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09/05/1989 | CEDH | N°11926/86

CEDH | BARANY contre la FRANCE


SUR LA RECEVABILITE de la requête No 11926/86 présentée par Alfred BARANY contre la France __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 9 mai 1989 en présence de MM. S. TRECHSEL, Président en exercice F. ERMACORA G. SPERDUTI E. BUSUTTIL G. JÖRUNDSSON A.S. GÖZÜBÜYÜK A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELI

US G. BATLINER J. CAMPINOS ...

SUR LA RECEVABILITE de la requête No 11926/86 présentée par Alfred BARANY contre la France __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 9 mai 1989 en présence de MM. S. TRECHSEL, Président en exercice F. ERMACORA G. SPERDUTI E. BUSUTTIL G. JÖRUNDSSON A.S. GÖZÜBÜYÜK A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS G. BATLINER J. CAMPINOS H. VANDENBERGHE Mme G.H. THUNE Sir Basil HALL MM. F. MARTINEZ C.L. ROZAKIS Mme J. LIDDY M. L. LOUCAIDES M. J. RAYMOND, Secrétaire adjoint de la Commission ; Vu l'article 25 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 9 décembre 1985 par Alfred BARANY contre la France et enregistrée le 8 janvier 1986 sous le No de dossier 11926/86 ; Vu la décision de la Commission du 15 juillet 1988 de porter le grief du requérant concernant la longueur de la procédure à la connaissance du Gouvernement défendeur et de déclarer la requête irrecevable pour le surplus ; Vu les observations du Gouvernement en date du 14 décembre 1988 ; Vu les observations en réponse du requérant en date du 24 février 1989 ; Vu le rapport prévu à l'article 40 du Règlement intérieur de la Commission ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Le requérant, de nationalité française, est né au Caire en 1942. Domicilié à Château-Thierry, il y exerce les fonctions de Directeur des services techniques de la ville. Il est représenté devant la Commission par Me Jean-François Auduc, avocat au barreau de Paris. Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit. Les 6 mai et 7 juillet 1981, Mme X. était victime de violences légères et de dégradations résultant de bris de vitres causés par des coups de feu tirés depuis un lieu non déterminé. Le 7 juillet, Mme X prévenait les services de police. Arrivé sur les lieux vers 23 h 30, l'inspecteur P. découvrait sur le plancher de l'appartement 3 balles de calibre 22 long rifle. Le 17 juillet 1981, l'inspecteur G., officier de police judiciaire, plaçait ces balles sous scellés. Les 25 et 31 juillet 1981, ce même inspecteur effectuait des tirs avec une carabine appartenant au club sportif de Château-Thierry, plaçait les balles sous scellés et les adressait, avec les balles découvertes le 7 juillet, au laboratoire inter-régional de police scientifique de Lille. Il agissait ainsi en vertu des dispositions de l'article 60 du Code de procédure pénale qui stipule notamment : "S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques qui ne peuvent être différés, l'officier de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées." Le rapport du laboratoire de Lille du 10 août 1981 entraîna le 14 septembre 1981 l'ouverture d'une information par le juge d'instruction auprès du tribunal de grande instance de Soissons et l'inculpation du requérant le 1er octobre 1981 pour dégradations volontaires et violences légères. Celui-ci fut également placé sous contrôle judiciaire, avec notamment l'obligation de s'abstenir de se rendre à la société de tir de Château-Thierry et de verser un cautionnement d'un montant total de 5.000 francs. Le 6 octobre 1981, le conseil du requérant a demandé au juge d'instruction la mainlevée du contrôle judiciaire. Ce dernier ayant refusé par ordonnance du 12 octobre 1981, le conseil du requérant a fait appel de cette décision le 14 octobre 1981. Le 9 novembre 1981, et avant l'audition sur le fond du requérant, son conseil, se fondant sur l'article 172 du Code de procédure pénale, adressa un courrier au juge d'instruction demandant que soit annulée la procédure d'enquête préliminaire effectuée en application de l'article 60 du Code de procédure pénale qui suppose l'existence d'un flagrant délit, car les conditions de ce dernier n'avaient pas été réunies (1). Le 12 novembre 1981, le juge d'instruction a considéré qu'il n'y avait pas lieu de faire application de la procédure prévue par l'article 171 du Code de procédure pénale car : "Il est établi en effet que l'enquête préliminaire, "n'ayant d'autre valeur que celle de simple renseignement, (....) la protection du suspect n'est pas assurée par la nullité (... mais que) le justiciable n'a pas moins sa sauvegarde assurée par l'entière liberté d'appréciation laissée aux magistrats dans la prise en considération de ses résultats" (juris-classeur, procédure pénale art. 75-78 paragraphes 133 et 134). Sans préjuger de la régularité ou de la valeur probante des investigations incriminées, je considère qu'il n'y a pas lieu de faire application de la procédure prévue par l'article 171 du Code de procédure pénale, l'objet de l'information étant de vérifier l'exactitude des présomptions réunies à l'encontre de Monsieur BARANY, qui justifient en l'état, les obligations de contrôle judiciaire à caractère de mesures de sûreté qui lui sont imposées."
_______________ (1) Les articles 171 et 172 du Code de procédure pénale disposent : "Art. 171. S'il apparaît au juge d'instruction qu'un acte de l'information est frappé de nullité, il saisit la chambre d'accusation en vue de l'annulation de cet acte, après avoir pris l'avis du procureur de la République et en avoir avisé l'inculpé et la partie civile. Si c'est le procureur de la République qui estime qu'une nullité a été commise, il requiert du juge d'instruction communication de la procédure en vue de sa transmission à la chambre d'accusation et présente requête aux fins d'annulation à cette chambre. Dans l'un et l'autre cas, la chambre d'accusation procède comme il est dit à l'article 206. Art. 172. Il y a également nullité en cas de violation des dispositions substantielles du présent titre, autres que celles visées à l'article 170, et notamment en cas de violation des droits de la défense. La chambre d'accusation décide si l'annulation doit être limitée à l'acte vicié ou s'étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure. Les parties peuvent renoncer à se prévaloir de ces nullités lorsqu'elles ne sont édictées que dans leur seul intérêt. Cette renonciation doit être expresse. La chambre d'accusation est saisie et statue ainsi qu'il est dit à l'article précédent." Le 20 novembre 1981, le requérant fut interrogé par le juge d'instruction. Le 24 novembre 1981, la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Amiens, statuant sur l'appel que le requérant avait formé de l'ordonnance du juge d'instruction refusant la mainlevée du contrôle judiciaire, a confirmé ladite ordonnance. Le 4 janvier 1982, l'avocat du requérant remit de nouvelles pièces au juge d'instruction. Le 6 janvier 1982, ce magistrat désigna par ordonnance des experts chargés de procéder à une expertise balistique. Le 8 janvier 1982, le juge d'instruction délivra une commission rogatoire au commissaire de police de Château-Thierry pour faire vérifier l'exactitude de certaines déclarations du requérant. Les services de police exécutèrent cette commission rogatoire entre le 12 janvier et le 7 février 1982. Le 20 octobre 1982, les experts déposèrent leur rapport. La victime fut entendue le 3 novembre 1982. Le 5 novembre 1982, le requérant fut confronté avec les témoins. Le rapport d'expertise fut notifié le même jour, et le requérant demanda un complément d'expertise. Le 9 novembre 1982, le juge d'instruction écrivit au laboratoire de police scientifique pour obtenir des éclaircissements sur le bien-fondé de la demande de complément d'expertise. Le 29 décembre 1982, le juge d'instruction rendit une ordonnance de complément d'expertise. Le 10 février 1983, le juge d'instruction entendit des témoins. Le 29 mars 1983, le juge d'instruction ordonna le transport sur les lieux afin de vérifier "in situ" le caractère vraisemblable de certaines déclarations du requérant. Le transport sur les lieux s'effectua le 18 avril 1983. Le 5 septembre 1983 fut déposé le second rapport d'expertise, confirmant le premier. Ce rapport fut notifié au requérant le 19 septembre 1983. Le 29 septembre 1983, le requérant fut à nouveau interrogé et les faits furent requalifiés de sorte que le requérant fut inculpé de détérioration de biens mobiliers ou immobiliers appartenant à autrui par l'effet d'un moyen de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes. Le 8 novembre 1983, le juge d'instruction reçut une longue note de l'avocat du requérant visant à démontrer l'innocence de son client. Le 23 mars 1984, le juge d'instruction transmit le dossier au parquet, aux fins de réquisitions, le dossier étant réglé le 26 mars 1984. Le 28 mars 1984, le juge d'instruction émit une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel de Soissons. Le requérant était prévenu de dégradations volontaires de biens immobiliers et mobiliers d'autrui. Le 11 juillet 1984, le requérant déposa des conclusions demandant notamment que soit constatée la nullité des actes d'informations relatifs aux faits du 6 mai 1981, et qu'il soit constaté qu'il avait été privé de son droit à un procès équitable tel que prévu par 1 'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme en ce qu'il n'avait pu, en raison des dispositions de l'article 171 du Code de procédure pénale, saisir lui-même la chambre d'accusation d'une demande d'annulation des actes d'enquête ci-dessus précisés. Par jugement du 9 janvier 1985, le tribunal prononça "la nullité des pièces de la procédure, y compris la citation délivrée au prévenu en ce qu'elles concernent les faits du 7 juillet 1981". Sur la violation alléguée de l'article 6 de la Convention, le tribunal s'est prononcé comme suit : "Ce ... texte cependant ne garantit pas, ni explicitement ni implicitement, la possibilité pour le prévenu de faire constater durant l'instruction toutes nullités viciant tout ou partie des actes de la procédure alors que cette possibilité se trouve être reconnue par le Code de procédure pénale non seulement au magistrat instructeur, mais aussi au ministère public. Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu, de ce chef, de prononcer la nullité totale ou partielle de la procédure, notamment en ce qui concerne les faits du 6 mai 1981." Le tribunal relaxa par ailleurs le requérant estimant que celui-ci n'était pas "suffisamment convaincu des faits du 6 mai 1981 qui lui sont reprochés". Le procureur de la République se pourvut en appel le 24 janvier 1985. Le requérant se référa à ses conclusions de première instance. Le 8 juillet 1985, la cour d'appel, tout en rejetant l'appel formé par le parquet, réforma partiellement le jugement en concluant : "Attendu cependant qu'il demeure, d'une part, que la saisine du Juge d'Instruction relativement à ces faits du 7 juillet a été fondée sur le rapport du directeur du laboratoire de police scientifique commis en application de l'article 60 du Code de Procédure Pénale et dont les conclusions sont apparues de nature à mettre en cause BARANY, d'autre part, que la saisine de cet expert est intervenue 18 jours après les faits du 7 juillet 1981, alors qu'à l'évidence il n'existait plus aucune flagrance au sens de l'article 53 du Code de Procédure Pénale, que BARANY n'a pas été trouvé en possession de l'arme litigieuse, qu'en tout cas il n'y avait plus lieu à des constatations qui ne pouvaient être différées et justifiant le recours à une personne qualifiée dans les conditions de l'article 60 du Code de Procédure Pénale, et que de surcroît les balles ainsi examinées et appréhendées matériellement le 7 juillet 1981 par l'agent de police judiciaire P. n'ont été placées sous scellés que le 17 juillet 1981, que cette méconnaissance des règles substantielles et strictes de la procédure de crime de flagrant délit, laquelle implique des diligences exécutées dans un temps voisin de l'action et sans désemparer, ont incontestablement porté une grave atteinte aux droits de la défense et par voie de conséquence à l'intérêt de l'ordre public, étant observé en outre que le défaut de relevé immédiat ou même ultérieur des trajectoires des balles dans l'appartement de dame C. n'a d'ailleurs pas permis par la suite de déterminer les conditions matérielles du tir ; Attendu que pour ces motifs il y a lieu d'annuler l'ensemble de la procédure de flagrant délit et de la procédure d'instruction qui a suivi, relativement tant aux faits du 6 mai qu'à ceux du 7 juillet 1981, sans avoir à constater une quelconque violation de l'article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l'Homme qui ne saurait résulter des conditions restrictives de saisine de la Chambre d'Accusation à l'égard des nullités de l'information en vertu de l'article 171 du Code de Procédure Pénale, alors que celles-ci ont pu être légalement et ont été de fait soulevées devant la juridiction de jugement". Le ministère public ne s'étant pas pourvu en cassation, l'arrêt de la cour d'appel constitue la décision interne définitive en l'espèce.
GRIEFS Le requérant se plaint de la durée de la procédure et invoque le délai raisonnable prévu à l'article 6 par. 1 de la Convention. Il rappelle que cette procédure a débuté le 1er octobre 1981, que le juge d'instruction a ordonné le renvoi devant le tribunal correctionnel le 28 mars 1984, et que la cour d'appel a prononcé la nullité de l'ensemble de la procédure le 8 juillet 1985, levant ainsi le contrôle judiciaire.
PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION La requête a été introduite le 9 décembre 1985 et enregistrée le 8 janvier 1986. Le 15 juillet 1988, la Commission a décidé d'inviter le Gouvernement de la France à présenter par écrit des observations sur la recevabilité et le bien-fondé du grief portant sur la longueur de la procédure au regard de l'article 6 par. 1 de la Convention et de déclarer la requête irrecevable pour le surplus (grief tiré de l'inéquité de la procédure). La Commission a également invité le Gouvernement à produire un relevé des actes accomplis dans le cadre de l'instruction entre le 1er octobre 1981 et le 28 mars 1984. Le 7 novembre 1988, le Gouvernement a demandé une prorogation de délai au 10 décembre 1988, prorogation qui lui a été accordée le 15 novembre 1988 par le Président de la Commission. Les observations du Gouvernement défendeur ont été présentées le 14 décembre 1988. Les observations en réponse du requérant ont été présentées le 24 février 1989.
EN DROIT Le requérant se plaint de la durée de la procédure. Il invoque sur ce point l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention qui dispose notamment que "toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle." Le Gouvernement soulève tout d'abord deux exceptions d'irrecevabilité tirées du non-épuisement des voies de recours internes. Il expose en premier lieu que le requérant n'a pas invoqué l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention devant la cour d'appel d'Amiens à l'occasion des demandes de main-levée du contrôle judiciaire. Il note à cet égard que le requérant ne pouvait effectivement pas se plaindre de la longueur excessive de la procédure lors de ses demandes des 6 et 14 octobre 1981, mais qu'il aurait pu le faire par la suite. La Commission rappelle que l'épuisement des voies de recours internes n'implique l'utilisation des voies de droit que pour autant qu'elles sont efficaces ou suffisantes, c'est-à-dire susceptibles de remédier à la situation en cause (voir Cour Eur. D.H., arrêt De Jong, Baljet et van den Brink du 22 mai 1984, série A n° 77, p. 19, par. 39). Sur le point considéré, la Commission relève toutefois que le fait, pour le requérant, d'invoquer la longueur de la procédure lors de demandes de main-levée du contrôle judiciaire n'était pas une voie de recours de nature à porter remède au grief tiré de la durée, à ses yeux excessive, des procédures d'instruction puis de jugement. Le Gouvernement fait valoir en deuxième lieu que le requérant aurait dû mettre en cause la responsabilité de l'Etat devant les tribunaux judiciaires du fait du fonctionnement défectueux du service de la justice, conformément à l'article L 781-1 du code de l'organisation judiciaire. Cette disposition lui permettait en effet de présenter une demande d'indemnité fondée sur la durée prétendument excessive de la procédure ayant constitué une faute lourde dans le fonctionnement de la justice. Le requérant quant à lui fait observer que la violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention n'est pas subordonnée à l'existence d'une faute lourde. Il est vrai que la voie de recours indiquée par le Gouvernement, bien que relativement récente, a déjà été utilisée devant les juridictions françaises lorsque les justiciables estimaient qu'il y avait un manquement de la part des autorités judiciaires à la règle du délai raisonnable. Elle a donné lieu à une décision - apparemment isolée - reconnaissant le caractère non raisonnable de la durée de la procédure (Fuchs - C.A. Paris, 10.05.1983). La Commission considère dès lors que le Gouvernement n'a pas été en mesure de faire état d'une jurisprudence qui soit véritablement établie, et qui aurait ouvert au requérant un recours efficace, en la circonstance, au regard de l'article 26 (art. 26) de la Convention (voir également req. n° 10828/84 - Funke c/France, Déc. 6.10.1988). Il s'ensuit que les exceptions de non-épuisement des voies de recours internes soulevées par le Gouvernement ne sauraient être retenues. Quant au bien-fondé du grief, le Gouvernement estime qu'aucune violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) ne saurait être constatée. S'appuyant sur une chronologie de la procédure visant à établir que celle-ci n'a pas connu une durée excessive, il ajoute que l'affaire était complexe du fait que les témoignages n'étaient pas concordants et que les faits et les éléments de preuve ont dû faire l'objet de vérifications minutieuses. Il souligne que la longueur de l'expertise et le fait que le requérant ait demandé une seconde expertise prouvent la complexité de l'affaire qui a d'ailleurs entraîné une requalification juridique des faits et une nouvelle inculpation du requérant. Le Gouvernement avance par ailleurs que sur les 30 mois d'instruction les expertises ont représenté 21 mois et que la durée réelle de l'instruction a donc été d'un peu plus de 9 mois, ce qui constitue un délai extrêmement raisonnable. Le Gouvernement avance enfin que le requérant a, par son attitude, contribué à l'allongement de la procédure dans la mesure où il a demandé une seconde expertise et où il a déposé le 8 novembre 1983 une longue note sur la procédure qui a nécessité une étude approfondie de la part du juge d'instruction. Le requérant quant à lui fait observer qu'aucune diligence n'a été accomplie par le juge d'instruction entre le 8 janvier 1982 et le 5 novembre 1982 et entre le 18 avril 1983 et le 29 septembre 1983. Il fait également observer que l'affaire ne revêtait pas une complexité exceptionnelle et que le Gouvernement ne saurait prendre la durée des expertises comme excuse dans la mesure où les experts judiciaires doivent concourir au bon fonctionnement de la justice. La Commission note que le requérant a été inculpé le 1er octobre 1981, qu'il a été renvoyé devant le tribunal correctionnel le 28 mars 1984, et que la nullité de la procédure a été prononcée définitivement par la cour d'appel le 8 juillet 1985. La procédure a donc duré 3 ans, 9 mois et 7 jours. Elle rappelle que le caractère raisonnable de la durée de la procédure doit s'apprécier eu égard notamment à la complexité de l'affaire, au comportement du requérant et à celui des autorités judiciaires (voir Cour Eur. D.H., arrêt Eckle du 15 juillet 1982, série A n° 51, p. 35, par. 80). La Commission estime que la requête pose de sérieuses questions de fait et de droit concernant la durée de la procédure, qui ne peuvent être résolues à ce stade de l'examen de la requête, mais nécessitent un examen au fond. Dès lors, la requête ne saurait être déclarée manifestement mal fondée sur ce point au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention. La Commission constate d'autre part que cette partie de la requête ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. Par ces motifs, la Commission DECLARE RECEVABLE, tous moyens de fond réservés, le grief du requérant concernant la durée de la procédure. Le Secrétaire adjoint Le Président en exercice de la Commission de la Commission (J. RAYMOND) (S. TRECHSEL)


Synthèse
Formation : Commission
Numéro d'arrêt : 11926/86
Date de la décision : 09/05/1989
Type d'affaire : DECISION
Type de recours : recevable (partiellement) ; irrecevable (partiellement)

Parties
Demandeurs : BARANY
Défendeurs : la FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1989-05-09;11926.86 ?

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