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13/02/1992 | CEDH | N°17688/91

CEDH | MADARIAGA Y AGIRRE contre la FRANCE


DEUXIEME CHAMBRE SUR LA RECEVABILITE de la requête No 17688/91 présentée par Iulen MADARIAGA Y AGIRRE contre la France __________
La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 13 février 1992 en présence de MM. S. TRECHSEL, Président de la Deuxième Chambre G. JÖRUNDSSON A. WEITZEL J.-C. SOYER H. G. SCHERMERS

H. DANELIUS Mme G. H. THUNE ...

DEUXIEME CHAMBRE SUR LA RECEVABILITE de la requête No 17688/91 présentée par Iulen MADARIAGA Y AGIRRE contre la France __________
La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 13 février 1992 en présence de MM. S. TRECHSEL, Président de la Deuxième Chambre G. JÖRUNDSSON A. WEITZEL J.-C. SOYER H. G. SCHERMERS H. DANELIUS Mme G. H. THUNE MM. F. MARTINEZ L. LOUCAIDES J.-C. GEUS A.V. ALMEIDA RIBEIRO M. K. ROGGE, Secrétaire de la Deuxième Chambre,
Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ;
Vu la requête introduite le 8 janvier 1991 par Iulen Kerman de MADARIAGA y AGIRRE contre la France et enregistrée le 21 janvier 1991 sous le No de dossier 17688/91 ;
Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission ;
Après avoir délibéré,
Rend la décision suivante : 17688/91- 2 -
EN FAIT
Le requérant est un ressortissant français né en 1932 à Bilbao. Au moment de la présentation de sa requête il était détenu à la maison d'arrêt de Fresnes. Devant la Commission, il est représenté par Me de Felice de Paris.
Par décision du 13 juillet 1989, le tribunal correctionnel de Paris a reconnu le requérant coupable du délit d'association de malfaiteurs et l'a condamné à une peine de quatre ans de prison et dix ans d'interdiction de séjour. Le requérant interjeta appel du jugement.
Dans des conclusions présentées à la cour d'appel de Paris en date du 7 novembre 1989, le requérant, se fondant notamment sur l'article 6 par. 3 d) de la Convention, demanda à ce que la cour entende lors de l'audience huit témoins de personnalité.
Dans son arrêt du 21 novembre 1989, la cour d'appel de Paris confirma la peine de prison et ramena la peine d'interdiction de séjour à cinq ans. Concernant la demande d'audition des huit témoins de personnalité, la cour rejeta la demande au motif que "Sur le fondement de l'article 513 du Code de procédure pénale, la Cour peut, si elle le juge utile ou nécessaire, ordonner l'audition de témoins nouveaux, comme la plupart de ceux indiqués par la défense, qui ont ce caractère ; toutefois, cette possibilité est toujours facultative.
En l'espèce, la Cour considère qu'elle est suffisamment informée sur la personnalité du prévenu par les éléments recueillis à ce sujet tant au cours de la procédure que devant le Tribunal et la Cour et qu'il n'y a pas lieu à supplément d'information.
L'article 6 par. 3 alinéa d) de la Convention Européenne des Droits de l'Homme prévoyant le droit pour un accusé ou un prévenu d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge est inapplicable en la présente cause, les termes "témoins à décharge ou à charge" devant être interprétés comme visant exclusivement la culpabilité du prévenu."
Le pourvoi en cassation formé par le requérant fut rejeté par arrêt en date du 18 juillet 1990. S'agissant du refus d'entendre de nouveaux témoins opposé par la cour d'appel, la haute juridiction déclarait : "Attendu que la cour d'appel, pour refuser d'ordonner l'audition des "témoins de personnalité" sollicitée par le prévenu, observe qu'elle "est suffisamment informée sur la personnalité du prévenu par les éléments recueillis à ce sujet tant au cours de la procédure que devant le tribunal et la Cour" ; - 3 -17688/91
Attendu qu'il résulte du jugement du tribunal correctionnel et des pièces de procédure que Iulen de Madariaga y Aguirre a, devant les premiers juges, fait citer et entendre des témoins ainsi que les articles 435 et 444 du Code de procédure pénale l'y autorisaient ; que parmi eux figurait notamment l'un de ceux dont l'audition était encore demandée devant la cour d'appel ;
Attendu qu'en cet état, abstraction faite du motif critiqué qui est surabondant, c'est sans méconnaître les dispositions de l'article 6 par. 3 d) de la Convention européenne des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales que les juges du second degré ont refusé d'entendre des témoins qui, soit avaient été entendu par les premiers juges, soit n'avaient pas été cités devant ces derniers par le prévenu alors que celui-ci en avait la faculté ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis."
GRIEFS
Devant la Commission, le requérant estime que le refus opposé par la cour d'appel de Paris et confirmé par la Cour de cassation à sa demande tendant à ce que huit témoins de personnalité soient entendus par la cour a méconnu le droit à obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge énoncé par l'article 6 par. 3 d) de la Convention.
EN DROIT
Le requérant se plaint de ne pas avoir obtenu de la cour d'appel de Paris la convocation et l'interrogation de huit témoins de personnalité. Il invoque l'article 6 par. 3 d) (art. 6-3-d) de la Convention.
Cette disposition se lit comme suit : "Tout accusé a droit notamment à : ............
d.interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge."
La Commission rappelle tout d'abord que selon une jurisprudence constante, l'article 6 par. 3 d) (art. 6-3-d) n'accorde pas à la défense un droit absolu d'interroger tous les témoins qu'elle propose (Cour Eur. D.H., arrêt Engel et autres du 8 juin 1976, Série A n° 22 et N° 8417/78, déc. 4.5.79, D.R. 16 p. 200). En principe, il relève du pouvoir discrétionnaire des tribunaux internes des Etats contractants d'établir si l'audition des témoins à décharge peut aider à découvrir la vérité et, dans le cas contraire, de décider de ne pas citer ces témoins (cf. N° 5131/71, X. c/ Royaume-Uni, Rec. 43 p. 151 ; N° 8231/78, déc. 6.3.82, D.R. 28 p. 5, 60, N° 10486/83, déc. 9.10.86, D.R. 49 p. 86, 121). 17688/91- 4 -
Dans le cas d'espèce, la Commission observe que la cour d'appel a donné dans sa décision les motifs pour lesquels elle n'estimait pas possible ni nécessaire d'entendre certains témoins, jugeant que leur déposition ne serait pas utile. Elle remarque que devant les premiers juges, le requérant obtint du tribunal la citation de tous les témoins qu'il proposa. Elle considère que le requérant aurait pu alors proposer l'audition des témoins qu'il demanda en appel. Au demeurant, les renseignements fournis par le requérant ne montrent pas comment les témoins qu'il désirait faire interroger auraient pu produire des informations pertinentes pour l'issue du litige. Dans ces conditions, la Commission considère que la cour d'appel n'a pas rejeté la demande du requérant de façon arbitraire et inéquitable.
Il s'ensuit que la requête doit être rejetée comme étant manifestement mal fondée en application de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
Par ces motifs, la Commission à l'unanimité
DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE. Le Secrétaire de Le Président de la Deuxième Chambre la Deuxième Chambre (K. ROGGE) (S. TRECHSEL)


Synthèse
Formation : Commission
Numéro d'arrêt : 17688/91
Date de la décision : 13/02/1992
Type d'affaire : DECISION
Type de recours : irrecevable (partiellement) ; recevable (partiellement)

Parties
Demandeurs : MADARIAGA Y AGIRRE
Défendeurs : la FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1992-02-13;17688.91 ?

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