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07/03/2014 | BELGIQUE | N°C.13.0461.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 mars 2014, C.13.0461.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

1267



NDEG C.13.0461.F

1. F.-R. E.,

2. D. E.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Isabelle Heenen, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Uccle, Dieweg, 274, ou il est fait electionde domicile,

contre

CENTRALE KREDIETVERLENING, societe anonyme dont le siege social est etablià Waregem, Mannebeekstraat, 33,

defenderesse en cassation,

en presence de

1. R. Z.,

2. E. E.,

parties appelees en declaration d'arret commun.
r>I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 14 fevrier 2013par la cour d'appel de Liege.

Le pres...

Cour de cassation de Belgique

Arret

1267

NDEG C.13.0461.F

1. F.-R. E.,

2. D. E.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Isabelle Heenen, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Uccle, Dieweg, 274, ou il est fait electionde domicile,

contre

CENTRALE KREDIETVERLENING, societe anonyme dont le siege social est etablià Waregem, Mannebeekstraat, 33,

defenderesse en cassation,

en presence de

1. R. Z.,

2. E. E.,

parties appelees en declaration d'arret commun.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 14 fevrier 2013par la cour d'appel de Liege.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demandeurs presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- articles 19 et 1561 du Code judiciaire ;

- article 815 du Code civil.

Decisions et motifs critiques

L'arret du 30 octobre 2012 avait decide que la licitation-partage nepouvait porter que sur les « droits de jouissance que se partagent sur lememe bien les enfants (les demandeurs et [la seconde partie appelee] endeclaration d'arret commun) de (la premiere partie en declaration d'arretcommun) en tant que pleins proprietaires et elle-meme en qualited'usufruitiere et qu'en revanche, elle ne [pouvait] viser les droits ennue-propriete ». Il a ordonne la reouverture des debats pour permettreaux parties de s'expliquer quant à la quotite d'usufruit dont etaienttitulaires les demandeurs et les parties appelees en declaration d'arretcommun. L'arret attaque, statuant sur cette reouverture des debats,constate que :

« (La defenderesse) ne demontre pas que les parties sont en indivisionquant à la pleine propriete de l'immeuble litigieux.

L'arret rendu le 30 octobre 2012 a rappele que, quand quelqu'un estproprietaire d'une partie d'un bien et nu-proprietaire de l'autre, tandisqu'un tiers en est l'usufruitier, `le proprietaire et l'usufruitier ontquant à la jouissance du bien des droits de meme nature sur le bienconsidere : ils ont l'usus et le fructus. A cet egard et à cet egarduniquement, ils sont en concours sur le bien, ce qui correspond à ladefinition en comprehension du concept d'indivision' (P. Delnoy, `Sur leconcept d'indivision', Rev. not. b., 2009, pp. 549-552].

Il resulte des developpements qui precedent que les parties sont enindivision quant à la jouissance de l'immeuble de ... ».

L'arret attaque ordonne neanmoins ensuite :

« Que, sur les poursuites de la (defenderesse) et en presence des(demandeurs et parties appelees en declaration d'arret commun), ceux-civalablement appeles par exploit d'huissier de justice, huit jours àl'avance, par le ministere du notaire, à defaut d'office par le tribunal,il sera procede à la vente prealable publique par licitation du bienlitigieux, à savoir une maison d'habitation avec toutes ses dependances,sur et avec le terrain, sise rue ... nDEG ... à ..., cadastree sectionA, numero 178 D, pour une contenance totale de 20 ares et 10 centiares,ainsi qu'au partage de son prix de vente selon les droits de chacun »,

et dit :

« Que la part d'usufruit revenant à (la premiere partie appelee endeclaration d'arret commun) dans le prix de vente du bien immobilier seraaffectee au paiement de la creance de (la defenderesse) en principal,interets et frais ».

Griefs

Premiere branche

La decision du juge du fond doit, pour etre regulierement motivee,repondre aux conclusions des parties. Cette obligation, en cas dereouverture des debats, vise les conclusions prises avant celle-ci, saufsi, dans les conclusions deposees apres la reouverture des debats, lesparties ont expressement renonce aux premieres conclusions ou si cette renonciation est certaine et se deduit d'elements non susceptibles d'uneautre interpretation (Cass., 28 septembre 1987, Pas., 1988, I, nDEG 64).

Dans ses conclusions additionnelles et de synthese d'appel prises avantl'arret du [30 octobre 2012], la premiere partie appelee en declarationd'arret commun, agissant tant pour elle-meme qu'en qualite derepresentante legale des demandeurs, demandait à la cour [d'appel], àtitre subsidiaire, « si, par impossible, la cour [d'appel] devait fairedroit à la demande, [...] qu'il soit clairement indique au dispositif dela decision à rendre que l'indivision à partager ne porte que sur desdroits en usufruit ».

Dans leurs conclusions apres reouverture des debats, les demandeurs et la premiere partie appelee en declaration d'arret commun, apres avoirconteste le principe meme de la demande de licitation-partage,enonc,aient, « pour le surplus, [...] s'en referer à leurs conclusionsprecedentes », confirmant ainsi le maintien des conclusions precitees.

L'arret attaque ordonne la licitation-partage de l'immeuble litigieux etsa vente, sans repondre aux conclusions de la premiere partie appelee endeclaration d'arret commun en ce qu'elle soutenait, à titre subsidiaire,que, si la licitation devait etre ordonnee, elle ne pourrait porter quesur les droits indivis en usufruit, seuls en indivision entre parties.

Partant, l'arret n'est pas regulierement motive et viole l'article 149 dela Constitution.

A tout le moins, il n'y repond que de maniere contradictoire, en ordonnantla licitation de l'immeuble en pleine propriete, alors que, tant dans sonarret du 30 octobre 2012 que dans [l'arret attaque], la cour d'appelavait, sans equivoque, considere qu'il n'y avait d'indivision qu'en cequi concerne la jouissance de l'immeuble et que la licitation ne pourrait porter que sur cette jouissance. A ce titre egalement, l'arret violel'article 149 de la Constitution.

Deuxieme branche

En vertu de l'article 19 Code judiciaire, un jugement est definitiflorsqu'il epuise la juridiction du juge sur un point litigieux.

Lorsqu'un jugement definitif a ete rendu, le juge qui, dans la meme cause,opposant les memes parties, statue ensuite sur une question litigieusedont il n'est plus saisi commet un exces de pouvoir (Cass., 26 juin 1992,Pas., 1992, I , 968 ; 22 novembre 1993, Pas., 1993, I , 979 ; 19 avril2001, Pas., 2001, I , 644 ; 25 juin 2009, Pas., 2009, I , 1671 ; 29janvier 2010, Pas., 2010, 283).

Par son arret du 30 octobre 2012, la cour d'appel avait decide que

« (la premiere partie appelee en declaration d'arret commun) insiste surce que la seule indivision qui existe en ce qui (la) concerne (...) estune indivision relative à des droits en usufruit » [...] ; « que (lapremiere partie appelee en declaration d'arret commun) declare etreusufruitiere de 44/64e sur l'immeuble, les autres 20/64e appartenant àses enfants (...) en pleine propriete tandis que 44/64e leur revient ennue-propriete ; que la licitation ne peut donc porter que sur les droitsde jouissance que partagent sur le meme bien les enfants de (la premierepartie appelee en declaration d'arret commun) en tant que pleinsproprietaires et elle-meme en qualite d'usufruitiere ; qu'en revanche,elle ne peut viser les droits en nue-propriete ».

La cour d'appel avait ainsi decide de maniere definitive que la licitationne pourrait porter que sur les droits de jouissance indivis entre lesdemandeurs et les parties appelees en declaration d'arret commun et nonsur la pleine propriete de l'immeuble.

En ordonnant neanmoins la licitation de l'immeuble en pleine propriete,l'arret attaque commet par consequent un exces de pouvoir et violel'article 19 du Code judiciaire.

Troisieme branche

La licitation ne peut porter que sur des biens en indivision.

L'arret attaque constate que seuls les droits de jouissance des partiessur l'immeuble se trouvaient en indivision.

En ordonnant neanmoins la licitation-partage de la totalite de l'immeubleen pleine propriete, et non uniquement de ces droits de jouissance,l'arret attaque meconnait l'article 815 du Code civil ainsi que l'article1561 du Code judiciaire, qui permet aux creanciers de provoquer lalicitation de biens indivis.

III. La decision de la Cour

Quant à la troisieme branche :

En vertu de l'article 815 du Code civil, il peut etre mis fin à uneindivision par le partage.

Une indivision existe entre des personnes ayant sur une chose ou sur unensemble de choses un droit de meme nature, chacune pour une quote-part.

L'arret attaque, qui considere qu'il n'existe d'indivision entre lesparties autres que la defenderesse qu'en ce qui concerne les droitsd'usufruit dont elles sont titulaires sur l'immeuble litigieux, n'a pu,sans violer l'article 815 du Code civil, ordonner la licitation de lapleine propriete de cet immeuble.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres branches du moyen, qui nesauraient entrainer une cassation plus etendue.

Sur la demande en declaration d'arret commun :

Les demandeurs ont interet à ce que l'arret soit declare commun auxparties appelees à la cause devant la Cour à cette fin.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il rec,oit l'appel ;

Declare le present arret commun à R. Z. et à E. E. ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Mons.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, le conseiller Didier Batsele, lepresident de section Albert Fettweis, les conseillers Martine Regout etMichel Lemal, et prononce en audience publique du sept mars deux millequatorze par le president Christian Storck, en presence de l'avocatgeneral Thierry Werquin, avec l'assistance du greffier Patricia DeWadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Regout |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Fettweis | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

7 MARS 2014 C.13.0461.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.13.0461.F
Date de la décision : 07/03/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2014-03-07;c.13.0461.f ?
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