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22/02/2007 | NIGER | N°07-044

Niger | Niger, Cour suprême, Chambre judiciaire, 22 février 2007, 07-044


Texte (pseudonymisé)
REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Judiciaire

La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires coutumières en son audience publique ordinaire du jeudi vingt deux février deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE :
Ad Af, cultivateur demeurant à Affala (Zabarma-Tahoua), assisté de Maître Abdou Yahaya, avocat à la Cour Niamey ;
D'une part

ET :
Héritiers Ad Aa, représentés par Ac Ad, cultivateur demeurant à Tahoua ;
D'autre part
Après lecture

du rapport de Monsieur Adamou Amadou, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Gén...

REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Judiciaire

La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires coutumières en son audience publique ordinaire du jeudi vingt deux février deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE :
Ad Af, cultivateur demeurant à Affala (Zabarma-Tahoua), assisté de Maître Abdou Yahaya, avocat à la Cour Niamey ;
D'une part

ET :
Héritiers Ad Aa, représentés par Ac Ad, cultivateur demeurant à Tahoua ;
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Adamou Amadou, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Statuant sur le pourvoi en cassation déposé au greffe du Tribunal de Tahoua suivant acte du 18 avril 2005 par Monsieur Ad Af contre le jugement n° 16 du 15 avril 2005 du Tribunal Régional de Tahoua, statuant en matière coutumière et en cause d'appel en ces termes:
-Reçoit Ac Ad, représentant des héritiers Ad Aa en son appel régulier en la forme;
-Au fond, infirme le jugement attaqué; dit et juge que le champ litigieux reste et demeure la propriété des héritiers Ad Aa;
-Dit n'y avoir pas lieu aux dépens;
-Avis de pourvoi (un mois);

Vu la loi 2000-10 du 14 août 2000 sur la Cour Suprême;
Vu la loi 2004-50 du 22 juillet 2004;
Vu la loi 63-18 du 22 février 1963;
Vu l'acte de pourvoi;
Vu les mémoires produits par les parties;
Vu les conclusions du Procureur Général;

EN LA FORME
Attendu que le pourvoi est intervenu dans les forme et délai prévus par la loi; qu'il y a lieu de le déclarer recevable;

AU FOND
Attendu que le requérant soulève un moyen unique, tiré de la violation des articles 2 alinéa 2 de la loi n° 2004-50, 23 et suivants de la loi n° 63-18 du 22-02-1963 pour absence de motifs et manque de base légale, en ce que le juge d'appel a:
Déclaré recevable la décision du premier juge (1ère branche);
Méconnu les conséquences ou l'issue du procès au cas où une partie dont le serment est déféré refuse de le prêter (2ème branche);

Sur la première branche du moyen;

Attendu que le demandeur au pourvoi soutient que la décision frappée d'appel est le jugement n° 05 du 10 avril 2003 dont l'expédition date du 16 mai 2003; que l'appel interjeté par les héritiers Ad Aa datant du 4 février 2005, le recours doit être déclaré irrecevable pour forclusion de délai; qu'en déclarant cet appel recevable, le juge d'appel a violé la loi notamment les articles 23 et suivants de la loi 63-18 du 22 février 1963;
Attendu qu'il y a lieu de clarifier que la décision du premier juge date du 3 février 2005, en témoignent le numéro du rôle (n° 038/05) porté sur l'expédition du jugement, la feuille d'audience et la chemise du dossier; qu'une erreur de frappe s'est certainement glissée sur le chapeau du premier jugement, consistant à porter le numéro et la date d'un jugement ADD du 10 avril 2003 relatif à la même affaire aux lieu et place de l'audience du 3 février 2005; que le jugement dont pourvoi précisait lui-même que les héritiers Ad Aa ont interjeté appel le 4 février 2005 du «jugement n° 06 rendu le 3 février 2005, par le magistrat susvisé»;
Qu'en déclarant l'appel recevable, le juge d'appel n'a violé aucune disposition légale;
Que cette première branche du moyen mérite d'être écartée, car non fondée;

Sur la deuxième branche du moyen;

Attendu que pour le demandeur au pourvoi, les héritiers Ad Aa représentés par Ac Ad ont refusé de prêter serment coranique devant le premier juge lequel a apprécié les conséquences dudit refus en lui attribuant le champ litigieux; que devant la juridiction d'appel, leur représentant a également refusé de prêter serment coranique et a refusé non plus de le déférer à la partie adverse; que selon le requérant, devant cette impasse, le juge d'appel n'a eu pour fâcheuse solution que d'infirmer le jugement attaqué au motif que l'intimé «n'a pu à l'audience convaincre la religion du Tribunal par des preuves suffisantes»; que se référant à

la jurisprudence de la Cour (Arrêt n° 96-67/C du 26-12-1996), il soutient contrairement aux motivations du juge d'appel que les héritiers Ad Aa devaient succomber pour n'avoir ni accepté de prêter serment, ni accepté de le lui déférer; que pareils comportements de leur part ajoute le requérant constituent un aveu qui doit d'office leur faire perdre le procès;
Attendu que les défendeurs quant à eux, après avoir fait la genèse du litige, concluent au rejet du pourvoi; qu'ils affirment ne s'être jamais opposés à la prestation du serment coranique aussi bien devant le premier juge que devant la juridiction d'appel; que c'est plutôt leur adversaire Ad Af qui refusait de les leur déférer; que de même le Ab de Tahoua s'opposait à leur prestation de serment aux motifs que c'est aux témoins de Ad Af de le faire;
Attendu que des différentes thèses exposées par les parties, il y a lieu de retenir cette évidence; que le premier juge, grâce au consentement de toutes les parties envoyait celles-ci le 8 avril 2004 devant l'autorité religieuse de Ae pour la cérémonie de prestation de serment coranique; que le juge adressait un message écrit au Ab en ces termes: «dans le cadre du présent litige champêtre, Ac Ad doit prêter le serment dont la teneur suit: «je jure que le champ objet du litige appartient à mon père»; que le papier fut retourné au juge de paix sans que ce serment ne soit prêté par le représentant des héritiers Ad Aa; que le premier juge, tirant les conséquences d'untel refus de prestation de serment, attribue le champ litigieux au demandeur au pourvoi, à savoir Ad Af; que le refus de prestation de serment quoique contesté par les défendeurs, est confirmé par le juge d'appel qui s'exprimait en ces termes: «Attendu en plus que les appelants ont certes accepté à un moment devant le premier juge, de jurer sur le Coran pour prouver la véracité de leur droit de propriété sur le champ litigieux, mais qu'une fois arrivés devant le marabout ministre du culte, ils se sont désistés.»;
Attendu que le juge d'appel, qui est tenu d'apprécier les conséquences d'untel refus, demande paradoxalement au déférant (du serment) de convaincre la religion du Tribunal par des preuves suffisantes, sans inquiéter outre mesure la partie adverse;
Attendu que les conséquences du désistement volontaire d'un serment consacrées par la jurisprudence de la Cour, doivent être connues du juge et de toutes les parties, comme une sorte d'aveu qui fait succomber la partie dont le serment est déféré;
Qu'en se détournant des conséquences dudit désistement tout en cherchant des preuves ailleurs, en affirmant que le désistement de Ac Ad est légitime et ne constitue pas un aveu de l'inexistence du droit sur la terre réclamée, le juge d'appel n'a pas légalement apprécié les faits de la cause; qu'il y a donc lieu de déclarer cette deuxième branche de moyen fondée;

PAR CES MOTIFS

Déclare le pourvoi recevable;

Casse et annule le jugement n° 16 du 15 avril 2005 du Tribunal Régional de Tahoua;

Renvoie la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée;

Dit qu'il n'y a pas lieu aux dépens;

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.

ARRÊT N° 07-044/C
Du 22 février 2007

MATIERE : Coutumière

DEMANDEUR :
Ad Af
Me Abdou Yahaya

A :
Héritiers Ad Aa

B :
Dillé Rabo
Président
Issaka Dan Déla ; Adamou Amadou
Conseillers
Ali Karmazi ; Mounkaila Dallou
Assesseurs
Abdou Aouta Aminou
Ministère Public
Me Gado Fati Founou
Greffier

RAPPORTEUR
Adamou Amadou


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 07-044
Date de la décision : 22/02/2007
Coutumière

Parties
Demandeurs : Salifou Illiassou Me Abdou Yahaya
Défendeurs : Héritiers Salifou Issa

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ne;cour.supreme;arret;2007-02-22;07.044 ?
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