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05/02/2016 | BELGIQUE | N°C.15.0179.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 05 février 2016, C.15.0179.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.15.0179.F

* T. V.,

* demandeur en cassation,

* represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des QuatreBras, 6, ou il est fait election de domicile,

* * contre

* * AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

* defenderesse en cassation,

* representee par Maitre Isabelle Heenen, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, av

enue Louise,480, ou il est fait election de domicile.

* I. La procedure devant la Cour

XII. Le pourvoi ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.15.0179.F

* T. V.,

* demandeur en cassation,

* represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des QuatreBras, 6, ou il est fait election de domicile,

* * contre

* * AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

* defenderesse en cassation,

* representee par Maitre Isabelle Heenen, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise,480, ou il est fait election de domicile.

* I. La procedure devant la Cour

XII. Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 22octobre 2014 par la cour d'appel de Mons, statuant commejuridiction de renvoi ensuite de l'arret de la Cour du 25 avril2013.

XIII. Le conseiller Michel Lemal a fait rapport.

XIV. L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

XV. II. Le moyen de cassation

XVI. Dans la requete en cassation, jointe au present arret encopie certifiee conforme, le demandeur presente un moyen.

XVII. III. La decision de la Cour

XVIII. Sur le moyen :

Sur la premiere fin de non-recevoir opposee au moyen parla defenderesse et deduite de ce qu'il est dirige contreune decision conforme aux conclusions du demandeur :

Le moyen est dirige contre la decision de l'arret derejeter la demande du demandeur en indemnisation desconsequences du vol de son vehicule en se fondant sur lesconditions generales de la police d'assurance liant lesparties qui excluent la couverture du vol survenu lorsqueles cles sont restees dans ou sur le vehicule.

Il fait grief à l'arret de ne pas examiner si la clauseexcluant la couverture du vol survenu dans cescirconstances ne constituait pas une clause de decheanceet si, conformement à l'article 11 de la loi du 25 juin1992 sur le contrat d'assurance terrestre, la circonstancequ'une cle se trouvait dans le vehicule au moment du vol,que l'arret tient pour averee, est en relation causaleavec celui-ci.

L'article 11 precite est de droit imperatif et il neresulte pas des pieces auxquelles la Cour peut avoir egardque le demandeur a renonce à la protection qui lui estaccordee par la loi.

Des lors, quels que soient les moyens qu'il a soumis aujuge du fond, le demandeur est recevable à invoquercontre l'arret, qui, en rejetant sa demande sur lefondement de cette clause du contrat d'assurance, dont ledemandeur contestait l'application, lui inflige grief, unmoyen qui, pris de la violation de pareille disposition,peut etre souleve pour la premiere fois devant la Cour.

Sur la deuxieme fin de non-recevoir opposee au moyen parla defenderesse et deduite de ce qu'il n'indique pas commevioles les articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil :

Le moyen ne fait pas grief à l'arret de donner de laclause litigieuse une interpretation non conciliable avecses termes mais de lui donner une qualification contraireà l'article 11 de la loi du 25 juin 1992.

Sur la troisieme fin de non-recevoir opposee au moyen parla defenderesse et deduite de ce qu'il critique uneinterpretation en fait de la cour d'appel :

La qualification d'un contrat ou d'une clause de celui-ciconsiste à en determiner la nature juridique exacte et,des lors, ne releve pas de l'appreciation souveraine dujuge du fond.

Les fins de non-recevoir ne peuvent etre accueillies.

Sur le fondement du moyen :

Apres avoir enonce qu'« il appartient [au demandeur],conformement à l'article 1315, alinea 1er, du Code civil,de demontrer que le risque tel qu'il s'est realise estcouvert et n'est pas exclu de la garantie de [ladefenderesse] », l'arret constate que « les conditionsgenerales de la police d'assurance `confort auto' liantles parties excluent la couverture du vol `survenu lorsquele vehicule se trouve inoccupe et que les precautionsindispensables ont ete negligees, notamment ... cles oudispositif de desarmement de l'antivol restes dans ou surle vehicule, sauf si le vehicule se trouvait dans ungarage individuel ferme à cle et qu'il y a eu effractiondu garage' » et considere que « cette clause est claireet ne necessite aucune interpretation ».

Il considere egalement que :

* « les constatations des verbalisateurs et lesphotographies annexees au dossier repressifetablissent que la cle de contact se trouvait sur lecontacteur du vehicule lorsqu'il a ete retire de laMeuse » ;

* « il resulte par ailleurs du constat de l'huissiermandate par [la defenderesse] dresse en presence [dudemandeur] le 12 fevrier 2009 que le vehicule nepresentait aucune trace d'effraction au niveau despoignees des portes et des aretes de portes, que deuxvitres etaient cassees au niveau des deux portes coteconducteur, que la direction etait bloquee et qu'unecle a ete retrouvee dans celui-ci » ;

* « [le demandeur] pretend que `rien ne prouve que lacle retrouvee dans le vehicule soit le double luiappartenant et que ces cles sont restees sur ou dansle vehicule au moment du vol' » et que « cetteaffirmation ne lui permet pas de rapporter la preuvequi lui incombe de la couverture du sinistre » ;

* « les elements objectifs du dossier rappelesci-dessus etablissent en effet qu'une cle etaitrestee sur le contacteur dans le vehicule, [ledemandeur] ayant par ailleurs reconnu ne disposer quede deux cles dont l'une etait restee en possession desa compagne depuis leur separation en mars 2008,circonstance qui n'est pas etablie et que cettederniere a formellement contestee » ;

* « sa demande n'est donc pas fondee sans qu'il soitnecessaire d'epiloguer sur les circonstances precisesdu sinistre ».

Il suit de ces enonciations que l'arret considere, sansetre entache de l'ambiguite denoncee au moyen, que laclause precitee constitue une clause d'exclusion de lagarantie et qu'en vertu de ladite clause, cette garantien'est pas acquise au demandeur des lors qu'il est averequ'une cle se trouvait dans le vehicule.

Pour le surplus, aux termes de l'article 11, alinea 1er,de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assuranceterrestre, applicable aux faits, le contrat d'assurance nepeut prevoir la decheance partielle ou totale du droit àla prestation d'assurance qu'en raison de l'inexecutiond'une obligation determinee imposee par le contrat et àla condition que le manquement soit en relation causaleavec la survenance du sinistre.

En vertu du caractere imperatif de cette disposition,consacre par l'article 3 de la loi du 25 juin 1992, ilappartient au juge de verifier si une clause du contratd'assurance presentee sous une autre qualification neconstitue pas une clause de decheance.

La clause qui permet à l'assureur de refuser sa garantieen raison de l'inexecution par l'assure de ses obligationsconventionnelles constitue une clause de decheance au sensde l'article 11 precite.

En statuant comme il le fait sans examiner si lacirconstance qu'une cle se trouvait dans le vehicule esten relation causale avec la survenance du vol, l'arretviole l'article 11 de la loi du 25 juin 1992.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en margede l'arret casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci parle juge du fond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, àBruxelles, ou siegeaient le president de section ChristianStorck, les conseillers Didier Batsele, Mireille Delange,Michel Lemal et Marie-Claire Ernotte, et prononce enaudience publique du cinq fevrier deux mille seize par lepresident de section Christian Storck, en presence del'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistance dugreffier Patricia De Wadripont.

+------------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
|-----------------+----------------+-------------|
| M. Delange | D. Batsele | Chr. Storck |
+------------------------------------------------+

POURVOI EN CASSATION

POUR : Monsieur T. V.,

Demandeur en cassation, assiste et represente par Me.Huguette Geinger, avocat à la Cour de Cassation, dont lecabinet est etabli à 1000 Bruxelles, rue Quatre Bras 6,chez qui il est fait election de domicile,

CONTRE: La societe anonyme AXA BELGIUM, inscrite à laBanque Carrefour des Entreprises sous le numero0404.483.367 et dont le siege est etabli à 1170Bruxelles, boulevard du Souverain 25,

Defenderesse en cassation.

* * *

A Messieurs les Premier President et President, Messieurset Mesdames les Conseillers, composant la Cour deCassation,

Messieurs,

Mesdames,

Le demandeur a l'honneur de deferer à la censure de VotreCour l'arret, rendu le 22 octobre 2014 par la vingt etunieme chambre de la Cour dàppel de Mons (2013/RG/862).

RETROACTES

Le demandeur etait proprietaire d'un vehicule VW Passat,achete en 2005 et assure en responsabilite civile et enomnium aupres de la defenderesse.

Le 21 novembre 2008, le demandeur declara le vol de sonvehicule aupres de la police de Huy en precisant que ladisparition a du avoir lieu le meme jour, entre 8h30 et12h30. Il declara egalement avoir perdu le double de sescles depuis son demenagement le 21 mars 2008, en precisantque ces cles sont restees avec les cles de la voiture deson ex-compagne dans le bureau qu'ils occupaient, et quela separation s'est mal passee de sorte qu'il n'a plus decontact avec son ex-compagne.

La voiture fut retrouvee le 16 decembre 2008 dans laMeuse, à hauteur de la rue P. à A.

Par courrier du 18 decembre 2008, la defenderesse informale demandeur que les nouvelles informations, obtenues dansle cadre du sinistre, l'obligent, jusqu'à plus informee,à suspendre toute intervention.

La defenderesse mandata un huissier de justice quiconstata le 23 fevrier 2009 que la cle trouve àl'interieur du vehicule etait bien une des cles originalesde celui-ci.

La defenderesse informa le demandeur par courrier du 17mars 2009 de son refus d'indemniser le dommage au motifqu'il avait declare au verbalisateurs qu'il savait depuisplusieurs mois avant le vol qu'une des cles etaitmanquante et qu'il n'a pas declare cette perte ou oubli àla compagnie, en depit de l'obligation lui incombant selonles conditions generales du contrat.

Le demandeur cita la defenderesse le 15 mai 2009 devant leTribunal de premiere instance de Huy afin de l'entendrecondamner à l'indemni-ser du dommage subi.

Par jugement du 11 fevrier 2010, le Tribunal de premiereinstance de Huy declara la demande partiellement fondee etcondamna la defenderesse à payer au demandeur la somme de11.385,90 EUR, à majorer des interets au taux legal àdater du 15 septembre 2009, reserva à statuer sur lesurplus et renvoya la cause au role general quant à ce.

La defenderesse interjeta appel de ce jugement, et ledemandeur forma un appel incident par conclusions.

Par arret du 20 decembre 2011, la Cour d'appel de Liegedeclara uniquement l'appel principal fonde. La cour dit lademande du demandeur non fondee et le condamna aux depensdes deux instances.

Votre Cour a, en l'arret du 25 avril 2013 (C.12.0416.F),casse cet arret de la Cour d'appel de Liege, sauf en tantqu'il rec,oit l'appel principal et a renvoye la cause,ainsi limitee, devant la Cour d'appel de Mons.

Par arret du 22 octobre 2014, la Cour d'appel de Monsrec,oit l'appel incident et dit seul l'appel principalfonde. La cour d'appel met partant le jugement dont appelà neant et dit la demande du demandeur recevable mais nonfondee.

Le demandeur estime pouvoir presenter le moyen decassation suivant à l'encontre de l'arret du 22 octobre2014.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Dispositions violees

* l'article 149 de la Constitution,

* l'article 1315 du Code civil,

* l'article 870 du Code judiciaire,

* les articles 3 et 11 (avant abrogation par la loi du4 avril 2014 relative aux assurances) de la loi du 25juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre,

* les articles 56 et 65 de la loi du 4 avril 2014relative aux assurances.

Decision attaquee

En son arret du 22 octobre 2014, la Cour d'appel de Monsdit seul l'appel principal, forme par la defenderesse,contre le jugement, rendu le 11 fevrier 2010 par leTribunal de premiere instance de Huy, fonde.

La cour d'appel met le jugement dont appel à neant et ditnon fondee la demande du demandeur, tendant à entendrecondamner la defenderesse à lui payer les sommes de11.385,90 EUR (le principal confirme par le jugement dontappel), 1059 EUR (frais d'entreposage), 150 EUR (fraisadministratifs), 5000 EUR (perte de jouissance d'unvehicule) et 1 EUR provisionnel evalue à 5000 EUR (avocatde cassation), à majorer des interets compensatoires etjudiciaires au taux legal depuis le 21 novembre 2008.

La cour d'appel condamne le demandeur à payer à ladefenderesse les frais et depens des deux instances, en cecompris les indemnites de procedure.

La cour d'appel fonde sa decision sur les motifs suivants:

« I. Antecedents de procedure

Par citation du 15 mai 2009, (le demandeur) poursuivait lacondamnation de (la defenderesse), son assureur RC etomnium pour son vehicule VW Passat immatricule ... vole le21 novembre 2008 à Huy et retrouve le 16 decembre suivantdans la Meuse avec une cle originale transpondeur sur lecontacteur et sans trace d'effraction, à lui payer lasomme provisionnelle d'un euro portee ensuite à 15.836,80EUR sur un dommage evalue à 27.000 EUR.

Cette demande etait contestee, (la demanderesse)contestant la realite du vol et n'estimant pas devoir sonintervention au motif du non-respect par son assure de sesobligations.

(...)

II. Discussion

(La defenderesse) conteste la realite du vol et invoquel'article 4 des conditions generales du contrat excluantson intervention lorsqu'une cle est restee dans ou sur levehicule pour s'opposer à la demande (du demandeur).

A titre subsidiaire, elle lui reproche de ne pas l'avoiravisee de ce qu'il ne disposait plus que d'une seule clesuite à sa separation et invoque l'article 26 S:1er de laloi du 25 juin 1992 relatif à l'aggravation du risque.

Plus subsidiairement, le defaut de restitution des clesoriginales lors de la declaration de vol justifie selonelle son refus de couverture.

Il appartient (au demandeur), conformement à l'article1315 alinea 1er du Code civil, de demontrer que le risquetel qu'il s'est realise est couvert et n'est pas exclu dela garantie de (la defenderesse) (Cass., 17 novembre 2005,Pas., p.2284).

Les conditions generales de la police d'assurance `confortauto' liant les parties excluent la couverture du vol`survenu lorsque le vehicule se trouve inoccupe et que lesprecautions indispensables ont ete negligees, notamment... cles et/ou dispositif de desarmement de l'antivolrestes dans ou sur le vehicule sauf si le vehicule setrouvait dans un garage individuel ferme à cle et qu'il ya eu effraction du garage'.

Cette clause est claire et ne necessite aucuneinterpretation.

Les constatations des verbalisateurs et les photographiesannexees au dossier repressif etablissent que la cle decontact se trouvait sur le contacteur du vehiculelorsqu'il a ete retire de la Meuse.

Il resulte par ailleurs du constat de l'huissier mandatepar (la defenderesse) dresse en presence (du demandeur) le12 fevrier 2009 que le vehicule ne presentait aucune traced'effraction au niveau des poignees des portes et desaretes de portes, que deux vitres etaient cassees auniveau des deux portes cote conducteur, que la directionetait bloquee et qu'une cle a ete retrouvee dans celui-ci.

(Le demandeur) pretend que `rien ne prouve que la cleretrouvee dans le vehicule soit le double lui appartenantet que ces cles sont restees sur ou dans le vehicule aumoment du vol'.

Cette affirmation ne lui permet pas de rapporter la preuvequi lui incombe de la couverture du sinistre.

Les elements objectifs du dossier rappeles ci-dessusetablissent en effet qu'une cle etait restee sur lecontacteur dans le vehicule, (le demandeur) ayant parailleurs reconnu ne disposer que de deux cles dont l'uneetait restee en possession de sa compagne depuis leurseparation en mars 2008, circonstance qui n'est pasetablie et que cette derniere a formellement conteste.

Sa demande n'est donc pas fondee sans qu'il soitnecessaire d'epiloguer sur les circonstances precises dusinistre » (arret, pp. 3-4).

Griefs

1. En vertu de l'article 149 de la Constitution, les jugesont l'obli-gation de motiver leur decision, c'est-à-dired'exprimer clairement et sans equivoque les raisons quiont determine leur conviction.

La motivation doit etre telle qu'elle permet à Votre Courd'effectuer son controle de legalite.

La presence de motifs ambigus dans une decision, equivautà une absence de motifs, et partant à une violation del'article 149 de la Constitution. Les motifs sont ambiguslorsqu'ils sont susceptibles d'au moins deuxinterpretations differentes et que, dans uneinterpretation, la decision attaquee est legalementjustifiee, tandis que, dans une (ou plusieurs) autre(s),elle ne l'est pas.

2.1 Le risque, couvert par l'assurance, est celui definipar voie legislative ou contractuelle et pour lequel, unefois realise en generant un sinistre, l'assure demandereparation à son assureur par voie d'indemnite ou decapital.

Cette definition du risque assure a un double aspect:d'une part, il y a la description des elementsconstitutifs du risque couvert, et, d'autre part, àl'oppose, s'en deduit ce qui manifestement n'est pascouvert, c'est-à-dire un risque qui est manifestement àl'exterieure de la definition.

2.2 A l'interieure du type de risque assure, il y a desexclusions de la couverture. Cette exclusion ne se resumepas à la simple definition negative du risque,c'est-à-dire aux elements qui manifestement lui sontetranger.

Exclusion et non-assurance ne sont pas synonyme. En effet,il est des hypotheses nombreuses, ou le risque couvert estgenerique, en matiere telle que dans certainescirconstances le risque prend la forme d'une sous-especeexclue de la couverture. Ainsi, p. ex., une assurancecontre les accidents corporels, qui exclut de sacouverture les dommages corporels survenus à l'occasiond'escalades en haute montagne.

2.3 Enfin, la decheance du droit à l'indemnisation est laperte de ce droit alors que le risque etait bien couvert.En regle, cette perte est la consequence d'un comportementdefendu de l'assure.

2.4 L'article 1315 du Code civil dispose que (a) celui quireclame l'execution d'une obligation doit la prouver, et(b) reciproquement, celui qui se pretend libere doitjustifier le paiement ou le fait qui a produitl'extinction de son obligation.

L'article 870 du Code judiciaire formule un raccourciprocedural: chacune des parties a la charge de prouver lesfaits qu'elle allegue.

2.5 En application de ces dispositions, et plusparticulierement l'article 1315, alinea premier du Codecivil, il appartient à l'assure qui reclame l'executionpar l'assureur de sa dette d'indemnisation, de prouver quele sinistre dont la reparation est demandee, entre biendans le risque couvert par l'assureur.

A l'inverse, en vertu du second alinea de l'article 1315du Code civil, lorsqu'il invoque l'existence d'une caused'exclusion ou de decheance, l'assureur qui pretend etredecharge de la garantie doit rapporter la preuve du faitallegue.

2.6 En vertu de l'article 11 de la loi du 25 juin 1992 surle contrat d'assurance terrestre, avant son abrogation parla loi du 4 avril 2014 relative aux assurances, et envertu de l'article 65 de ladite loi du 4 avril 2014, lecontrat d'assurance ne peut prevoir la decheance partielleou totale du droit à la prestation d'assurance qu'enraison de l'inexecution d'une obligation determinee,imposee par le contrat et à condition que le manquementsoit en relation causale avec la survenance du sinistre.

L'assureur qui se pretend libere de sa detted'indemnisation en raison de l'existence d'une cause dedecheance devra partant prouver, non seulementl'inexecution par l'assure d'une obligation determineeimposee par le contrat, mais egalement la relation causaleentre cette inexecution et la survenance du sinistre.

3. Il ne fut pas conteste que le demandeur avait concluavec la defenderesse un contrat d'assurance prevoyant lacouverture du vol de sa voiture.

La cour d'appel constate que « Les conditions generalesde la police d'assurance `confort auto' liant les partiesexcluent la couverture du vol `survenu lorsque le vehiculese trouve inoccupe et que les precautions indispensablesont ete negligees, notamment ... cles et/ou dispositif dedesarmement de l'antivol restes dans ou sur le vehiculesauf si le vehicule se trouvait dans un garage individuelferme à cle et qu'il y a eu effraction du garage' »(arret, p. 4, al. 2).

En application des articles 1315 du Code civil et 870 duCode judiciaire et des articles 11 de la loi du 25 juin1992 et 65 de la loi du 4 avril 2014, il incombait

* au demandeur de prouver qu'il y a eu vol de savoiture,

* à la defenderesse, qui se prevalait de la clauseprecitee dans les conditions generales de la policed'assurance, de rapporter la preuve du fait que, aumoment du vol, les cles se trouvent dans ou sur levehicule et de ce qu'il existe une relation causaleentre ce fait et le vol.

4. Apres avoir decide qu'il appartient au demandeur,conformement à l'article 1315, al. 1er du Code civil, dedemontrer que le risque tel qu'il s'est realise estcouvert « et n'est pas exclu de la garantie de (ladefenderesse) » (arret, p. 4, al. 1er), la cour d'appelconstate que

* la cle de contact se trouvait sur le contacteur duvehicule lorsqu'il a ete retire de la Meuse,

* le vehicule ne presentait aucune trace d'effractionau niveau des poignees des portes et des aretes deportes, que deux vitres etaient cassees au niveau desdeux portes cote conducteur, que la direction etaitbloquee et qu'une cle a ete retrouvee dans levehicule,

* le demandeur a reconnu ne disposer que de deux clesdont l'une etait restee en possession de sa compagnedepuis leur separation en mai 2008, circonstance quin'est pas etablie et que cette derniere aformellement contestee.

La cour d'appel decide que

* le demandeur pretend que rien ne prouve que la cleretrouvee dans le vehicule soit le double luiappartenant et que ces cles sont restees sur ou dansle vehicule au moment du vol,

* cette affirmation ne lui permet pas d'apporter lapreuve qui lui incombe de la couverture du sinistre,

* en effet, les elements objectifs du dossieretablissent qu'une cle etait restee sur le contacteurdu vehicule (arret, p. 4).

5. La cour d'appel declare ainsi la demande du demandeurnon fondee parce qu'il lui incombe de demontrer que lerisque tel qu'il s'est realise est couvert et n'est pasexclu de la garantie de la defenderesse (arret, p. 4, al.1er) et qu'il ne rapporte pas la preuve de la couverturedu sinistre (arret, p. 4, al. 7).

En decidant qu'il incombe au demandeur de demontrer que lerisque tel qu'il s'est realise est couvert et n'est pasexclu de la garantie de la defenderesse, la cour d'appelimpose au demandeur de demontrer

* que le risque tel qu'il s'est realise est couvert,c'est-à-dire qu'il y a eu vol de sa voiture,

* que le risque n'est pas exclu de la garantie,c'est-à-dire que le vol n'est pas survenu lorsque lavoiture se trouvait inoccupee et que les cles etaientrestees dans ou sur le vehicule.

Les motifs de l'arret entrepris ne permettent pas desavoir si la cour d'appel a declare la demande dudemandeur non fondee (a) parce que le demandeur n'etablitpas la realite du vol de son vehicule, (b) parce que ledemandeur n'etablit pas que, au moment du vol, les cles nese trouvaient pas sur ou dans le vehicule ou encore (c)parce qu'il est etabli que, au moment du vol, les cles setrouvaient sur ou dans le vehicule.

Si la cour d'appel declare la demande du demandeur nonfondee parce qu'il n'etablit pas la realite du vol, ladecision est legalement justifiee.

Si, par contre, la cour d'appel declare la demande dudemandeur non fondee parce que le demandeur n'etablit pasque, au moment du vol, les cles ne se trouvaient pas surou dans le vehicule (infra, nDEG6) ou parce qu'il estetabli que, au moment du vol, les cles se trouvaient surou dans le vehicule (infra, nDEG 7), la decision n'est paslegalement justifiee.

6. Si la cour d'appel declare la demande du demandeur nonfondee parce qu'il n'etablit pas que, au moment du vol,les cles ne se trouvaient pas sur ou dans le vehicule,l'arret entrepris n'est pas legalement justifie.

En vertu des articles 1315 du Code civil et 870 du Codejudiciaire, il n'incombait en effet pas au demandeurd'etablir que, au moment du vol de sa voiture, les cles nese trouvaient pas sur ou dans le vehicule. Il incombait,au contraire, à la defenderesse, qui alleguait que sonintervention etait, en vertu des conditions generales ducontrat, exclue si une cle etait restee dans ou sur levehicule, d'etablir que tel avait ete le cas,c'est-à-dire de prouver que, au moment du vol, une cle setrouvait dans ou sur le vehicule.

L'arret entrepris qui declare la demande du demandeur nonfondee, viole partant les articles 1315 du Code civil etl'article 870 du Code judiciaire.

7.1 Si la cour d'appel declare la demande du demandeur nonfondee parce qu'il est etabli (par la defenderesse) qu'unecle se trouvait, au moment du vol, dans le vehicule,l'arret entrepris n'est pas davantage legalement justifie.

7.2 Aux termes de l'article 11 de la loi du 25 juin 1992sur le contrat d'assurance terrestre, avant son abrogationpar la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances, et envertu de l'article 65 de cette loi du 4 avril 2014, lecontrat d'assurance ne peut prevoir la decheance partielleou totale du droit à la prestation d'assurance qu'enraison de l'inexecution d'une obligation determineeimposee par le contrat et à condition que le manquementsoit en relation causale avec la survenance du sinistre.

En vertu du caractere imperatif de ces dispositions,consacre par les articles 3 de la loi du 25 juin 1992 et56 de la loi du 4 avril 2014, il appartient au juge deverifier si une clause du contrat d'assurance, presenteesous une autre qualification, ne constitue pas une clausede decheance.

La clause qui permet à l'assureur de refuser sa garantieen raison de l'inexecution par l'assure de ses obligationsconventionnelles constitue une clause de decheance au sensdes articles 11 de la loi du 25 juin 1992 et 65 de la loidu 4 avril 2014.

L'arret entrepris constate que « Les conditions generalesde la police d'assurance `confort auto' liant les partiesexcluent la couverture du vol `survenu lorsque le vehiculese trouve inoccupe et que les precautions indispensablesont ete negligees, notamment ... cles et/ou dispositif dedesarmement de l'antivol restes dans ou sur le vehiculesauf si le vehicule se trouvait dans un garage individuelferme à cle et qu'il y a eu effraction du garage' »(arret, p. 4, al. 2).

Cette clause, contenue dans les conditions generales de lapolice d'assurance, permet ainsi à l'assureur de refusersa garantie en raison de l'inexecution par l'assure d'uneobligation conventionnelle, c'est-à-dire de l'obligationde ne pas laisser de cle dans ou sur le vehicule inoccupe.

Il s'agit partant d'une clause de decheance, de sorte quela defenderesse ne peut refuser sa garantie que si elleetablit que l'inexecution par le demandeur de sonobligation contractuelle est en relation causale avec levol de sa voiture.

L'arret declare la demande du demandeur non fondee parcequ'il est etabli qu'une cle se trouvait dans le vehiculeau moment ou il a ete vole, sans examiner si la clauselitigieuse du contrat d'assurance vol doit etre qualifieede clause de decheance et sans examiner si la circonstancequ'une cle se trouvait dans la voiture au moment du volest en relation causale avec le vol.

En declarant la demande du demandeur non fondee au motifqu'il est etabli qu'une cle se trouvait dans le vehiculeau moment ou il a ete vole, sans examiner si la clauselitigieuse du contrat d'assurance vol doit etre qualifieede clause de decheance et sans constater que cetteinexecution d'une obligation contractuelle par ledemandeur est en relation causale avec le vol, l'arretentrepris viole les articles 3 et 11 de la loi 25 juin1992 sur le contrat d'assurance terrestre (l'article 11tel qu'il etait applicable avant son abrogation par la loidu 4 avril 2014) et les articles 56 et 65 de la loi du 4avril 2014 relative aux assurances.

8. Les motifs de l'arret entrepris sont ainsi susceptiblesde trois interpretations differentes. Dans uneinterpretation, la decision est legalement justifiee,tandis que dans les deux autres interpretations (ou, àtout le moins, dans une de ces deux autresinterpretations), la decision attaquee n'est paslegalement justifiee.

L'arret entrepris est ainsi fonde sur des motifs ambiguset viole l'article 149 de la Constitution et, pour autantque besoin, les articles 1315 du Code civil, 870 du Codejudiciaire, 3 et 11 (avant son abrogation par la loi du 4avril 2014 relative aux assurances) de la loi du 25 juin1992 sur le contrat d'assurance terrestre, 56 et 65 de laloi du 4 avril 2014 relative aux assurances.

Developpements

Le demandeur se refere

* en ce qui concerne le nDEG 6 des griefs, aux arretsde Votre Cour des 26 octobre 2007 (Pas. 2007, nDEG507, precedes des conclusions de l'Avocat generalHenkes, commentees dans le Rapport annuel de VotreCour 2007, p. 52), 19 mai 2005 (Pas. 2005 nDEG 284),2 avril 2004 (Pas. 2004, nDEG 178, avec lesconclusions de l'Avocat general De Riemaecker), 18janvier 2002 (Pas. 2002, nDEG 42, avec lesconclusions du Premier Avocat general Henkes) et 7juin 2001 (Pas. 2001, nDEG 344),

* en ce qui concerne le nDEG 7 des griefs, à l'arretde Votre Cour du 20 septembre 2012 (Pas. 2012, nDEG447, avec les conclusions de l'Avocat generalGenicot).

PAR CES CONSIDERATIONS,

L'avocat à la Cour de Cassation soussignee conclut pourle demandeur à ce qu'il Vous plaise, Mesdames etMessieurs, casser l'arret entrepris, renvoyer la cause etles parties devant une autre cour d'appel, depens comme dedroit.

Bruxelles, le 21 avril 2015

5 FEVRIER 2016 C.15.0179.F/1

Requete/15


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0179.F
Date de la décision : 05/02/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-02-05;c.15.0179.f ?
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