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10/03/2016 | BELGIQUE | N°F.14.0034.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 mars 2016, F.14.0034.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.14.0034.N

SOLIVAR, s.a.,

Me Michel Maus, avocat au barreau de Bruges,

contre

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances,

Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation, et Me Stefan DeVleeschouwer, avocat au barreau de Bruxelles.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 octobre 2013par la cour d'appel de Gand.

L'avocat general Dirk Thijs a depose des conclusions ecrites le 19 octobre2015.



Le president de

section Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general Dirk Thijs a conclu.

II. Les moyens de cassation

Dans la requete...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.14.0034.N

SOLIVAR, s.a.,

Me Michel Maus, avocat au barreau de Bruges,

contre

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances,

Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation, et Me Stefan DeVleeschouwer, avocat au barreau de Bruxelles.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 octobre 2013par la cour d'appel de Gand.

L'avocat general Dirk Thijs a depose des conclusions ecrites le 19 octobre2015.

Le president de section Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general Dirk Thijs a conclu.

II. Les moyens de cassation

Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente quatre moyens.

III. La decision de la Cour

[...]

Sur le quatrieme moyen :

7. Aux termes de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droitsde l'homme et des libertes fondamentales, toute personne a droit à ce quesa cause soit entendue equitablement, publiquement et dans un delairaisonnable, par un tribunal independant et impartial, etabli par la loi,qui decidera, soit des contestations sur ses droits et obligations decaractere civil, soit du bien-fonde de toute accusation en matiere penaledirigee contre elle.

8. En vertu de l'article 57, 1DEG, du Code des impots sur les revenus1992, tel qu'il etait applicable pour les exercices 2008 et 2009, lescommissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations ouhonoraires occasionnels ou non, gratifications, retributions ou avantagesde toute nature qui constituent pour les beneficiaires des revenusprofessionnels imposables ou non en Belgique, à l'exclusion desremunerations visees à l'article 30, 3DEG, ne sont consideres comme desfrais professionnels que s'ils sont justifies par la production de fichesindividuelles et d'un releve recapitulatif etablis dans les formes etdelais determines par le Roi.

L'article 219, alinea 1er, du meme code, tel qu'il etait applicable pourles exercices 2008 et 2009, dispose qu'une cotisation distincte estetablie à raison des depenses visees à l'articles 57 et des avantages detoute nature vises aux articles 31, alinea 2, 2DEG, et 32, alinea 2, 2DEG,qui ne sont pas justifies par la production de fiches individuelles etd'un releve recapitulatif ainsi qu'à raison des benefices dissimules quine se retrouvent pas parmi les elements du patrimoine de la societe, etdes avantages financiers ou de toute nature vises à l'article 53, 24DEG.

Suivant le deuxieme alinea de cette disposition legale, cette cotisationest egale à 300 p.c. de ces depenses, avantages de toute nature,avantages financiers et benefices dissimules.

9. L'imposition distincte à l'impot des societes des commissions secretestend à obliger les contribuables à respecter leur obligation de donnerdans les formes legales et dans le delai legal à l'administration fiscaleles informations lui permettant de soumettre à l'imposition ceux qui ontperc,u ces commissions.

Il ressort de la genese de la loi que l'imposition distincte a ete porteede 200 à 300 p.c. par le legislateur pour lui donner un effet dissuasifet qu'en raison de son tarif eleve, il est impossible de considerer cetteimposition comme ayant en sa totalite le caractere d'une indemnite etqu'elle a donc aussi un caractere de prevention et de repression.

10. La circonstance qu'une sanction fiscale ou l'imposition d'un impotparticulier ne peut etre qualifiee de sanction penale en droit internen'exclut pas que cette mesure puisse etre de nature penale au sens del'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales.

Tel est le cas lorsque la disposition violee s'adresse à tous lescitoyens en leur qualite de contribuable, que la sanction infligee oul'impot particulier n'a pas seulement une fonction indemnitaire mais aessentiellement un but de prevention et de repression, et que l'importancede la sanction ou de l'impot est considerable.

Il appartient au juge d'apprecier si l'imposition des commissions secretesprise dans son ensemble repond à ces criteres, auquel cas elle constitue,au sens de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales, une sanction penale soumise aucontrole de proportionnalite. Lors de cette appreciation, le juge ne peutscinder l'imposition en une partie qualifiee d'indemnite et une autrepartie qualifiee de sanction. Lorsque le juge admet que l'impositionparticuliere consideree dans son ensemble constitue une sanction au sensde l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertes fondamentales, il doit examiner in concreto s'il existe descirconstances justifiant que l'imposition soit reduite en-dessous du tariffixe par la loi.

11. En considerant que seule la part repressive de l'impositionparticuliere constitue une sanction au sens de l'article 6.1 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales et en se bornant, pour cette raison, à controler le seulaspect repressif de l'imposition particuliere à la lumiere du principe deproportionnalite, les juges d'appel ont viole ledit article 6.1.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque en tant qu'il statue sur l'imposition particulieredes commissions secretes et sur les depens ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel d'Anvers.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Eric Dirix, president, les presidentsde section Beatrijs Deconinck et Alain Smetryns, les conseillers GeertJocque et Koenraad Moens, et prononce en audience publique du dix marsdeux mille seize par le president de section Eric Dirix, en presence del'avocat general Dirk Thijs, avec l'assistance du greffier Kristel VandenBossche.

Traduction etablie sous le controle du president de section ChristianStorck et transcrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

Le greffier, Le president de section,

Requete

10 MARS 2016 F.14.0034.N/1

Requete/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.14.0034.N
Date de la décision : 10/03/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-03-10;f.14.0034.n ?
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