La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/08/2015 | BELGIQUE | N°P.15.1158.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 12 août 2015, P.15.1158.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.15.1158.N

Y. M., (...),

requerante de mise en liberte provisoire, detenue,

demanderesse en cassation,

Me Joris Van Cauter, avocat au barreau de Gand.

I. la procedure devant la cour

Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 31 juillet 2015 par la courd'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.

La demanderesse invoque deux moyens dans un memoire annexe au presentarret.

Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. la

decision de la cour

Sur le moyen :

1. Le moyen invoque la violation des articles 5.4 et 13 de la Conventionde sauveg...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.15.1158.N

Y. M., (...),

requerante de mise en liberte provisoire, detenue,

demanderesse en cassation,

Me Joris Van Cauter, avocat au barreau de Gand.

I. la procedure devant la cour

Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 31 juillet 2015 par la courd'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.

La demanderesse invoque deux moyens dans un memoire annexe au presentarret.

Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. la decision de la cour

Sur le moyen :

1. Le moyen invoque la violation des articles 5.4 et 13 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales, et 9.4du Pacte international relatif aux droits civils et politiques : l'arretdeclare à tort la chambre des mises en accusation incompetente pourstatuer sur la requete de mise en liberte provisoire de la demanderesse etconsidere que ladite requete ressortit à la competence du tribunal del'application des peines ; ensuite de l'arret rendu le 24 fevrier 2015 parla Cour europeenne des droits de l'homme (ci-apres C.E.D.H.), l'arretrendu le 17 octobre 2008 par la cour d'assises de la province d'Anvers quia condamne la demanderesse à une peine et en vertu duquel la demanderesseest actuellement detenue a ete declare contraire à l'article 6.1 de laConvention europeenne ; il s'ensuit que l'article 5.4 de ladite conventions'applique à nouveau et que la demanderesse doit pouvoir avoir acces aujuge pour faire controler la legalite de sa detention; le tribunal del'application de l'application des peines n'offre pas pareil acces etantdonne que la demanderesse n'a pas encore subi un tiers de sa peine; enoutre, l'application de l'article 5.4 de la Convention que la requete dela demanderesse soit examinee à bref delai.

2. En vertu de l'article 442bis du Code d'instruction criminelle, s'il aete etabli par un arret definitif de la C.E.D.H. que la Conventioneuropeenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales ou des protocoles additionnels ont ete violes, il peut etredemande la reouverture, en ce qui concerne la seule action publique, de laprocedure qui a conduit à la condamnation du requerant dans l'affaireportee devant la C.E.D.H. ou à la condamnation d'une autre personne pourle meme fait et fondee sur les memes moyens de preuve.

L'article 442quinquies du Code d'instruction criminelle dispose que,lorsqu'il ressort de l'examen de la demande soit que la decision attaqueeest contraire sur le fond à la Convention europeenne, soit que laviolation constatee est la consequence d'erreurs ou de defaillances deprocedure d'une gravite telle qu'un doute serieux existe quant au resultatde la procedure attaquee, la Cour de cassation ordonne la reouverture dela procedure.

3. Le fait qu'une demande de reouverture de la procedure a ete introduiteen application des articles 442bis et suivants du Code d'instructioncriminelle n'implique pas que l'article 5.4 de la Convention s'applique ànouveau automatiquement. Tel est seulement le cas lorsque la procedure esteffectivement rouverte, à savoir lorsque la Cour de cassation considereque la condamnation qui a donne lieu à la decision de la C.E.D.H. estcontraire sur le fond à la Convention europeenne ou que la violationconstatee est la consequence d'erreurs ou de defaillances de procedured'une gravite telle qu'un doute serieux existe quant au resultat de laprocedure attaquee. Ce n'est que dans ce cas que la Cour de cassationretire son arret ayant rejete le pourvoi en cassation forme par lerequerant et statue à nouveau sur ce pourvoi. Tant que la reouverture n'apas eu lieu et que la procedure critiquee n'est pas annulee, lacondamnation demeure executoire et les conditions d'application del'article 5.4 de la Convention ne sont pas remplies.

Dans cette mesure, le moyen manque en droit.

4. Pour le surplus, le moyen se deduit de la violation, vainement allegueeci-dessus, de l'article 5.4 de la Convention et, des lors, estirrecevable.

Sur le second moyen :

5. Le moyen invoque la violation de l'article 27, S: 1, 5DEG, de la loi du20 juillet 1990 relative à la detention preventive, ainsi que du principegeneral du droit, à tout le moins du principe de droit, del'interpretation des lois nationales conformement aux normesinternationales: l'arret considere que l'article 27, S: 1er, 5DEG, de laloi du 20 juillet 1990 ne peut etre applique par analogie, parce que cettedisposition vise la situation ou la condamnation n'a pas encore acquisforce de chose jugee et ou le pourvoi en cassation est encore pendant; ilconsidere ensuite que l'arret de la cour d'assises a acquis force de chosejugee et que l'arret de la C.E.D.H. n'a pas automatiquement pourconsequence de rendre cet arret caduc ; la demanderesse se trouveneanmoins dans le champ d'application de l'article 27, S: 1er, 5DEG, de laloi du 20 juillet 1990 relative à la detention preventive, de sorte qu'ilne saurait etre question d'une application par analogie ; apres le depotd'une requete conformement aux article 442bis et suivants du Coded'instruction criminelle, l'arret attaque de la cour d'assises peut eneffet à nouveau faire l'objet d'un pourvoi en cassation qui peut aboutirà son annulation; conformement à l'article 442sexies du Coded'instruction criminelle, cette annulation a les memes effets qu'un arretrendu sur un pourvoi en cassation ; il resulte de la combinaison de cesdispositions sur la reouverture de la procedure en matiere repressive etde l'article 27, S: 1er, 5DEG, de la loi du 20 juillet 1990 que la notionde pourvoi en cassation comprend aussi la situation ou la personneconcernee, apres un arret de condamnation de la C.E.D.H., a depose dansles delais une requete de reouverture de la procedure ; cetteinterpretation est par ailleurs conforme à la Convention europeenne, quigarantit le droit à un controle judiciaire de la legalite de la privationde liberte, lorsque ce droit n'a pas ete incorpore à la condamnationdefinitive de la demanderesse.

* La demanderesse demande en ordre subsidiaire de poser à la Courconstitutionnelle la question prejudicielle suivante:

* "L'article 27, S: 1er, 5DEGde la loi du 20 juillet 1990 relative à ladetention preventive viole-t-il les articles 10 et 11 de laConstitution, lus en combinaison avec les articles 5.3, 5.4, 6 et 13de la Convention europeenne de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, interpretee en ce sens que cette dispositionpermettrait uniquement que les justiciables qui ont ete condamnes endernier ressort et forment un pourvoi en cassation puissent introduireune requete en mise en liberte provisoire, alors que les justiciablesqui ont egalement fait l'objet d'une condamnation en dernier ressort,à l'occasion de laquelle la cour europeenne des droits de l'homme atoutefois constate une violation de l'article 6 de la Convention enraison de laquelle la Cour de cassation est saisie de leur causeconformement aux articles 442bis et suivants du Code d'instructioncriminelle, n'ont pas la possibilite d'introduire pareille requete?"

6. Il n'existe pas de principe general du droit de l'interpretation deslois nationales conformement aux normes internationales.

* Dans la mesure ou il invoque la violation de pareil principe generaldu droit, le moyen manque en droit.

* 7. La violation d'un principe de droit qui ne constitue pas unprincipe general du droit ne donne pas lieu à cassation.

* Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.

* * 8. L'article 27, S: 1, de la loi du 20 juillet 1990 relative à ladetention preventive dispose que: "Lorsque la detention preventive n'apas pris fin et que l'instruction est close ou qu'il a ete faitapplication de l'article 133 du Code d'instruction criminelle et del'article 26, S: 5, la mise en liberte provisoire peut etre accordeesur requete adressee :

* (...)

* 5DEG à la chambre des mises en accusation, depuis le recours encassation jusqu'à l'arret."

* * 9. Cette disposition ne concerne que la situation juridique ou lerequerant qui sollicite sa mise en liberte provisoire se trouve enetat de detention preventive au cours d'une procedure devant la Courde cassation, c'est-à-dire la situation juridique dans laquelle setrouve le requerant qui, à la suite du recours en cassation, n'a pasencore ete condamne par une decision passee en force de chose jugee.Des que le recours en cassation a ete rejete et que la decision decondamnation a ainsi acquis force de chose jugee, cette dispositionn'est plus applicable.

* 10. Ainsi qu'il ressort de la reponse au premier moyen, la reouverturede la procedure prevue à l'article 442bis du Code d'instructioncriminelle n'est pas automatique, mais est uniquement ordonnee par laCour de cassation lorsqu'elle considere qu'il est satisfait auxconditions de l'article 442quinquies du meme code. Puisque ce n'estque dans ce cas que la Cour retirera la decision attaquee et statueraà nouveau sur le pourvoi en cassation originaire, la situationjuridique de detention preventive visee à l'article 27, S: 1er, 5DEG,de la loi du 20 juillet 1990 relative à la detention preventive nenait qu'à partir de la decision de la Cour de rouvrir la procedure.Cette situation juridique ne nait ainsi pas du fait que le condamne aintroduit une demande de reouverture de la procedure à la suite d'unarret de la C.E.D.H. tel que vise ci-dessus.

* * En tant qu'il se fonde sur une autre conception juridique, le moyenmanque egalement en droit.

* 11. La situation juridique d'un inculpe se trouvant en detentionpreventive et susceptible, sur cette base, de relever du champd'application de l'article 27, S: 5DEG, de la loi du 20 juillet 1990relative à la detention preventive n'est manifestement pas comparableà la situation juridique du condamne qui a ete prive de sa liberte enexecution de la peine qui lui a ete infligee par une condamnationpassee en force de chose jugee.

* * Il n'y a des lors pas lieu de poser la question prejudicielleproposee.

l'examen d'office

12. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi juge par la Cour de cassation, chambre des vacations, à Bruxelles,ou siegeaient Paul Maffei, president, Franc,oise Roggen, Peter Hoet, ErwinFrancis et Marie-Claire Ernotte, conseillers, et prononce en audiencepublique du douze aout deux mille quinze par le president Paul Maffei, enpresence de l'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistance dugreffier Vanessa Van de Sijpe.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Pierre Cornelis ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le conseiller,

12 Aout 2015 P.15.1158.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.15.1158.N
Date de la décision : 12/08/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-08-12;p.15.1158.n ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award