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28/10/2021 | GUINéE | N°10

Guinée | Guinée, Cour suprême, 28 octobre 2021, 10


Texte (pseudonymisé)
COUR SUPREME
CHAMBRE
ADMINISTRATIVE
ARRET N°10
Du 28/10/2021
RG N° 20 du 04/06/2021
AFFAIRE
Monsieur Aa Ac B
CONTRE
Le Secrétariat Général des Affaires Religieuses (SGAR) représenté par l'Agent judiciaire de l'Etat
OBJET Recours en annulation d'une décision pour excès de pouvoir
DECISION
(VOIR DISPOSISIF) REPUBLIQUE DE GUINEE
Travail - Justice — Solidarité
AU NOM DU PEUPLE GUINEEN
Audience du 28 Octobre 2021
LA COUR SUPREME DE LA REPUBLIQUE DE GUINEE ; (Chambre Administrative), séant à Conakry, statuant en ma

tière administrative, en son audience publique et ordinaire du vingt-huit octobre deux mille vingt et un, à l...

COUR SUPREME
CHAMBRE
ADMINISTRATIVE
ARRET N°10
Du 28/10/2021
RG N° 20 du 04/06/2021
AFFAIRE
Monsieur Aa Ac B
CONTRE
Le Secrétariat Général des Affaires Religieuses (SGAR) représenté par l'Agent judiciaire de l'Etat
OBJET Recours en annulation d'une décision pour excès de pouvoir
DECISION
(VOIR DISPOSISIF) REPUBLIQUE DE GUINEE
Travail - Justice — Solidarité
AU NOM DU PEUPLE GUINEEN
Audience du 28 Octobre 2021
LA COUR SUPREME DE LA REPUBLIQUE DE GUINEE ; (Chambre Administrative), séant à Conakry, statuant en matière administrative, en son audience publique et ordinaire du vingt-huit octobre deux mille vingt et un, à laquelle siégeaient :
1 Monsieur Mohamed Aly THIAM, Président de Chambre, Président ;
Monsieur Amadou ‘SAGNANE, Conseiller, Conseiller rapporteur ;
Monsieur Mohamed Bachir FAYE, Conseiller à la Cour Suprême ;
Monsieur Tidiane Cherif HAIDARA, Conseiller, Conseiller à la Cour Suprême ;
Monsieur Mohamed Sidiki ZOUMANIGUI, Conseiller, Conseiller à la Cour Suprême ;
En présence de Monsieur William FERNANDEZ, Avocat Général substituant monsieur le Procureur Général empêché ;
Avec l'assistance de Maître Hadja Ramatoulaye BAH, Greffière en chef à ladite Cour ;
DANS LA CAUSE ENTRE,
Monsieur Aa Ac B, né en 1974 à Kalinko, préfecture de Dinguiraye, professeur de langue Malinké, alphabet N’ko, citoyen guinéen, domicilié au quartier Bordo, commune de Kankan,
Demandeur au pourvoi, ayant pour conseil Maître Salifou BEAVOGUI, Avocat à la Cour,
Et
Le Secrétariat Général des Affaires Religieuses (SGAR),
représenté par l'Agent judiciaire de l'Etat dont le siège se trouve
au quartier Boulbinet, Commune de Kaloum, Conakry,
Défendeur au pourvoi, ayant pour conseil Maître Antoine _ v DE GUINÉE SAGNO Avocat à la Cour.
D'autre part ; DEBATS :
L'affaire, appelée à l'audience du 29 juillet 2021, a été débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 28 octobre 2021.
Advenue cette date, vidant son délibéré, la Cour a rendu l'arrêt suivant :
LA COUR
Statuant sur le recours de monsieur Aa Ac B, en annulation pour excès de pouvoir, contre la décision n° 2020/046/SGAR rendu par le Secrétaire Général des Affaires Religieuses (SGAR) le 30 juillet 2020 ;
Vu la décision administrative attaquée ;
Vu les articles 1, 10, 11, 30 et 31 de la Constitution ;
Vu les articles 2 al 2, 36, 49 à 52, 88 et suivants de la loi organique L/2017/003/AN portant attribution, organisation et fonctionnement de la Cour suprême ;
Vu le Décret n°189/PRG/SGG du 23 août 2918 ;
Après avoir entendu :
7 Le Conseiller Amadou SAGNANE, en son rapport ;
7 Les Conseils des parties en leurs moyens, fins et conclusions ;
L'Avocat Général William _ FERNANDEZ, en ses observations ;
SUR LA FORME :
Considérant que les dispositions de la Loi Organique L/2017/003/AN du 23 Février 2017 prescrivent respectivement que :
Article 2 (alinéa 2) : « La Cour Suprême est juge en premier et dernier ressort de la légalité des textes règlementaires et des actes des autorités exécutives, ainsi que des dispositions de forme législative à caractère réglementaire » ;
Article 36 (alinéa 1) : « La Chambre Administrative connaît en premier et dernier ressort des recours en annulation pour excès de pouvoir, de la légalité des actes des collectivités locales » ;
Article 88 : « Le recours pour excès de pouvoir n’est recevable que contre une décision explicite ou implicite d’une autorité administrative. Le délai pour se pourvoir est de deux mois. Le délai court de la date de publication de la décision attaquée, à moins qu'elle ne doive être notifiée ou signifiée, auquel cas le délai court de la date de la notification ou de la signification. » :
Considérant que la requête contient les indications prévues par la loi organique susvisée : la caution de 30 000 FG est consignée au / Sgreffe, conformément à son article 50, la requête, accompagnée de la copie de la décision administrative, est signifiée à la partie adverse dans les délais et formes prescrits par l’article 51 ;
Que ce recours de Monsieur Aa Ac B, étant exercé dans les formes et conditions de la loi, est donc recevable ;
AU FOND :
Considérant que par requête de Maître Salifou BEAVOGUI, pour le compte de son client Aa Ac B, en date du 22 février 2021, enregistrée au greffe de la cour suprême le 22 février 2021 sous le numéro 281, monsieur Aa Ac B, demande à la Cour Suprême l'annulation de la décision plus haut indiquée ;
Selon ce recours en annulation pour excès de pouvoir, la décision déférée empêcherait son client, Monsieur Ac B, d'exercer son culte religieux comme il l'entend, de faire ses prières en langue malinké au lieu de l’arabe, alors que le principe de laïcité de l’Etat interdit aux autorités exécutives de se mêler de religion ;
Considérant que des pièces du dossier et des débats publics à l'audience, il résulte sommairement que monsieur Aa Ac B, professeur de langue Malinké en N'ko (vocable désignant un alphabet de transcription d'une multitude de langues), est aussi Imam dans son quartier de Bordo et prêche les préceptes et dogmes de l'Islam ;
Considérant que monsieur Aa Ac B exerce son office, en faisant prier et en interprétant les textes coraniques en Malinké, au lieu de les réciter tels qu’ils sont transcrits dans le Livre saint, pendant les cinq prières quotidiennes qu’il dirige dans sa Mosquée ;
Que cet acte a provoqué la polémique, qui l'a exposé à toute sorte de traitements inhumains et dégradants, alors que le Coran, parole de DIEU, est destiné à toute l'humanité, avec pour but de guider les hommes sur le droit chemin et de les éloigner des œuvres de Satan ;
Considérant qu'il déclare que des conseils et des avertissements lui ont été adressés à ce sujet, selon lesquels sa pratique cultuelle est contraire aux préceptes de l’Islam et considérée comme Que celle-ci a provoqué de vives controverses parmi les fidèles musulmans ;
Que c'est suite à son refus persistant d'obtempérer aux rappels qui lui ont été transmis, que le Secrétariat Général des Affaires Religieuses, lui à interdit toute activité religieuse publique ;
Considérant que la décision attaquée dispose : « Article 1° : I! est formellement interdit à monsieur Aa Ac B, d'exercer une activité religieuse publique et de parler au nom de l'Islam sur toute l'étendue du territoire national.
Article2 : Les autorités administratives, les inspections régionales des affaires religieuses, les secrétariats communaux préfectoraux des affaires religieuses, les conseils de Mosquée sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'application de la présente décision » ;
Considérant que le demandeur reproche à cette décision N° 2020/0464/SGAR/CAB/DRH la violation des dispositions constitutionnelles, notamment les articles 1e, 10 et 11 de la Constitution ;
Du moyen unique du demandeur, pris de la violation des dispositions combinées des articles 1e, 10 et 11 de la constitution :
Considérant que ces textes de loi prescrivent respectivement que :
« Article 1% (alinéa 1) : La Guinée est une République indépendante, souveraine, unitaire, laïque, —indivisible, démocratique et sociale. Elle respecte toutes les croyances. » ;
« Article 10 : Tout individu a droit à la liberté d'expression et d'opinion.
Il est libre d'exprimer, de manifester et de diffuser ses idées et opinions par la parole, l'écrit ou l’image, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi, » ;
« Article 11 : L'Etat garantit et protège la liberté de conscience. Il garantit à fous le libre exercice, la profession ou la pratique d’une religion ou d’un culte, sous réserve du respect des conditions prescrites par la loi et dictés par l'ordre public.
Les institutions et communautés religieuses se créent et s’administrent librement dans le respect des principes édictés par l’ordre public » ;
Considérant que monsieur Aa Ac B soutient, sur la base de ces textes fondamentaux, que le Secrétariat général des affaires religieuses, chargé de garantir à tous la libre expression d'opinion et de pratique religieuse selon les convenances personnelles, lui a interdit, par cette décision, toute activité religieuse publique, donc de prier et de prêcher en public ;
Qu'il affirme, d'une part, que le principe de laïcité interdit à l'Etat de se mêler de religion et, d'autre part, qu'un Musulman peut bien prier en une langue autre que l'Arabe, comme le disent des érudits islamologues, parmi lesquels le tunisien Ab A, dont il cite un extrait de l’écrit publié dans la revue Nawaat du 05 février 2005, relatif au Message Divin : « C’est une parole théandrique, entièrement divine en amont. Mais se réfractant dans l’histoire, elle ne peut parvenir aux hommes que si elle leur parle dans leur langue… En aval, parole entièrement humaine, elle est soumise à toutes les approches possibles, philologiques, linguistiques » ;
Qu'ainsi, il termine en disant à la dernière page de son mémoire ampliatif (paragraphe 2) que « Pour Monsieur Ab A, c’est le Coran et non l’Arabe qui est sacré » ;
Moyens du défendeur tendant au rejet du recours :
Considérant que dans sa réplique, le SGAR rejette les prétentions du demandeur, en soutenant avoir agi en toute légalité, sa décision étant prise dans les limites de ses attributions et le souci de sauvegarder l’ordre public ;
Considérant que le défendeur expose trois moyens ;
1- Premier moyen, pris de la compétence du Secrétariat Général des Affaires Religieuses, tirée du Décret n°189/ PRG/SGG du 23 août 2018 :
Considérant qu'aux termes du Décret n°189/PRG /SGG du 23 août 2018, le Secrétariat Général aux Affaires Religieuses est chargé entre autres :
- De promouvoir et vulgariser les principes religieux tirés des livres Saints :
- De veiller au respect des principes religieux ;
- De promouvoir la culture, l'éducation, la formation et l'information conformément aux principes religieux ;
- De promouvoir, contrôler et superviser les activités des associations et ONG religieuses ; )
- De lutter contre les activités à tendance déviationniste.
Considérant que le défendeur réfute les assertions du demandeur et affirme qu'il ne s'agit nullement, dans le cas d'espèce, de la = RÉPUBLIQUE DE GUINÉE ; liberté de s'exprimer dans une langue, mais bien de l'exigence dogmatique d'appliquer une règle essentielle de l'Islam consistant à réciter textuellement des versets ou sourates aucours de la prière ;
Considérant que de l'avis du défendeur, le demandeur confond tout et ne distingue pas l'exercice ou la jouissance de la liberté, de l'accomplissement fidèle d'un devoir ou de l'exécution conforme d’une obligation découlant d’une règle librement acceptée ;
Qu'il soutient que la religion est un ensemble de règles immuables et intangibles, une loi sui generis, dont il faut respecter les commandements ou les prohibitions, selon la maxime bien connue « Dura lex, sed lex » ;
Considérant qu'en décidant d'utiliser la langue malinké au cours de la prière, il viole une règle universelle et essentielle de l'Islam, telle qu’elle est appliquée sur toute la surface de la terre ; Or, il est indiscutable que la liberté de religion, de culte implique le respect des règles ou dogmes de ladite religion ;
Considérant que le défendeur souligne que le demandeur prétend qu'il professe ce qu'il appelle ’djèrè kolo baya” qu'il ne considère pas comme une nouvelle croyance ou religion ;
Qu'il s'ensuit pour lui que le moyen du demandeur n’est pas fondé et mérite d'être rejeté ;
Que le défendeur sollicite que ce moyen illogiquement basé sur la liberté d'expression ou de parler une langue, soit écarté comme inopérant ;
2- Deuxième moyen pris de l’inopérance des dispositions constitutionnelles (articles 1, 10 et 11) :
Considérant que par ce moyen, le défendeur soutient que le concept de laïcité veut dire que l'Etat est neutre vis-à-vis des religions, mais pas des individus ;
Que l’État n'édicte aucune règle religieuse, mais veille au libre exercice du culte qui n'affecte pas l'ordre public, la religion étant encadrée par les principes républicains interdisant de perturber l'ordre public, rompre l'harmonie au sein de la communauté religieuse;
Considérant que le défendeur, en l'occurrence le Secrétariat
général des affaires religieuses, souligne que s'il était dos 13 7
prétentions de monsieur Aa Ac B de créer une nouvelle religion, il serait dans l'exercice ou la jouissance de la liberté de profession d'une religion, d’une pratique nouvelle, mais s'il veut rester musulman, il doit respecter les préceptes et dogmes de cette religion, se mettre en harmonie avec ceux qui en pratiquent fidèlement le culte ;
Mais qu’agir contrairement à ce qui est unanimement admis comme immutable, est prendre le risque de porter atteinte à l'ordre public ;
Considérant que le représentant du Secrétariat général des affaires religieuses soutient qu'adhérer à l’Islam signifie accepter librement son système de dogmes, s'engager à ne pas violer les obligations qui lui sont subséquentes ;
Que parmi ces obligations figure le respect des règles de la prière, deuxième pilier de cette religion. Cette prière s'accomplit selon une règle immuable et des obligations inviolables et se compose de 2, 3 ou 4 rakaats ;
Qu'au cours de chaque rakaat, le fidèle récite deux textes du Coran, invariablement et obligatoirement la ‘’Fathia”’ et un verset d'une sourate ou la sourate entière, au choix ;
Considérant que l'obligation consiste, en la matière, à réciter strictement et fidèlement le texte du Coran, tel qu'il a été révélé ; Qu'il ne s'agit pas de la liberté de parler une langue, mais bien de l'exigence dogmatique de réciter des versets ou sourates ;
D'où l'inopérance de ce moyen ;
3- Troisième moyen tiré des conséquences d’une éventuelle annulation de la décision attaquée :
Considérant que par ce moyen, le défendeur s'inquiète des conséquences, sur l'ordre public et l'harmonie dans la pratique religieuse, d’une éventuelle annulation de la décision attaquée, laissant libre cours à la déperdition, à l'hérésie et au déviationnisme :
Considérant que le défendeur, dans sa réfutation des allégations du demandeur, déclare que l'Islam, comme toute religion, comporte un culte, en tant que manifestation extérieure de l’adoration, consistant invariablement et partout dans le monde, pendant l'acte de prière, à réciter fidèlement, c'est-à-dire sans rien changer, les versets du Coran et non à parler arabe ; réciter avec exactitude un texte étant différent de parler une ngue AD Que cette récitation fidèle du texte coranique tient à la nécessité de
L RÉPUBLIQUE THB AT DE GUINÉE | conserver au long des l'essence siècles, en et la la préservant mystique de de la diminution prière des ou origines, d'ajout ; tout
Que de l'avis du défendeur, il apparaît évident que si chacun priait dans sa langue maternelle ou dans son dialecte, surviendraient des possibilités, au préjudice de la prière islamique, de disparition de beaucoup de choses, notamment en termes de mots ou de concepts ou que certains rites en soient modifiés ou confondus ou altérés par la mauvaise traduction ou par des superstitions non fondées ;
Que subséquemment, la traduction locale, de la nature de celle que propose monsieur B, entraînerait inéluctablement le péril de la cohérence rituelle ;
Considérant que le défendeur, partant du principe que dans toute religion la prière est sacrée, allègue qu'il est compréhensible et logique que le Secrétariat général aux affaires religieuses veuille mettre chacune des religions à l’abri des innovations destructrices, dont les traductions en dialecte ou langue locale seraient la source, en ce qui concerne particulièrement l'Islam ;
Qu'à cet égard, l'obligation fondamentale de neutralité de l'Etat envers toutes les religions, sans distinction, n’a nullement été violée par la décision attaquée ;
Considérant que l'alinéa 1e de l’article 1% de la Constitution proclame la laïcité de la République de Guinée ;
Qu'à cet effet, l'Etat a l'obligation fondamentale de neutralité à l'égard de toutes les religions, sans distinction ;
Considérant que le demandeur ne dit pas en quoi la décision attaquée ne respecte pas l’une quelconque des religions pratiquées dans le pays ou en favorise une au détriment des autres ou viole la neutralité de l'Etat en matière de religion ;
Considérant que la présente affaire ne concerne pas une communauté religieuse, mais la sanction infligée à un individu, en raison de son comportement non conforme aux règles et aux dogmes de la religion : dont il se réclame, par voie de conséquence à l'ordre public ;
Que pour le défendeur cet élément du moyen n’est donc pas fondé et ne peut prospérer ;
OBSERVATIONS DU MINISTERE PUBLIC :
Considérant que dans ses observations, le représentant du Ministère public a fait remarquer que l'islam a pour dogme immuable que la prière consiste à réciter exactement et fidèlement les versets du Coran, sans conséquence, pour celui qui se place devant Allah, de parler ou de comprendre l'arabe ;
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ou à la jouissance d'une quelconque liberté, mais à l'exécution d'un devoir rituélique fixé pour tous les musulmans ;
Que la violation de ce devoir est susceptible d'entraîner d'inutiles tensions au sein de la très large majorité que constitue la communauté des fidèles musulmans ;
Qu'il revient légitimement à l'autorité exécutive de veiller à ce que la pratique individuelle, dans chacune des religions, n'entraîne pas, ni pour la communauté religieuse, ni pour l’unité nationale, des causes ou motifs de rupture de la quiétude ou d'altération du vivre ensemble pacifique, en cette période de propagation de l’extrémisme religieux ;
Considérant qu'il conclut qu'il n'y a pas de violation de la loi, quant à la liberté de religion ou de culte ou de croyance ;
En conséquence de quoi, il a requis : en la forme, déclarer la requête recevable et, au fond, la déclarer mal fondée et de la rejeter purement et simplement.
DISCUSSION :
Considérant que si l’article 10 de la Constitution prescrit que chacun est libre d'exprimer et de diffuser ses idées et opinions, il en fixe des limites en ajoutant en fin de phrase : « sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi » ;
Que l’article 11 précise aussi que l'Etat « garantit à tous le libre exercice, la profession ou la pratique d’une religion ou d'un culte, sous réserve du respect des conditions prescrites par la loi et dictées par l'ordre public » ;
Considérant qu'en garantissant la liberté d'expression, d'opinion et de culte, la Constitution restreint la prérogative de l'Etat d'influencer le choix confessionnel des citoyens et le libre exercice du culte ;
Que cependant elle a créé à la charge de l'Etat, par l'organe du
Secrétariat promouvoir les Général religions aux et vulgariser Affaires Religieuses, les principes de l'obligation la noté 6 de 10
culte et en garantir la pratique conformément à leurs livres saints et à leurs usages communément répandus ;
DE UBLIQUE GUINÉE: | à Considérant que ne viole pas les dispositions combinées des articles 1, 10 et 11 de la Constitution, l'autorité administrative qui décide de suspendre de toutes activités religieuses publiques et d'interdire de parler, sur l'étendue du territoire nationale, au nom d'une religion, tout ministre du culte qui en viole les principes et dogmes, par convenances personnelles ;
Considérant que nulle part et à aucun moment, Monsieur Aa Ac B ne prétend, ni ne soutient qu’il crée une nouvelle religion, une nouvelle croyance différente de l'Islam ;
Qu'il ne parle pas d'un culte nouveau, différent de l'islam ; car alors il serait en droit de se prévaloir qu'il exerce une liberté de croyance, de culte ou de profession foi, mais, il se prévaut de pratiquer l'Islam, une religion plus que millénaire, ayant son système de dogmes, de pratiques rituelles ;
Considérant qu'aucune langue au monde ne peut prétendre qu'elle est sacrée ; mais que dans chaque religion, ce sont les livres révélés, contenant les saintes écritures, qui sont sacrés ;
Qu'il s’agit, dans la présente affaire, non de l'obligation de parler arabe ou une quelconque langue, mais de l'obligation pour le musulman de réciter fidèlement, pendant la courte période de prière, les versets du Coran ;
Considérant que la prétention de Monsieur Aa Ac B de pratiquer le ‘’djèrè kolo baya”, une voie de traduction et d'interprétation du Coran en malinké, serait légitime si cette pratique n'altérait pas le rite dogmatique de la prière Islamique ;
Considérant que sur la base de l’affimation du Conseil de monsieur B, selon laquelle c'est le Coran qui est sacré et non la langue Arabe, il convient de noter que ce qui est sacré appartient à l’inviolable, l’intangible et fait l'objet d'une vénération religieuse et d'interdits, par opposition à ce qui est profane ;
Considérant que l'adoption de la récitation des versets en arabe par l'ensemble des communautés multiethniques et multiraciales des musulmans est un facteur d'unité, comme l’est la langue officielle d'un pays ;
Que le Secrétariat Général aux Affaires Religieuses est alors en droit d’inférer qu’en effectuant la prière en langue malinké,
Monsieur Ac B tend à l’ethnisation de sta 267 11
Qu'une telle tendance donne droit à l'autorité chargée des Affaires religieuses d'opposer une mesure prohibitive et préventive, conformément à l'alinéa 2 de l’article 31 de la Constitution ;
Considérant que de tout ce qui précède, les moyens invoqués par
RÉPUBLIQUE DE GUINÉE , toutes le annulation Secrétaire demandeur les activités général de n'étant la Décision des religieuses, pas Affaires fondés, n° en Religieuses 2020/0464/ il date y a lieu du 30 de portant SGAR/CAB/DRH juillet rejeter 2020 suspension le recours ; en de du
Que le demandeur ayant succombé, la caution de 30 000 FG est à confisquer au profit du trésor public et les frais et dépens sont également à mettre à sa charge en application des articles 50 (alinéa 2) et 62 (alinéa dernier) de la loi relative à la Cour Suprême ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier ressort, et sur recours en annulation d'une décision administrative pour excès de pouvoir ;
EN LA FORME :
Déclare monsieur Aa Ac B recevable en son recours contre la décision n° 2020/0464/SGAR/CAB /DRH du 30 juillet 2020 du Secrétariat Général de Affaires Religieuses ;
Less ‘ L Li "A Le déclare mal fondé en ce recours et le rejette ;
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\ ee” à ( N° a les frais de l'instance à la charge du demandeur par application À 2 S » de l'article 62, alinéa dernier, de la loi relative à la cour suprême ;
Dit que le présent arrêt sera publié au bulletin de la cour suprême ;
fdonne sa transcription sur les registres à ce destinés.
/ Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour Suprême (Chambre Administrative) les jour, mois et an que dessus.” +
Greffière Et ont signé, le NF Président, le 7


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10
Date de la décision : 28/10/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;gn;cour.supreme;arret;2021-10-28;10 ?
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