La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/01/2014 | BELGIQUE | N°C.12.0359.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 janvier 2014, C.12.0359.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

424



NDEG C.12.0359.F

1. R. I. A.-W. et

2. H. J.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

eTAT BELGE, represente par le secretaire d'etat à l'Asile et laMigration, à l'Integration sociale et à la Lutte contre la pauvrete,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de Waterloo, 115,

defendeur en cassation,
r>represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatr...

Cour de cassation de Belgique

Arret

424

NDEG C.12.0359.F

1. R. I. A.-W. et

2. H. J.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

eTAT BELGE, represente par le secretaire d'etat à l'Asile et laMigration, à l'Integration sociale et à la Lutte contre la pauvrete,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de Waterloo, 115,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 16 fevrier 2012par la cour d'appel de Mons, statuant comme juridiction de renvoi ensuitede l'arret de la Cour du 30 novembre 2007.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demandeurs presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil ;

- articles 23, 24, 26, 28, 584, alinea 1er, 1039, alinea 1er, 1385bis,1385quater, 1395, 1494 et 1498 du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

Reformant le jugement entrepris, l'arret attaque declare fondeel'opposition du defendeur au commandement de payer les astreintes dontetait assortie sa condamnation contenue dans l'ordonnance du juge desreferes du 25 novembre 2004, partant, declare de nul effet le commandementde payer signifie par les demandeurs et ordonne la mainlevee de lasaisie-execution mobiliere pratiquee par eux.

L'arret attaque en dispose ainsi apres avoir, sur la base des motifssuivants, decide que le defendeur a correctement execute la condamnationprononcee à sa charge par l'ordonnance de refere en adressant aubourgmestre de ... sa lettre datee du 17 decembre 2004 donnantinstruction de delivrer un certificat d'inscription au registre desetrangers pour une periode de trois mois prorogeable :

« Que [le defendeur] fait grief au premier juge de ne pas avoir faitdroit à sa demande ;

Que le titre executoire est constitue par une ordonnance rendue le

25 novembre 2004 par le juge des referes du tribunal de premiere instancede Bruxelles, laquelle ordonnance a ete signifiee le 10 decembre 2004 [audefendeur] ;

Qu'en vertu de l'ordonnance precitee, [le defendeur] a ete condamne àdonner, dans les huit jours de la signification de ladite ordonnance, àl'administration communale du lieu de residence des [demandeurs], lesinstructions visant à les inscrire, à titre provisoire dans l'attente dela decision du Conseil d'Etat sur la requete en annulation introduite pareux, sur le registre des etrangers conformement à la decision de l'Officedes etrangers du 25 fevrier 2004 et à leur delivrer les documentsnecessaires à leur sejour durant cette meme periode ;

Que [le defendeur] a adresse au bourgmestre de ... une lettre datee du 17decembre 2004 et redigee comme suit :

`Par la presente, apres retrait de l'ordre de quitter le territoire, jevous prie de delivrer un titre de sejour limite aux personnes preciteessuite à la decision de l'ordonnance du 25 novembre 2004 emanant dutribunal de premiere instance de Bruxelles telle que signifiee en date du13 decembre 2004 par la delivrance d'un certificat d'inscription auregistre des etrangers pour une periode de trois mois sous reserve de toutdroit. Ce certificat d'inscription au registre des etrangers (CIRE)portera la mention suivante : « sejour temporaire ». Sa prorogation serasubordonnee à l'accord prealable de mes services' ;

Que, comme le premier juge l'a à juste titre fait observer, le titreexecutoire n'a pas impose [au defendeur] de prendre une decisionadministrative individuelle ;

Que [le defendeur] a, en effet, ete uniquement condamne à donner desinstructions à l'administration communale territorialement competente ;

Que ces instructions devaient avoir un double objet :

1. inscrire les [demandeurs] dans le registre des etrangers, conformementà une decision de l'Office des etrangers du 25 fevrier 2004 et ce, àtitre provisoire, dans l'attente de la decision du Conseil d'etat surle recours en annulation forme par ceux-ci ;

2. delivrer aux [demandeurs] les documents necessaires à leur sejourdurant cette meme periode ;

Qu'en vertu de l'article 1385quinquies du Code judiciaire, c'est au jugequi a ordonne l'astreinte qu'il appartient d'eventuellement en prononcerla suppression, la suspension ou la reduction et d'apprecier, dans cecontexte, l'impossibilite, definitive ou temporaire, totale ou partielle,pour le condamne, de satisfaire à la condamnation principale ;

Qu'en vertu de l'article 1498, alinea 1er, du meme code, le juge dessaisies connait toutefois des difficultes d'execution ;

Qu'il appartient des lors au juge des saisies, d'une part, d'examinerl'exacte portee du titre executoire et, d'autre part, d'en verifierl'actualite et l'efficacite ;

Que le courrier precite [du defendeur], date du 17 decembre 2004, contientune erreur materielle, laquelle n'a toutefois aucune incidence sur lasolution du litige ;

Qu'en effet, le titre executoire a ete signifie [au defendeur] le 10 etnon le 13 decembre 2004 ;

Que l'obligation imposee [au defendeur] par le titre executoire etaitlimitee dans le temps ;

Que cette limitation dans le temps n'etait toutefois pas determinable ;

Qu'il n'etait, en effet, pas possible de connaitre, à l'avance, la dateexacte à laquelle le Conseil d'etat rendrait son arret sur le recours enannulation forme par les [demandeurs] ;

Que [le defendeur], dans sa lettre precitee, a donne à l'autoritecommunale des instructions valables pendant trois mois et a envisageexpressement leur prorogation ;

Qu'en l'espece, la periode litigieuse est inferieure à trois mois, deslors que le titre executoire et le commandement de payer litigieux ont eterespectivement signifies le 10 decembre 2004 et le 26 janvier 2005 ;

Que le montant total des astreintes s'eleve d'ailleurs à la somme de13.000 euros, laquelle correspond à 26 jours ;

Que, dans le dispositif de l'ordonnance de refere du 25 novembre 2004, iln'est question que du sejour ;

Qu'il n'y est fait aucune mention de l'ouverture d'un droit à l'eventuelexercice d'une quelconque activite professionnelle ;

Que la cour d'appel fait siens les motifs de l'arret rendu par le Conseild'Etat le 26 juillet 2005 et relatifs au rejet du premier moyen soulevepar les [demandeurs] à l'appui de leur recours en annulation ;

Que le dossier administratif relatif à ce recours ne contenait aucunedecision de l'Office des etrangers qui aurait ete prise le 25 fevrier2004 ;

Qu'il n'est pas allegue par les [demandeurs] que ce dossier administratifaurait ete incomplet ;

Que, partant, la lettre [du defendeur] du 3 mars 2004 adressee audepute-bourgmestre P. M. fournissait à son destinataire un renseignementerrone en ce qu'il revelait l'existence d'une decision du 25 fevrier2004 ;

Que la lettre precitee du 3 mars 2004 ne contenait aucun acteadministratif createur de droits et avait pour unique objet de repondre àune demande de renseignement adressee par un mandataire politique auministre de l'Interieur ;

Que le renseignement errone contenu dans cette lettre a d'ailleurs eterectifie dans une lettre subsequente du 18 mars 2004 ;

Que, certes, les motifs de l'arret precite du 26 juillet 2005 sontcontredits par les motifs d'un arret anterieur, rendu le 2 juin 2004 parle Conseil d'etat ;

Qu'en rendant cet autre arret, le Conseil d'etat a toutefois statue auprovisoire ;

Que l'arret precite du 2 juin 2004 est, en effet, relatif à un recours ensuspension ;

Que les mots `conformement à la decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004' figurant dans le dispositif de l'ordonnance de refere du

25 novembre 2004 sont depourvus de signification des lors qu'il est ainsifait reference à une decision inexistante ;

Qu'il suit des considerations qui precedent que [le defendeur] acorrectement execute la condamnation prononcee à sa charge en adressantau bourgmestre de ... sa lettre datee du 17 decembre 2004 ;

Qu'il s'impose des lors de reformer le jugement entrepris ».

Griefs

1. Il est etabli que le juge des referes a statue dans le but d'amenagerprovisoirement la situation de sejour des demandeurs à la suite de ladecision du Conseil d'etat de suspendre les effets des decisions du 28avril 2004 de l'Office des etrangers refusant le sejour demande par lesdemandeurs sur la base de l'article 9, alinea 3 ancien, de la loi du 15decembre 1980 et leur ordonnant de quitter le pays, et ce, en attendantque le Conseil d'etat se prononce sur les demandes en annulationintroduites contre ces memes decisions.

Il est egalement etabli qu'à l'origine de ces procedures devant leConseil d'etat se trouvait un litige quant à l'existence d'une decisiondu

25 fevrier 2004 par laquelle l'Office des etrangers aurait bien fait droità ladite demande d'autorisation de sejour de plus de trois mois que lesdemandeurs avaient introduite sur la base de l'article 9, alinea 3 ancien,de la loi du

15 decembre 1980 (et dont il est egalement question à l'article 12 de lameme loi).

Il est enfin egalement incontestable que les parties ont debattu devant lejuge des referes de l'importance du sejour demande pour pouvoir travailleren Belgique et, de la sorte, subvenir à leurs besoins.

2. Dans les motifs precedant le dispositif de l'ordonnance du

25 novembre 2004, le juge des referes decide, sur la base d'une analyse del'arret de suspension du Conseil d'etat du 2 juin 2004, qu'il y a lieu deconsiderer prima facie que la decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004 existe et que, à la suite de l'arret de suspension duConseil d'etat, les demandeurs paraissent pouvoir se prevaloir del'autorisation au sejour qui leur a ete accordee par ladite decision et,partant, « sur la base de celle-ci, solliciter, conformement à l'article12 de la loi du 15 decembre 1980, que des instructions soient donnees parl'Etat belge pour qu'ils soient inscrits au registre des etrangers de lacommune de leur lieu de residence ».

Dans le dispositif de son ordonnance du 25 novembre 2004, le juge desreferes a des lors condamne le defendeur « à donner, dans les huit joursde la signification de cette ordonnance, à l'administration communale dulieu de residence des parties demanderesses, les instructions visant àles inscrire, à titre provisoire dans l'attente de la decision du Conseild'etat sur la requete en annulation introduite par eux, sur le registredes etrangers conformement à la decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004 et à leur delivrer les documents necessaires à leur sejourdurant cette meme periode ».

3. Il n'est pas conteste qu'à la suite de cette ordonnance du

25 novembre 2004, le defendeur n'a pas donne instruction à la commune de... de delivrer un permis de sejour de plus de trois mois en attendantl'arret du Conseil d'etat dans la procedure en annulation mais seulementde delivrer un certificat d'inscription au registre des etrangers pour uneperiode de maximum trois mois, prorogeable avec l'accord prealable del'Office des etrangers.

Neanmoins, l'arret attaque decide que le defendeur « a correctementexecute la condamnation prononcee à sa charge en adressant au bourgmestrede ... sa lettre datee du 17 decembre 2004 » et declare donc fondeel'opposition du defendeur au commandement de payer les astreintes pourinexecution de l'ordonnance que lui avaient signifie les demandeurs.

L'arret attaque en decide ainsi apres avoir considere que « dans ledispositif de l'ordonnance de refere du 25 novembre 2004, il n'estquestion que du sejour » et qu'il n'existe pas de decision de l'Officedes etrangers du 25 fevrier 2004, ainsi que l'a decide le Conseil d'etatdans son arret d'annulation, de sorte que « les mots `conformement àla decision de l'Office des etrangers du 25 fevrier 2004' figurant dansle dispositif de l'ordonnance de refere du 25 novembre 2004 sont depourvusde signification des lors qu'il est ainsi fait reference à une decisioninexistante ».

Premiere branche

1. En vertu des articles 1395 et 1494 du Code judiciaire, le juge dessaisies connait notamment des contestations relatives aux voiesd'execution.

En cas de difficulte d'execution d'une decision prononc,ant une astreinte,il appartient au juge des saisies de determiner, sur la base de l'article1498 du Code judiciaire, si les conditions requises pour l'astreinte sontreunies ou non.

S'il est permis au juge des saisies d'examiner si le titre executoire aconserve son actualite et partant, sa force executoire, il doit evidemmentrespecter l'autorite de la chose jugee qui s'attache à ce titreexecutoire.

2. Aux termes de l'article 23 du Code judiciaire, l'autorite de la chosejugee a lieu à l'egard de ce qui a fait l'objet de la decision.

En vertu de l'article 24 du Code judiciaire, toute decision definitive a,des son prononce, autorite de chose jugee. Aux termes de l'article 26 duCode judiciaire, l'autorite de la chose jugee subsiste tant que ladecision n'a pas ete infirmee.

En vertu de l'article 584, alinea 1er, du Code judiciaire, le president dutribunal de premiere instance statue au provisoire dans les cas dont ilreconnait l'urgence, en toutes matieres, sauf celles que la loi soustraitau pouvoir judiciaire.

L'article 1039, alinea 1er, du Code judiciaire, dispose que lesordonnances sur refere ne portent pas prejudice au principal.

S'il ressort de ces dispositions que, des que le juge du fond a rendu unedecision contraire relative aux droits contestes, la decision de refereperd de plein droit son effet, il en ressort egalement que la decision dujuge des referes produit son effet jusqu'à la decision contraire du jugedu fond et sans que cette derniere decision ait un effet retroactif sur ladecision de refere.

3. Il s'ensuit que, lorsque l'ordonnance de refere condamne une partie àfaire quelque chose en attendant la decision du juge du fond, et ce, souspeine d'astreinte, le non-respect de cette ordonnance donne en principelieu au paiement de l'astreinte.

En vertu de l'article 1385bis du Code judiciaire, l'astreinte est unesanction infligee à la partie qui ne satisfait pas à la condamnationprincipale et elle est encourue par le seul fait du non-respect de ladecision principale.

Elle reste, aux termes de l'article 1385quater du Code judiciaire,integralement acquise à la partie qui a obtenu la condamnation.

4. En l'espece, l'arret attaque decide que le defendeur a satisfait à lacondamnation de l'ordonnance de refere en donnant instruction à lacommune de ... de delivrer un certificat d'inscription au registre desetrangers pour une periode de trois mois prorogeable et qu'il n'a doncpas encouru l'astreinte prevue dans la meme ordonnance.

Toutefois, l'arret attaque en decide ainsi apres avoir considere, sur labase d'une analyse de l'arret d'annulation du Conseil d'etat du 26 juillet2005, que « les mots `conformement à la decision de l'Office desetrangers du 25 fevrier 2004' figurant dans le dispositif de l'ordonnancede refere du

25 novembre 2004 sont depourvus de signification des lors qu'il est ainsifait reference à une decision inexistante ».

C'est pourtant cette decision de l'Office des etrangers du 25 fevrier 2004qui, selon les motifs de l'ordonnance de refere, permettait aux demandeursde solliciter leur inscription au registre des etrangers conformement àl'article 12 de la loi du 15 decembre 1980 sur l'acces au territoire, lesejour, l'etablissement et l'eloignement des etrangers, c'est-à-dire uneinscription sur la base d'un permis de sejour de plus de trois mois viseà l'article 9 ancien de la meme loi.

5. En refusant de donner effet à cet element essentiel de l'ordonnancede refere du 25 novembre 2004 pour le motif qu'il a perdu toutesignification à la suite de ce qu'a decide le Conseil d'etat dans sonarret d'annulation du

26 juillet 2005, l'arret attaque meconnait l'autorite de la chose jugeedont beneficiait l'ordonnance jusqu'à la date de l'arret d'annulation, dememe qu'il meconnait le caractere punitif de l'astreinte dont etaitassortie la condamnation principale contenue dans l'ordonnance.

Partant, l'arret attaque viole les articles 23, 24, 26, 584, alinea 1er,1039, alinea 1er, 1385bis, 1385quater et, pour autant que de besoin, 1395,1494 et 1498 du Code judiciaire.

Seconde branche

1. En vertu des articles 1395 et 1494 du Code judiciaire, le juge dessaisies connait des contestations relatives aux voies d'execution.

En cas de difficulte d'execution d'une decision prononc,ant une astreinte,il appartient au juge des saisies de determiner, sur la base de l'article1498 du Code judiciaire, si les conditions requises pour l'astreinte sontreunies.

Si, à cette occasion, le juge des saisies est appele à interpreter letitre executoire, il ne peut evidemment en modifier l'etendue et doitrespecter la foi due à ce titre. Il doit, à cet egard, interpreter ledispositif du titre à la lumiere des motifs qui le sous-tendent.

2. L'arret attaque decide que le defendeur a satisfait à la condamnationde l'ordonnance de refere en donnant instruction à la commune de ... dedelivrer aux demandeurs un certificat d'inscription au registre desetrangers pour une periode de trois mois prorogeable, de sorte qu'il n'apas encouru l'astreinte prevue à l'ordonnance.

L'arret attaque considere donc que l'ordonnance de refere du

25 novembre 2004 n'imposait pas au defendeur de delivrer aux demandeurs unpermis de sejour de plus de trois mois jusqu'à ce que le Conseil d'etatse prononce dans la procedure en annulation, comme l'avaient soutenu lesdemandeurs, mais qu'elle lui permettait de delivrer un permis de maximumtrois mois prorogeable.

3. L'arret en dispose ainsi apres avoir considere « que les mots`conformement à la decision de l'Office des etrangers du 25 fevrier 2004'figurant dans le dispositif de l'ordonnance de refere du 25 novembre 2004sont depourvus de signification des lors qu'il est ainsi fait reference àune decision inexistante ». Ce faisant, l'arret attaque ampute ledispositif de l'ordonnance d'un element essentiel.

C'est en effet cette decision de l'Office des etrangers du 25 fevrier 2004qui, selon les motifs de l'ordonnance de refere, permettait aux demandeursde solliciter leur inscription au registre des etrangers conformement àl'article 12 de la loi du 15 decembre 1980, c'est-à-dire une inscriptionsur la base d'un permis de sejour de plus de trois mois vise à l'article9 ancien de la meme loi.

En amputant l'ordonnance d'une enonciation pourtant essentielle qu'ellecontient, l'arret attaque meconnait la foi due à cette ordonnance et,partant, viole les articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil. Ce faisant,l'arret modifie en outre le titre executoire, ce qui n'est pas dans lespouvoirs du juge des saisies, et viole des lors egalement les articles1395, 1494 et 1498 du Code judiciaire.

4. L'arret attaque constate egalement « que, dans le dispositif del'ordonnance de refere du 25 novembre 2004, il n'est question que dusejour ».

Pourtant, dans ses motifs, ladite ordonnance decide que les demandeurs« paraissent [...] pouvoir se prevaloir de l'autorisation au sejour quileur a ete accordee par [la decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004] et, partant, sur la base de celle-ci, solliciter,conformement à l'article 12 de la loi du 15 decembre 1980, que desinstructions soient donnees par [le defendeur] pour qu'ils soient inscritsau registre des etrangers de la commune de leur lieu de residence ».

L'article 12 de la loi du 15 decembre 1980 sur l'acces au territoire, lesejour, l'etablissement et l'eloignement des etrangers dispose que« l'etranger admis ou autorise à sejourner plus de trois mois dans leroyaume est inscrit au registre des etrangers par l'administrationcommunale du lieu de sa residence ». La reference dans l'ordonnance derefere à cette disposition implique donc necessairement qu'elle visait unsejour de plus de trois mois, prevu à l'article 9 de la meme loi.

à defaut d'interpreter le dispositif à la lumiere des motifs qui lesous-tendent, l'arret attaque refuse d'y lire cette reference au permis deplus de trois mois vise à l'article 9 de la loi du 15 decembre 1980.Partant, l'arret attaque meconnait la foi due à l'ordonnance et violedonc les articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil.

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

1. L'article 1385quater du Code judiciaire dispose que l'astreinte unefois encourue reste integralement acquise à la partie qui a obtenu lacondamnation et que cette partie peut en poursuivre le recouvrement envertu du titre meme qui la prevoit.

En cas de difficulte d'execution d'une decision prononc,ant une astreinte,il appartient, en vertu de l'article 1498 du Code judiciaire, au juge dessaisies de determiner si les conditions de l'astreinte sont reunies.

à cette occasion, le juge des saisies peut etre amene à determiner laportee de la decision mais il ne peut ni l'interpreter, si elle estobscure ou ambigu:e, ni a fortiori en modifier le contenu. Il ne peut, enparticulier, considerer que l'astreinte n'est pas due au motif que lacondamnation principale n'etait pas justifiee.

2. Aux termes de l'article 24 du Code judiciaire, toute decisiondefinitive a, des son prononce, autorite de chose jugee et, en vertu del'article 26 du meme code, cette autorite subsiste tant que la decisionn'a pas ete infirmee.

L'article 584, alinea 1er, de ce code dispose que le president du tribunalde premiere instance statue au provisoire dans les cas dont il reconnaitl'urgence, en toutes matieres, sauf celles que la loi soustrait au pouvoirjudiciaire.

Suivant l'article 1039, alinea 1er, dudit code, les ordonnances sur referene portent pas prejudice au principal.

Il resulte de ces dispositions que, des que le juge du fond a rendu unedecision contraire relative aux droits contestes, la decision de refereperd de plein droit son effet.

La decision du juge du fond n'a toutefois pas d'effet retroactif sur ladecision de refere.

3. Il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard quel'ordonnance rendue le 25 novembre 2004 par le juge des referes dutribunal de premiere instance de Bruxelles :

- enonce que le Conseil d'etat, dans son arret de suspension du 2 juin2004, a admis l'existence d'une decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004, donnant instruction qu'un certificat d'inscription auregistre des etrangers soit delivre aux demandeurs ;

- considere que cette decision du 25 fevrier 2004 suffit à justifier lefondement de la demande des demandeurs tendant à etre inscrits auregistre des etrangers jusqu'à ce qu'il ait ete statue sur la requete enannulation pendante devant le Conseil d'etat ;

- condamne le defendeur « à donner, dans les huit jours de lasignification de la presente ordonnance, à l'administration communale dulieu de residence [des demandeurs] les instructions visant à lesinscrire, à titre provisoire dans l'attente de la decision du Conseild'etat sur la requete en annulation introduite par eux, sur le registredes etrangers, conformement à la decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004, et à delivrer les documents necessaires à leur sejourdurant cette meme periode », et condamne le defendeur, « à defaut des'executer dans ledit delai, à une astreinte de 500 euros par jour deretard ».

L'arret attaque declare de nul effet le commandement des demandeurstendant à obtenir paiement par le defendeur d'une astreinte de 13.000euros, encourue selon les demandeurs du 10 decembre 2004 au 26 janvier2005 pour non-execution de la condamnation principale de l'ordonnance du25 novembre 2004, aux motifs que :

- la cour d'appel fait siens les motifs de l'arret rendu par le Conseild'Etat le 26 juillet 2005, suivant lesquels la decision de l'Office desetrangers qui aurait ete prise le 25 fevrier 2004 n'existe pas ;

- si les motifs de l'arret du 26 juillet 2005 sont contredits par lesmotifs de l'arret anterieur du 2 juin 2004, « par cet autre arret, leConseil d'etat a toutefois statue au provisoire » ;

- « les mots `conformement à la decision de l'Office des etrangers du 25fevrier 2004' figurant dans le dispositif de l'ordonnance de refere du

25 novembre 2004 sont depourvus de signification des lors qu'il est ainsifait reference à une decision inexistante » ;

- « il suit des considerations qui precedent que le defendeur acorrectement execute la condamnation prononcee en adressant au bourgmestrede ... sa lettre datee du 17 decembre 2004 ».

Par ces considerations, l'arret attaque donne à l'arret du 27 juillet2005 precite du Conseil d'etat un effet retroactif sur l'ordonnance derefere du

25 novembre 2004. Partant, il ne justifie pas legalement sa decisiond'ordonner mainlevee de la saisie-execution mobiliere pratiquee le 15 mars2005 à la requete des demandeurs à charge du defendeur.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner la seconde branche du moyen, qui ne sauraitentrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque, sauf en tant que, par confirmation du jugement dupremier juge, il declare la demande originaire recevable ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Liege.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, le conseiller Didier Batsele, lepresident de section Albert Fettweis, les conseillers Mireille Delange etMichel Lemal, et prononce en audience publique du vingt-quatre janvierdeux mille quatorze par le president Christian Storck, en presence del'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistance du greffier PatriciaDe Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Delange |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Fettweis | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

24 JANVIER 2014 C.12.0359.F/16


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.12.0359.F
Date de la décision : 24/01/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2014-01-24;c.12.0359.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award