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23/12/2015 | BELGIQUE | N°P.15.0615.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 décembre 2015, P.15.0615.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.15.0615.F

Maitres Christian VAN BUGGENHOUT, Ilse VAN de MIEROP et Alain d'IETEREN,avocats au barreau de Bruxelles, agissant en leur qualite de curateurs àla faillite de la societe anonyme Sabena,

parties civiles,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile, et ayant pour conseils Maitres ElineTritsmans et Hans Rieder, avocats au barreau de Gand,

contr

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1. SAIRGROUP AG, societe de droit suisse en liquidation concordataire,dont le siege est e...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.15.0615.F

Maitres Christian VAN BUGGENHOUT, Ilse VAN de MIEROP et Alain d'IETEREN,avocats au barreau de Bruxelles, agissant en leur qualite de curateurs àla faillite de la societe anonyme Sabena,

parties civiles,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile, et ayant pour conseils Maitres ElineTritsmans et Hans Rieder, avocats au barreau de Gand,

contre

1. SAIRGROUP AG, societe de droit suisse en liquidation concordataire,dont le siege est etabli à Zurich (Suisse), Hirschengraben, 84, ayantcomme liquidateur Maitre Karl Wu:trich dont le cabinet est etabli àKu:ssnacht (Suisse),

representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

2. B. Ph.

ayant pour conseil Maitre Olivier Klees, avocat au barreau de Bruxelles,dont le cabinet est etabli à Uccle, avenue Brugmann, 403, ou il est faitelection de domicile,

3. du B. P. represente par Maitre Caroline De Baets, avocat à la Courde cassation,

4. G. P.

5. SWISSAIR SWISS AIR TRANSPORT COMPANY LTD, societe de droit suisse enliquidation concordataire, dont le siege est etabli à Zurich Airport(Suisse), 8302 Kloten, Balz Zimmermann-Strasse, ayant comme liquidateurMaitre Karl Wu:trich dont le cabinet est etabli à Ku:snacht (Suisse),

6. W. H.

representee par Maitre Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Gand, Drie Koningenstraat, 3, ouil est fait election de domicile,

inculpes,

defendeurs en cassation.

I. la procedure devant la cour

Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 8 avril 2015 par la courd'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.

Les demandeurs invoquent sept moyens dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

A l'audience du 25 novembre 2015, le president de section Frederic Close afait rapport et l'avocat general Damien Vandermeersch a conclu.

II. la decision de la cour

Sur le septieme moyen :

Le moyen reproche à la chambre des mises en accusation d'avoir ecarte desdebats, pour abus de procedure, les troisiemes conclusions de synthesedeposees par les demandeurs à l'audience du 22 octobre 2014. Il soutientqu'à cette date les debats etaient loin d'etre termines et que l'arret nereproche pas aux demandeurs d'avoir agi dans un but dilatoire.

Dans la mesure ou il invoque la violation des articles 190 et 210 duCode d'instruction criminelle qui ne sont pas d'application devant lesjuridictions d'instruction, le moyen manque en droit.

En matiere repressive, si aucune disposition legale n'interdit à lapartie poursuivie de deposer des conclusions jusqu'à la cloture desdebats, ni ne l'oblige, avant de les deposer, à les communiquer auministere public et à la partie civile, sous reserve du droit de ceux-cid'en demander la communication, le juge peut toutefois, en respectant lesdroits de la defense, refuser le depot de conclusions qui ne se ferait quedans un but dilatoire.

Il en va de meme, à plus forte raison, de la partie civile. Sans pouvoirse trouver dans une situation de net desavantage par rapport à l'inculpe,au prevenu ou à l'accuse qui, comme elle, defendent leur interetpersonnel, la partie civile ne cherche, en effet, à obtenir que lareparation de son dommage, alors qu'outre la defense de son patrimoine, lapersonne poursuivie risque une privation de liberte et les autresconsequences d'une condamnation penale.

Apres avoir rappele les antecedents de la procedure d'audience depuisl'introduction de la cause devant la chambre des mises en accusation le 4decembre 2013, et notamment l'avertissement donne aux conseils de lasociete demanderesse le 18 juin 2014, l'arret releve que l'ampleur desnouvelles conclusions deposees apres que de nombreux inculpes ont dejàfait valoir leurs moyens de defense, empecherait une bonne administrationde la justice et violerait tant les droits de la defense des inculpes etleur droit à un debat contradictoire et loyal que le droit à un procesequitable.

Par ces considerations, la chambre des mises en accusation a justifie sadecision dans le respect des droits de la defense et de l'article 6 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales dont le moyen invoque des lors vainement la violation.

A cet egard, le moyen ne peut etre accueilli.

Sur le troisieme moyen :

Le moyen critique la decision constatant la prescription de l'actionpublique exercee à charge des defenderesses, les societes de droit suisseen liquidation concordataire Sairgroup AG et Swissair Swiss Air TransportCompany LTD, au motif qu'elles ne constituent qu'une seule societe.

En sa premiere branche, il soutient que la chambre des mises en accusationa viole la foi due à des pieces que les demandeurs ont deposees.Toutefois, l'arret ne se refere pas auxdites pieces et ne pourrait doncvioler la foi qui leur est due.

En sa seconde branche, le moyen reproche aux juges d'appel de n'avoir pasmotive leur affirmation.

D'une part, l'article 149 de la Constitution n'est pas d'application auxjuridictions d'instruction lorsqu'elles statuent sur le reglement de laprocedure.

D'autre part, la chambre des mises en accusation n'avait pas à repondreà des pieces deposees et sa decision resulte d'une appreciation en faitqu'il n'est pas au pouvoir de la Cour de censurer.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Sur le quatrieme moyen :

Le moyen reproche à l'arret de dire l'action publique prescrite en ce quiconcerne toutes les preventions mises à charge des defenderesses societesSairgroup AG et Swissair Swiss Air Transport Company LTD, l'une et l'autreen liquidation concordataire. Il critique à cette fin la consideration dela chambre des mises en accusation selon laquelle, des lors que lesdemandeurs ont eux-memes verse des pieces arguees de faux au dossier d'uneprocedure en responsabilite civile, ils soutiennent en vain que lesdefenderesses en ont fait un usage punissable en temps non prescrit.

Quant à la premiere branche :

La loi n'ayant pas defini l'usage de faux, il appartient au juged'apprecier en fait ce qui constitue un tel usage.

Le moyen considere que le fait de se baser sur un faux à l'appui d'uneaction ou d'une defense peut constituer un comportement dont le juge peutlegalement deduire l'usage de faux punissable.

L'usage de faux persiste, meme sans fait nouveau de l'auteur du faux etsans intervention renouvelee de sa part, tant que le but qu'il visaitn'est pas entierement atteint et tant que l'acte initial qui lui estreproche ne cesse pas d'engendrer, sans qu'il s'y oppose, l'effet utilequ'il en attendait. Il faut toutefois que l'auteur du faux se soit serviinitialement du faux en l'opposant à des tiers et que l'usage qui en estfait ulterieurement par un tiers ait ete previsible.

De la constatation que les pieces arguees de faux ont ete utilisees dansune procedure distincte à l'initiative des demandeurs et non desdefenderesses, les juges d'appel ont pu legalement deduire que celles-cin'ont pas commis un usage de faux punissable.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Quant à la seconde branche :

A l'appui de sa constatation selon laquelle ce sont les demandeurs qui ontverse lesdites pieces aux debats de la procedure civile, et non lesdefenderesses, l'arret, à la note numero 26 de la page 30, renvoie aux« conclusions de synthese, pages 13 et 14 » sans autre precision.

Selon le moyen, ces conclusions correspondaient aux « secondesconclusions de synthese » prises par les demandeurs devant la chambre desmises en accusation, lesquelles citaient, sous les points 13 et 14, desconclusions deposees par la defenderesse Sairgroup AG devant le tribunalde commerce et la cour d'appel de Bruxelles dans le cadre de la procedureen responsabilite. Ces dernieres mentionnaient des inventaires de pieces,les demandeurs considerant qu'il resultait de l'un de ces inventaires queles pieces arguees de faux avaient ete invoquees dans le cadre de cetteprocedure distincte.

Il ressort toutefois des pages 13 et 14 des « conclusions de synthese »deposees par la societe Sairgroup AG devant la chambre des mises enaccusation que cette defenderesse opposait aux demandeurs que les piecesdeposees dans le cadre de la procedure en responsabilite l'avaient eteinitialement par eux-memes.

L'arret se fondant ainsi sur ces conclusions de synthese de ladefenderesse, les juges d'appel ne se sont referes, contrairement à ceque soutient le moyen, ni aux secondes conclusions de synthese desdemandeurs ni aux pieces visees par ces conclusions, et n'ont pu des lorsvioler la foi qui leur est due.

Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Sur le sixieme moyen :

Le moyen critique la decision constatant la prescription de l'actionpublique exercee à charge de Ph.B., P. du B.et H. W.. Les demandeursreprochent à la cour d'appel d'avoir, en raison de la cessation defonctions des defendeurs, fixe la fin de l'usage des faux qui leur etaitreproche à la date de la declaration de faillite de la Sabena. Ils fontgrief à la chambre des mises en accusation de ne pas avoir examine si cesdefendeurs n'ont pas fait ulterieurement usage desdits faux en ecrituresdans le cadre de la procedure distincte en responsabilite.

Revenant à critiquer l'appreciation de l'usage de faux par le juge dufond, alors qu'en l'absence de definition legale d'un tel usage, cetteappreciation git en fait, le moyen est irrecevable.

Sur l'ensemble du cinquieme moyen :

Le moyen critique la decision de la cour d'appel de refuser de detaillerles qualifications libellees dans le requisitoire du ministere public datedu 3 mars 2009 sous A.I, A.II. a à e, et A.IV.c.

Des lors que, d'une part, la requalification sollicitee par les demandeursrestait sans incidence sur la date des faits et que, d'autre part, lachambre des mises en accusation a legalement decide que la prescription del'action publique etait acquise quant à l'ensemble des faits reprochestant, sous A.1, aux societes defenderesses, que, sous A.II, au defendeurP. du B., et, sous A.IV.c, à la defenderesse H. W.le moyen, meme fonde,ne pourrait entrainer la cassation.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Sur le premier moyen :

Le moyen reproche à l'arret de dire irrecevables les constitutions departie civile des demandeurs dirigees contre Ph. B. et H.W., aux motifsqu'elles auraient ete, selon la chambre des mises en accusation,introduites pour la premiere fois devant elle, et qu'une partie civile nepeut interjeter appel que vis-à-vis des inculpes contre lesquels elle adirige sa demande devant la chambre du conseil ou, à tout le moins, que,pour etre recevable à l'egard d'un inculpe determine, son appel doit etreexpressement dirige contre lui.

L'arret declare eteinte par prescription l'action publique exercee àcharge de ces defendeurs, decision que les demandeurs critiquentvainement. Il s'ensuit que la chambre des mises en accusation etait sanscompetence pour statuer sur l'action civile exercee contre ces defendeurs.

Fut-il fonde, le moyen ne pourrait entrainer la cassation et est, partant,irrecevable à defaut d'interet.

Sur le deuxieme moyen :

Le moyen est pris de la violation de l'article 235 du Code d'instructioncriminelle. Il critique l'arret en ce qu'il declare irrecevable laconstitution de partie civile formee par les demandeurs contre P. G. aumotif que celui-ci n'etait vise ni dans le requisitoire du reglement de laprocedure, ni dans la constitution de partie civile des demandeursintroduite devant la chambre du conseil, ni dans leurs conclusionsdeposees devant celle-ci.

En application de la disposition visee au moyen, la chambre des mises enaccusation peut, notamment, ordonner des poursuites à l'egard depersonnes qui n'avaient ete ni mises en prevention par le ministere publicou la partie civile ni inculpees par le juge d'instruction, ou encoresaisir celui-ci de nouveaux faits, pour autant que ceux-ci ressortent dudossier de la procedure et que les parties aient l'occasion d'etreentendues à leur sujet.

Si la loi confere à la chambre des mises en accusation cette competenced'inculper et d'etendre l'instruction, elle ne lui en fait pasl'obligation. En la lui accordant « d'office », soit independamment detoute demande, elle revient à permettre à cette juridiction de ne pasindiquer les motifs pour lesquels elle ne fait pas application duditarticle 235 si celle-ci lui est demandee.

Des lors que les appels de l'ordonnance du reglement de la procedure n'ontpas saisi la chambre des mises en accusation de faits mis à charge dudefendeur et qu'il n'apparait pas de la procedure que la chambre des misesen accusation ait fait usage des pouvoirs qui lui sont attribues par leditarticle 235, l'arret justifie legalement sa decision de declarerirrecevable la constitution de partie civile.

Le moyen ne peut etre accueilli.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demandeurs aux frais.

Lesdits frais taxes en totalite à la somme de trois mille centquarante-sept euros dix-huit centimes dont deux cent septante euros onzecentimes dus et deux mille huit cent septante-sept euros sept centimespayes par ces demandeurs.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Frederic Close, president de section, Pierre Cornelis, GustaveSteffens, Marie-Claire Ernotte et Sidney Berneman, conseillers, etprononce en audience publique du vingt-trois decembre deux mille quinzepar Frederic Close, president de section, en presence de DamienVandermeersch, avocat general, avec l'assistance de Tatiana Fenaux,greffier.

+------------------------------------------+
| T. Fenaux | S. Berneman | M-C. Ernotte |
|-------------+-------------+--------------|
| G. Steffens | P. Cornelis | F. Close |
+------------------------------------------+

23 decembre 2015 P.15.0615.F/3


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.15.0615.F
Date de la décision : 23/12/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-12-23;p.15.0615.f ?
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