La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/05/1992 | CEDH | N°13568/88

CEDH | BERTOLUCCI contre l'ITALIE


SUR LA RECEVABILITE de la requête No 13568/88 présentée par Luciano BERTOLUCCI contre l'Italie __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 13 mai 1992 en présence de MM. S. TRECHSEL, Président de la Deuxième Chambre G. JÖRUNDSSON A. WEITZEL J.-C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS Mme G.H. THUNE MM. F. MARTINEZ L. LOUCAÏDES J

.C. GEUS A.V. D'ALMEIDA RIBEIRO M. K. RO...

SUR LA RECEVABILITE de la requête No 13568/88 présentée par Luciano BERTOLUCCI contre l'Italie __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 13 mai 1992 en présence de MM. S. TRECHSEL, Président de la Deuxième Chambre G. JÖRUNDSSON A. WEITZEL J.-C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS Mme G.H. THUNE MM. F. MARTINEZ L. LOUCAÏDES J.C. GEUS A.V. D'ALMEIDA RIBEIRO M. K. ROGGE, Secrétaire de la Deuxième Chambre ; Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 30 octobre 1987 par Luciano BERTOLUCCI contre l'Italie et enregistrée le 28 janvier 1988 sous le No de dossier 13568/88 ; Vu la décision de la Commission du 6 juillet 1989 de porter la requête à la connaissance du Gouvernement défendeur ; Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur les 4 décembre 1989 et 17 janvier 1990 et les observations en réponse présentées par le requérant le 5 mars 1990 ; Vu la décision de la Commission du 9 avril 1991 de renvoyer la requête à une Chambre ; Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Le requérant, Luciano BERTOLUCCI, est un ressortissant italien né en 1944 et résidant à Viareggio. Il est représenté devant la Commission par Giunio MASSA, avocat à Viareggio. Dans sa requête, invoquant l'article 6 par. 1 de la Convention, le requérant se plaint de la durée de la procédure engagée devant le tribunal de Lucca et qui a trait aux faits suivants. Le 20 juin 1976, le requérant fut blessé lors de la collision entre la voiture conduite par M.C., dans laquelle il était passager, et la motocyclette appartenant à M.M., conduite par M.P. La procédure pénale ouverte à la suite de l'accident fut rayée du rôle à une date qui n'a pas été précisée, entre 1976 et 1980, en raison d'une amnistie. Par acte notifié le 18 mars 1980, le requérant assigna M.C., la société d'assurance "Reale Mutua Assicurazioni", M.P., M.M. et la société d'assurance "Nationale Suisse" devant le tribunal de Lucca en vue d'obtenir la réparation des dommages résultant de l'accident. La première audience devant le tribunal de Lucca eut lieu le 27 juin 1980 ; à cette occasion les avocats de M.P. et de M.M. offrirent au requérant la somme de 7.500.000 lires chacun, à titre de dédommagement. A l'audience suivante du 28 novembre 1980, le requérant accepta cette offre à titre d'acompte sur le montant des dommages qui serait liquidé par le tribunal. Les audiences des 27 février 1981, 8 mai 1981 et 9 octobre 1981 furent reportées à la demande des avocats des parties causant à la procédure un délai d'environ neuf mois. A l'audience du 4 décembre 1981, l'avocat d'un des défendeurs demanda au juge rapporteur d'ordonner une expertise. Puis une audience fut fixée au 12 février 1982. A cette date les avocats des parties communiquèrent au juge d'instruction que devant le même tribunal était pendante une affaire connexe. Le juge rapporteur transmit alors le dossier au Président du tribunal pour qu'il ordonne, au besoin, la jonction des affaires. Par arrêt du 15 février 1982, le Président du tribunal de Lucca ordonna la jonction de la présente affaire à l'affaire n. 3710/81 (M.C. contre M.P. et la société d'assurance "Reale Mutua Assicurazioni") en fixant une audience au 19 mars 1982. A cette date, une remise d'audience fut demandée par l'avocat du requérant pour pouvoir examiner le dossier de l'affaire jointe. L'audience suivante, du 7 mai 1982, fut reportée à la demande de l'avocat du requérant. A l'audience du 18 juin 1982, un expert fut désigné, puis à celle du 22 octobre 1982, un autre expert dut être désigné, le premier n'ayant pu accepter sa mission en raison d'une incompatibilité. Le 17 décembre 1982, l'expert prêta serment. L'expertise fut déposée à une date qui n'est pas connue, en tout cas, avant l'audience du 15 avril 1983, date à laquelle les avocats des parties demandèrent une remise d'audience pour pouvoir l'examiner. A l'audience du 10 juin 1983, une autre remise d'audience fut demandée par les avocats des parties et l'audience fut reportée d'environ cinq mois, au 4 novembre 1983. A cette date l'avocat du requérant contesta l'expertise et, le 27 janvier 1984, demanda au juge d'ordonner un complément d'expertise. L'audience du 6 avril 1984 fut reportée à la demande des avocats des parties. A l'audience du 15 juin 1984, l'avocat du requérant réitéra sa requête de complément d'expertise et le 16 novembre 1984, soit environ dix mois après que le requérant en ait fait la demande, le juge ordonna la comparution de l'expert qui, à l'audience successive du 25 janvier 1985, ne se présenta pas. Le 22 février 1985, le juge rapporteur intima à l'expert un délai de 90 jours pour le complément d'expertise. Ce ne fut qu'à l'audience du 8 novembre 1985 que les avocats des parties purent prendre connaissance de l'expertise, et ils demandèrent une remise d'audience pour pouvoir l'examiner. Entre le 21 février 1986 et le 18 décembre 1987, les six audiences prévues furent ajournées à la demande de l'avocat du requérant compte tenu de tentatives de transaction en cours. Après cet intervalle de près de vingt-deux mois, lors de l'audience du 18 décembre 1987, l'avocat du requérant demanda au juge rapporteur d'ordonner l'audition des témoins. Trois audiences furent nécessaires, du 15 janvier 1988 au 25 septembre 1988, pour l'accomplissement des opérations liées à l'audition des témoins. L'audience du 25 novembre 1988 fut reportée à la demande des parties en vue de la présentation des conclusions qui furent en effet présentées cinq mois plus tard, le 28 avril 1989. L'audience prévue ensuite le 29 juin 1990 fut reportée d'office et l'affaire fut mise en délibéré le 23 novembre 1990. Le tribunal de Lucca rendit son jugement le 27 novembre 1990, déclarant que le requérant n'avait pas droit à d'autres dommages, ayant déjà été dédommagé par la somme versée le 28 novembre 1980. Le texte du jugement fut déposé au greffe le 10 janvier 1991.
EN DROIT Le grief du requérant porte sur la durée de la procédure litigieuse. Cette procédure a débuté le 18 mars 1980 et s'est terminée le 10 janvier 1991 par le dépôt au greffe du jugement du tribunal de Lucca. Selon le requérant, la durée de la procédure, qui est de dix ans et presque dix mois, ne répond pas à l'exigence du "délai raisonnable" (article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention). Le Gouvernement estime, quant à lui, que la durée de la procédure s'explique par des particularités procédurales propres à la présente affaire (nécessité de joindre à la présente une autre affaire, difficultés concernant le choix de l'expert) et par le comportement des parties qui en auraient retardé le déroulement. Selon la jurisprudence constante de la Cour et de la Commission, le caractère raisonnable de la durée d'une procédure relevant de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention s'apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard en particulier aux critères suivants : la complexité de l'affaire, le comportement des parties et celui des autorités compétentes (voir, par exemple, Cour Eur. D.H., arrêt Vernillo du 20 février 1991, série A n° 198, page 12, par. 30). La Commission constate que tout au long de la procédure les parties ont demandé de nombreuses remises d'audiences. Il ressort, en effet, des procès-verbaux des audiences que, sur trente-sept audiences, treize furent reportées sur demande des conseils des parties, prolongeant la procédure au total d'environ trois ans. Elle relève également que ce n'est que le 18 décembre 1987, soit sept ans et neuf mois après le commencement de la procédure, que l'avocat du requérant jugea bon de demander au juge rapporteur d'ordonner l'audition des témoins, ce qui entraîna une prolongation de neuf mois de la procédure. Quant au comportement des autorités compétentes, la Commission note que la désignation de l'expert requit environ six mois et que le juge rapporteur mit dix mois avant de décider d'un complément d'expertise. Enfin, on peut relever une période d'inactivité qui s'étend du 28 avril 1989 (date de la présentation des conclusions par les avocats des parties) au 23 novembre 1990 (date de la mise en délibéré), soit environ dix-neuf mois. Toutefois, eu égard à l'ensemble des circonstances de la cause, et spécialement aux responsabilités des parties dans la conduite du procès, les délais imputables à la conduite du procès par les autorités judiciaires ne se révèlent pas assez importants pour permettre de considérer comme excessive la durée globale du procès (voir Cour Eur. D.H., arrêt Vernillo précité, page 11, par. 39). Il s'ensuit que le grief tiré de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, invoqué par le requérant, est manifestement mal fondé et doit être rejeté conformément à l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention. Par ces motifs, la Commission, à la majorité, DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE. Le Secrétaire de la Le Président de la Deuxième Chambre Deuxième Chambre (K. ROGGE) (S. TRECHSEL)


Synthèse
Formation : Commission
Numéro d'arrêt : 13568/88
Date de la décision : 13/05/1992
Type d'affaire : DECISION
Type de recours : Partiellement recevable ; Partiellement irrecevable

Parties
Demandeurs : BERTOLUCCI
Défendeurs : l'ITALIE

Références :

Notice Hudoc


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1992-05-13;13568.88 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award