M. Ardic s’est vu accorder un sursis à leur exécution. Ce sursis a été par la suite révoqué au motif que M. Ardic n’avait
pas respecté les conditions de sa remise en liberté conditionnelle.

2. Bien que M. Ardic ait comparu en personne au procès ayant mené aux deux jugements définitifs le condamnant à deux peines privatives de liberté, il n’a pas comparu en personne à la procédure ayant conduit aux décisions de révocation du sursis à exécution du reste desdites peines.

3. La présente affaire porte sur le champ d’application de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584/JAI ( 3 ). La juridiction de renvoi s’interroge sur la question de savoir si la notion de « procès qui a mené à la décision » y figurant concerne une procédure qui a mené aux décisions révoquant le sursis à exécution du reste des peines privatives de liberté.

II. Cadre juridique

A.  La CEDH

4. L’article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ( 4 ) (ci‑après la « CEDH ») prévoit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. […] »

B.  Le droit de l’Union

1. La Charte

5. En vertu de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») :

« Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article.

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter.

[…] »

6. Aux termes de l’article 48, paragraphe 2, de la Charte, « [l]e respect des droits de la défense est garanti à tout accusé ».

2. La décision-cadre

7. L’article 1, paragraphe 2, de la décision-cadre dispose que « [l]es États membres exécutent tout [MAE], sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre ».

8. L’article 1, paragraphe 3, prévoit que ladite décision-cadre « ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 [TUE] ».

9. L’article 4 bis de la décision-cadre a été introduit par la décision-cadre 2009/299/JAI ( 5 ) aux fins de préciser les motifs facultatifs de refus d’exécuter un MAE lorsque l’intéressé n’a pas comparu en personne à son procès :

« 1.   L’autorité judiciaire d’exécution peut également refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen délivré aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, si l’intéressé n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision, sauf si le mandat d’arrêt européen indique que l’intéressé, conformément aux autres exigences procédurales définies dans la législation nationale de l’État membre d’émission :

a) en temps utile,

i) soit a été cité à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour le procès qui a mené à la décision, soit a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu ;

et

ii) a été informé qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution ;

ou

b) ayant eu connaissance du procès prévu, a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par l’intéressé soit par l’État, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès ;

ou

c) après s’être vu signifier la décision et avoir été expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale :

i) a indiqué expressément qu’il ne contestait pas la décision ;

ou

ii) n’a pas demandé une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel dans le délai imparti ;

ou

d) n’a pas reçu personnellement la signification de la décision, mais :

i) la recevra personnellement sans délai après la remise et sera expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale ;

et

ii) sera informé du délai dans lequel il doit demander une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel, comme le mentionne le mandat d’arrêt européen concerné.

[…] »

III. Les faits, la procédure au principal et la question préjudicielle

10. Le 13 juin 2017, le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas) a été saisi par l’officier van justitie bij de rechtbank (ministère public près le tribunal, Pays-Bas) d’une demande concernant le traitement d’un MAE émis le 9 mai 2017 par le Staatsanwaltschaft Stuttgart (parquet de Stuttgart, Allemagne).

11. Ce MAE tend à l’arrestation et à la remise de M. Ardic, ressortissant allemand, aux fins de l’exécution en Allemagne de deux peines privatives de liberté. Deux jugements définitifs qui visent neuf infractions constituent le fondement dudit MAE. En premier lieu, le jugement du 4 mars 2009 de l’Amtsgericht Böblingen (tribunal de district de Böblingen, Allemagne) a condamné M. Ardic à une peine privative de liberté d’un an et huit mois. En second lieu, le jugement du 10 novembre 2010 de
l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt, Allemagne) a condamné M. Ardic à une peine privative de liberté d’un an et huit mois.

12. La partie d) du MAE en cause confirme que M. Ardic a comparu en personne au procès qui a mené à ces deux jugements.

13. Par deux décisions (respectivement du 4 janvier 2010 et du 31 mai 2011), les juridictions ayant prononcé les jugements mentionnés au point 11 des présentes conclusions ont sursis à l’exécution du reste des peines prévues dans ceux-ci ( 6 ).

14. Ces sursis ont été révoqués par deux décisions de l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt), rendues respectivement les 18 et 4 avril 2013 (ci-après les « décisions de révocation »). L’exécution du reste des peines privatives de liberté a été ordonnée au motif que l’intéressé n’avait pas respecté les conditions de sa libération conditionnelle et s’était soustrait, nonobstant les rappels, au contrôle et à la direction de son agent de reclassement
ainsi qu’au contrôle du tribunal. Ces décisions de révocation sont définitives. Aussi, M. Ardic doit encore purger 338 jours de la peine privative de liberté infligée dans l’affaire jugée le 4 mars 2009 par l’Amtsgericht Böblingen (tribunal de district de Böblingen) et 340 jours de celle infligée dans l’affaire jugée le 10 novembre 2010 par l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt).

15. La juridiction de renvoi infère du MAE en question que M. Ardic n’a pas comparu en personne à la procédure qui a mené aux décisions de révocation, ce que M. Ardic a confirmé. Ce dernier a également déclaré que, s’il avait eu connaissance de la date et du lieu dudit procès, il aurait comparu afin de convaincre le juge compétent de ne pas procéder à la révocation.

16. La partie f) du MAE (informations facultatives concernant les « autres circonstances pertinentes en l’espèce ») mentionne que les décisions de révocation ont été signifiées par voie de publication à la personne réclamée, qui devra donc se voir accorder le droit d’être entendue a posteriori eu égard à ces décisions, sans que cela ait d’incidence directe sur le caractère exécutoire de celles-ci.

17. Selon la juridiction de renvoi, le droit allemand impose au juge de révoquer la décision sur le sursis à exécution du reste des peines si le condamné persiste à se soustraire au contrôle et à la direction de l’agent de reclassement et/ou à ne pas respecter les conditions de ce sursis. Le juge allemand doit en revanche s’abstenir de procéder à une telle révocation s’il suffit d’imposer des conditions ou instructions supplémentaires, ou de prolonger la période de mise à l’épreuve. Il ressort des
décisions de révocation que l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt) a constaté que l’imposition de conditions supplémentaires ou la prolongation de la période probatoire n’étaient pas suffisantes et que la révocation était conforme au principe de proportionnalité. La juridiction de renvoi note que, lorsqu’il statue sur la révocation, le juge allemand dispose d’une marge d’appréciation lui permettant de prendre en considération la situation ou la
personnalité de l’intéressé.

18. À la lumière de l’arrêt rendu dans l’affaire Zdziaszek, la juridiction de renvoi observe que la Cour a opéré une distinction, aux fins de l’application de l’article 4 bis de la décision-cadre, entre les mesures qui modifient le quantum de la peine infligée et celles relatives aux modalités d’exécution d’une peine privative de liberté ( 7 ). La juridiction de renvoi constate que les décisions de révocation en cause au principal ne modifient pas le quantum de la peine. Cependant, cela ne
signifierait pas nécessairement que l’article 4 bis de la décision-cadre ne s’applique pas aux décisions de révocation, compte tenu du niveau de protection plus élevé garanti par la Charte. En effet, la juridiction de renvoi relève qu’il est possible qu’une décision de révocation ait autant d’importance pour l’intéressé qu’un jugement prononçant une peine globale (en cause dans l’affaire Zdziaszek) lorsque le juge dispose d’une marge d’appréciation.

19. Dans ces conditions, le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Si la personne réclamée a été définitivement déclarée coupable dans le cadre d’une procédure qui s’est déroulée en sa présence et a été condamnée à une peine privative de liberté dont il a été sursis à l’exécution sous conditions, la procédure ultérieure dans le cadre de laquelle le juge, en l’absence de la personne réclamée, ordonne la révocation de ce sursis pour cause de non-respect des conditions et de soustraction au contrôle et à la direction d’un agent de reclassement constitue-t-elle
un “procès qui a mené à la décision” au sens de l’article 4 bis de la décision-cadre [2002/584] ? »

IV. Sur la procédure d’urgence devant la Cour

20. La juridiction de renvoi a demandé que le présent renvoi préjudiciel soit soumis à la procédure d’urgence prévue à l’article 107 du règlement de procédure de la Cour. À l’appui de cette demande, elle a fait valoir que la question préjudicielle posée porte sur l’interprétation de la décision-cadre qui relève du titre V de la troisième partie du traité FUE. Elle a aussi observé que l’intéressé se trouvait en détention aux Pays-Bas, dans l’attente de la suite à réserver à sa remise. La réponse
urgente de la Cour aurait une influence directe et décisive sur la durée de la détention de l’intéressé.

21. La cinquième chambre de la Cour a décidé, le 12 octobre 2017, de faire droit à cette demande.

22. Des observations écrites ont été déposées par l’Openbaar Ministerie (ministère public, Pays-Bas), M. Ardic, les gouvernements allemand et néerlandais ainsi que par la Commission européenne. Les précités, ainsi que le gouvernement irlandais, ont présenté des observations orales lors de l’audience qui s’est tenue le 22 novembre 2017.

V. Appréciation

23. Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi vise à savoir si la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, phrase introductive, de la décision-cadre, comprend la procédure ayant mené à la décision de révocation du sursis à exécution du reste d’une peine privative de liberté ayant été définitivement prononcée. La présente affaire vise ainsi le champ d’application de l’article 4 bis de la décision-cadre.

24. Les présentes conclusions sont structurées comme suit. Après quelques considérations liminaires sur le cadre juridique procédural allemand pertinent ainsi que sur la jurisprudence de la Cour EDH(A), je proposerai d’abord une interprétation de l’article 4 bis de la décision-cadre (B). Ensuite, j’examinerai la question spécifique de la révocation de la décision de sursis à exécution du reste d’une peine privative de liberté dans le cadre de l’article 4 bis de la décision-cadre (C). Pour finir, je
ferai brièvement quelques remarques relatives aux droits fondamentaux dans le système de la décision-cadre (D).

A.  Clarifications liminaires

25. La question préjudicielle posée dans la présente affaire est étroitement liée aux questions abordées par la Cour dans les affaires Tupikas (C‑270/17 PPU) et Zdziaszek (C‑271/17 PPU). Dans la première de ces affaires, la Cour a notamment précisé que, pour les besoins de l’application de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, la notion de « procès qui a mené à la décision » doit être entendue, dans l’hypothèse où la procédure a comporté plusieurs instances, comme visant
l’instance d’appel, pour autant que la décision rendue à l’issue de cette instance a statué définitivement sur la culpabilité de l’intéressé ainsi que sur sa peine ( 8 ). Dans l’affaire Zdziaszek, la Cour a dit pour droit que la notion de « procès qui a mené à la décision » vise également des procédures subséquentes (telles que celles aboutissant à un jugement prononçant une peine globale) à l’issue desquelles intervient une décision qui modifie de façon définitive le niveau des peines
initialement prononcées, pour autant que l’autorité ayant adopté ces décisions bénéficie d’un certain pouvoir d’appréciation ( 9 ).

26. Dans ce dernier arrêt, la Cour a également précisé, en faisant référence à l’arrêt de la Cour EDH dans l’affaire Boulois ( 10 ), qu’« il convient […] de distinguer les mesures [modifiant le quantum de la ou des peines infligées] de celles relatives aux modalités d’exécution d’une peine privative de liberté. Il ressort d’ailleurs de la jurisprudence de la Cour EDH que l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ne trouve pas à s’appliquer à des questions relatives aux modalités d’exécution d’une peine
privative de liberté, notamment à celles ayant trait à la mise en liberté provisoire ( 11 ) ».

27. Dans ce contexte, la question préjudicielle posée par la juridiction de renvoi dans la présente affaire est liée à la distinction entre, d’une part, les décisions statuant sur la culpabilité et sur la peine et, d’autre part, les décisions portant sur des « modalités d’exécution d’une peine privative de liberté ». Conformément à l’arrêt Zdziaszek, ces dernières seraient en dehors du champ d’application de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ( 12 ), ce qui pourrait être par suite interprété
comme excluant telles « modalités d’exécution » du champ d’application de l’article 4 bis de la décision-cadre.

28. Afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi dans la présente affaire, deux clarifications liminaires sont nécessaires. En premier lieu, il s’impose de clarifier quelle est, en droit allemand, la nature exacte de la procédure menant à la décision de révocation du sursis à exécution du reste d’une peine privative de liberté (1). En second lieu, il apparaît également nécessaire de se pencher sur la notion de « modalités d’exécution d’une peine privative de liberté » dans la
jurisprudence de la Cour EDH (2).

1. Sur la procédure de révocation du sursis à exécution du reste d’une peine privative de liberté en droit allemand

29. Le gouvernement allemand a été invité par la Cour à préciser le régime allemand régissant la procédure de révocation du sursis à exécution du reste d’une peine privative de liberté. Ce gouvernement a apporté les explications suivantes.

30. En premier lieu, l’article 57 du Strafgesetzbuch (code pénal, ci-après le « StGB ») permet de surseoir avec mise à l’épreuve au solde d’une peine privative de liberté partiellement purgée ( 13 ). Lorsque les deux tiers de la peine infligée ont été purgés avec un minimum de deux mois, le tribunal sursoit à l’exécution du reste de la peine privative de liberté, avec l’accord de la personne condamnée et après avoir déterminé si les intérêts de la sécurité publique peuvent justifier cela ( 14 ).
Lorsque la moitié de la durée d’une peine privative de liberté a été purgée, avec cependant un minimum de six mois, le tribunal peut surseoir à l’exécution du solde avec mise à l’épreuve sous des conditions plus strictes ( 15 ).

31. Le tribunal compétent révoque le sursis si la personne condamnée méconnaît de manière flagrante ou persistante des instructions ou conditions, ou continue de se soustraire au contrôle et à la direction de l’agent de probation, faisant ainsi craindre une récidive ( 16 ). En revanche, le tribunal ne révoque pas le sursis s’il suffit d’imposer des conditions ou des instructions supplémentaires, en particulier le fait de placer la personne condamnée sous le contrôle d’un agent de probation ou de
prolonger la période probatoire ou de contrôle ( 17 ). Si ces conditions ne sont pas respectées, le tribunal doit impérativement révoquer le sursis à exécution du reste de la peine.

32. En second lieu, les décisions ultérieures relatives au sursis à exécution du reste d’une peine privative de liberté avec mise à l’épreuve sont régies par l’article 453 du Strafprozessordnung (code de procédure pénale, ci-après le « StPO »). Lorsqu’une révocation du sursis est envisagée, le tribunal donne à la personne condamnée l’occasion d’être entendue oralement ( 18 ). Une fois la décision de révocation adoptée, celle-ci peut être attaquée par la personne condamnée par la voie du recours
immédiat, qui doit être introduit dans la semaine suivant la communication de l’ordonnance de révocation à la personne condamnée ( 19 ). Si le lieu de résidence de la personne condamnée n’est pas connu et si la notification ne peut pas être faite dans les formes requises, il est permis de notifier publiquement l’ordonnance moyennant un affichage sur le tableau du tribunal. La notification est réputée accomplie à l’issue d’un mois d’affichage. Le délai précité d’une semaine pour introduire le
recours immédiat commence à courir à partir de ce moment. À son expiration, l’ordonnance de révocation acquiert force de chose jugée ( 20 ).

33. Le gouvernement allemand a expliqué lors de l’audience que l’occasion d’être entendu doit impérativement être donnée à la personne condamnée même si la personne ne prend effectivement connaissance de la décision de révocation notifiée publiquement qu’après l’écoulement du délai d’une semaine. Il ressort de la jurisprudence nationale relative à l’article 33a du StPO que, dans une telle situation, la personne condamnée doit être auditionnée afin d’avoir l’opportunité de faire valoir ses objections
à la révocation et d’exposer de nouveaux éléments de fait. À la suite de cette audition, la procédure peut être rétablie, d’office ou sur demande, dans l’état où elle se trouvait avant l’adoption de la décision de révocation en question.

2. Sur les « modalités d’exécution d’une peine privative de liberté » dans la jurisprudence de la Cour EDH

34. Ainsi que l’a relevé la Cour dans l’affaire Zdziaszek ( 21 ), il ressort de la jurisprudence de la Cour EDH que les garanties de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH trouvent à s’appliquer non seulement à la déclaration de culpabilité, mais également à la détermination de la peine ( 22 ).

35. Toutefois, selon la jurisprudence de la Cour EDH, les questions relatives aux modalités d’exécution d’une peine privative de liberté ne tombent pas sous le coup de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ( 23 ). Plus particulièrement, la Cour EDH a dit pour droit que le volet pénal de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH n’est pas applicable au contentieux pénitentiaire qui ne concerne pas, en principe, le bien-fondé d’une « accusation en matière pénale » ( 24 ).

36. Ainsi, la Cour EDH et l’ancienne Commission EDH ont estimé que la protection de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ne s’applique pas à des procédures telles que le congé à accorder à une personne détenue ( 25 ), l’amnistie ( 26 ), l’octroi d’une libération conditionnelle ( 27 ), la mise en liberté provisoire dans le cadre d’une détention préventive ( 28 ), ou le transfèrement des personnes condamnées ( 29 ). Il en va de même des procédures de révocation de la suspension d’une peine, du moins
selon la jurisprudence de l’ancienne Commission EDH ( 30 ).

37. Comme le note la juridiction de renvoi, cette approche concorde avec la jurisprudence de la Cour EDH relative à la notion de « peine » au sens de l’article 7 de la CEDH ( 31 ).

38. Cependant, la Cour EDH a également reconnu, notamment dans le cadre de l’article 7 de la CEDH, que la distinction entre une « peine » et une mesure relative à l’« exécution » d’une peine n’est pas toujours nette en pratique ( 32 ). La Cour EDH a aussi admis l’applicabilité de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH à des mesures étroitement liées à la procédure pénale et à la détermination définitive de la peine ( 33 ).

39. De surcroît, des doutes persistent concernant la question de savoir si des mesures liées à l’exécution des peines peuvent être couvertes, dans certaines conditions, par le volet civil de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ( 34 ). En effet, bien que, dans l’affaire Boulois, la grande chambre de la Cour EDH n’ait pas estimé applicable l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH dans son volet civil, cette réponse est liée au fait que le « congé pénal » ne constituait pas un droit, la détermination de
ce qui constitue un « droit » étant fortement liée à sa configuration dans le système juridique national ( 35 ).

40. Enfin, les garanties inhérentes au droit plus spécifique de l’accusé de comparaître à son procès ne figurent pas expressément à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH. Elles ont été initialement dégagées par la Cour EDH dans le contexte spécifique du volet pénal de cette disposition ( 36 ) avant d’être récemment étendues au volet civil ( 37 ).

B.  L’interprétation de l’article 4 bis de la décision-cadre

41. S’agissant de la question de savoir si la procédure conduisant à la décision de révocation relève du champ d’application de l’article 4 bis de la décision-cadre et si une telle décision s’apparente à une modalité d’exécution d’une peine, les parties intéressées retiennent des interprétations divergentes.

42. M. Ardic soutient que l’article 4 bis vise une procédure de révocation telle que celle en cause au principal. Il avance d’abord l’argument selon lequel l’article 6 de la CEDH est applicable aux décisions de révocation. Pour ce qui est du « volet pénal » de l’article 6 de la CEDH, M. Ardic fait valoir que les procédures de révocation peuvent aboutir à une modification de la peine dans le cadre d’une telle procédure, et que le juge de la révocation dispose d’une marge d’appréciation lorsqu’il
prend sa décision. Ensuite, l’article 6 de la CEDH, dans son volet civil, pourrait également trouver à s’appliquer étant donné que la procédure de révocation met en jeu le « droit à la liberté ». En toute hypothèse, même s’il fallait admettre que l’article 6 de la CEDH ne s’applique pas à la procédure de révocation, les articles 47 et 48 de la Charte accorderaient une protection plus étendue. En particulier, l’article 47 de la Charte aurait une portée plus large, susceptible de couvrir une
procédure de révocation telle que celle en cause au principal. C’est à la lumière de ces dispositions que l’article 4 bis de la décision-cadre devrait être interprété.

43. Le gouvernement irlandais fait valoir que, dans des circonstances où la révocation n’est pas automatique et où le juge dispose d’un certain pouvoir discrétionnaire, une personne doit être considérée comme faisant toujours l’objet d’une procédure pénale lors de l’audience portant sur la révocation du sursis à exécution du reste de la peine. Dans de telles circonstances, il s’agirait d’une procédure conduisant à une décision judiciaire ayant définitivement condamné la personne dont la remise est
sollicitée (pour reprendre la terminologie utilisée par la Cour au point 74 de l’arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628). Se référant au point 91 de l’arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629), le gouvernement irlandais considère qu’il s’agirait d’une décision qui détermine le quantum de la peine. Les considérations retenues par la Cour au point 84 dudit arrêt Tupikas devraient ainsi être appliquées par analogie dans ces circonstances, étant donné que
l’audience sur la révocation du sursis serait susceptible de conduire à une privation de liberté. Eu égard aux conséquences potentielles pour l’individu, une telle procédure concernerait le bien-fondé d’une accusation en matière pénale au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH. En tout état de cause, un niveau de protection plus élevé pourrait être accordé au titre de l’article 47 de la Charte, conformément à l’article 53, paragraphe 2, de celle-ci.

44. En revanche, le ministère public néerlandais ainsi que les gouvernements néerlandais et allemand et la Commission partagent en substance la position selon laquelle les décisions de révocation en cause au principal n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 4 bis de la décision-cadre. Premièrement, cela ressortirait notamment du point 85 de l’arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629). D’après ces parties intéressées, l’examen pertinent aux fins de l’article 4 bis
concernerait uniquement les questions relatives à la culpabilité et à la peine. Il faudrait donc distinguer la détermination de la culpabilité/peine des procédures ultérieures qui concernent les modalités d’exécution de la peine imposée. Les décisions de révocation constituant des modalités d’exécution, elles ne relèveraient pas de l’article 4 bis de la décision-cadre. Deuxièmement, la peine est certaine et définitive en l’espèce, à la différence de l’affaire Zdziaszek où le quantum de la peine
n’était pas établi. Les décisions ultérieures concernant la révocation du sursis n’auraient modifié à aucun égard les deux condamnations définitives à deux peines privatives de liberté d’une durée d’un an et huit mois. Les décisions de révocation indiqueraient ce qui doit être exécuté : le reste des peines infligées initialement. Troisièmement, le pouvoir discrétionnaire du juge jouerait seulement dans le contexte de la fixation de la peine. Le fait que, dans la procédure en cause au principal,
le juge dispose d’une marge d’appréciation pour révoquer le sursis serait sans incidence sur le quantum de la peine.

45. Les arguments qui viennent d’être exposés démontrent que la question du champ d’application des garanties de l’article 6 de la CEDH et la délimitation de ce qui constitue une modalité d’exécution des peines soulèvent des problèmes complexes. Certes, à la lumière de la jurisprudence de la Cour EDH, la notion de « modalités d’exécution » et ses implications eu égard à l’applicabilité des volets pénal et civil de l’article 6 de la CEDH ne sont pas entièrement claires, particulièrement en ce qui
concerne les décisions de révocation en cause au principal, telles que prévues par le droit allemand.

46. Cependant, à mon avis, cette discussion revêt une importance limitée aux fins de la présente affaire. L’identification de ce qui constitue une modalité d’exécution au sens de l’article 6 de la CEDH n’est pas déterminante pour répondre à la question préjudicielle posée par la juridiction de renvoi en ce qu’elle vise spécifiquement à interpréter l’article 4 bis de la décision-cadre. Ce qui importe, par conséquent, afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, est d’interpréter
l’article 4 bis de la décision-cadre. À cet effet, il faut revenir sur le texte et le système(1), sur la genèse (2) et sur la finalité de cette disposition(3).

1. Sur le texte et le système

47. La notion de « procès qui a mené à la décision » contenue dans le libellé de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre doit être appréhendée comme une notion autonome du droit de l’Union ( 38 ). Le libellé de cette disposition ne permet toutefois pas, à lui seul, de préciser le contenu spécifique de la notion de « procès qui a mené à la décision ». Il en va de même de la notion reprise dans l’intitulé de l’article 4 bis de la décision-cadre, qui se borne à faire référence aux
« [d]écisions rendues à l’issue d’un procès auquel l’intéressé n’a pas comparu en personne » ( 39 ).

48. Dans ces circonstances, il est nécessaire d’avoir recours au texte et au système de l’ensemble de l’article 4 bis ainsi qu’à d’autres dispositions de la décision-cadre.

49. En premier lieu, l’article 4 bis est applicable aux mandats d’arrêt européen visant à l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté. Il est donc évident que cette disposition n’entre en ligne de compte qu’en présence d’une décision de condamnation ( 40 ). Il existe ainsi un rapport explicite entre le champ d’application de cette disposition et la décision devant être exécutée.

50. À cet égard, plusieurs dispositions de la décision-cadre clarifient la notion de « décision » à laquelle doit aboutir le procès, au sens de l’article 4 bis de la décision-cadre. Ainsi, l’article 8, paragraphe 1, sous c) et f), de la décision-cadre fait référence au « jugement exécutoire » ou à « toute autre décision judiciaire exécutoire ayant la même force », ainsi qu’à la « peine prononcée » dans le « jugement définitif », au titre des informations qui doivent figurer dans le MAE. De même, le
point b.2 de l’annexe de la décision-cadre mentionne le « jugement exécutoire ». Ces éléments mettent en évidence le fait que l’article 4 bis vise explicitement le procès donnant lieu à la décision de condamnation qui, selon la Cour, doit être au demeurant définitive ( 41 ).

51. En second lieu, les différents cas de figure visés à l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre en tant qu’exceptions à la faculté de refuser l’exécution du MAE témoignent du fait que le procès en cause est celui conduisant à une décision sur la culpabilité et/ou la peine, autrement dit à une décision contenant les éléments constitutifs d’une condamnation pénale.

52. Plus particulièrement, l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre fait référence à la défense effective au procès par un conseil juridique. L’article 4 bis, paragraphe 1, sous c), de la décision-cadre se réfère à la situation où, ayant été informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel permettant de réexaminer l’affaire sur le fond, l’intéressé ne conteste pas la décision ou ne demande pas une nouvelle procédure de jugement.
L’article 4 bis, paragraphe 1, sous d), de la décision-cadre vise la situation dans laquelle la personne recevra personnellement la signification de la décision après la remise et sera informée de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou d’appel qui permettra de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et pourra aboutir à une infirmation de la décision initiale.

53. Il s’ensuit que, au sens de l’article 4 bis, la décision à laquelle le procès doit conduire est « la décision judiciaire ayant définitivement condamné la personne dont la remise est sollicitée dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen » ( 42 ). La Cour a rappelé, dans ce contexte, que le terme « condamnation » vise la déclaration de culpabilité ainsi que l’infliction d’une peine ou d’une autre mesure privative de liberté ( 43 ).

54. Dans l’affaire Zdziaszek, la Cour a précisé que la notion de « procès qui a mené à la décision » inclut également une procédure subséquente aboutissant à un jugement prononçant une peine globale. Dans cette hypothèse, l’élément déterminant est précisément qu’une telle procédure donne lieu à une décision modifiant le niveau de la peine initialement prononcée, l’auteur de cette décision ayant à cet égard bénéficié d’un certain pouvoir d’appréciation ( 44 ). Ainsi, la notion de « procès qui a mené
à la décision », interprétée dans le contexte spécifique de l’article 4 bis de la décision-cadre, se focalise sur la phase procédurale qui concerne l’examen de l’affaire sur le fond, déterminante pour la condamnation de la personne concernée ( 45 ).

55. Les éléments analysés plus haut permettent de conclure que la notion de « procès qui a mené à la décision » n’inclut pas les procédures ultérieures au procès ayant conduit à une décision définitive sur la condamnation dès lors que ces procédures n’affectent pas la détermination de la culpabilité et du niveau de la peine.

2. Sur la genèse de l’article 4 bis

56. La genèse de la décision-cadre 2009/299 confirme que l’article 4 bis de la décision-cadre ne concerne que le droit spécifique à comparaître au procès pénal, compris comme la procédure déterminant de façon définitive la condamnation (culpabilité et peine).

57. En premier lieu, la décision-cadre 2009/299, qui a introduit l’article 4 bis, établit des règles communes pour la reconnaissance et/ou l’exécution des décisions judiciaires « à l’issue d’une procédure à laquelle l’intéressé n’a pas comparu en personne » ( 46 ). Cet instrument répond au souci de renforcer le droit des accusés à un procès équitable garanti par la CEDH, qui comprend spécifiquement « le droit de l’intéressé à comparaître en personne au procès » ( 47 ). La décision-cadre 2009/299 et
plus particulièrement l’article 4 bis visent ainsi spécifiquement l’un des éléments inclus dans le droit à un procès équitable prévu à l’article 6 de la CEDH, en tant qu’il découle de l’objet et du but de l’ensemble de cette disposition : le droit de l’accusé de comparaître en personne à son procès, tel qu’interprété par la Cour EDH ( 48 ). Les cas de figure envisagés à l’article 4 bis font écho à cette jurisprudence ( 49 ).

58. Ainsi, l’article 4 bis de la décision-cadre, en tant que motif facultatif de non-exécution d’un MAE tendant lui-même à l’exécution d’un jugement exécutoire, couvre spécifiquement, compte tenu de l’objectif et du contenu de la décision-cadre 2009/299, les garanties liées au droit spécifique de l’intéressé à comparaître à son procès pénal. En effet, l’article 4 bis n’a pas pour objet l’incorporation de toutes les garanties procédurales dérivant de l’article 6 de la CEDH (ni, par analogie, celles
potentiellement plus étendues résultant des articles 47 et 48 de la Charte), en tant qu’éléments susceptibles de justifier le refus de l’exécution du MAE. L’article 4 bis vise exclusivement les garanties afférentes au droit de comparaître au procès pénal.

59. En second lieu, le fait que l’article 4 bis de la décision-cadre a pour seul objet la procédure judiciaire statuant sur le fond de la condamnation pénale est confirmé par les travaux préparatoires. En effet, le libellé originel de cette disposition, tel qu’il résulte de l’initiative des États membres ayant conduit à l’adoption de la décision-cadre 2009/299, faisait référence au terme large de « procédure », qui s’est finalement vu préférer celui, plus précis, de « procès » ( 50 ).

60. Ainsi, le fait de ne pas avoir été entendu dans le cadre d’une procédure ultérieure au procès, telle qu’une procédure de révocation d’une décision de sursis à exécution d’une peine, ne rend pas le jugement exécutoire prononcé à l’occasion du procès pénal en un jugement in absentia ou, par défaut, au sens de l’article 4 bis de la décision-cadre.

3. Interprétation téléologique

61. En ce qui concerne l’interprétation téléologique, l’article 4 bis de la décision-cadre doit être interprété à la lumière de ses objectifs généraux ainsi que de ceux de la décision-cadre 2009/229.

62. L’objectif des modifications introduites par la décision-cadre 2009/299 était double. Il s’agissait de renforcer les droits procéduraux des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale tout en facilitant la coopération judiciaire en matière pénale, en particulier en améliorant la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires ( 51 ).

63. Pour ce qui est de la facilitation de la coopération judiciaire, il ressort du considérant 3 de la décision-cadre 2009/299 que le législateur de l’Union a voulu mettre fin à la situation prévue à l’article 5 de la version initiale de la décision-cadre, aux termes duquel il revenait à l’autorité d’exécution d’apprécier si les assurances données quant à la possibilité de demander une réouverture de la procédure de jugement étaient suffisantes ( 52 ).

64. L’équilibre entre cet objectif et celui de renforcement des droits procéduraux des personnes est garanti, en particulier, par l’application des exigences prévues à l’article 4 bis au regard des seuls éléments qui relèvent du cœur du procès pénal en tant que tel, soit la culpabilité et la peine. C’est par rapport à ces éléments que la protection accrue en cas de condamnations prononcées par défaut s’applique.

65. Une interprétation extensive de ces exigences au-delà du procès pénal proprement dit, au sens de l’article 4 bis de la décision-cadre, risquerait d’altérer ce délicat équilibre recherché par la décision-cadre dans son ensemble, ainsi que par les modifications de 2009. En effet, une telle approche risquerait de soumettre à l’examen des juridictions d’exécution tous les éléments de procédure secondaires liés au procès pénal, y compris lorsque ces éléments sont postérieurs au jugement définitif,
voire avant le début du procès proprement dit.

66. Comme le note la juridiction de renvoi, il est certes possible de soutenir qu’une décision de révocation du sursis à exécution du reste des peines privatives de liberté présente des conséquences importantes pour l’intéressé. Cependant, d’un point de vue pratique, subordonner la remise au droit d’être entendu dans le cadre de la procédure conduisant à des décisions de révocation telles que celles en cause au principal aurait pour effet d’entraver le fonctionnement du système de la décision-cadre
dans tous les cas où une personne condamnée ne se trouvant plus sur le territoire de l’État membre de la condamnation (et n’ayant pas informé les autorités de son changement de domicile) ne respecterait pas les mesures de probation.

67. Au demeurant, il peut être noté à toutes fins utiles que le droit de l’Union prévoit une voie spécifique pour assurer la possibilité des personnes soumises à des mesures de probation de se déplacer dans d’autres États membres tout en respectant ces mesures ( 53 ).

C.  La procédure de révocation d’une décision de sursis à exécution

68. Il découle des considérations qui précèdent que la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis de la décision-cadre, vise le procès (première instance ou appel) qui a conduit au jugement exécutoire prononçant la condamnation (culpabilité et peine), ce jugement constituant le fondement de la peine de privation de liberté dont l’exécution est visée par le MAE. Une telle interprétation conduit à conclure que l’article 4 bis de la décision-cadre n’est pas applicable à
une procédure ultérieure au procès conduisant à une décision définitive sur la condamnation lorsqu’une telle procédure ne peut affecter la détermination de la culpabilité et du niveau de la peine.

69. À la lumière de ces éléments, il semblerait que la révocation d’une décision de sursis à exécution du reste des peines de privation de liberté, telle qu’elle a été présentée par la juridiction de renvoi et expliquée par le gouvernement allemand, n’est ainsi pas couverte par l’article 4 bis de la décision-cadre.

70. Premièrement, il ressort de la décision de renvoi que les décisions de révocation en question n’ont pas modifié le quantum des peines infligées imposées par les jugements définitifs qui constituent le fondement du MAE en question. En effet, le seul jugement exécutoire à la base du MAE demeure le jugement portant condamnation. Les décisions de révocation n’impliquent pas une nouvelle décision sur le fond susceptible de constituer le fondement du MAE. Les décisions de révocation ne peuvent pas
être considérées indépendamment des jugements qui contiennent les éléments concernant la culpabilité et la peine prononcées de façon définitive, et dont l’exécution est toujours en cours ( 54 ).

71. Deuxièmement, les décisions de révocation réactivent des peines qui ont été définitivement fixées au moment de la condamnation, même si elles avaient été par la suite suspendues sous conditions. Il est alors procédé à un calcul arithmétique des jours restants à purger par rapport à la durée de la peine déjà accomplie. Le pouvoir discrétionnaire dont les autorités judiciaires de l’État membre d’émission disposent à cet égard ne se rapporte pas aux éléments de la condamnation que sont la
culpabilité et la peine.

72. Troisièmement, l’objet d’une telle procédure de révocation est différent du procès pénal qui a mené au jugement portant sur la culpabilité et la peine. La procédure de révocation ainsi que la marge d’appréciation dont dispose le juge dans ce cadre spécifique concernent l’appréciation du respect des conditions pour le sursis à exécution ainsi que de la pertinence de l’imposition d’autres conditions supplémentaires. Elles ne touchent pas à la culpabilité et à la peine prononcées de façon
définitive dans le procès pénal ( 55 ).

D.  Le respect des droits fondamentaux au-delà de l’article 4 bis

73. Le fait que, en tant que procédures ultérieures au procès pénal au sens de la décision-cadre, les procédures de révocation en cause au principal n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 4 bis de celle-ci n’entraîne pas pour autant l’absence de garanties procédurales à ce stade.

74. Si le système de la décision-cadre est fondé sur la confiance réciproque, il est devenu de plus en plus évident qu’il ne s’agit pas d’une confiance aveugle. La confiance sur laquelle repose le principe de reconnaissance mutuelle se fonde sur une construction solide fondée sur des standards équivalents et des responsabilités partagées.

75. Dans ce contexte, et plus particulièrement dans les affaires portées devant cette Cour, la discussion se focalise sur le rôle de la juridiction d’exécution, et notamment sur les facultés dont elle dispose pour refuser l’exécution d’un MAE face au risque de violation des droits fondamentaux dans l’État membre d’émission. Toutefois, l’importance cruciale des obligations de celui-ci ne saurait être sous-estimée.

76. D’une part, la présomption de protection équivalente (mais non identique) sur laquelle se fonde le principe de confiance mutuelle repose sur des fondements juridiques robustes. Tous les États membres sont parties à la CEDH et doivent garantir effectivement le respect de l’ensemble des garanties dérivant de celle-ci, et cela indépendamment du fait qu’une procédure particulière ait trait ou non à l’exécution d’un MAE.

77. Dans ces circonstances, si le fait de n’avoir pas été entendu au préalable dans le cadre d’une procédure de révocation d’un sursis à exécution d’une peine privative de liberté n’est pas un motif de refus d’exécution du MAE conformément à l’article 4 bis de la décision-cadre, cela ne signifie aucunement que le droit d’être entendu ne doive pas être respecté. Cette obligation relève, en effet, des obligations afférentes à l’État membre d’émission. C’est dans le cadre des obligations de celui-ci
que les droits fondamentaux procéduraux, y compris le droit d’être entendu, doivent être sauvegardés dans le cadre de la mise en œuvre des procédures et voies de recours internes.

78. Le rôle de protagoniste de l’État membre d’émission en matière de droits procéduraux est mis en avant, au sein du système du MAE, par l’article 1er, paragraphe 2, de la décision-cadre 2009/299, au terme duquel cette décision-cadre « n’a pas pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 du traité, y compris le droit de la défense des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, ni
celle de les faire respecter par les autorités judiciaires des États membres ». Cette disposition, qui a une portée équivalente à celle de l’article 1, paragraphe 3, de la décision-cadre, vise les obligations incombant tant à l’État membre d’émission qu’à l’État membre d’exécution ( 56 ). Ainsi, si les dispositions précitées n’impliquent pas que tout risque de méconnaissance d’un droit fondamental doive donner lieu à un refus d’exécution, elles veillent néanmoins à garantir que le niveau de
protection des droits fondamentaux ne soit pas affecté du fait que l’intéressé a été l’objet d’un MAE.

79. C’est ainsi que le droit allemand, tel qu’expliqué par le gouvernement allemand, garantit le droit d’être entendu dans le cadre de la procédure de révocation en cause, y compris après la remise, lorsque l’intéressé n’a pas été entendu lors de cette procédure.

80. D’autre part, il importe de souligner que, si la confiance réciproque implique que les États membres peuvent être tenus de présumer le respect des droits fondamentaux par les autres États membres ( 57 ), il ne s’agit pas d’une présomption irréfragable. La décision-cadre s’inscrit dans l’ordre juridique de l’Union en tant qu’Union de droit respectueuse des droits fondamentaux dont la jurisprudence de la Cour, telle qu’issue notamment des affaires Aranyosi et Căldăraru, constitue la clé de voûte (
58 ). Cette jurisprudence reconnaît l’obligation pour l’État membre d’exécution de reporter la décision sur la remise – voire de mettre fin à la procédure de remise – à la suite d’une appréciation concrète et précise des motifs sérieux et avérés indiquant un risque réel de violations graves des droits fondamentaux ( 59 ). Toutefois, compte tenu du cadre factuel et juridique de la présente affaire, une telle situation est ici purement hypothétique ( 60 ).

81. Pour finir, il est indispensable de rappeler l’importance de la communication entre les autorités d’exécution et les autorités d’émission, telle que prévue à l’article 15, paragraphe 2, de la décision-cadre. Comme la Cour l’a souligné à maintes reprises, cette disposition, qui permet à l’autorité judiciaire d’exécution de demander des informations complémentaires, constitue un élément essentiel de la coopération judiciaire qui est à la base du système de reconnaissance mutuelle ( 61 ). Dans ces
conditions, la juridiction de l’État membre d’exécution est censée se renseigner au moyen des voies offertes par cette disposition avant de refuser l’exécution d’un MAE ( 62 ).

VI. Conclusion

82. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas) comme suit :

La notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, phrase introductive, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009, doit être interprétée en ce sens qu’elle n’inclut pas une procédure de révocation d’une décision de sursis à exécution d’une peine privative de liberté,
pour cause de non-respect des conditions du sursis, pour autant qu’une telle révocation n’affecte pas la décision sur la culpabilité ou sur la peine qui se trouve au fondement du mandat d’arrêt européen émis.

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( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Le point 10 des présentes conclusions a fait l’objet d’une modification à cause d’une erreur de frappe détectée postérieurement à sa première mise en ligne. La date du « 13 juin 2015 » a été corrigée et substituée par « 13 juin 2017 ».

( 3 ) Décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24) (ci-après la « décision-cadre »).

( 4 ) Signée à Rome le 4 novembre 1950.

( 5 ) Décision-cadre du Conseil du 26 février 2009 portant modification des décisions-cadres 2002/584/JAI, 2005/214/JAI, 2006/783/JAI, 2008/909/JAI et 2008/947/JAI, renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès (JO 2009, L 81, p. 24).

( 6 ) Il s’agit, conformément au droit allemand, de la mesure dénommée « Aussetzung des Strafrestes bei zeitiger Freiheitsstrafe » (suspension du reste de la peine en cas d'emprisonnement). Cette mesure implique la remise en liberté conditionnelle lorsqu’une partie de la peine privative de liberté a déjà été purgée. Voir, également, point 30 des présentes conclusions.

( 7 ) Arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 85).

( 8 ) Arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 81, 90 et 98).

( 9 ) Arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, points 90 et 96).

( 10 ) Cour EDH, 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg (CE:ECHR:2012:0403JUD003757504, § 87).

( 11 ) Arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 85).

( 12 ) Arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 85).

( 13 ) « Aussetzung des Strafrestes bei zeitiger Freiheitsstrafe ».

( 14 ) Article 57, paragraphe 1, du StGB.

( 15 ) Article 57, paragraphe 2, du StGB

( 16 ) Article 56f, paragraphe 1, du StGB.

( 17 ) Article 56f, paragraphe 2, du StGB.

( 18 ) Article 453, paragraphe 1, quatrième phrase, du StPO.

( 19 ) Article 453, paragraphe 2, troisième phrase, et article 311, paragraphe 2, du StPO.

( 20 ) Article 40, paragraphe 1, et article 37, paragraphes 1 et 2, du StPO, ainsi que articles 186 et 188 du Zivilprozessordnung (code de procédure civile).

( 21 ) Arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 87).

( 22 ) Ces garanties couvrent « l’ensemble de la procédure en cause, y compris les voies de recours et la détermination de la peine ». Voir, en ce sens, Cour EDH, 28 novembre 2013, Aleksandr Dementyev c. Russie (CE:ECHR:2013:1128JUD004309505, § 23 et jurisprudence citée).

( 23 ) Cour EDH, 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg (CE:ECHR:2012:0403JUD003757504, § 87).

( 24 ) Cour EDH, 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg, CE:ECHR:2012:0403JUD003757504, § 85, et Cour EDH, 17 septembre 2009, Enea c. Italie (CE:ECHR:2009:0917JUD007491201, § 97).

( 25 ) Cour EDH, 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg (CE:ECHR:2012:0403JUD003757504, § 104).

( 26 ) Cour EDH, 13 mai 2003, Montcornet de Caumont c. France (CE:ECHR:2003:0513DEC005929000).

( 27 ) Commission EDH, 7 mai 1990, A. c. Autriche (CE:ECHR:1990:0507DEC001626690, § 2, et jurisprudence citée).

( 28 ) Cour EDH, Neumeister c. Autriche, 27 juin 1968 (CE:ECHR:1968:0627JUD000193663, §§ 22 et 23).

( 29 ) Cour EDH, 6 juin 2006, Szabó c. Suède (CE:ECHR:2006:0627DEC002857803).

( 30 ) Commission EDH, 5 octobre 1967, X v. the Federal Republic of Germany (CE:ECHR:1967:1005DEC000242865).

( 31 ) Cour EDH, 29 novembre 2005, Uttley c. Royaume-Uni (CE:ECHR:2005:1129DEC003694603) ; Cour EDH, 10 juillet 2003, Grava c. Italie (CE:ECHR:2003:0710JUD004352298, § 51) ; Cour EDH, 23 octobre 2012, Ciok v. Poland (CE:ECHR:2012:1023DEC000049810, § 33) ; Cour EDH, 12 février 2008, Kafkaris c. Chypre (CE:ECHR:2008:0212JUD002190604, § 142 et suiv.). En particulier, concernant les différentes conditions dans les États membres pour une libération conditionnelle applicables dans le cadre de la
décision-cadre, Cour EDH, 23 octobre 2012, Giza v. Poland (CE:ECHR:2012:1023DEC000199711, §§ 31 à 33).

( 32 ) Voir Cour EDH, 21 octobre 2013, Del Río Prada c. Espagne (CE:ECHR:2013:1021JUD004275009, § 85 et suiv.), citant, notamment, Cour EDH, 12 février 2008, Kafkaris c. Chypre (CE:ECHR:2008:0212JUD002190604, § 142).

( 33 ) Cour EDH, 1er avril 2010, Buijen c. Allemagne, CE:ECHR:2010:0401JUD002780405, § 42 (concernant le transfèrement des personnes condamnées). Voir, également, Cour EDH, 15 décembre 2009, Gurguchiani c. Espagne (CE:ECHR:2009:1215JUD001601206, §§ 40, 47 et 48, (concernant le remplacement d’une peine de prison par l’expulsion du territoire d’un État). De même, la Cour EDH a considéré applicable l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH aux procédures imposées en raison des infractions commises pendant
l’exécution de la peine et résultant en un rallongement de la durée de détention (Cour EDH, 9 octobre 2003, Ezeh et Connors c. Royaume-Uni, CE:ECHR:2003:1009JUD003966598).

( 34 ) Au terme duquel « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue [...] par un tribunal [...] qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil [...] ».

( 35 ) Cour EDH, 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg (CE:ECHR:2012:0403JUD003757504, §§ 89 et 101).

( 36 ) La Cour EDH a souligné que ce droit découle de l’objet et du but de l’article 6 pris dans son ensemble, en faisant référence aux points c), d) et e) du paragraphe 3, qui reconnaissent à « tout accusé » le droit de « se défendre lui-même », d’« interroger ou faire interroger les témoins » et de « se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience », « ce qui ne se conçoit guère sans sa présence ». Voir, notamment, Cour EDH,
12 février 1985, Colozza c. Italie (CE:ECHR:1985:0212JUD000902480, § 27); Cour EDH, 1er mars 2006, Sejdovic c. Italie (CE:ECHR:2006:0301JUD005658100, §§ 81 et suiv.).

( 37 ) Voir Cour EDH, 14 mars 2014, Dılıpak et Karakaya c. Turquie (CE:ECHR:2014:0304JUD000794205, §§ 76-80), ainsi que Cour EDH, 8 octobre 2015, Aždajić c. Slovénie (CE:ECHR:2015:1008JUD007187212, § 50).

( 38 ) Arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 66 et 67).

( 39 ) Arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 69).

( 40 ) Par suite, ces garanties ne seraient pas applicables dans le cadre d’un MAE émis en vue de poursuites pénales. Voir, en ce sens, arrêt du 29 janvier 2013, Radu (C‑396/11, EU:C:2013:39, points 39 et 40).

( 41 ) Arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 71 et 72).

( 42 ) Arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 74).

( 43 ) Arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 78, faisant référence à l’arrêt de Cour EDH, 21 octobre 2013, Del Río Prada c. Espagne, CE:ECHR:2013:1021JUD004275009, § 123).

( 44 ) Arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 96).

( 45 ) Voir, en ce sens, arrêt du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 87 et 89), ainsi que l’arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 98).

( 46 ) Article 1er, paragraphe 3, de la décision-cadre 2009/299.

( 47 ) Considérant 8 de la décision-cadre 2009/299.

( 48 ) Cela ressort également du titre de la décision-cadre 2009/299 « portant modification des décisions-cadres […] renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès ».

( 49 ) Voir mes conclusions dans l’affaire Dworzecki (C‑108/16 PPU, EU:C:2016:333, point 69 et suiv., ainsi que jurisprudence de la Cour EDH citée).

( 50 ) Les termes « proceedings » (anglais), « procédure » (français), « proceso » (espagnol), « Verfahren » (allemand) et « procedimento » (italien) […] apparaissent dans le texte de l’initiative de la République de Slovénie, de la République française, de la République tchèque, du Royaume de Suède, de la République slovaque, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et de la République fédérale d’Allemagne en vue de l’adoption de la décision-cadre 2008/…/JAI du Conseil relative à
l’exécution des décisions rendues par défaut et modifiant la décision-cadre 2002/584/JAI relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, de la décision-cadre 2005/214/JAI concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux sanctions pécuniaires, la décision-cadre 2006/783/JAI relative à l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions de confiscation et la décision-cadre 2008/…/JAI concernant l’application du principe de
reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne (JO 2008, C 52, p. 1). À la suite des réactions des États membres (voir document du Conseil 6501/08, note 21), cette terminologie a été remplacée par une notion clairement plus étroite (respectivement par les termes « trial », « procès », « juicio », « Verhandlung », « proceso », etc.) qui apparaissent dans le texte de la décision-cadre
2009/299.

( 51 ) Considérant 15 et article 1er de la décision-cadre 2009/299. Voir, notamment, arrêt du 16 juillet 2015, Lanigan (C‑237/15 PPU, EU:C:2015:474, point 36 et jurisprudence citée).

( 52 ) Voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, point 41).

( 53 ) Décision-cadre 2008/947/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements et aux décisions de probation aux fins de la surveillance des mesures de probation et des peines de substitution (JO 2008, L 337, p. 102), en particulier son considérant 14 et l’article 5, paragraphe 2.

( 54 ) Voir, dans le contexte différent de l’application du principe ne bis in idem, l’arrêt du 18 juillet 2007, Kretzinger (C‑288/05, EU:C:2007:441, point 42), selon lequel, « une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis […] doit être considérée comme étant “actuellement en cours d’exécution” dès que la condamnation est devenue exécutoire et durant la période d’épreuve […] ».

( 55 ) Voir mes conclusions dans l’affaire Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:612, points 53, 67 et 68).

( 56 ) Arrêts du 16 juillet 2015, Lanigan (C‑237/15 PPU, EU:C:2015:474, point 53), et du 30 mai 2013, F (C‑168/13 PPU, EU:C:2013:358, point 40).

( 57 ) Voir, en ce sens, avis 2/13, du 18 décembre 2014 (EU:C:2014:2454, point 191).

( 58 ) Arrêt du 5 avril 2016 (C‑404/15 et C‑659/15 PPU, EU:C:2016:198). Voir, par analogie, dans le contexte du droit d’asile, arrêt du 21 décembre 2011, N. S. e.a. (C‑411/10 et C‑493/10, EU:C:2011:865), et plus récemment arrêt du 16 février 2017, C. K. e.a. (C‑578/16 PPU, EU:C:2017:127).

( 59 ) Une telle possibilité n’a été reconnue pour le moment qu’eu égard au droit (de caractère absolu) consacré à l’article 4 de la Charte. Voir, également, Cour EDH 23 mai 2016, Avotiņš c. Lettonie (CE:ECHR:2016:0523JUD001750207, § 116). Sur la question de l’application d’une telle approche aux droits garantis par l’article 6 de la CEDH, voir conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Radu (C‑396/11, EU:C:2012:648).

( 60 ) Il convient de rappeler que, eu égard à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH, la Cour EDH « n’exclut pas qu’une décision d’extradition puisse exceptionnellement soulever un problème sur le terrain de ce texte au cas où le fugitif aurait subi ou risquerait de subir un déni de justice flagrant » (7 juillet 1989, Soering c. Royaume-Uni, CE:ECHR:1989:0707JUD001403888, § 113) (mise en italique par mes soins). La Cour EDH a confirmé cette approche par rapport à la décision-cadre dans sa décision
du 4 mai 2010, Stapleton c. Irlande (CE:ECHR:2010:0504DEC005658807, § 25), et a pris en compte le fait que, dans ce contexte, l’État membre d’émission s’est engagé à respecter les obligations de l’article 6 de la CEDH.

( 61 ) Arrêts du 5 avril 2016, Aranyosi et Căldăraru (C‑404/15 et C‑659/15 PPU, EU:C:2016:198, points 95 à 98) ; du 24 mai 2016, Dworzecki (C‑108/16 PPU, EU:C:2016:346, point 53) ; du 1er juin 2016, Bob-Dogi (C‑241/15, EU:C:2016:385, points 65 et 66), et du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 91).

( 62 ) Pour de plus amples détails, voir mes conclusions dans l’affaire Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:612, points 88 à 113).


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-571/17
Date de la décision : 20/12/2017
Type d'affaire : Renvoi préjudiciel - Procédure d'urgence

Analyses

Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Coopération policière et judiciaire en matière pénale – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Procédures de remise entre États membres – Conditions d’exécution – Motifs de non-exécution facultative – Article 4 bis, paragraphe 1, issu de la décision-cadre 2009/299/JAI – Mandat délivré aux fins de l’exécution d’une peine privative de liberté – Notion de “procès qui a mené à la décision” – Portée – Personne ayant été définitivement condamnée à une peine privative de liberté à l’issue d’une procédure qui s’est déroulée en sa présence – Peine à l’exécution de laquelle il a ultérieurement été sursis pour partie et sous certaines conditions – Procédure subséquente ayant abouti à la révocation du sursis en raison du non-respect de ces conditions – Procédure de révocation s’étant déroulée en l’absence de l’intéressé.

Coopération judiciaire en matière pénale

Espace de liberté, de sécurité et de justice

Coopération policière


Parties
Demandeurs : Samet Ardic.

Composition du Tribunal
Avocat général : Bobek

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2017:1013

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