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10/01/2013 | CEDH | N°001-115768

CEDH | CEDH, AFFAIRE DUFOORT c. BELGIQUE, 2013, 001-115768


CINQUIÈME SECTION

AFFAIRE DUFOORT c. BELGIQUE

(Requête no 43653/09)

ARRÊT

STRASBOURG

10 janvier 2013

DÉFINITIF

10/04/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Dufoort c. Belgique,

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :

Mark Villiger, président,
Angelika Nußberger,
Boštjan M. Zupančič,
Ann Power-Forde,
André Poto

cki,
Paul Lemmens,
Helena Jäderblom, juges,
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 4 décembr...

CINQUIÈME SECTION

AFFAIRE DUFOORT c. BELGIQUE

(Requête no 43653/09)

ARRÊT

STRASBOURG

10 janvier 2013

DÉFINITIF

10/04/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Dufoort c. Belgique,

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :

Mark Villiger, président,
Angelika Nußberger,
Boštjan M. Zupančič,
Ann Power-Forde,
André Potocki,
Paul Lemmens,
Helena Jäderblom, juges,
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 4 décembre 2012,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 43653/09) dirigée contre le Royaume de Belgique et dont un ressortissant de cet Etat, M. Michel Dufoort (« le requérant »), a saisi la Cour le 5 août 2009 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant est représenté par Me C. Saveyn, avocat à Oudenaarde, et par Me J. De Winter, avocat à Gand. Le gouvernement belge (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. M. Tysebaert, conseiller général, service public fédéral de la Justice.

3. Le requérant allègue en particulier que sa détention est contraire à l’article 5 § 1 e) de la Convention car elle a lieu dans un établissement non approprié. Il se plaint également de l’ineffectivité des recours et invoque l’article 5 § 4 de la Convention.

4. Le 5 mai 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Le requérant est né en 1970 et est actuellement interné à l’annexe psychiatrique de la prison de Merksplas.

6. En 1997, le requérant fut arrêté et mis en détention préventive à la prison de Turnhout pour tentative de meurtre au sein d’une clinique. D’après un rapport établi par trois psychiatres en octobre 1998, le requérant avait une intelligence moyennement basse avec une dépendance à l’alcool, l’héroïne, la cocaïne et aux amphétamines. Le rapport relevait que certains aspects de la personnalité du requérant étaient antisociaux, qu’il manquait d’empathie, qu’il était manipulateur, qu’il avait une conscience limitée et les traits d’une personnalité narcissique et égocentrique.

7. Le 2 janvier 1999, la chambre du conseil du tribunal de première instance de Turnhout considéra que requérant n’était pas pénalement responsable de ses actes et ordonna son internement. Le tribunal décida du placement provisoire du requérant à l’annexe psychiatrique d’Anvers jusqu’à ce que la commission de défense sociale (« CDS ») décide du lieu d’internement.

8. Le 18 février 1999, la chambre des mises en accusation de la cour d’appel d’Anvers rejeta l’appel formé par le requérant contre cette décision.

9. Constatant que l’état de santé du requérant ne s’était pas suffisamment amélioré et qu’un reclassement présentant suffisamment de garanties pour protéger la société du danger n’était pas encore possible, la CDS d’Anvers décida, le 1er juin 1999, de prolonger l’internement du requérant et de le transférer à l’annexe psychiatrique de la prison de Merksplas.

10. Un test PCL-R (psychopathy check list revised), effectué en 2001, révéla une personnalité psychopathe impliquant un risque de récidive important.

11. De 2000 à 2004, le maintien du requérant à Merksplas fut confirmé à plusieurs reprises par la CDS dans des termes identiques. La CDS ajouta, dans ses décisions prises à partir d’octobre 2002, que dès que le requérant pouvait présenter un certificat attestant de son admission dans une institution psychiatrique, il pourrait refaire une demande de comparution devant la commission.

12. En 2003, plusieurs rapports furent établis par différents psychiatres de la prison confirmant les analyses antérieures et révélant que le requérant était impulsif sous l’effet des substances et avait commis des actes de violence à l’égard des internés et du personnel soignant. Ils soulignaient également que le risque de récidive du requérant était d’autant plus grand que le requérant ne semblait pas comprendre la gravité de ses problèmes et minimisait les faits qui lui étaient reprochés. Ils concluaient que le pronostic était sombre.

13. A partir d’avril 2003, des démarches furent entreprises afin de transférer le requérant vers un établissement spécialisé de sécurité moyenne. L’hôpital psychiatrique de Zelzate et le centre public de soins psychiatriques de Rekem furent contactés.

14. A la suite d’une décision de la CDS du 25 mai 2004, le requérant fut transféré à l’annexe psychiatrique de la prison de Turnhout dans l’attente d’un certificat attestant de son admission dans un établissement de sécurité moyenne.

15. Il s’avéra en 2005 que les établissements contactés avaient refusé l’admission du requérant en raison des résultats obtenus sur la base du test PCL-R et de ses faibles capacités intellectuelles. Le centre de Rekem invoquait le fait qu’il était trop dominant par rapport aux autres personnes qui y étaient soignées. Les psychiatres recommandèrent de miser plutôt sur les permissions de sortie, privilégiant un traitement ambulatoire pour le problème de la poly-toxicomanie.

16. Un rapport de mars 2006 établi par deux psychologues pour le service psycho-social de la prison résumait la situation du requérant comme suit :

(traduction)

« L’intéressé reçoit au minimum une fois par semaine la visite de son frère (...) et de son amie (...). Il apprécie également les contacts téléphoniques avec l’extérieur. (...) Au sein de la prison il entretient des contacts sociaux avec des codétenus généralement en raison de son travail. (...) En ce qui concerne la discipline, il n’y a pas de problème. (...) Depuis sept mois, il accomplit son travail au sein de la salle des visites de façon responsable. En raison de l’absence d’une personne en maladie de longue durée, l’intéressé peut gagner sa vie. (...) Il apprécie en particulier la dimension sociale de son travail. L’intéressé s’est inscrit pour suivre des cours. (...) Il ne va plus aux réunions des [Alcooliques Anonymes]. Il craint que cela se retourne contre lui. Il a peur qu’on y voit une raison de le considérer comme étant encore alcoolique (...). L’intéressé travaille bien avec le [service psycho-social] et prend son implication en vue d’un reclassement au sérieux. (...) Durant ses sorties, il est accueilli par son frère et son amie. Dans l’éventualité d’une mise en liberté à l’essai, deux frères ont indiqué qu’ils étaient disposés à l’héberger aussi longtemps que nécessaire. (...) »

17. Constatant que l’état de santé du requérant ne s’était pas suffisamment amélioré et qu’un reclassement présentant suffisamment de garanties pour protéger la société du danger n’était pas encore possible et dans l’attente d’un certificat attestant de son admission dans un établissement de sécurité moyenne, la CDS confirma le maintien de l’internement à Turnhout à plusieurs reprises tout en lui accordant des permissions de sortie.

18. En 2006, il bénéficia de deux autorisations de sortie. La première se passa sans problème. Au cours de la seconde, il revint en retard à la prison et ivre. Les permissions furent suspendues.

19. Deux rapports établis par des psychologues en 2007 pour le service psycho-social de la prison firent état de la frustration qu’engendrait sur le requérant la détention de longue durée sans perspective de reclassement. Ils se prononçaient en faveur de nouvelles autorisations de sortie à condition qu’elles aient lieu à un endroit déterminé, qu’il soit accompagné par son frère et qu’un test d’alcoolémie soit effectué à son retour.

20. Le 16 mars 2007, le requérant assigna l’Etat en référé. Se référant à la jurisprudence de la Cour telle qu’énoncée dans l’arrêt Aerts c. Belgique (30 juillet 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-V), le requérant demanda au Président du tribunal de première instance de Turnhout de condamner, sous peine d’astreinte, l’Etat à mettre à sa disposition, conformément aux prescriptions de l’arrêt royal du 23 octobre 1964 portant fixation des normes auxquelles les hôpitaux et leurs services doivent répondre, une équipe de soignants spécialisés composée d’un psychiatre, d’un psychologue, d’une infirmière psychiatrique et d’une assistante sociale. Il demandait également qu’une descente sur les lieux soit organisée. Il motivait sa demande en ces termes :

(traduction)

« Au cours de cette longue période de détention, l’accompagnement nécessaire ne fut pas fourni au demandeur mis à part l’administration de médicaments et des conversations fugaces. (...) En outre, il n’y a pas de personnel thérapeutique suffisant pour assurer un support solide au demandeur ni pour lui fournir une thérapie qu’elle soit individuelle ou en groupe. La longue période de détention continue du demandeur sans aucune forme de thérapie a eu des conséquences néfastes sur son état de santé mental : il a perdu son indépendance, il est devenu désespéré, frustré et dépressif. (...) Face aux appels à l’aide du demandeur (...) la réponse consiste principalement en l’administration de médicaments qui ont plutôt un effet "anesthésiant" sur la situation. En raison du manque manifeste d’accompagnement, lequel est censé limiter la récidive, il va de soi que le risque de récidive demeure au premier plan plaçant le demandeur dans un cercle vicieux. (...) »

21. Le 11 septembre 2007, la CDS décida de mandater un collège d’experts pour qu’ils réévaluent le risque de récidive du requérant.

22. Un rapport du 13 août 2008 établi pour le service psycho-social fit état de problèmes de discipline au cours des six premiers mois de l’année (retour tardif d’une sortie, agression verbale, automutilation) et fit part d’un risque de montée en puissance. Il en déduisait que le reclassement en ambulatoire avait peu de chance de succès et qu’un reclassement dans un cadre structuré demeurait nécessaire.

23. En août 2008, le requérant eut une crise de psychose paranoïde. Suite à cela, il fut placé, le 15 octobre 2008, dans la section C de l’annexe (« projet psychoses ») où un environnement tranquille est assuré. Il y reçut un traitement médicamenteux.

24. Le 18 novembre 2008, la CDS décida à nouveau du maintien du requérant à Turnhout. Invoquant l’article 5 § 1 e) de la Convention, le requérant fit recours contre cette décision de la CDS.

25. Le 18 décembre 2008, la Commission supérieure de défense sociale (« CSDS ») rejeta le recours au motif que son transfert vers un établissement approprié n’était pas possible sans preuve de son admission. Or, son état ne s’était pas amélioré au point de rendre un tel transfert possible ou d’envisager une réintégration dans la société d’une autre manière. La CSDS refusa de donner une suite favorable à la demande du requérant d’effectuer une visite de son lieu d’internement.

26. Le 24 février 2009, la Cour de cassation rejeta le pourvoi introduit par le requérant contre la décision de la CSDS au motif que, contrairement à ce que celui-ci alléguait, la CSDS n’avait pas mis en question sa compétence pour statuer sur le transfert en établissement psychiatrique privé mais avait considéré qu’il ne remplissait pas encore les conditions pour un tel transfert. De plus, selon la Cour de cassation, le moyen tiré de la carence des pouvoirs publics à mettre en place une structure d’accueil en dehors du système pénitentiaire était sans rapport avec les dispositions invoquées à l’appui du pourvoi (articles 10 et 11 de la Constitution et article 5 de la Convention).

27. Le 14 mars 2009, un rapport établi par un psychologue pour le service psycho-social indiqua que le séjour du requérant dans la section C avait eu des effets positifs, que son état psychique s’était stabilisé et qu’il n’avait plus connu de problème de discipline. Il faisait état du souhait renouvelé du requérant d’être transféré dans une institution et de bénéficier de sorties pour rendre visite à son frère. Le psychologue recommandait à nouveau le placement dans un établissement de sécurité moyenne.

28. Le 9 avril 2009, la demande en référé du requérant fut rejetée au motif qu’elle était sans fondement. Le Président du tribunal de première instance de Turnhout s’exprima ainsi :

(traduction)

« S’agissant des établissements pénitentiaires où se trouvent les internés aucune norme n’est applicable. Le juge en référé ne dispose que d’un pouvoir d’appréciation marginal des conditions réelles dans lesquelles une personne internée se trouve (...). A la prison de Turnhout, il y a pour 51 personnes internées un service psycho-social avec des psychologues et une assistante sociale. A cela s’ajoute une équipe soignante composée d’un psychologue, d’une assistante sociale et de quatre assistants pénitentiaires. Entre le 13 mai 2008 et le 17 février 2009, le demandeur bénéficia de 20 consultations auprès du psychiatre,de 2 consultations auprès d’un psychologue et de 6 entretiens avec des assistants sociaux. (...) Le demandeur reçoit incontestablement un accompagnement psychiatrique et psychologique. »

29. Fin 2009, l’hôpital psychiatrique de Zelzate et le centre de Rekem furent à nouveau contactés mais refusèrent l’admission du requérant en raison des résultats obtenus sur la base du test PCL-R.

30. Il s’avéra en 2010 que le requérant, qui avait bénéficié de deux sorties au cours de l’année, n’avait pas respecté les conditions mises à ces sorties, à savoir l’interdiction de consommer de l’alcool et du cannabis.

31. En mai 2010, le requérant quitta la section C, où il avait introduit de la drogue, pour être placé à la section A. Le psychiatre de la prison nota que le requérant ne participait pas aux activités proposées en raison de son mauvais état physique et de son travail.

32. Le 9 juin 2010, la cour d’appel d’Anvers rejeta l’appel formé par le requérant contre l’ordonnance du Président du tribunal de première instance de Turnhout du 9 avril 2009. S’agissant de la régularité de la détention sous l’angle de l’article 5 § 1 e) de la Convention, la cour d’appel s’exprima comme suit :

(traduction)

« L’article 5 § 1 [de la Convention] n’interdit pas qu’un malade mental soit placé en prison. [L’intéressé] réside par ailleurs dans une aile spéciale de la prison où il reçoit un accompagnement spécifique. Il n’est en aucun cas exigé que l’établissement où séjourne le demandeur soit conforme aux normes de santé publique telles qu’elles sont prévues par l’arrêté royal du 23 octobre 1964. Le ministre de la santé publique n’est pas compétent s’agissant des prisons et de l’internement. La circulaire no 1800 du SPF Justice garantit aux internés des soins de santé équivalents à ceux dispensés dans la société libre et adaptés à leurs besoins spécifiques.

Le psychiatre traitant confirme qu’il est vu en consultation sur une base régulière. Ces entretiens réguliers traitent en substance de l’état d’esprit du demandeur. L’équipe de soins a constaté qu’il s’était stabilisé et fonctionnait bien dans la structure mise en place au sein de la section C en combinaison avec la médication. »

Quant à la demande du requérant d’avoir à sa disposition une équipe spécialisée, la cour d’appel conclut qu’il n’entrait pas dans les compétences du juge en référé de se prononcer sur les modalités du traitement à administrer.

33. En 2011, les résultats d’une nouvelle évaluation des risques révélèrent que le score élevé obtenu en 2001 au test PCL-R devait être nuancé et que les problèmes de psychopathie étaient en fait liés à ses dysfonctionnements de personnalité et qu’il n’avait pas le profil d’un psychopathe typique. Son suivi en institution de sécurité moyenne restait recommandé.

34. Selon une fiche établie par les services pénitentiaires en juin 2011, le requérant avait bénéficié de vingt-deux consultations auprès du psychiatre de la prison depuis août 2009. Figure également sur cette fiche une liste de médicaments administrés au requérant.

35. De nouvelles demandes furent adressées aux établissements spécialisés et le 8 août 2011, l’hôpital psychiatrique de Zelzate donna son accord de principe pour l’admission du requérant.

36. Le 4 octobre 2011, le requérant fut transféré à l’annexe psychiatrique de la prison de Merksplas car sa sécurité était menacée par d’autres détenus. Il n’a pas quitté cet établissement depuis.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

37. Les dispositions applicables en l’espèce figurent dans la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux, des délinquants d’habitude et des auteurs de certains délits sexuels (« loi de défense sociale »).

38. Cette loi doit être remplacée par la loi du 21 avril 2007 relative à l’internement des personnes atteintes d’un trouble mental, qui n’est toutefois pas encore entrée en vigueur, mais devrait l’être, au plus tard, le 1er janvier 2013.

A. Décision et durée de l’internement

39. La loi de défense sociale prévoit deux types de mesures à l’égard des inculpés qui se trouvent dans un état prévu par l’article 1er de la loi, « soit en état de démence, soit dans un état grave de déséquilibre mental ou de débilité mentale [les] rendant incapable[s] du contrôle de [leurs] actions ». La première mesure est la mise en observation qui a pour but d’établir un diagnostic sur leur état mental et dont il n’est pas question en l’espèce. La deuxième est la mesure de « défense sociale » à durée indéterminée, ou d’internement, qui se substitue à la peine.

40. L’internement est, dans ce cas, décidé par une juridiction :

Article 7

« Les juridictions d’instruction, à moins qu’il ne s’agisse d’un crime ou d’un délit politiques ou de presse, et les juridictions de jugement peuvent ordonner l’internement de l’inculpé qui a commis un fait qualifié crime ou délit et qui est dans un des états prévus à l’article premier. (...) »

41. L’internement peut également concerner les personnes condamnées qui développent un trouble mental au cours de leur détention :

Article 21

« Les condamnés pour crimes et délits qui, au cours de leur détention, sont reconnus en état de démence ou dans un état grave de déséquilibre mental ou de débilité mentale les rendant incapables du contrôle de leurs actions, peuvent être internés en vertu d’une décision du Ministre de la Justice rendue sur avis conforme de la commission de défense sociale.

(...)

Si, avant l’expiration de la durée prévue pour la peine, l’état mental du condamné est suffisamment amélioré pour ne plus nécessiter son internement, la commission le constate et le Ministre de la Justice ordonne le retour du condamné au centre pénitentiaire où il se trouvait antérieurement détenu.

(...) »

B. Les instances de défense sociale

42. Les commissions de défense sociale (« CDS ») sont responsables de la mise en œuvre de l’internement :

Article 12

« Il est institué auprès de chaque annexe psychiatrique une commission de défense sociale.

Les commissions de défense sociale sont composées de trois membres : un magistrat effectif ou honoraire qui en est le président, un avocat et un médecin.

Les membres des commissions sont nommés pour trois ans ; ils ont chacun un ou plusieurs suppléants. (...) »

Article 13

« Il est institué également une commission supérieure de défense sociale composée de trois membres : un magistrat effectif ou honoraire de la Cour de cassation ou d’une Cour d’appel, qui en est le président, un avocat et le médecin directeur du service d’anthropologie pénitentiaire. (...) »

43. Les CDS décident du lieu d’internement :

Article 14

« L’internement a lieu dans l’établissement désigné par la commission de défense sociale.

Celui-ci est choisi parmi les établissements organisés par le gouvernement. La commission peut toutefois, pour des raisons thérapeutiques et par décision spécialement motivée, ordonner le placement et le maintien dans un établissement approprié quant aux mesures de sécurité et aux soins à donner. (...) »

Article 15

« La commission peut d’office ou à la demande du Ministre de la Justice, du procureur du Roi, de l’interné ou de son avocat ordonner le transfèrement de l’interné dans un autre établissement.

La demande de l’interné ou de son avocat ne peut être représentée qu’après l’expiration d’un délai de six mois.

La commission peut admettre l’interné à un régime de semi-liberté dont les conditions et modalités sont fixées par le Ministre de la Justice. »

Article 17

« En cas d’urgence, le président de la commission peut ordonner à titre provisoire le transfèrement dans un autre établissement. Sa décision est soumise à la commission qui statue lors de sa plus prochaine séance.

Dans le même cas, et pour des raisons de sécurité, le Ministre de la Justice peut également ordonner, à titre provisoire, le transfèrement de l’intéressé dans un autre établissement. Il en informe immédiatement la commission. »

44. Les décisions des instances de défense sociale visées aux articles 14 à 17 de la loi de défense sociale ne sont pas susceptibles d’un pourvoi en cassation car elles sont considérées comme une modalité d’exécution de l’internement (parmi d’autres : Cass., 2 juin 2009, P.09.0586.N et P.09.0735.N).

45. La loi n’accorde pas aux CDS le pouvoir d’imposer l’acceptation des internés par l’établissement approprié qu’elles ont désigné. La Cour constitutionnelle, saisie d’une question préjudicielle sur la compatibilité de cette situation avec l’article 5 § 1 de la Convention, s’est prononcée en ces termes dans un arrêt no 142/2009 du 17 septembre 2009 :

« B.7.3. Lorsque la juridiction compétente a jugé qu’une personne internée doit être accueillie dans un établissement approprié, il appartient aux autorités compétentes de faire en sorte que cette personne puisse y être accueillie (CEDH, Johnson c. Royaume-Uni, 24 octobre 1997 ; Brand c. Pays-Bas, 11 mai 2004 ; Morsink c. Pays-Bas, 11 mai 2004). Si, lorsque l’établissement désigné par la commission de défense sociale ne peut accueillir la personne internée, un équilibre raisonnable doit être recherché entre les intérêts des autorités et ceux de l’intéressé, un tel équilibre est rompu lorsque celui-ci est laissé indéfiniment dans un établissement que la juridiction compétente a jugé inadapté pour permettre son reclassement.

B.7.4. Cette atteinte au droit [à la liberté et à la sûreté] ne provient cependant pas de la disposition législative sur laquelle la Cour est interrogée. Elle est due à l’insuffisance de places disponibles dans les établissements dans lesquels la mesure ordonnée par le juge a quo pourrait être exécutée.

B.8. Une telle situation concerne l’application de la loi. Sa sanction relève des cours et tribunaux et échappe par conséquent à la compétence de la Cour, de telle sorte que la question préjudicielle appelle une réponse négative. »

46. Sauf dans l’hypothèse, visée par l’article 21, où la peine n’a pas été purgée, les CDS sont compétentes pour ordonner la mise en liberté des internés :

Article 18

« La commission [de défense sociale] se tient informée de l’état de l’interné et peut à cet effet se rendre au lieu de son internement ou y déléguer un de ses membres. Elle peut, soit d’office, soit à la demande du procureur du Roi, de l’interné ou de son avocat, ordonner la mise en liberté définitive ou à l’essai de l’interné, lorsque l’état mental de celui-ci s’est suffisamment amélioré et que les conditions de sa réadaptation sociale sont réunies. Si la demande de l’interné ou de son avocat est rejetée, elle ne peut être renouvelée avant l’expiration d’un délai de six mois prenant cours à la date du rejet définitif.

(...) »

Article 19bis

« La décision de rejet de la demande de mise en liberté est notifiée à l’interné par le directeur de l’établissement au plus tard le surlendemain du prononcé.

L’avocat de l’interné peut interjeter appel de cette décision auprès de la commission supérieure de défense sociale dans un délai de (quinze) jours à dater de la notification. »

Article 19ter

« Le pourvoi en cassation contre la décision de la Commission supérieure de défense sociale confirmant la décision de rejet de la demande de mise en liberté de l’interné ou déclarant fondée l’opposition du procureur du Roi contre la décision de mise en liberté de l’interné ne peut être formé que par l’avocat de l’interné. »

47. Dans un arrêt du 2 juin 2009 (P.09.0586.N), la Cour de cassation précisa ce qui suit :

(traduction)

« La visite visée à l’article 18, alinéa 1er, de la loi de défense sociale tend à permettre à la commission de se tenir informée de l’état de l’interné en vue d’une éventuelle mise en liberté. Cette disposition ne vise point le contrôle quant aux conditions de détention de l’interné. La loi n’accorde pas davantage le droit à l’interné ou à son conseil de requérir une visite du lieu de l’internement. »

48. La procédure devant les CDS se présente comme suit :

Article 16

« La commission peut, avant de statuer par application des articles 14 et 15, prendre l’avis d’un médecin de son choix appartenant ou non à l’administration.

L’interné peut aussi se faire examiner par un médecin de son choix, et produire l’avis de celui-ci. Ce médecin peut prendre connaissance du dossier de l’interné.

Le procureur du Roi de l’arrondissement, le directeur ou le médecin de l’établissement de défense sociale ou de l’établissement approprié quant aux mesures de sécurité et aux soins à donner, l’interné et son avocat sont entendus. Le dossier est mis pendant quatre jours à la disposition de l’avocat de l’interné.

Les débats ont lieu à huis clos.

L’interné est représenté par son avocat dans le cas où il est préjudiciable d’examiner en sa présence des questions médico-psychiatriques concernant son état.

Les services de reclassement et de tutelle peuvent se faire représenter aux débats par des délégués agréés à cette fin par le Ministre de la Justice.

Les trois membres de la commission et le secrétaire sont seuls présents lors du délibéré. »

C. Lieux d’internement

49. L’internement peut avoir lieu dans trois types d’établissements :

1. Les établissements de défense sociale

50. Ces établissements, également appelés « centres de psychiatrie légale », sont des hôpitaux psychiatriques présentant un haut degré de sécurisation.

51. Il existe en Belgique quatre établissements de ce type, gérés par l’administration pénitentiaire ou dépendant du ministère de la Justice. Trois sont situés en Wallonie : l’établissement de Paifve, susceptible d’accueillir 208 internés ; l’hôpital de soins psychiatriques sécurisé « Les Marronniers », à Tournai, dont la capacité d’accueil est de 376 internés ; et la section de défense sociale du centre hospitalier psychiatrique du « Chêne aux Haies », à Mons, dont la capacité d’accueil est de trente lits réservés aux femmes internées. En 2009, la prison de Merksplas, en Flandre, a ouvert une section de soins sécurisée « De Haven », d’une capacité de soixante personnes, pour les internés présentant un handicap mental.

52. Il a été décidé en 2006, en exécution du « Plan pluriannuel justice 2005 de la ministre de la Justice », de développer le circuit de psychiatrie légale en Flandre en construisant, à Gand et Anvers, deux centres de psychiatrie légale hautement sécurisés d’une capacité totale de 390 places. Ces établissements devraient être opérationnels en 2015.

2. Les établissements psychiatriques classiques

53. Il s’agit soit d’hôpitaux psychiatriques privés subventionnés, soit de structures dépendant des pouvoirs publics.

54. Certaines institutions sont agréées de « sécurité moyenne » et peuvent accueillir des internés qui, en raison du danger qu’ils présentent pour la société, peuvent être considérés comme des patients ayant un sérieux trouble de comportement et/ou étant très agressifs et pour lesquels des mesures particulières de sécurité sont nécessaires. D’autres institutions sont agréées de « faible sécurité » et peuvent accueillir des internés qui ne présentent pas de danger particulier pour la société et dont la problématique psychiatrique présente les mêmes caractéristiques que la moyenne de la population d’un hôpital général psychiatrique.

55. Il existe en Flandre trois institutions de « sécurité moyenne » : l’hôpital psychiatrique privé Sint-Jan Baptist à Zelzate, le centre psychiatrique universitaire Sint-Kamillus à Bierbeek et le centre public de soins psychiatriques de Rekem.

3. Les annexes psychiatriques de prison

56. Douze prisons disposent d’annexes psychiatriques – également appelées sections de défense sociale – conçues à l’origine pour la mise en observation et l’internement provisoire dans l’attente d’un transfert vers un établissement de défense sociale.

57. Selon un document publié par le ministre de la Justice en mars 2010 intitulé « Politique pénale et d’exécution des peines – aperçu et développement », le nombre d’internés séjournant dans une annexe psychiatrique s’élevait en 2010 à 1 094, soit environ 10 % de la population carcérale, comparé à 790 internés en 1992. Selon le rapport d’activités 2010 de la direction générale de l’administration pénitentiaire, 68 personnes étaient internées à la prison de Turnhout et 625 personnes étaient internées à la prison de Merksplas.

D. Encadrement thérapeutique dans les annexes psychiatriques

58. Chaque établissement pénitentiaire et de défense sociale dispose d’un service psycho-social qui apporte « une assistance professionnelle aux autorités compétentes par les avis qu’il formule, et contribue par une approche scientifique à la réintégration psycho-sociale des détenus afin de limiter la récidive tout en contribuant à l’exécution sûre et humaine de la peine » (administration des établissements pénitentiaires, rapport annuel d’activités, 1999). Le service est composé d’un directeur (qui est en principe le directeur d’établissement), un psychiatre, un psychologue, un assistant social et un assistant administratif.

59. La circulaire no 1800, adoptée par le ministre de la Justice le 7 juin 2007, prévoit que dans les établissements pénitentiaires disposant d’une annexe psychiatrique, l’équipe soignante se complète d’infirmiers psychiatriques, d’ergothérapeutes, de kinésithérapeutes et d’éducateurs (article 1er). En fonction de la taille de l’annexe, et donc du nombre d’internés, il s’agit d’effectifs à temps plein ou à temps partiel.

60. Cette même circulaire prévoit que l’interné a droit à des soins de santé équivalents à ceux dispensés dans la société libre et adaptés à ses besoins spécifiques ainsi qu’aux services de dispensateurs de soin possédant les qualifications requises en fonction de ses besoins spécifiques (article 3).

61. En 2011, selon les informations données par le ministre de la Justice en réponse à une question parlementaire, les douze prisons disposant d’une annexe psychiatrique comptaient au total 19,79 psychologues et 27,38 psychiatres équivalent temps plein (question écrite no 5-2172 du 21 avril 2011, Sénat).

62. Selon le rapport d’activités 2010 de la direction générale de l’administration pénitentiaire, l’équipe médicale de la prison de Turnhout comptait onze personnes. L’équipe soignante en soins psychiatriques de la prison de Merksplas comptait trois psychiatres, quatre psychologues, dix infirmiers psychiatriques, trois ergothérapeutes, quatre éducateurs, des assistants sociaux et des musico-thérapeutes.

III. DOCUMENTS PERTINENTS RELATIFS À LA SITUATION EN MATIÈRE D’INTERNEMENT EN BELGIQUE

63. Le maintien des personnes atteintes d’un trouble mental en institutions pénitentiaires est une problématique reconnue par les instances officielles belges. Dans un document de 2010 (paragraphe 56), le ministre de la Justice s’exprimait en ces termes :

« (...) Les internés n’appartiennent pas à une catégorie carcérale classique. Ce sont des personnes souffrant de graves problèmes psychiques qui nécessitent un traitement adéquat. Un traitement adapté aux internés est d’ailleurs la meilleure prévention de la rechute.

Le manque permanent de capacités d’accueil dans le circuit psychiatrique externe conduit à l’admission des internés dans les établissements pénitentiaires, même si l’internement n’est pas une peine d’emprisonnement mais une mesure de sûreté. En dépit des circuits alternatifs (unités légales etc.) qui existent actuellement pour les internés, il y a une augmentation significative du nombre des internés dans les établissements pénitentiaires.

Malgré la constitution d’équipes de soins dans les établissements pénitentiaires, les internés restent, dans une mesure importante, privés des soins thérapeutiques qui doivent contribuer à une réintégration fructueuse dans la vie sociale.

En raison de la problématique de la surpopulation, la détention a en outre un effet contre-productif sur le processus de traitement des internés. »

64. Le Conseil central de surveillance pénitentiaire (« CCSP »), institué au sein du Service public fédéral Justice et ayant pour mandat de contrôler de manière indépendante les conditions de traitement des détenus, fit état dans son rapport 2008-2010 de ce qui suit :

« Selon la base, les soins médicaux en prison doivent être comparables aux soins apportés en dehors de la prison. Cet objectif n’est pas encore réalisé, certainement pas en ce qui concerne les soins de santé mentale (...) L’offre de soins psychiatriques fait l’objet d’un manque criant, compte tenu des besoins de soins, tant en ce qui concerne les personnes internées que les prisonniers ordinaires. Les rapports annuels du CCSP de 2006 et 2007 ont déjà signalé cette situation et nous devons constater qu’au cours des trois dernières années, la situation s’est constamment aggravée. Plus de 1 000 personnes internées traitées de manière inadéquate attendent dans des annexes psychiatriques surpeuplées ou dans des cellules de prisons ordinaires. Le temps d’attente pour un transfert vers une institution de soins adaptée peut grimper jusqu’à 2 ou 3 ans. La morbidité psychiatrique de la population pénitentiaire augmente au fil des ans et 5 à 10 % des prisonniers présentent un trouble psychiatrique majeur. Ces chiffres ne tiennent pas compte du fait que presque 47 % des détenus répondent aux critères du diagnostic de trouble antisocial de la personnalité.

(...)

Même si les soins fournis répondent aux règles de l’art, ils ne sont pas à la hauteur au niveau relationnel. La satisfaction relative à un traitement médical dépend dans une grande mesure de la qualité de la relation entre le médecin et le patient. Cet aspect peut très certainement faire l’objet d’une plus grande attention. En raison de la pénurie de personnel médical qualifié, surtout pendant les weekends et les gardes, l’on mobilise souvent du personnel pénitentiaire sans qualification médicale pour certaines tâches de soins, ce qui constitue une source de mécontentement qu’il convient d’éviter. »

65. La situation est par ailleurs critiquée depuis longtemps (voir arrêt Aerts c. Belgique (30 juillet 1998, § 28, Recueil des arrêts et décisions 1998-V) par plusieurs instances internationales et organisations non gouvernementales :

. le Commissaire des Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe releva au cours de sa visite en Belgique des 15-19 décembre 2008, (CommDH(2009)14) ce qui suit :

« 51. Le Commissaire a relevé que l’organisation et la pratique des soins de santé en milieu pénitentiaire en Belgique sont lacunaires. Le principe du droit à la protection de la santé et aux soins de santé en milieu carcéral est consacré par la loi Dupont. Le Commissaire s’appuie sur les constatations faites lors de sa visite et se réfère au rapport de l’Observatoire international des prisons pour 2008. Le Comité contre la torture s’est déclaré préoccupé par les conditions de détention, en particulier en ce qui concerne l’insuffisance de personnel qualifié, une vétusté des installations, une qualité insuffisante de soins, une absence de continuité des traitements.

52. Le Commissaire se félicite de la mise en place en 2007 d’équipes de soins multidisciplinaires au sein des annexes psychiatriques. Pourtant, le personnel qualifié est en nombre insuffisant par rapport au nombre de détenus, les délais d’attente pour rencontrer le médecin ou l’infirmier sont longs et le temps de consultation est insuffisant, ce qui porte atteinte à la qualité des soins. Par ailleurs, le manque de personnel surveillant pour assurer les transferts médicaux pose des problèmes d’organisation et limite l’accès aux soins.

53. S’agissant des infrastructures, les locaux médicaux de certains établissements pénitentiaires sont tout aussi vétustes et insalubres que les autres parties des établissements. Ainsi, l’annexe psychiatrique de la maison d’arrêt de Forest est ancienne et manque d’infrastructures adéquates. Les conditions de détention des internés dans le système carcéral belge sont particulièrement problématiques. Les annexes psychiatriques sont occupées par des internés psychiatriques en attente prolongée d’un transfert vers un établissement de défense sociale, par des détenus présentant des troubles mentaux, par des détenus toxicomanes ou des détenus suicidaires. Les annexes psychiatriques sont souvent surpeuplées et certains internés sont par conséquent détenus dans les cellules « normales ». Ainsi, lors de sa visite de la maison d’arrêt d’Anvers, le Commissaire a constaté que l’aile psychiatrique avait une capacité de 51 places, alors que 100 personnes avec des troubles psychiatriques étaient détenues. Le Commissaire relève qu’une telle situation prive les internés de l’accès au personnel hospitalier et aux soins thérapeutiques dont ils ont besoin. Le Commissaire prend note du plan du Gouvernement pour la construction de deux établissements de défense sociale. »

. le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (« CPT ») – qui a accordé une attention particulière, depuis sa première visite en Belgique en 1993, à la situation des détenus et des internés placés dans les annexes psychiatriques des établissements pénitentiaires – commenta la mise en œuvre de la circulaire no 1800 à la prison de Lantin dans son rapport relatif à la visite effectuée du 28 septembre au 7 octobre 2009, comme suit :

« Le projet visé par la circulaire no 1800 susmentionnée était de mettre en place au sein des annexes psychiatriques pénitentiaires (et dans les sections et établissements [de défense sociale] du pays) des équipes de soins multidisciplinaires, constituées de personnels médical, infirmier et paramédical qualifiés, en nombre suffisant pour assurer aux internés « des soins de santé équivalents à ceux dispensés dans la société libre ». L’APL [annexe psychiatrique de la prison de Lantin] avait été doté, à cette fin, d’ ½ poste équivalent temps plein (ETP) de psychiatre. Bien que ceci constitue une réelle avancée par rapport à la situation antérieure, un tel niveau de présence est loin d’être satisfaisant au regard des soins exigés par les internés placés à l’APL et ne permet guère d’assurer un suivi régulier suffisant des patients. Le CPT rappelle à cet égard sa recommandation, déjà formulée en 1993 et 1997, selon laquelle l’APL doit bénéficier d’au moins un poste de psychiatre. »

. le Comité contre la torture des Nations Unies fit état de ses préoccupations dans ses Observations finales relatives à la Belgique (CAT/C/BEL/CO/2, 21 novembre 2008) :

« 23. Le Comité se déclare préoccupé par la problématique des conditions de détention des internés psychiatriques dans le système carcéral belge, déjà déploré dans ses dernières recommandations (CAT/C/CR/30/6, § 7, g)), en particulier en ce qui concerne l’insuffisance de personnel qualifié, une vétusté des installations, une qualité insuffisante de soins, une absence de continuité des traitements, des examens médicaux, problématique sensiblement aggravée lors des grèves des agents pénitentiaires. Par ailleurs, le Comité s’inquiète par la longue période d’attente subie par de nombreux détenus figurant dans les annexes psychiatriques vers un transfert à un établissement de défense sociale (EDS). En raison de la surpopulation dans les EDS, l’attente peut durer de huit à quinze mois (Articles 11 et 16).

Le Comité recommande à l’Etat partie de prendre des mesures concrètes afin de contrer les problèmes du manque de qualité des soins de santé des internés, de la surpopulation des annexes, du placement de certains internés dans les ailes de la prison en raison du manque de place dans les annexes, de la vétusté des locaux, du manque d’activité et de prise en charge spécifiques des internés se trouvant dans les ailes de la prison. En outre, le Comité recommande à l’Etat partie d’assurer l’encadrement thérapeutique spécialisé suffisant. »

. le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies s’exprima dans ces termes en octobre 2010 dans le cadre de l’examen du rapport soumis par la Belgique conformément au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (projet d’observations finales, CCPR/C/BEL/CO/5) :

« Le Comité est préoccupé par la pratique de détention des malades mentaux dans les prisons et annexes psychiatriques des prisons belges, ainsi que par la longue période d’attente qu’ils doivent subir avant un transfert dans les établissements de défense sociale (EDS) (art. 7, 9, 10).

L’Etat partie devrait veiller, ainsi que le Comité l’a recommandé dans ses précédentes observations finales, à mettre fin à la pratique de détention des malades mentaux dans les prisons et les annexes psychiatriques. Il devrait également accroître les places d’internement dans les établissements de défense sociale et les conditions de vie des malades. »

. l’Observatoire international des prisons, section belge, dans sa note de 2010, fit part de sa préoccupation en ces termes :

« Sur la dernière décennie, la population des internés a augmenté de 85 % (Justice en chiffres 2010, SPF Justice) ! Sans compter les internés placés dans les établissements de défense sociale de Mons et de Tournai, on compte 1038 internés en Belgique en 2009 et 1089 internés en 2010, soit 1/10ème de la population
carcérale (...)

A l’heure actuelle, les internés sont placés dans des annexes psychiatriques d’établissements pénitentiaires en attente d’être transférés vers un établissement de défense sociale. Le délai est de trois à quatre ans. Cette situation a déjà valu la condamnation de la Belgique par la Cour européenne des Droits de l’Homme. Les annexes psychiatriques sont surpeuplées et ne sont pas équipées pour recevoir des internés. Le mélange des pathologies aggrave l’état de santé des détenus qui sont souvent parqués à trois 23h/24h dans une même cellule prévue pour 1 ou 2 détenus ou dans un dortoir comme à Jamioulx.

Depuis 2007 des équipes multidisciplinaires ont été mises en place au sein des annexes psychiatriques (circulaire no1800 du 7 juin 2007). Cependant, le Ministre reconnaît lui-même que « malgré la présence des équipes de soins, les internés restent privés de soins dont ils ont besoin » (Politique pénale et d’exécution des peines – aperçu et développements, Ministre de la Justice, mars 2010, p.34).

Certains établissements de défense sociale pour leur part disposent d’un personnel soignant insuffisant et la qualité des soins suscite également de nombreuses critiques. »

. dans sa note de 2006, la section belge de l’Observatoire international des prisons observait également que :

« Un des principaux problèmes résulte du manque manifeste de personnel médical. Le personnel étant en nombre totalement insuffisant, il ne peut consacrer que quelques minutes à chaque consultation. Une association de médecins travaillant dans les établissements pénitentiaires (AMEP) s’est constituée afin de dénoncer cette situation et de proposer des réformes aux autorités politiques. Le 28 avril 2003, l’AMEP indiquait qu’un médecin devait examiner entre 20 et 50 détenus en 2 heures, soit entre 2,5 et 6 minutes par détenu. Des plaintes récurrentes sont régulièrement émises quant à la disponibilité des médecins et à la manière dont sont organisées les consultations (...) En réalité, le médecin n’est présent que quelques heures par semaine et il n’y a pas toujours de véritable permanence médicale, la nuit et le week-end. Cette situation d’ores et déjà dangereuse pour les détenus « ordinaires » est totalement inacceptable pour des internés. »

. dans sa note de 2008, elle soulignait en outre :

« le problème de la « double casquette » des membres du personnel d’encadrement thérapeutique. La mission de celui-ci est en effet double : fournir le traitement et les soins nécessaires aux internés d’une part, et rendre des avis et rapports à la CDS d’autre part. Cette « double casquette » constitue indéniablement un obstacle à la mise en œuvre d’une relation de confiance entre l’interné et le personnel (comment l’interné peut-il se confier en toute liberté à un psychiatre, psychologue, etc., en sachant que ses propos risquent d’être rapportés à la CDS qui les prendra, le cas échant, en considération pour statuer sur son éventuelle demande de libération ?).

En pratique, la plupart de ces annexes accueillent non seulement des internés en attente de transfert vers un EDS, mais également des détenus qui présentent des troubles mentaux, des toxicomanes, des détenus « suicidaires » ou encore parfois des détenus ayant commis des faits de mœurs.

Les annexes sont les lieux les plus surpeuplés des prisons belges à tel point que dans plusieurs prisons, on crée des « annexes bis » au sein même du cellulaire « normal » (...), ou on relègue des internés vers le cellulaire « normal ».

Le mélange des pathologies aggrave l’état de santé des détenus qui sont souvent parqués à trois 23h/24h dans une même cellule prévue pour 1 ou 2 détenus ; le troisième dort dès lors sur un fin matelas placé à même le sol et qu’il faut relever la journée pour pouvoir circuler dans la cellule et ouvrir la porte. Les détenus mangent à tour de rôle ou, ensemble mais alors chacun assis sur son lit : il n’y a qu’une petite table et une ou deux chaises par cellule. Les annexes ne disposent pas toujours d’infirmiers de manière continue (il est difficile de trouver du personnel travaillant dans de mauvaises conditions (...)) ; ce sont souvent des agents sans formation qui sont chargés d’une série de soins. Les agents n’ont pas toujours la possibilité d’effectuer une formation en psychiatrie et quand ils le peuvent ce ne sera qu’après de nombreux mois voire des années de travail sans formation. »

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 1 DE LA CONVENTION

66. Le requérant se plaint d’être privé de sa liberté en violation de l’article 5 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

(...)

e) s’il s’agit de la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond. »

A. Sur la recevabilité

67. Le Gouvernement est d’avis que cette partie de la requête doit être rejetée pour défaut manifeste de fondement du fait que le requérant a omis d’apporter des preuves concrètes étayant l’absence alléguée de soins et les effets sur sa situation personnelle.

68. Le requérant fait valoir qu’il se plaint précisément de l’absence de soins adaptés à sa pathologie telle qu’elle a été diagnostiquée. Il soutient avoir fait valoir de manière étayée l’absence de soins et le caractère inapproprié de ses lieux de détention devant les juridictions internes et avoir demandé en vain à ce que ces carences soient constatées sur place.

69. La Cour estime que les griefs formulés par le requérant sous l’angle de l’article 5 du fait du caractère inapproprié de son lieu de détention posent des questions de fait et de droit complexes qui ne peuvent être tranchées qu’après un examen au fond de cette partie de la requête ; il s’ensuit qu’elle n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Aucun autre motif d’irrecevabilité n’ayant été relevé, il y a lieu en conséquence de la déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

70. Le requérant allègue que son maintien à l’annexe psychiatrique de la prison de Turnhout est lié à un manque structurel de capacité des établissements psychiatriques, problème que les autorités ont identifié depuis des années. Des initiatives ont été prises dès juillet 2001 à la demande du ministre de la Justice afin d’accorder des subventions à des hôpitaux psychiatriques en Flandre pour engager du personnel supplémentaire et financer l’accueil d’internés qualifiés de « sécurité moyenne ». Toutefois, à ce jour, le nombre de lits disponibles dans les établissements de « sécurité moyenne » est toujours loin d’être suffisant. Les autorités belges ne se sont donc pas trouvées confrontées, dans le cas du requérant, à une situation exceptionnelle et imprévue. Partant, la Cour pourrait emprunter au raisonnement qui a été le sien dans l’affaire Morsink c. Pays-Bas (no 48865/99, 11 mai 2004, §§ 63 à 70). Se référant ensuite à l’affaire Aerts précitée, le requérant estime être victime, depuis 1997, de la même situation caractérisée par l’absence de soins thérapeutiques appropriés à son état compromettant ainsi ses chances de reclassement. Cette situation est, selon lui, notoire et décriée dans de nombreux rapports internationaux, notamment plusieurs rapports de visite du CPT.

71. A titre général, le Gouvernement estime que la présente affaire se distingue des affaires Aerts précitée et Morsink c. Pays-Bas (no 48865/99, 11 mai 2004). A la différence de M. Aerts, le requérant a toujours été interné dans des établissements désignés par la CDS. De plus, il a toujours été entouré à Turnhout de soins alors que, dans l’affaire Aerts, les autorités avaient admis un manque de soins. Dans l’affaire Morsink, le requérant était maintenu en prison. Du reste, la détention du requérant dans cette dernière affaire manquait de base légale. Enfin, en l’espèce, contrairement à ces deux affaires, la coopération minimale du requérant, son comportement difficile et son opposition aux traitements font obstacle à toute alternative.

72. Le Gouvernement soutient que le requérant fait l’objet de soins appropriés et que l’encadrement médical et psychiatrique à la prison de Turnhout est adéquat. Il a eu accès à toute l’équipe soignante, a bénéficié de consultations régulières auprès du psychiatre de la prison et s’est vu administrer des médicaments. Il a été pris en charge au sein d’une section adaptée lors de sa crise de psychose en 2008, y a reçu un traitement médicamenteux et son état s’est amélioré.

73. Le Gouvernement insiste en outre sur les efforts soutenus qui ont été déployés par les autorités pour trouver un établissement adapté. L’échec de la prise en charge extérieure à la prison n’est donc pas dû aux autorités mais doit être attribué au requérant qui se trouve lui-même à l’origine de la situation dans laquelle il se trouve. Sa toxico-dépendance persistante, les dysfonctionnements de sa personnalité, ses faibles capacités intellectuelles, son peu de compréhension de sa problématique ainsi que son score au test de psychopathie ont eu à l’évidence un impact négatif sur son reclassement et expliquent que les établissements extérieurs aient été très hésitants à l’accepter. A cela s’ajoute que l’expérience des permissions de sortie n’était pas non plus satisfaisante, compromettant ainsi l’option d’un suivi ambulatoire.

2. Appréciation de la Cour

74. La Cour observe qu’en l’espèce, la privation de liberté litigieuse du requérant est fondée sur le jugement de la chambre du conseil du tribunal de première instance de Turnhout du 2 janvier 1999, décision confirmée, le 18 février 1999, par la cour d’appel d’Anvers. En conséquence, en l’absence de « condamnation », la détention subie par l’intéressé relève de l’alinéa e) de l’article 5 § 1 de la Convention pour autant qu’il concerne la détention d’aliénés.

75. La Cour note qu’il n’est pas contesté, en l’espèce, que l’internement du requérant a été décidé « selon les voies légales » au sens de l’article 5 § 1 de la Convention.

76. Aux fins de l’article 5 de la Convention toutefois, la conformité au droit interne de la privation de liberté du requérant n’est pas en soi décisive. Encore faut-il établir que la détention de l’intéressé est conforme au but de l’article 5 § 1 de la Convention, qui est de prémunir les personnes contre toute privation arbitraire de leur liberté (voir, parmi beaucoup d’autres, Witold Litwa c. Pologne, no 26629/95, §§ 72-73, CEDH 2000-III). La privation de liberté est en effet une mesure si grave qu’elle ne se justifie que lorsque d’autres mesures, moins sévères, ont été considérées et jugées insuffisantes pour sauvegarder l’intérêt personnel ou public exigeant la détention (idem, § 78 et Cristian Teodorescu c. Roumanie, no 22883/05, § 61, 19 juin 2012).

77. En ce qui concerne la privation de liberté des personnes atteintes de troubles mentaux, un individu ne peut passer pour « aliéné » et subir une privation de liberté que si les trois conditions suivantes au moins se trouvent réunies : premièrement, son aliénation doit avoir été établie de manière probante ; deuxièmement, le trouble doit revêtir un caractère ou une ampleur légitimant l’internement ; troisièmement, l’internement ne peut se prolonger valablement sans la persistance de pareil trouble (voir parmi d’autres, Winterwerp c. Pays-Bas, 24 octobre 1979, § 39, série A no 33, Varbanov c. Bulgarie, no 31365/96, § 45, CEDH 2000‑X et Chtoukatourov c. Russie, no 44009/05, § 114, CEDH 2008).

78. Rien ne permet à la Cour de douter que ces conditions sont remplies en l’espèce. Le requérant souffre de troubles de la personnalité attestés médicalement depuis 1998. Un test effectué en 2001 révéla en outre une personnalité psychopathe impliquant un risque de récidive important. Une nouvelle évaluation de sa dangerosité effectuée en 2011 confirma la nécessité de maintenir son internement dans un environnement moyennement sécurisé.

79. La Cour a également jugé qu’il devait exister un lien entre le motif censé justifier la privation de liberté et le lieu et les conditions de la détention. Elle rappelle à ce sujet qu’en principe, la « détention » d’une personne souffrant de troubles mentaux ne peut être considérée comme « régulière » aux fins de l’article 5 § 1 e) que si elle s’effectue dans un hôpital, dans une clinique ou dans un autre établissement approprié (Ashingdane c. Royaume-Uni, 28 mai 1985, § 44, série A no 93, Aerts, précité, § 46, Hutchison Reid c. Royaume-Uni, no 50272/99, § 48, CEDH 2003-IV). La Cour a admis que le seul fait qu’un intéressé ne soit pas intégré dans un établissement approprié n’avait pas pour effet automatique de rendre sa détention irrégulière au regard de l’article 5 § 1 de la Convention et qu’un équilibre raisonnable devait être ménagé entre les intérêts opposés en cause étant entendu qu’un poids particulier devait être accordé au droit à la liberté (Morsink précité, §§ 66 à 68, Brand
c. Pays-Bas, no 49902/99, §§ 62 à 65, 11 mai 2004).

80. Le Gouvernement estime qu’il faut tenir compte du fait que la CDS n’a pas désigné d’autres lieux que la prison de Merksplas puis celle de Turnhout pour l’internement du requérant et qu’il y a donc lieu de distinguer la présente affaire de l’affaire Aerts. La Cour rappelle que, dans cette affaire, elle avait conclu à une violation de l’article 5 § 1 e) au motif que l’annexe psychiatrique de Lantin où était détenu le requérant ne pouvait pas être considérée comme appropriée à la détention d’aliénés (Aerts précité, § 49). Pour parvenir à cette conclusion, elle avait tenu compte du fait que la CDS compétente avait désigné l’établissement de défense sociale de Paifve pour l’internement du requérant et que son transfert avait été retardé en raison du manque de place.

81. La Cour estime que l’approche proposée par le Gouvernement est trop formaliste. Elle observe qu’en l’espèce la prise en charge du requérant à l’extérieur de la prison dans un cadre adapté est envisagée indirectement par la CDS depuis 2002 (paragraphe 11). Il ressort également des circonstances de la cause que, dès 2003, les autorités pénitentiaires prirent elles-mêmes contact avec plusieurs établissements psychiatriques de sécurité moyenne et que de pareilles démarches furent réitérées en 2009. A cela s’ajoute qu’à la différence de l’affaire Aerts, en l’espèce, aucune place n’a été trouvée jusqu’en 2011 au sein des établissements contactés en raison de leur refus d’admettre le requérant. De plus, et en tout état de cause, la Cour constate que la loi de défense sociale n’accorde pas aux instances de défense sociale le pouvoir d’imposer l’acceptation des internés par l’établissement approprié qu’elles auraient désigné. Il s’avère donc que l’internement du requérant s’est en réalité prolongé au sein de l’annexe psychiatrique de la prison de Turnhout à défaut pour les autorités belges d’alternative.

82. Le Gouvernement soutient que le requérant y est entouré des soins adéquats. Les éléments auxquels se réfère le Gouvernement pour étayer sa thèse sont l’accès du requérant aux professionnels de santé présents dans l’établissement, les consultations du requérant auprès du psychiatre, les rapports établis par des psychologues et psychiatres en vue d’évaluer le danger de récidive qu’il représente ainsi que la prise en charge du requérant après sa crise de psychose en 2008.

83. D’après les données mentionnées par le Président du tribunal de première instance de Turnhout dans son ordonnance du 9 avril 2009, le requérant a bénéficié de vingt consultations auprès du psychiatre de la prison entre 2008 et 2009 et, à l’occasion de ces consultations, son état d’esprit était discuté. Il bénéficia également de vingt-deux consultations auprès du psychiatre entre 2009 et 2011 selon les informations récoltées par les services pénitentiaires en 2011. Le requérant ne conteste pas ces données. Dans sa demande en référé, il se plaignait toutefois du caractère fugace des consultations psychiatriques (paragraphe 20). Aux yeux de la Cour, si ces informations chiffrées attestent que le requérant a effectivement eu accès sur une base régulière à un psychiatre, elles ne sont pas suffisantes pour lui permettre d’évaluer la mesure de la prise en charge thérapeutique du requérant.

84. Le Gouvernement fait ensuite valoir que le caractère approprié de l’établissement résulte de l’administration de médicaments au requérant. La Cour constate toutefois que le Gouvernement omet de mentionner le type de médicaments et leurs visées thérapeutiques. Sachant qu’au vu de leur composition, les médicaments mentionnés dans la fiche établie par les services pénitentiaires en juin 2011 (paragraphe 34) n’ont a priori aucun lien avec le traitement de pathologies mentales, la Cour estime que la médication invoquée par le Gouvernement ne saurait entrer en ligne de compte.

85. Quant à l’amélioration de l’état du requérant à la suite de son séjour dans la section C de l’annexe psychiatrique, invoquée par le Gouvernement, la Cour n’y voit pas non plus un élément déterminant. Rien ne permet en effet d’exclure que la détérioration de l’état de santé du requérant qui avait conduit à ce séjour ait en réalité été le résultat de son internement sans perspective de reclassement.

86. En bref, aucun des arguments invoqués par le Gouvernement ne convainc la Cour que le requérant ait été dans une situation différente de celle de nombreux internés qui se trouvent dans une annexe psychiatrique de prison dans l’attente d’un transfert dans un établissement de défense sociale ou un établissement privé et se trouvent privés des soins thérapeutiques pouvant contribuer à une réintégration fructueuse dans la vie sociale. Cet état de fait est constaté par le ministre de la Justice lui-même (paragraphe 63). Le conseil central de surveillance pénitentiaire confirme que l’offre de soins psychiatriques fait l’objet d’un manque criant tant en ce qui concerne les personnes internées que les prisonniers ordinaires, et que la situation s’aggrave constamment notamment du fait de l’augmentation de la surpopulation carcérale (paragraphe 64). Le CPT, le Commissaire des Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, le Comité contre la torture et le Comité des droits de l’homme des Nations Unies ainsi que l’observatoire international des prisons expriment, de manière récurrente, les mêmes préoccupations (paragraphe 65).

87. Restent, selon le Gouvernement, les troubles spécifiques du requérant et son attitude pour expliquer l’échec de la prise en charge par des établissements spécialisés.

88. La Cour constate que les scores élevés obtenus par le requérant en 2001 au test de psychopathie ont effectivement clairement joué contre son admission à l’extérieur de la prison (paragraphes 15 et 29). Toutefois, elle constate également qu’une réévaluation n’a été envisagée qu’en 2007 et qu’ensuite s’est encore découlé un délai de quatre ans avant qu’un nouveau test soit effectué en 2011 (paragraphes 21 et 33). Compte tenu du poids particulier qu’elle accorde au droit à la liberté du requérant, la Cour estime que, contrairement à ce que soutient le Gouvernement, les efforts déployés par les autorités n’apparaissent pas avoir été à la hauteur des enjeux pour le requérant.

89. S’agissant du comportement du requérant, la Cour rappelle, que si l’attitude persistante d’une personne privée de liberté peut contribuer à faire obstacle à une modification de son régime de détention, cela ne dispense pas les autorités de prendre les initiatives appropriées en vue d’assurer à cette personne un traitement adapté à son état et de nature à l’aider à retrouver sa liberté (De Schepper, précité, § 48). En tout état de cause, la Cour n’est pas convaincue que le requérant ait fait preuve d’une attitude telle qu’elle empêchait toute évolution de sa situation vers une prise en charge résidentielle. Au contraire, les circonstances de la cause montrent que le requérant a pris son implication en vue de son reclassement au sérieux et qu’il effectuait un travail régulier et apprécié (paragraphe 16). Si les problèmes de discipline qu’il a rencontrés et son addiction à l’alcool et à la drogue ont pu être un obstacle légitime à un suivi ambulatoire (paragraphe 22), ceux-ci n’apparaissent pas avoir motivé les refus d’admission opposés par les établissements résidentiels contactés (paragraphes 15 et 29).

90. Eu égard à ce qui précède, la Cour considère que le maintien de l’internement du requérant pendant treize ans, de 1999 à ce jour, dans un établissement, où il ne bénéficie pas de l’encadrement approprié à sa pathologie, a eu pour effet de rompre le lien entre le but de la détention et les conditions dans lesquelles elle a lieu.

91. Partant, il y a eu violation de l’article 5 § 1 de la Convention.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 4 DE LA CONVENTION

92. Le requérant se plaint de l’ineffectivité du recours devant les instances de défense sociale en violation des articles 5 § 4 et 13 de la Convention. Vu le caractère de lex specialis de l’article 5 § 4 par rapport aux exigences plus générales de l’article 13 (A. et autres c. Royaume-Uni [GC], no 3455/05, § 202, CEDH 2009), la Cour considère que les griefs que soulève le requérant doivent être examinés sous l’angle de l’article 5 § 4 de la Convention, ainsi formulé :

« Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. »

A. Thèse des parties

93. Le requérant soutient que les voies de recours qu’il a utilisées ne sont pas effectives car elles ne lui ont pas permis d’établir la réalité de ses conditions de détention et donc le caractère inapproprié de son lieu de détention au sens de l’article 5 § 1 e). La CDS a refusé d’effectuer une visite sur les lieux. De même, le juge judiciaire n’a pas donné suite à sa demande de descente sur les lieux.

94. Le requérant soutient que la demande de mise en liberté devant les instances de défense sociale est en tout état de cause ineffective pour un autre motif. Tant qu’un interné ne peut se prévaloir de son admission dans un établissement extérieur, la demande n’a aucune chance de succès. En effet, en cas de refus opposé par un tel établissement de l’admettre, les instances de défense sociale sont, de toute façon, sans compétence pour « forcer » le transfert.

95. Le Gouvernement estime que le requérant a eu accès au juge conformément à l’article 5 § 4 pour se plaindre de la légalité de sa détention ainsi que des conditions dans lesquelles il se trouve. Il a d’ailleurs utilisé les deux principales voies de recours possibles et avait, dans les deux cas, les moyens de prouver sa thèse. Premièrement, la régularité de sa détention a été régulièrement examinée par la CDS, seule compétente pour décider du lieu d’internement, qui aurait pu ordonner une visite des lieux pour se faire une idée précise de l’état de l’interné si elle l’avait estimé nécessaire. Si elle n’a pas donné suite à la demande du requérant, c’est qu’elle connaissait la situation à Merksplas. Deuxièmement, le requérant a saisi le juge en référé. Afin que les parties puissent prouver leurs allégations, le code judiciaire prévoit que le juge peut, même d’office, ordonner une descente sur les lieux. Il ressort d’une jurisprudence bien établie, illustrée par un arrêt de la cour d’appel de Gand du 26 mai 2005, que la voie du référé s’avère être particulièrement effective pour les internés qui ont à plusieurs reprises obtenu du juge qu’il ordonne aux autorités d’exécuter les décisions des CDS ou, à tout le moins, les oblige à donner aux intéressés l’accompagnement nécessaire. Dans l’affaire portée devant la cour d’appel de Gand, l’intéressé contestait ses conditions d’internement et avait exigé que l’Etat soit condamné à lui dispenser tous les soins médicaux et psychiatriques nécessaires à son état et à lui désigner un établissement approprié. Afin d’établir les conditions de détention, le Président du tribunal de première instance avait ordonné à l’Etat de produire un rapport et procédé à une visite des lieux. La cour d’appel confirma que le juge de première instance avait pleinement respecté ses compétences en la matière.

B. Appréciation de la Cour

96. La Cour constate que le grief tiré de l’article 5 § 4 n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

97. Sur le fond, la Cour a récemment rappelé les principes généraux relatifs à l’article 5 § 4 en ce qu’il s’applique en cas d’internement de personnes souffrant de troubles mentaux dans l’affaire Stanev c. Bulgarie [GC] (no 36760/06, §§ 168 à 171, CEDH 2012 et jurisprudence citée). Ils peuvent se résumer comme suit en ce qui concerne la présente espèce.

98. L’article 5 § 4 offre une garantie fondamentale contre les détentions arbitraires en exigeant qu’un individu privé de sa liberté ait le droit de faire contrôler par un tribunal la légalité de sa détention. Le concept de « légalité » doit avoir le même sens au paragraphe 4 de l’article 5 qu’au paragraphe 1, de sorte qu’une personne détenue a le droit de faire contrôler la « légalité » de sa détention sous l’angle non seulement du droit interne, mais aussi de la Convention, des principes généraux qu’elle consacre et du but des restrictions qu’autorise l’article 5 § 1. L’article 5 § 4 ne garantit pas un droit à un contrôle juridictionnel d’une ampleur telle qu’il habiliterait le tribunal compétent à substituer sur l’ensemble des aspects de la cause, y compris des considérations de pure opportunité, sa propre appréciation à celle de l’autorité dont émane la décision. Il n’en veut pas moins un contrôle assez ample pour s’étendre à chacune des conditions indispensables à la « légalité » de la détention d’un individu au regard du paragraphe 1.

99. En cas de détention pour maladie mentale, des garanties spéciales de procédure peuvent s’imposer pour protéger ceux qui, en raison de leurs troubles mentaux, ne sont pas entièrement capables d’agir pour leur propre compte.

100. En cas de détention pour une durée illimitée ou prolongée, l’intéressé a en principe le droit, au moins en l’absence de contrôle judiciaire périodique et automatique, d’introduire « à des intervalles raisonnables » un recours devant un tribunal pour contester la « légalité » – au sens de la Convention – de son internement.

101. Enfin, l’organe compétent doit avoir le pouvoir d’ordonner l’élargissement s’il juge que la détention est illégale (Benjamin et Wilson c. Royaume-Uni, no 28212/95, §§ 33 et 34, 26 septembre 2002).

102. En l’espèce, le requérant a utilisé deux voies de recours au sens de l’article 5 § 4 de la Convention. D’une part, il a demandé le contrôle de la légalité du maintien de son internement aux instances de défense sociale. D’autre part, il a assigné l’Etat en référé afin que celui-ci soit condamné à lui prodiguer les soins appropriés. La Cour va donc examiner ces deux voies de recours successivement.

103. La Cour note qu’en vertu de l’article 18 de la loi de défense sociale, la CDS est compétente pour « statuer » sur la « légalité » de la détention et ordonner la libération d’un interné en cas de détention illégale. Ce contrôle peut être renouvelé tous les six mois. Elle est également compétente, en vertu des articles 14 et 15 de la loi de défense sociale, pour ordonner le transfèrement dans un établissement approprié et admettre les internés à un régime de semi-liberté.

104. La Cour rappelle que le recours à la CDS, tant du point de vue de son organisation que du point de vue de sa procédure et des droits de la défense, répond en principe aux exigences de l’article 5 § 4 (voir notamment Merkier c. Belgique, no 11200/84, décision de la Commission du 14 juillet 1987, Décisions et rapports 53, p. 50). Elle n’a aucune raison en l’espèce de se départir de cette conclusion.

105. En ce qui concerne l’effectivité de la procédure devant la CDS en tant que mécanisme de protection contre les détentions arbitraires ou irrégulières, la Cour observe que, dans sa décision du 18 novembre 2008, la CDS a refusé de faire suite à la demande du requérant d’effectuer une visite sur son lieu de détention pour constater de visu son caractère inapproprié. Cette décision fut confirmée par l’organe de recours, la CSDS, le 18 décembre 2008 et, dans le cadre de cette procédure, le requérant fut débouté de son pourvoi en cassation le 24 février 2009. La demande de mise en liberté du requérant fut rejetée au motif que le requérant ne remplissait pas encore les conditions pour un transfert.

106. Il apparaît toutefois de la motivation de la décision de la CSDS (paragraphe 25) que, même si une visite des lieux avait été effectuée, cela n’aurait pas pu mener la CDS et la CSDS à conclure autrement vu que le transfert du requérant était tributaire de l’admission dans un établissement extérieur. Or, la Cour relève qu’en cas de refus d’admission, les instances de défense sociale sont sans compétence pour ordonner la mise à disposition d’une place adaptée au requérant (paragraphe 45).

107. Ces circonstances amènent la Cour à s’interroger sur la portée du contrôle de la légalité que peuvent effectuer les instances de défense sociale. A ses yeux, la limitation des compétences de la CDS a eu pour effet de priver le requérant d’un contrôle assez ample pour s’étendre à l’une des conditions indispensables à la « légalité » de sa détention au sens de l’article 5 § 1 e), à savoir le caractère approprié du lieu de détention.

108. La Cour se penche ensuite sur la procédure devant le juge judiciaire. Elle observe, à la lumière de la jurisprudence citée par le Gouvernement (paragraphe 95), que cette voie s’est avérée utile dans certaines affaires pour investiguer et statuer sur le caractère approprié du lieu d’internement. Elle note qu’en l’espèce également, le juge a examiné in concreto l’encadrement dont bénéficiait le requérant, mais a rejeté sa demande au motif qu’il la considérait mal fondée (paragraphe 28). Or, rien dans le dossier ne montre que, si le juge en référé avait conclu à l’insuffisance des soins, il n’aurait pas pu y remédier. Sans préjuger de l’effectivité de cette voie de recours sous l’angle de la condition de son épuisement prévue par l’article 35 § 1 de la Convention, la Cour estime ne pas disposer de suffisamment d’éléments en l’espèce pour considérer que la procédure en référé n’était pas un recours conforme à l’article 5 § 4 de la Convention.

109. Eu égard à ce qui précède, spécialement aux considérations relatives à la procédure devant le juge des référés (paragraphe 108), la Cour conclut à la non-violation de l’article 5 § 4 de la Convention.

III. SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES

110. Dans ses observations, le requérant se plaint que ses conditions d’internement ont constitué un traitement contraire à l’article 3 de la Convention ainsi libellé :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

111. La Cour constate que le requérant n’étaye pas suffisamment ce grief à l’aide d’éléments concrets relatifs à sa situation individuelle qui expliquent les conséquences des conditions de détention sur son état.

112. Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et doit être rejetée conformément à l’article 35 § 4.

IV. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

113. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

114. Le requérant, se référant à la somme octroyée par la Cour dans l’affaire Morsinck précitée, réclame 5 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu’il aurait subi du fait de sa détention dans un établissement inapproprié.

115. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Cour.

116. La Cour estime que le requérant a subi un préjudice moral certain en raison de son maintien en détention dans un établissement inapproprié. Elle juge donc équitable de faire droit à sa demande et lui alloue 5 000 EUR à titre de réparation du dommage moral.

117. De plus, la Cour est d’avis qu’en l’espèce, le transfert du requérant dans un établissement approprié à ses besoins constitue la manière adéquate de redresser la violation constatée.

B. Frais et dépens

118. Le requérant demande également 738 EUR pour les frais et dépens engagés devant la Cour. Il ventile cette somme de la façon suivante : 498 EUR au titre des frais de traduction de son mémoire et 240 EUR en raison des déplacements de son conseil à la prison. Il produit à l’appui de sa demande la facture afférente aux frais de traduction ainsi qu’une estimation des coûts engendrés par les déplacements.

119. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux.

120. En l’espèce et compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour accorde 498 EUR au titre des frais et dépens et rejette la demande pour le surplus à défaut de justificatif.

C. Intérêts moratoires

121. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare, la requête recevable quant aux griefs tirés de l’article 5 §§ 1 et 4 de la Convention et irrecevable pour le surplus ;

2. Dit, qu’il y a eu violation de l’article 5 § 1 e) de la Convention ;

3. Dit, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention ;

4. Dit,

a) que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention :

i) 5000 EUR (cinq mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii) 498 EUR (quatre cent quatre-vingt dix-huit euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par le requérant, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

5. Rejette, la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 10 janvier 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Claudia WesterdiekMark Villiger
GreffièrePrésident


Synthèse
Formation : Cour (cinquiÈme section)
Numéro d'arrêt : 001-115768
Date de la décision : 10/01/2013
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 5 - Droit à la liberté et à la sûreté (Article 5-1-e - Aliéné);Non-violation de l'article 5 - Droit à la liberté et à la sûreté (Article 5-4 - Contrôle de la légalité de la détention)

Parties
Demandeurs : DUFOORT
Défendeurs : BELGIQUE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SAVEYN C. ; DE WINTER J.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

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