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03/05/2012 | BELGIQUE | N°C.11.0340.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 mai 2012, C.11.0340.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.11.0340.N

H. D. M.,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. I. V.,

2. J. D.,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 24 janvier 2011par la cour d'appel de Gand.

Le conseiller Eric Stassijns a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les te

rmes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 1184, 1709 et 1741 du Code civil ;

- article 20, 1DEG, de la loi hypotheca...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.11.0340.N

H. D. M.,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. I. V.,

2. J. D.,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 24 janvier 2011par la cour d'appel de Gand.

Le conseiller Eric Stassijns a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 1184, 1709 et 1741 du Code civil ;

- article 20, 1DEG, de la loi hypothecaire, qui constitue le livre 3,titre XVIII du Code civil.

Decisions et motifs critiques

Le juge d'appel a declare l'appel des defendeurs recevable et fonde et adecide que la creance qui a trait à l'indemnite d'occupation pourl'occupation du bien immeuble depuis le 1er septembre 2005, date de laresolution, au 9 decembre 2005, est privilegiee en vertu de l'article 20,1DEG, de la loi hypothecaire et ordonne sur cette base, la reprise aupassif privilegie de la societe privee à responsabilite limitee faillieRyckaert-Neyt des sommes de 1.150,05 euros et 13.175,00 euros sur la basedes considerations suivantes :

« IV. DISCUSSION

Le moyen relatif à l'article 20, 1DEG, de la loi hypothecaire concernantl'indemnite d'occupation du 16 septembre 2005 au 9 decembre 2005.

8. La cour d'appel doit trancher la question de savoir si l'indemnited'occupation accordee et confisquee apres la resolution judiciaire du bailcommercial concerne ou non l'execution du bail au sens de l'article 20,1DEG, alinea 4, in fine, de la loi hypothecaire.

Une reponse à cette question requiert un raisonnement strict. Il est,ainsi, constate que le 31 aout 2005 le juge de paix avait resolu le bailcommercial et que, consecutivement, il n'etait donc plus question d'unbail. Une indemnite d'occupation pourrait etre totalement etrangere aubail et ne pas relever de `l'execution de la convention'. Par ce motif,l'indemnite d'occupation ne ressortirait pas au privilege de l'article 20,1DEG, de la loi hypothecaire.

Un argument en faveur de ce raisonnement strict pourrait etre deduit del'alinea 4 de l'article 20, 1DEG, de la loi hypothecaire qui reprend dansune seule phrase les termes `reparations locatives' et `tout ce quiconcerne `l'execution du bail'. Les seuls termes « indemnited'occupation » indiqueraient qu'il n'est plus question d'un bail.

9. La cour d'appel ne suit, toutefois, pas cette argumentation, pour lesraisons suivantes.

Le louage de choses est un contrat par lequel l'une des parties s'obligeà faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps et moyennantun certain prix que le locataire s'oblige de lui payer (article 1708 -lire 1709 - du Code civil). Le bail commercial est une forme speciale delouage d'un bien immobilier. Une des obligations du locataire d'un bien,quelle que soit la nature du bail, est de restituer le bien au bailleurapres un certain temps. La restitution du bien loue releve de la bonneexecution du bail.

Lors de la resolution du bail commercial, une indemnite d'occupation estaccordee afin d'eviter que le preneur ne rende pas (immediatement) le bienet que le bailleur, d'une part, ne dispose pas de son bien et, d'autrepart, ne beneficie plus de revenus issus du bail (commercial), des lorsque ce bail a pris fin. L'indemnite d'occupation revet, des lors, lecaractere d'une indemnite compensatoire lors de la fin du bail, ensuite dela mauvaise execution du bail par le preneur et du defaut de remplir sesengagements sur la base du bail et de sa resolution. Non seulementl'indemnite d'occupation presente un aspect de dedommagement, mais ellepresente aussi un element imperatif des lors qu'elle est souventsuperieure à ce qui est prevu par le contrat de bail afin d'exercer unecertaine contrainte pour que le bien soit restitue dans son integralite.

L'indemnite d'occupation constitue, ainsi, un aspect de l'execution dubail au sens de l'article 20, 1DEG, alinea 4, de la loi hypothecaire.

Il peut etre ajoute de maniere plus generale à ce qui precede quel'indemnite d'occupation decoule d'une presence sur les lieux, qui estinitialement fondee sur le bail. Dans le cas d'une indemnite pour un usageou une occupation precaire, il n'y a jamais eu de bail et une indemnitepour une simple occupation ne peut, des lors, jamais etre specialementprivilegiee.

Le privilege d'un bailleur non paye garantit toutes les creances que lebailleur peut introduire contre le preneur en vertu du bail en raison deson inexecution.

De toute fac,on, jusqu'à la faillite, seule l'indemnite d'occupationexistait et il n'etait pas encore question d'un concours avec lescreanciers de la societe privee à responsabilite limitee Ryckaert-Neyt.Aucun argument ne peut, des lors, etre puise dans les droits respectifsdes creanciers.

10. Ce qui precede vaut a fortiori pour l'indemnite accordee par le jugede paix du chef du retard dans l'evacuation, entre le 1er et le 15septembre 2005.

Le jugement entrepris est reforme en ce sens ».

Griefs

Conformement à l'article 20, 1DEG, de la loi hypothecaire, les loyers desimmeubles sont des creances privilegiees sur tout ce qui garnit la maisonlouee. Le meme privilege a lieu pour les reparations locatives et pourtout ce qui concerne l'execution du bail. Il decoule de cette dispositionlegale que la creance garantie est la creance qui tend au paiement desloyers dus en vertu d'un bail d'un immeuble. Aux termes de l'article 1709du Code civil, le louage de choses est un contrat par lequel l'une desparties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certaintemps et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer. Ils'ensuit que le loyer est le prix que doit le preneur au bailleur enexecution du bail. Conformement à l'article 1741 du Code civil, qui estune application speciale de l'article 1184 du Code civil, le contrat delouage se resout par le defaut respectif du bailleur et du preneur, deremplir leurs engagements. Une telle resolution met fin au bail.

Le juge d'appel a constate que la demande des defendeurs a trait à uneindemnite d'occupation qui etait accordee par le juge de paix par jourapres la resolution judiciaire d'un bail commercial jusqu'à la date de ladeclaration en faillite de la societe-debitrice, soit la societe privee àresponsabilite limitee Ryckaert-Neyt. Une indemnite d'occupation neconstitue, toutefois, pas un loyer au sens des articles 1709 du Code civilet 20, 1DEG, de la loi hypothecaire, une telle indemnite d'occupationn'etant pas due en vertu du bail et n'etant, des lors, pas de naturecontractuelle mais extra-contractuelle. Dans la mesure ou le juge d'appelconsidere que l'indemnite d'occupation constitue un aspect de l'executiondu bail, il meconnait les effets juridiques de la resolution du bail,conformement aux articles 1741 et 1184 du Code civil (violation desarticles 1741 et 1184 du Code civil et 20, 1DEG, alinea 4, de la loihypothecaire). En considerant, en outre, que la demande tendant aupaiement de l'indemnite d'occupation pour la periode posterieure à laresolution du bail est privilegiee en vertu de l'article 20, 1DEG, de laloi hypothecaire, il accorde une portee à cette disposition legalequ'elle n'a pas, des lors que ce privilege n'a lieu qu'en garantie de cequi est du en execution du bail (violation des articles 20, 1DEG, de laloi hypothecaire et 1709 du Code civil).

III. La decision de la Cour

1. L'article 20, 1DEG, alinea 1er, de la loi hypothecaire dispose que lesloyers et fermages des immeubles sont des creances privilegiees sur lesfruits de la recolte de l'annee, et sur le prix de tout ce qui garnit lamaison louee ou la ferme, et de tout ce qui sert à l'exploitation de laferme.

L'alinea 4 de cet article dispose que le meme privilege a lieu pour lesreparations locatives et pour tout ce qui concerne l'execution du bail.

L'article 1741 du Code civil dispose que le contrat de louage se resoutpar le defaut du preneur de remplir ses engagements.

L'article 1760 du Code civil dispose qu'en cas de resiliation par la fautedu locataire, celui-ci est tenu de payer le prix du bail pendant le tempsnecessaire à la relocation, sans prejudice des dommages et interets quiont pu resulter de l'abus.

2. Le juge qui ordonne la resolution du bail à charge du locataire peutcondamner celui-ci, à titre de dedommagement, au paiement d'une indemnited'occupation pour la periode entre la date à laquelle le bail a eteresolu et la date à laquelle le bien locatif a ete evacue. Cetteindemnite d'occupation constitue un dedommagement de l'inexecution par lelocataire de ses obligations.

La creance du bailleur resultant de l'indemnite d'occupation nait dudefaut du preneur de remplir ses engagements lors de l'execution du bailet est, en vertu de l'article 20, 1DEG, alinea 4, de la loi hypothecaire,privilegiee.

En supposant le contraire, le moyen manque en droit.

3. Les autres dispositions legales indiquees comme etant violees sontentierement deduites de la violation vainement invoquee de l'article 20,1DEG, de la loi hypothecaire et sont, des lors, irrecevables.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux depens.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Eric Dirix, le conseiller EricStassijns, le president de section Albert Fettweis, les conseillersBeatrijs Deconinck et Geert Jocque, et prononce en audience publique dutrois mai deux mille douze par le president de section Eric Dirix, enpresence de l'avocat general delegue Andre Van Ingelgem, avec l'assistancedu greffier Frank Adriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Didier Batsele ettranscrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

Le greffier, Le conseiller,

3 mai 2012 C.11.0340.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.11.0340.N
Date de la décision : 03/05/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 01/11/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-05-03;c.11.0340.n ?
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