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23/05/2016 | BELGIQUE | N°S.14.0002.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 mai 2016, S.14.0002.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.14.0002.F

UNION NATIONALE DES MUTUALITES LIBRES, dont le siege est etabli àWoluwe-Saint-Pierre, rue Saint-Hubert, 19,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Paul Lefebvre, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 480, ou il est faitelection de domicile,

contre

I. D.,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er octobre2013 par la cour du travail de L

iege.

Le 29 mars 2016, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.14.0002.F

UNION NATIONALE DES MUTUALITES LIBRES, dont le siege est etabli àWoluwe-Saint-Pierre, rue Saint-Hubert, 19,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Paul Lefebvre, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 480, ou il est faitelection de domicile,

contre

I. D.,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er octobre2013 par la cour du travail de Liege.

Le 29 mars 2016, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat general JeanMarie Genicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente un moyen.

III. La decision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la premiere branche :

D'une part, l'article 101, S: 3, de la loi relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994,dans la redaction applicable apres sa modification par la loi du 28 avril2010, assimile à des jours indemnises, pour la determination de sesdroits aux prestations de securite sociale, les jours durant lesquels letitulaire reconnu incapable de travailler a accompli un travail nonautorise et pour lesquels les indemnites sont recuperees.

Cette disposition assimile les jours de travail à des jours indemnises,pour la determination des droits du titulaire aux prestations del'assurance indemnites.

D'autre part, l'article 101, S: 3, de la loi coordonnee prime le principegeneral du droit fraus omnia corrumpit.

Le moyen, qui, en cette branche, soutient le contraire, manque en droit.

Quant à la deuxieme branche :

1. Par la consideration que, en application de l'article 101, S: 3,precite, la « periode [du 31 decembre 2008 au 1er mars 2011] estassimilee à des jours indemnises pour la determination des droits auxprestations de securite sociale du titulaire », l'arret repond auxconclusions de la demanderesse qui soutenait que, à partir du 10 octobre2011, la defenderesse ne remplissait pas les conditions du droit auxindemnites d'incapacite de travail fixees par les articles 86, S: 1er, et131 de la loi coordonnee et qu'elle ne justifiait pas d'une periode destage.

Dans la mesure ou il invoque la violation de l'article 149 de laConstitution, le moyen, en cette branche, manque en fait.

2. Pour le surplus, en vertu de l'article 86, S: 1er, 1DEG, a), de la loicoordonnee, sont beneficiaires du droit aux indemnites en qualite detitulaires les travailleurs assujettis à l'assurance obligatoireindemnites en vertu de la loi du 27 juin 1969 revisant l'arrete-loi du 28decembre 1944 concernant la securite sociale des travailleurs,c'est-à-dire, suivant l'article 1er, S: 1er, de cette derniere loi, lestravailleurs lies par un contrat de travail. En vertu du 2DEG du memearticle 86, S: 1er, sont egalement titulaires les travailleurs qui, aucours d'une periode d'incapacite de travail, perdent cette qualite detravailleur assujetti à l'assurance obligatoire indemnites.

En vertu de l'article 128, S: 1er, de la loi coordonnee, pour obtenir lesprestations prevues par l'assurance indemnites, ces titulaires doiventavoir accompli un stage d'un certain nombre de jours de travail au coursd'une periode de six mois precedant la date d'obtention du droit etfournir la preuve que les cotisations pour le secteur des indemnites ontete effectivement payees pour cette meme periode.

Suivant l'article 130, alinea 1er, de la meme loi, les titulaires qui ontaccompli le stage conformement à l'article 128 peuvent continuer àbeneficier des prestations prevues par l'assurance indemnites à lacondition que, pour les deuxieme et troisieme trimestres precedant celuiau cours duquel ils y font appel, 1DEG, ils aient conserve à un titrequelconque la qualite de titulaire definie à l'article 86, S: 1er,pendant un nombre de jours ouvrables egal au nombre de jours de travailprevu à l'article 128, S: 1er, precite, et 2DEG, les cotisations pour lesecteur des indemnites aient ete payees.

S'agissant de la qualite de titulaire definie à l'article 86, S: 1er, lestravailleurs salaries en periode d'incapacite de travail la conserventlorsqu'ils restent lies par un contrat de travail comme prevu au 1DEG, a),de cette disposition ou lorsque le contrat de travail prend fin commeprevu au 2DEG.

S'agissant des cotisations pour le secteur des indemnites, l'article 130,alinea 2, precise qu'elles doivent atteindre le montant minimum fixe parle Roi ou etre completees par des cotisations personnelles dans lesconditions fixees par Lui.

Pour la periode au cours de laquelle le titulaire a ete reconnu incapablede travailler, l'article 290, A, 2, 1DEG, de l'arrete royal du 3 juillet1996 portant execution de la loi relative à l'assurance obligatoire soinsde sante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994, neutralise lecomplement de cotisations à payer en vertu de l'article 287 lorsque lavaleur des cotisations est inferieure aux minimums fixes à l'article 286de l'arrete royal. Il s'ensuit que les travailleurs salaries qui ontaccompli le stage conformement à l'article 128 de la loi coordonneecontinuent en vertu de l'article 130, alinea 1er, de la meme loi àbeneficier des prestations prevues par l'assurance indemnites lorsque,durant les deuxieme et troisieme trimestres precedant celui au coursduquel ils y font appel, ils connaissent une ou plusieurs periodesd'incapacite de travail.

En vertu de l'article 131, les indemnites d'incapacite de travail sontdues au titulaire s'il ne s'est pas ecoule une periode ininterrompue deplus de trente jours entre la date de debut de son incapacite de travailet le dernier jour d'une periode pendant laquelle il avait la qualite detitulaire visee à l'article 86, S: 1er, ou etait reconnu incapable detravailler au sens de la loi.

3. L'article 101, S: 1er, de la loi cordonnee, dans la redactionapplicable apres sa modification par la loi du 28 avril 2010, dispose quele titulaire reconnu incapable de travailler qui a effectue un travailsans l'autorisation visee à l'article 100, S: 2, est soumis à un examenmedical en vue de verifier si les conditions de reconnaissance del'incapacite de travail sont reunies à la date de l'examen. En cas dedecision negative, une decision de fin de reconnaissance est notifiee autitulaire.

L'examen medical precite verifie les conditions de reconnaissance del'incapacite de travail enoncees par l'article 100, S: 1er, à savoir lacessation de toute activite en consequence directe du debut ou del'aggravation de lesions ou de troubles fonctionnels dont il est reconnuqu'ils entrainent une reduction de la capacite de gain du titulaire.

Ainsi que cela ressort de la reponse à la premiere branche du moyen, pourl'application des articles 130 et 131 de la loi coordonnee et 290, A, 2,1DEG, de l'arrete royal, l'article 101, S: 3, de la loi coordonneeassimile à des jours indemnises, au cours desquels le titulaire estreconnu incapable de travailler, ceux durant lesquels il a accompli untravail non autorise et pour lesquels les indemnites sont recuperees.

Il s'ensuit que, apres de tels jours de travail non autorise, si lesconditions de reconnaissance de l'incapacite de travail enoncees parl'article 100, S: 1er, sont reunies à la date de l'examen medical prevupar l'article 101, S: 1er, le titulaire beneficie des indemnites sansdevoir accomplir à nouveau le stage prevu à l'article 128, S: 1er.

Le moyen, qui, en cette branche, soutient le contraire, manque en droit.

Quant à la troisieme branche :

Le moyen reproche à l'arret d'appliquer l'article 101 de la loicoordonnee alors que la defenderesse a repris un travail à temps plein.

L'arret ne constate pas cette circonstance de fait qu'il n'est pas aupouvoir de la Cour de verifier.

Le moyen, en cette branche, est irrecevable.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de huit cent vingt-quatre euros trente-cinqcentimes envers la partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Martine Regout, les conseillers DidierBatsele, Mireille Delange, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, etprononce en audience publique du vingt-trois mai deux mille seize par lepresident de section Martine Regout, en presence de l'avocat generaldelegue Michel Palumbo, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+------------------------------------------+
| L. Body | S. Geubel | M.-Cl. Ernotte |
|------------+------------+----------------|
| M. Delange | D. Batsele | M. Regout |
+------------------------------------------+

Requete

Requete en cassation

Pour : L'Union Nationale des mutualites libres, societe Mutualiste dePrevoyance, dont le siege est etabli à 1150 Bruxelles, rue Saint-Hubert19 et inscrite à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numero0411.766.483;

Demanderesse en cassation,

Assistee et representee par Me Paul Lefebvre, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à 1050 Bruxelles, avenue Louise480/9, ou il est fait election de domicile ;

Contre : Madame I. D. ;

Defenderesse en cassation

* * *

A Messieurs les Premier President et Presidents, Mesdames et Messieurs lesConseillers composant la Cour de cassation de Belgique,

Messieurs,

Mesdames,

La demanderesse a l'honneur de deferer à votre censure l'arret renducontradictoirement entre les parties par la 1iere chambre de la cour dutravail de Liege à l'audience du 1er octobre 2013 (nDEG R.G. 2013/AL/207- Rep. 2013/1376).

Faits et antecedents de la procedure

1. La defenderesse etait en incapacite de travail, au sens de l'article100 de la Loi relative à l'assurance obligatoire soins de sante etindemnites, coordonnee le 14 juillet 1994 (ci-apres « Loi du 14juillet 1994 »), depuis le 25 mai 1994.

2. Suite à une enquete realisee par le service de controle de l'INAMI,il est apparu que la defenderesse avait repris l'exercice d'uneactivite professionnelle sans l'autorisation prealable dumedecin-conseil. Elle exerc,ait, en effet, la fonction de gerante d'unetablissement de brasserie et de jeux.

N'ayant pas averti sa mutuelle (Omnimut) de ce changement, elle a, parconsequent, continue à percevoir indument des indemnites d'incapacite detravail entre le 31 decembre 2008 et le 1er mars 2011.

3. Par courrier du 19 septembre 2011, la demanderesse reclama leremboursement d'un indu de 30.640,23 euros.

4. Le 10 octobre 2011, la defenderesse introduisit une demande dereconnaissance d'incapacite de travail aupres de la demanderesse.

Celle-ci donna lieu à une decision de refus de reconnaissance del'incapacite de travail, le 13 octobre 2011, ainsi qu'à une demande deremboursement des soins de sante à hauteur de 2.991,45 euros, le 2novembre 2011.

Ces decisions ont - chacune - fait l'objet d'un recours de la part de ladefenderesse devant le tribunal du travail de Liege.

5. Par jugement du 18 mars 2013, le tribunal du travail ordonna lajonction de desdites affaires.

Le rapport d'expertise dresse par le docteur D., attestant de l'etatd'incapacite de la defenderesse au 6 juin 2012, fut enterine et letribunal decida, sur pied des articles 100 et 101 de la Loi du 14 juillet1994, que la defenderesse redevenait legalement indemnisable à compter du10 octobre 2011.

6. La demanderesse interjeta appel contre cette decision par requete du 5avril 2013. Selon elle, tant les conditions relatives à la qualite detitulaire pouvant pretendre à une indemnisation que celles relativesà la validite dans le temps de cette qualite n'etaient pas reunies enl'espece.

La defenderesse ne pouvait, des lors, beneficier d'un droit àindemnisation à partir du 10 octobre 2011.

7. Par arret du 1er octobre 2013, la cour du travail de Liege declaral'appel recevable mais non-fonde. La demanderesse fut condamnee auxdepens d'appel et la cause fut renvoyee devant le tribunal du travailde Liege.

A l'encontre de cette decision, la demanderesse fait valoir les griefssuivants :

Moyen Unique

Dispositions legales violees

* L'article 149 de la Constitution ;

* les articles 86, S: 1er (tel que modifie par l'article 3 de la Loi du4 aout 1996 modifiant la Loi relative à l'assurance obligatoire soinsde sante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994, l'article 25 del'Arrete Royal du 18 fevrier 1997 modifiant l'Arrete Royal du 14septembre 1984 etablissant la nomenclature des prestations de sante enmatiere d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites,l'article 95 de la Loi du 26 mars 1999 relative au plan d'action belgepour l'emploi 1998 et portant des dispositions diverses, l'article 20de l'Arrete Royal du 10 juin 2001 relatif à l'harmonisation de lasecurite sociale à l'Arrete Royal du 10 juin 2001 portant definitionuniforme de notions relatives au temps de travail à l'usage de lasecurite sociale, en application de l'article 39 de la Loi du 26juillet 1996 portant modernisation de la securite sociale et assurantla viabilite des regimes legaux des pensions, par l'article 160 de laLoi-programme (I) du 24 decembre 2002 et par l'article 87 de laLoi-programme du 8 avril 2003), 100, S: 1er (tel que modifie parl'article 15 de la Loi du 3 juillet 2005 relative aux droits desvolontaires et par l'article 86 de la Loi du 13 juillet 2006 portantdes dispositions diverses en matiere de maladies professionnelles etd'accidents du travail et en matiere de reinsertion professionnelle),101 (tel que modifie par l'article 140 de la Loi du 25 janvier 1999portant des dispositions sociales, l'article 99 de la Loi du 28 avril2010 portant des dispositions diverses et avant sa modification parl'article 17 de la Loi-programme (I) du 4 juillet 2011), 128 et 131 dela Loi relative à l'assurance obligatoire soins de sante etindemnites coordonnee le 14 juillet 1994 (ci-apres « Loi du 14juillet 1994 ») ;

* le principe general de droit « fraus omnia corrumpit ».

Decision attaquee

L'arret attaque confirme le jugement entrepris decidant que ladefenderesse redevenait legalement indemnisable à compter de la date del'expertise sur pied des motifs suivants :

« 1. L'article 101 de la loi relative à l'assurance obligatoire soins desante et indemnites coordonnee le 14 juillet 1994, tel que modifie par laloi du 25 janvier 199[9], dispose:

- en son alinea 1er que le travailleur reconnu incapable de travailler quia effectue un travail sans l'autorisation prealable visee à l'article100, S: 2, mais dont la capacite de travail est reduite d'au moins 50% dupoint de vue medical, est tenu de rembourser les indemnites qu'il aperc,ues pour les jours ou la periode durant lesquels ou laquelle il aaccompli ce travail non autorise;

- en son alinea 2 qu'il est toutefois repute etre reste frappe d'uneincapacite de travail, et que les jours pour lesquels les indemnitesd'incapacite de travail sont recuperees en application de l'alinea 1ersont assimiles à des jours pour lesquels une indemnite a ete octroyeepour la fixation des droits aux prestations de la securite sociale dutitulaire et des personnes dont il a la charge.

2. Le meme article 101, tel que modifie par la loi du 28 avril 2010, entreen vigueur le 31 decembre 2010, dispose :

- en son paragraphe 1er que le titulaire reconnu incapable de travaillerqui a effectue un travail sans l'autorisation prealable visee à l'article100 S: 2 ou sans respecter les conditions de l'autorisation est soumis àun examen medical en vue de verifier si les conditions de reconnaissancede l'incapacite de travail sont reunies à la date de l'examen ;

- en son paragraphe 2 que le titulaire vise au S: 1 est tenu de rembourserles indemnites d'incapacite de travail qu'il a perc,ues pour les jours oula periode durant lesquels il a accompli le travail non autorise ;

- en son paragraphe 3 que les jours ou la periode pour lesquels lesindemnites sont recuperees, sont assimiles à des jours indemnises pour ladetermination des droits aux prestations de securite sociale du titulaire,ainsi que des personnes à charge de celui-ci.

3. En l'espece, [la defenderesse] a ete convoquee par courrier du 13septembre 2011 pour un examen medical mais la convocation a ete annuleedes le 14 septembre 2011 en raison d'un « contretemps » ; en raison durefus de [la demanderesse] d'executer cette obligation, [la defenderesse]a saisi le juge des referes et l'expert judiciaire designe a concluqu'elle est bien incapable au sens de l'article 100 susdit, conclusionsd'ailleurs non contestees par [la demanderesse].

4. Si des lors [la defenderesse] doit rembourser les indemnites perc,uesentre le 31 decembre 2008 et le 1er mars 2011, il n'en reste pas moins quecette periode est assimilee à des jours indemnises pour la determinationdes droits aux prestations de securite sociale du titulaire ainsi que despersonnes à charge de celui-ci (...).

5. Il s'ensuit que l'appel n'est pas fonde et que le jugement entreprisdoit etre confirme.

6. Les depens d'appel sont mis à charge de [la demanderesse] enapplication de l'article 1017, alinea 2, du code judiciaire.

7. La cause est renvoyee pour le surplus devant le tribunal du travail deLiege ».

Griefs

Premiere branche

L'article 101, S: 1er de la Loi du 14 juillet 1994 prevoit que « letitulaire reconnu incapable de travailler qui a effectue un travail sansl'autorisation prealable visee à l'article 100, S: 2, ou sans respecterles conditions de l'autorisation, est soumis à un examen medical en vuede verifier si les conditions de reconnaissance de l'incapacite de travailsont reunies à la date de l'examen ».

Le troisieme paragraphe de cette disposition, qui trouve ses origines àl'article 56bis de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant unregime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites, precise que« les jours ou la periode pour lesquels les indemnites sont recuperees,sont assimiles à des jours indemnises pour la determination des droitsaux prestations de securite sociale du titulaire, ainsi que des personnesà charge de celui-ci ».

Ce principe d'assimilation de la periode incriminee de reprise d'activiteà des jours indemnises pour la determination des droits aux prestationsde securite sociale a ete insere afin de temperer les consequences,parfois lourdes, qu'une reprise illegale d'activite pouvait avoir pourl'interesse et sa famille. Dans une telle situation, l'interesse devait,en effet, non seulement rembourser les indemnites d'incapacite de travail,mais egalement tous les soins de sante payes pour lui et les personnes àsa charge ainsi que toutes les allocations familiales versees durant cetteperiode. En outre, tous les jours de maladie pris en compte pour le calculde la pension et du pecule de vacances etaient supprimes.

Si l'ajout du principe d'assimilation entendait, ainsi, temperer de tellesconsequences par rapport à la famille de l'interesse, il ne s'agissait,toutefois, pas de liberer l'interesse de toute sanction. Ainsi, lorsquel'article 101, S: 3 de la Loi du 14 juillet 1994 - anciennement l'article56bis de la Loi du 9 aout 1963 - prevoit que « les jours ou la periodepour lesquels les indemnites sont recuperees, sont assimiles à des joursindemnises pour la determination des droits aux prestations de securitesociale du titulaire, ainsi que des personnes à charge de celui-ci »,cela ne peut evidemment concerner le droit aux indemnites pour incapacitede travail, objet de la fraude commise par la reprise illegale d'activite.Soutenir le contraire reviendrait à oter tout caractere dissuasif à unereprise illegale d'activite ainsi que tout controle par rapport auxconditions generales requises afin de pouvoir pretendre à nouveau austatut d'incapacite de travail, ce qui ne peut etre l'intention dulegislateur et qui serait, par ailleurs, contraire au principe general dedroit « fraus omnia corrumpit ».

L'intention du legislateur est de confiner les consequences de la repriseillegale d'activite aux indemnites d'incapacite de travail et d'eviter quela fraude ait des repercussions ou un effet de domino sur les autresdroits conferes par la securite sociale dont beneficient egalement ceux(enfants et conjoints) qui sont à charge du fraudeur.

Les travaux preparatoires confirment ce temperament lorsqu'ils precisentque la periode incriminee sera prise en compte pour l'application desconditions relatives à l'octroi du droit aux prestations de sante auxtitulaires et aux personnes à sa charge et pour la determination desdroits des titulaires et leurs ayants droits aux prestations prevues pard'autres lois relatives à la securite sociale (Proposition de Loimodifiant l'article 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisantun regime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites, Chambre,Session 1988-89, Doc. 810/1).

Quant aux conditions relatives au droit aux indemnites pour incapacite detravail, celles-ci ne rentrerons dans l'ordre que « lorsque lebeneficiaire auquel a ete signifiee la constatation d'un travail nonautorise peut à nouveau pretendre aux indemnites » (Proposition de Loimodifiant l'article 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisantun regime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites, Chambre,Session 1988-89, Doc. 810/1).

Or, l'arret attaque decide que « si des lors [la defenderesse] doitrembourser les indemnites perc,ues entre le 31 decembre 2008 et le 1ermars 2011, il n'en reste pas moins que cette periode est assimilee à desjours indemnises pour la determination des droits aux prestations desecurite sociale du titulaire ainsi que des personnes à charge decelui-ci » et qu'il « s'ensuit que l'appel n'est pas fonde et que lejugement entrepris doit etre confirme » (arret attaque, p. 3).

Le jugement a quo avait decide que la defenderesse « presente bien à ladate de l'expertise ainsi qu'à la date du 10/10/2011 l'etat d'incapacitetel qu'il est determine par les articles 100 et 101 de la loi coordonneedu 14 juillet 1994 » et qu'« à partir de cette date [la defenderesse]redevient legalement indemnisable » (jugement a quo, pp. 3-4).

En considerant que les jours indemnises sont assimiles à des jours pourla determination des droits aux prestations de securite sociale, encompris pour la determination du droit aux indemnites pour incapacite detravail, alors que s'il est indiscutable que le legislateur voulait fairepreuve de mansuetude par rapport aux prestations de securite socialeautres que le droit aux indemnites pour incapacite de travail, objet de lareprise illegale et, des lors, frauduleuse, d'activite, il n'en est rienpour ce dernier, les juges d'appel violent la portee de l'article 101, S:3 de la Loi du 14 juillet 1994 ainsi que le principe general de droit« fraus omnia corrumpit ».

Deuxieme branche

La Loi du 14 juillet 1994 soumet l'octroi d'indemnites pour incapacite detravail à une serie de conditions.

Tout d'abord, il faut avoir la qualite requise au sens de l'article 86, S:1er de la Loi du 14 juillet 1994. Il s'agit, notamment, « destravailleurs qui se trouvent dans une des situations visees à l'article32, alinea 1er, 3DEG, et 5DEG » et « des travailleurs qui, au coursd'une periode d'incapacite de travail (ou de protection de la maternite),telle qu'elle est definie par la presente loi coordonnee, perdent laqualite de titulaire visee au 1DEG, a) ».

Il importe, ensuite, d'etre frappe d'une incapacite de travail au sens del'article 100, S: 1, alinea 1, de la Loi du 14 juillet 1994 : « Estreconnu incapable de travailler au sens de la presente loi coordonnee, letravailleur qui a cesse toute activite en consequence directe du debut oude l'aggravation de lesions ou de troubles fonctionnels dont il estreconnu qu'ils entrainent une reduction de sa capacite de gain, à un tauxegal ou inferieur au tiers de ce qu'une personne de meme condition et dememe formation peut gagner par son travail, dans le groupe de professionsdans lesquelles se range l'activite professionnelle exercee parl'interesse au moment ou il est devenu incapable de travailler ou dans lesdiverses professions qu'il a ou qu'il aurait pu exercer du fait de saformation professionnelle ».

Enfin, le travailleur devra repondre aux conditions d'octroi desprestations afin de pouvoir beneficier de celles-ci. L'article 128 de laLoi du 14 juillet 1994 prevoit, ainsi, que « pour obtenir le droit auxprestations prevues au titre IV, les titulaires vises à l'article 86, S:1er, doivent accomplir un stage dans les conditions suivantes :

1DEG avoir totalise, au cours d'une periode de six mois precedant la dated'obtention du droit, un nombre de jours de travail que le Roi determine.Les jours d'inactivite professionnelle assimilables à des journees detravail effectif sont definis par le Roi. Il definit ce qu'il y a lieud'entendre par "journee de travail";

2DEG fournir la preuve, dans les conditions determinees par le Roi, quepar rapport à cette meme periode, les cotisations pour le secteur desindemnites ont ete effectivement payees, ces cotisations doivent atteindreun montant minimum fixe par le Roi ou doivent, dans les conditions fixeespar Lui, etre completees par des cotisations personnelles ».

L'article 131 prevoit, quant à lui, le maintien de la qualite debeneficiaire lorsque le travailleur viendrait à retomber en incapacite detravail suite à une reprise tres breve d'activite : « les indemnitesincapacite de travail ne sont dues aux titulaires qu'à la condition qu'ilne se soit pas ecoule une periode ininterrompue de plus de trente joursentre la date de debut de leur incapacite de travail et le dernier jourd'une periode pendant laquelle ils avaient la qualite de titulaire viseeà l'article 86, S: 1er, ou etaient reconnus incapables de travailler ausens de la presente loi coordonnee ».

Ce n'est que si l'ensemble de ces conditions sont reunies que letravailleur pourra pretendre à une indemnite pour incapacite de travail.

L'etat d'incapacite de travail n'implique pas necessairement la cessationde toute activite professionnelle. L'article 100, S: 2 de la Loi du 14juillet 1991 permet, en effet, une reprise d'activite moyennantl'autorisation prealable du medecin-conseil lorsque le travailleur restefrappe d'une incapacite de travail superieure à 50% d'un point de vue nonpas economique mais medical.

Le travailleur qui viendrait à reprendre une activite sans l'autorisationprealable du medecin-conseil se verra infliger le regime prevu àl'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994, qui prevoit ce qui suit :

« S: 1er. Le titulaire reconnu incapable de travailler qui a effectue untravail sans l'autorisation prealable visee à l'article 100, S: 2, ousans respecter les conditions de l'autorisation, est soumis à un examenmedical en vue de verifier si les conditions de reconnaissance del'incapacite de travail sont reunies à la date de l'examen. Le Roidetermine le delai dans lequel cet examen doit etre effectue, à compterde la constatation de l'activite non autorisee ou de la communication decelle-ci.

En cas de decision negative, une decision de fin de reconnaissance estnotifiee au titulaire dans le delai determine par le Roi.

S: 2. Le titulaire vise au paragraphe 1er est tenu de rembourser lesindemnites d'incapacite de travail qu'il a perc,ues pour les jours ou laperiode durant lesquels il a accompli le travail non autorise.

Le Comite de gestion du Service des Indemnites peut toutefois renoncer, entout ou en partie, à la recuperation des indemnites visees à l'alinea1er dans les cas dignes d'interet, depourvus d'intention frauduleuse.

Cette decision tient compte de la proportionnalite à observer entrel'importance de la recuperation, d'une part, et la nature ou la gravite dumanquement du titulaire à ses obligations, d'autre part.

A cet egard, le Comite prend notamment en consideration les elementssuivants :

1DEG la situation du titulaire sur le plan social et financier, ainsi quetout autre element personnel pertinent;

2DEG l'assujettissement ou non des activites non autorisees à la securitesociale;

3DEG le volume desdites activites ainsi que l'importance des revenus s'yrapportant.

S: 3. Les jours ou la periode pour lesquels les indemnites sontrecuperees, sont assimiles à des jours indemnises pour la determinationdes droits aux prestations de securite sociale du titulaire, ainsi que despersonnes à charge de celui-ci ».

Il decoule de cette disposition que le travailleur ayant repris uneactivite non-autorisee sera soumis à un examen medical en vue de verifiersi les conditions de reconnaissance de l'incapacite de travail,c'est-à-dire les conditions reprises aux articles 86, S: 1er, 100, S: 1eret 128 de la Loi, sont reunies à la date de l'examen.

Si le travailleur ne remplit plus les conditions requises pour beneficierdu regime d'incapacite de travail, une decision de fin de reconnaissanced'incapacite lui sera notifiee et il devra rembourser les indemnitesindument perc,ues. Pour beneficier à nouveau de ce regime, il devraintroduire une nouvelle demande demontrant qu'il repond aux conditions desarticles 86, 100, S: 1er, 128 et, le cas echeant, 131 de la Loi du 14juillet 1994. Ses (autres) droits à la securite sociale seront,neanmoins, maintenus conformement à l'article 101, S: 3.

A l'inverse, si les conditions de reconnaissance de l'incapacite detravail sont reunies au jour de l'examen medical, le travailleur devrauniquement rembourser les indemnites perc,ues indument. Il sera alorsconsidere comme etant en incapacite de travail à compter de la date del'examen medical et ses droits à la securite sociale seront maintenus.

En l'espece, la defenderesse a repris l'exercice d'une activite à pleintemps entre le 1er janvier 2009 et le 1er mars 2011 avec pour consequencequ'elle a automatiquement perdu son statut d'incapacite de travail.

L'expertise medicale realisee le 6 juin 2012 a demontre qu'elle restaitneanmoins « porteuse d'une incapacite de travail de plus de 66,6 % ausens des articles 100 et 101 de la Loi coordonnee du 14.07.1994 et cela dela date de l'examen jusqu'à la date du refus de reconnaissance »(Rapport d'expertise medicale, p. 11).

Tant dans sa requete d'appel que dans ses conclusions, la demanderessereprochait au jugement attaque d'avoir decide que la defenderesse« presente bien à la date de l'expertise ainsi qu'à la date du10/10/2011 l'etat d'incapacite tel qu'il est determine par les articles100 et 101 de la loi coordonnee du 14 juillet 1994 » et qu'« à partirde cette date [la defenderesse] redevient legalement indemnisable »(jugement a quo, pp. 3-4) sans, toutefois, avoir verifie si les autresconditions de reconnaissance prevues aux articles 86, S: 1er, 128 et 131de la Loi etaient ou non reunies (conclusions, pp. 5-6).

Or, il etait - ce faisant - conteste que la defenderesse - outre qu'ellene repondait pas aux conditions d'octroi prevues à l'article 128 de laLoi puisque les jours de travail effectues durant la periode incriminee nepeuvent etre pris en compte pour le calcul de l'assurabilite - presentaitencore la qualite requise par l'article 86, S: 1er pour beneficier duregime des indemnites pour incapacite de travail des lors que, depuis le1er janvier 2009, aucun justificatif pertinent ne venait legitimer cettequalite au-delà du 31 decembre 2008 (conclusions, p. 6).

Des lors qu'une periode superieure à trente jours s'est ecoulee entre ledernier jour de la periode durant laquelle elle beneficiait de la qualiterequise - soit le 31 decembre 2008 - et le debut de la nouvelle incapacitede travail - soit le 6 juin 2012, date de l'examen medical - ladefenderesse ne pouvait davantage beneficier du regime particulier prevuà l'article 131 de la Loi du 14 juillet 1994 (conclusions, p. 5). Parconsequent, la defenderesse ne pouvait legalement redevenir indemnisablesans devoir demontrer la reunion des conditions prevues aux articles 86,S: 1er et 128 de la Loi du 14 juillet 1994, ce que les juges d'appel ontmanque de constater.

Or, l'arret attaque se borne à constater que la defenderesse « a eteconvoquee par courrier du 13 septembre 2011 pour un examen medical mais laconvocation a ete annulee des le 14 septembre 2011 en raison d'un «contretemps », qu' « en raison du refus de [la demanderesse] d'executercette obligation, [la defenderesse] a saisi le juge des referes etl'expert judiciaire designe a conclu qu'elle est bien incapable au sens del'article 100 susdit, conclusions d'ailleurs non contestees par [lademanderesse] » et decide, ensuite, que « si des lors [la defenderesse]doit rembourser les indemnites perc,ues entre le 31 decembre 2008 et le1er mars 2011, il n'en reste pas moins que cette periode est assimilee àdes jours indemnises pour la determination des droits aux prestations desecurite sociale du titulaire ainsi que des personnes à charge decelui-ci » et conclut qu'« il s'ensuit que l'appel n'est pas fonde etque le jugement entrepris doit etre confirme » (arret attaque, p. 3).

En enterinant le jugement entrepris, à savoir la decision que ladefenderesse « presente bien à la date de l'expertise ainsi qu'à ladate du 10/10/2011 l'etat d'incapacite tel qu'il est determine par lesarticles 100 et 101 de la loi coordonnee du 14 juillet 1994 » et qu'« àpartir de cette date [la defenderesse] redevient legalementindemnisable », sans, toutefois, verifier si, outre l'existence d'uneincapacite superieure à 66%, condition requise par l'article 100, S: 1erde la Loi du 14 juillet 1994, les autres conditions d'assurabilite de ladefenderesse etaient remplies en l'espece, à savoir la qualite requise ausens de l'article 86, S: 1er de la Loi du 14 juillet 1994 ainsi que lesconditions d'octroi des prestations requises par l'article 128 de laditeLoi, alors que l'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994 exige que l'onverifie si toutes ces conditions sont reunies au jour de l'examen medical,les juges d'appel violent les articles 86, S: 1er, 101, 128 et 131 de laLoi du 14 juillet 1994.

En confirmant simplement que la defenderesse redevenait legalementindemnisable sans repondre au moyen defendu par la demanderesse dans sesconclusions, selon lequel la defenderesse ne repondait pas aux conditionsgenerales d'assurabilite lui permettant de beneficier du regime prevu àl'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994, les juges d'appel violentegalement l'article 149 de la Constitution.

Troisieme branche

L'article 101, S: 1er de la Loi du 14 juillet 1994 prevoit que « letitulaire reconnu incapable de travailler qui a effectue un travail sansl'autorisation prealable visee à l'article 100, S: 2, ou sans respecterles conditions de l'autorisation, est soumis à un examen medical en vuede verifier si les conditions de reconnaissance de l'incapacite de travailsont reunies à la date de l'examen » que « le Roi determine le delaidans lequel cet examen doit etre effectue, à compter de la constatationde l'activite non autorisee ou de la communication de celle-ci » etqu'« en cas de decision negative, une decision de fin de reconnaissanceest notifiee au titulaire dans le delai determine par le Roi ».

Cette disposition vise la reprise d'un travail sans l'autorisationprealable prevue à l'article 100, S: 2 de la Loi ou sans respecter lesconditions de cette autorisation.

L'article 100, S: 2, alinea 1er, de la Loi du 14 juillet 1994 precisequ'« est reconnu comme etant incapable de travailler, le travailleur qui,dans les conditions fixees par le reglement vise à l'article 80, 5DEGreprend un travail prealablement autorise à condition que, sur le planmedical, il conserve une reduction de sa capacite d'au moins 50% ».

En rendant compatible le maintien du droit aux indemnites avec la reprised'un travail autorise, le legislateur entendait permettre une reinsertionprogressive du travailleur dans le marche du travail ou, à tout le moins,l'exercice d'une activite qui soit compatible avec son etat de sante cequi implique la reprise d'un travail dans des conditions differentes quele travail precedant.

Il s'ensuit que, ni l'article 100, S: 2, ni à fortiori l'article 101 dela Loi du 14 juillet 1994, ne visent le cas ou le travailleur reprendraitson precedent travail ou un travail equivalent. Il en est de meme pour lareprise d'une activite à temps plein car il s'agit d'une reprise normalede travail.

L'arret attaque rappelle dans un premier temps le libelle de l'article 101de la Loi du 14 juillet 1994 et decide, ensuite, que « si des lors [ladefenderesse] doit rembourser les indemnites perc,ues entre le 31 decembre2008 et le 1er mars 2011, il n'en reste pas moins que cette periode estassimilee à des jours indemnises pour la determination des droits auxprestations de securite sociale du titulaire ainsi que des personnes àcharge de celui-ci » et qu'« il s'ensuit que l'appel n'est pas fonde etque le jugement entrepris doit etre confirme » (arret attaque, p. 3).

Or, le jugement a quo constate que « suite à une enquete du service decontrole administratif de l'INAMI [la defenderesse] s'est vue dresserproces-verbal pour avoir repris une activite professionnelle sansautorisation, consistant dans la direction d'un etablissement de brasserieet de jeux depuis debut 2009 » (jugement a quo, p. 2).

En faisant beneficier la defenderesse du regime prevu à l'article 101 dela Loi du 14 juillet 1994 alors que celle-ci avait, telle que constate parle premier juge, repris une activite à temps plein, les juges d'appelappliquent l'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994 à une situationqu'il ne vise pas et violent, partant, ledit article.

Developpements

1. La premiere branche reproche à l'arret attaque d'avoir considere queles jours durant lesquels le travailleur a exerce une activitenon-autorisee devait etre assimiles à des jours indemnises en vue depouvoir beneficier, à nouveau, du droit aux indemnites d'incapacitede travail.

1. Le principe d'assimilation de la periode incriminee de reprised'activite à des jours indemnises pour la determination des droitsaux prestations de securite sociale a ete insere par l'article 56bisà la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant un regimed'assurance obligatoire soins de sante et indemnites et a ete repris,ensuite, à l'article 101, S: 3 de la Loi du 14 juillet 1994.

L'idee du legislateur etait de temperer les consequences, parfois lourdes,qu'une reprise illegale d'activite pouvait avoir pour l'interesse et safamille. Dans une telle situation, l'interesse devait, en effet, nonseulement rembourser les indemnites d'incapacite de travail, maisegalement tous les soins de sante payes pour lui et les personnes à sacharge ainsi que toutes les allocations familiales versees durant cetteperiode. En outre, tous les jours de maladie pris en compte pour le calculde la pension et du pecule de vacances etaient supprimes (Proposition deLoi modifiant l'article 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant etorganisant un regime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites,Chambre, Session 1988-89, Doc. 810/1).

La proposition de loi prevoit, ainsi, que la periode de reprise illegaled'activite « sera consideree comme une periode d'incapacite de travailreconnue donnant lieu au paiement d'indemnites :

* pour l'application des conditions fixees au titre V de la presente loien ce qui concerne l'octroi du droit aux prestations de sante[indemnites soins de sante] aux titulaires et aux personnes àcharge ;

* pour l'application des conditions fixees au titre V de la presente loien ce qui concerne le droit aux indemnites [pour incapacite detravail] lorsque le beneficiaire auquel a ete signifiee laconstatation d'un travail non autorise peut à nouveau pretendre auxindemnites ;

* pour la determination des droits des titulaires et des ayants droitaux prestations prevues par d'autres lois relatives à la securitesociale des travailleurs » (Proposition de Loi modifiant l'article 56de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant un regimed'assurance obligatoire soins de sante et indemnites, Chambre, Session1988-89, Doc. 810/1).

A la difference des soins de sante et autres droits des titulaires etleurs ayants droits decoulant d'autres lois relatives à la securitesociale, pour lesquels la periode de reprise illegale d'activite seraprise en compte pour l'application des conditions d'octroi, tel ne serapas le cas des indemnites pour incapacite de travail pour lesquelsl'interesse devra demontrer qu'il peut pretendre, à nouveau, auxindemnites.

L'intention du legislateur est de confiner les consequences de la repriseillegale d'activite aux indemnites d'incapacite de travail et d'eviter quela fraude ait des repercussions ou un effet de domino sur les autresdroits conferes par la securite sociale dont beneficient egalement ceux(enfants et conjoints) qui sont à charge du fraudeur.

Le principe de l'assimilation ne peut evidemment concerner le droit auxindemnites pour incapacite de travail lequel fut l'objet de la fraudecommise par la reprise illegale d'activite car soutenir le contrairereviendrait à oter tout caractere dissuasif à une reprise illegaled'activite ainsi que tout controle par rapport aux conditions generalesrequises afin de pouvoir pretendre à nouveau au statut d'incapacite detravail, ce qui ne peut etre l'intention du legislateur et qui serait, parailleurs, contraire au principe general de droit « fraus omniacorrumpit ».

Le systeme de la securite sociale ayant ete institue afin de venir en aideaux personnes dont la situation justifie une (certaine) prise en charge ouassistance de la part de la societe, l'on ne peut concevoir que lestemperaments que la Loi contiendrait afin de garantir le caractereproportionnel des sanctions infligees en cas d'abus viendraient, enrealite, à supprimer tout caractere dissuasif à une reprise illegaled'activite ainsi que tout controle par rapport aux conditions generalesrequises afin de pouvoir pretendre à nouveau au statut d'incapacite detravail

1. En considerant que les jours indemnises sont assimiles à des jourspour la determination des droits aux prestations de securite sociale,en compris pour la determination du droit aux indemnites pourincapacite de travail, alors que, s'il est indiscutable que lelegislateur voulait faire preuve de mansuetude par rapport auxprestations de securite sociale autres que le droit aux indemnitespour incapacite de travail, objet de la reprise illegale et, deslors, frauduleuse, d'activite, il n'en est rien pour ces derniers,les juges d'appel violent la portee de l'article 101, S: 3 de la Loidu 14 juillet 1994 ainsi que le principe general de droit « frausomnia corrumpit ».

2. La deuxieme branche reproche à l'arret attaque d'avoir decide que ladefenderesse redevenait legalement indemnisable sur pied de l'article101 de la Loi du 14 juillet 1994 sans avoir prealablement verifie sielle remplissait encore l'ensemble des conditions de reconnaissanced'incapacite requises pour beneficier de ladite disposition.

1. La Loi du 14 juillet 1994 soumet l'octroi d'indemnites pourincapacite de travail à une serie de conditions attenantes (i) à laqualite de beneficiaire (articles 86, S: 1er et 131), (ii) àl'existence d'une incapacite de travail (article 100, S: 1er), (iii)à l'octroi des prestations (article 128) ainsi (iv) qu'au maintiendu droit aux prestations (articles 129 et suivants).

Ce n'est que si l'ensemble de ces conditions est reuni que le travailleurpourra pretendre à une indemnite pour incapacite de travail.

2. L'etat d'incapacite de travail n'implique pas necessairement lacessation de toute activite professionnelle. L'article 100, S: 2 dela Loi du 14 juillet 1991 permet, en effet, une reprise d'activitemoyennant l'autorisation prealable du medecin-conseil.

Pour pouvoir beneficier de ce regime et conserver le droit aux indemnites,la reprise du travail devra avoir ete (i) autorisee par le medecin-conseil(ii) de maniere prealable et (iii) l'incapacite devra etre superieure à50% (J.F. Funck, Droit de la securite sociale, Larcier, 2006, p. 283).Cette incapacite est le resultat d'une evaluation de la capacite physiquedu travailleur et non de sa capacite de gain.

Ce systeme trouve son origine à l'article 56 de la Loi du 9 aout 1963instituant et organisant un regime d'assurance obligatoire soins de santeet indemnites.

3. A l'origine, la situation du travailleur en incapacite de travail quiviendrait à reprendre une activite sans l'autorisation prealable dumedecin-conseil n'avait pas ete envisagee par le legislateur.

La jurisprudence de Votre Cour considerait alors que « lorsque letravailleur reconnu en incapacite de travailler effectue un travailmoyennant remuneration sans autorisation du medecin-conseil, il est misfin à la reconnaissance de l'etat d'incapacite » et que « conformementà l'article 56, S: 2, de la loi du 9 aout 1963, applicable en l'espece,seul le travailleur reconnu comme etant incapable de travailler peutrecevoir prealablement l'autorisation de reprendre le travail » (Cass.,30 octobre 2000, J.T.T., 2000, 497).

En d'autres termes, la reprise d'une quelconque activite sans autorisationprealable entrainait non seulement la perte du droit aux indemnites maisegalement de la reconnaissance de son etat d'incapacite de travail, et ce,quel que soit l'etat de sante du travailleur (P. Denis, Droit de lasecurite sociale, 5ieme ed., Larcier, 1986, p. 340, nDEG 408 ; Propositionde Loi modifiant l'article 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant etorganisant un regime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites,Chambre, Session 1988-89, Doc. 810/1). Le droit aux indemnites nerenaissait qu'une fois une nouvelle demande formulee et les conditionsd'octroi à nouveau reunies ce qui impliquait, notamment, la realisationd'une nouvelle periode de stage et d'un nouveau constat de l'etatd'incapacite (Cass., 30 octobre 2000, J.T.T., 2000, 497 ; plus ancien :Cass., 4 septembre 1974, Bull. I.N.A.M.I., 1975).

4. Compte tenu des lourdes consequences qu'une telle situation pouvaitavoir sur la situation du travailleur et de sa famille, lelegislateur a insere, par la Loi du 18 octobre 1991, un article 56bisà la Loi du 9 aout 1963 (Proposition de Loi modifiant l'article 56de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant un regimed'assurance obligatoire soins de sante et indemnites, Chambre,Session 1988-89, Doc. 810/3). Cette disposition est entree en vigueurle 27 decembre 1991 et prevoyait ce qui suit :

« Le travailleur reconnu incapable de travailler, qui a effectue, sansl'autorisation prealable visee à l'article 56, S: 2, un travailcompatible avec son etat de sante, mais dont la capacite de travail estrestee reduite d'au moins 50 % du point de vue medical, est tenu derembourser les indemnites qu'il a perc,ues pour les jours ou la periodedurant lesquels ou laquelle il a accompli ce travail non autorise.

Il est toutefois repute etre reste frappe d'une incapacite de travail etles jours pour lesquels les indemnites d'incapacite de travail sontrecuperees en application du premier alinea sont assimiles à des jourspour lesquels une indemnite a ete octroyee pour la fixation des droits auxprestations de la securite sociale du titulaire et des personnes dont il ala charge.

Dans de cas dignes d'interet, à l'exclusion de ceux ou il y a eu uneintention frauduleuse, le Comite de gestion du Service des indemnites peutrenoncer en tout ou en partie à la recuperation prevue au premieralinea ».

Deux hypotheses devaient donc etre distinguees :

1. Soit le travailleur n'avait plus une incapacite de travailsuperieure à 50%, auquel cas il devait rembourser les indemnitesindument perc,ues et perdait sa qualite de beneficiaire. Pourpercevoir à nouveau des indemnites d'incapacite de travail, ildevait introduire une nouvelle demande et repondre, notamment, auxconditions d'assurabilite et d'octroi.

2. Soit le travailleur etait toujours frappe d'une incapacite detravail superieure à ce seuil de 50%, auquel cas il devaituniquement rembourser les indemnites perc,ues indument et etaitdispense de devoir demontrer à nouveau le respect des conditionsd'assurabilite. Il etait, en effet, repute etre reste frappe d'uneincapacite de travail et pouvait « à nouveau pretendre à l'octroid'indemnites d'incapacite de travail à partir de la date decessation du travail non autorise » (Proposition de Loi modifiantl'article 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant unregime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites,Chambre, Session 1988-89, Doc. 810/3) sans devoir «proceder à unenouvelle declaration d'incapacite de travail pour garantir sesdroits aux indemnites apres la periode de reprise du travail »(J.F. Funck, Droit de la securite sociale, Larcier, 2006, p. 284,nDEG 245).

3. Dans chacune des hypotheses susmentionnees, les jours pour lesquelsl'indemnite a ete recuperee etaient assimiles à des jours pourlesquels l'indemnite a ete octroyee pour la fixation des droits auxprestations de securite sociale. Le travailleur et les personnes àsa charge etaient donc consideres comme etant en regle pourbeneficier des prestations de sante, indemnites d'incapacite detravail - pour autant que le beneficiaire puisse à nouveaupretendre à de telles indemnites (Proposition de Loi modifiantl'article 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant unregime d'assurance obligatoire soins de sante et indemnites,Chambre, Session 1988-89, Doc. 810/3) - et autre eventuelle aidedecoulant de la securite sociale (J. Van Langendonck, Handboeksocialezekerheidsrecht, Intersentia, 2011, p. 495, nDEG 1449).

5. Suite à l'Arrete Royal du 14 juillet 1994 portant coordination de laLoi du 9 aout 1963 instituant et organisant un regime d'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites, l'ancien article 56bis aete integralement repris à l'article 101 de la Loi coordonnee du 14juillet 1994.

6. La Loi du 25 janvier 1999 portant des dispositions sociales a modifiele paragraphe premier comme suit : « Le travailleur reconnuincapable de travailler qui a effectue un travail sans l'autorisationprealable visee à l'article 100, S: 2, mais dont la capacite detravail est restee reduite d'au moins 50 % du point de vue medical,est tenu de rembourser les indemnites qu'il a perc,ues pour les joursou la periode durant lesquels ou laquelle il a accompli ce travailnon autorise ».

La reference à la compatibilite du travail avec l'etat de sante dutravailleur est ainsi supprimee.

7. La Loi du 28 avril 2010 a modifie plus sensiblement l'article 101 dela Loi du 14 juillet 1994. L'idee centrale de cette reforme etait desimplifier et rationaliser la procedure de regularisation en passantd'un controle de l'etat d'incapacite de travail « ex ante à uncontrole ex post », le medecin-conseil ne devant « plus seprononcer sur l'etat d'incapacite de travail pour la periode detravail non autorisee se situant dans le passe » mais evaluercelui-ci à la date de l'examen pratique (Projet de loi portant desdispositions diverses, Chambre, Session 2009-10, Doc. 2423/012, p.6).

Le paragraphe premier prevoit, en effet, que « le titulaire reconnuincapable de travailler qui a effectue un travail sans l'autorisationprealable visee à l'article 100, S: 2, ou sans respecter les conditionsde l'autorisation, est soumis à un examen medical en vue de verifier siles conditions de reconnaissance de l'incapacite de travail sont reuniesà la date de l'examen. Le Roi determine le delai dans lequel cet examendoit etre effectue, à compter de la constatation de l'activite nonautorisee ou de la communication de celle-ci. En cas de decision negative,une decision de fin de reconnaissance est notifiee au titulaire dans ledelai determine par le Roi ».

Le second paragraphe reprend, quant à lui, le principe du remboursementdes indemnites indument perc,ues tandis que le troisieme paragrapheconfirme le principe selon lequel les jours pour lesquels les indemnitesont ete recuperees seront assimiles à des jours indemnises pour ladetermination des droits aux prestations de securite sociale du titulaireainsi que des personnes à sa charge.

1. La premiere modification majeure est la suppression de la referenceau fait que l'incapacite de travail devrait etre restee inferieureà 50 % du point de vue medical. Cette condition est remplacee parla necessite que les « conditions de reconnaissance de l'incapacitede travail [soient] reunies à la date de l'examen ».

Lors des discussions parlementaires, Madame Tasiaux-De Neys (cdH) asouligne qu'« à certains egard, cette reforme semble aller dans le sensd'un durcissement » puisque « le beneficiaire devra prouver uneincapacite de 66% au lieu de 50%, ce qui pourrait augmenter le nombre depersonnes sanctionnees » (Projet de loi portant des dispositionsdiverses, Chambre, Session 2009-10, Doc. 2423/012, p. 8).

La ministre des affaires sociales a repondu ce qui suit :

« Le critere des 66% fait reference à une perte de capacite de gain dedeux tiers au moins et est une condition requise en vue de lareconnaissance de l'incapacite de travail au sens de l'article 100, S: 1erde la loi » tandis que « le critere relatif à une reduction de lacapacite de 50% au moins sur le plan medical est requis pour lareconnaissance de l'incapacite de travail des titulaires qui reprennent,dans le courant de leur incapacite de travail reconnue, un travail avecl'autorisation prealable du medecin-conseil de l'organisme assureur(article 100 S: 2 de la loi », cette seconde notion visant « lestitulaires qui possedent une certaine capacite de travail restante et quin'ont donc pas encore retrouve la capacite de travail leur permettantd'exercer à nouveau leur profession habituelle ou tout autre professionaccessible » (Projet de loi portant des dispositions diverses, Chambre,Session 2009-10, Doc. 2423/012, pp. 8-9).

Elle poursuit, en se referant au systeme precedant la reforme : « cecritere de reduction de la capacite de 50% au moins sur le plan medicalest egalement pris en consideration dans le cadre de la procedure deregularisation des reprises de travail non autorisees par lemedecin-conseil (article 101 de la loi (...)) » mais « il est propose,dans le projet de loi, de supprimer cette regularisation sur le planmedical, des reprises de travail non autorisees portant sur une periodeecoulee » et « l'examen sur le plan medical, par les instancescompetentes, devra porter sur l'evaluation de l'etat d'incapacite detravail au moment du reexamen et ulterieurement » (Projet de loi portantdes dispositions diverses, Chambre, Session 2009-10, Doc. 2423/012, p. 9).

En abandonnant la reference à un taux d'incapacite au profit d'un examendes « conditions de reconnaissance de l'incapacite de travail », lelegislateur a entendu confirmer qu'il y a lieu de se referer auxconditions generales d'incapacite, c'est-à-dire l'ensemble des conditionsdevant etre reunies pour beneficier du regime des indemnites pourincapacite de travail. Outre l'existence d'une incapacite superieure à66% (article 100, S: 1 de la Loi du 14 juillet 1994), il faut ainsi quesoient egalement reunies les conditions relatives à la qualite et àl'octroi des indemnites (articles 86, S: 1er et 128 de la Loi du 14juillet 1994).

2. La seconde modification majeure de l'article 101 est la suppressiondu principe selon lequel le travailleur est « repute etre restefrappe d'une incapacite de travail ».

3. Ces deux modifications prises ensemble indiquent, d'une part, quel'exercice d'une activite non-autorisee fait perdre au travailleurson statut d'incapacite et, d'autre part, que pour beneficier ànouveau de ce statut, il devra repondre aux conditions generales dereconnaissance de l'incapacite de travail au jour de l'examen.

Ainsi, s'il resulte de l'examen medical que le travailleur ne remplit pasles conditions de reconnaissance, une decision de fin de reconnaissanced'incapacite lui sera notifiee. Pour beneficier à nouveau des indemnites,il devra introduire une nouvelle demande et repondre, notamment, auxconditions des articles 86 et 128 de la Loi du 14 juillet 1994.

A l'inverse, si les conditions de reconnaissance sont reunies au jour del'examen, il sera alors considere comme etant en incapacite de travail àcompter de cette date puisqu'il n'est pas repute etre reste frappe d'uneincapacite de travail.

8. En l'espece, la defenderesse a repris l'exercice d'une activite àplein temps entre le 1er janvier 2009 et le 1er mars 2011 avec pourconsequence qu'elle a automatiquement perdu son statut d'incapacitede travail.

L'expertise medicale realisee le 6 juin 2012 a demontre qu'elle restaitneanmoins « porteuse d'une incapacite de travail de plus de 66,6 % ausens des articles 100 et 101 de la Loi coordonnee du 14.07.1994 et cela dela date de l'examen jusqu'à la date du refus de reconnaissance »(Rapport d'expertise medicale, p. 11).

L'etat d'incapacite de la defenderesse n'est pas conteste par lademanderesse.

Tant dans sa requete d'appel que dans ses conclusions, la demanderessereprochait, par contre, au jugement attaque d'avoir decide que ladefenderesse redevenait legalement indemnisable sans, toutefois, avoirverifie si les autres conditions de reconnaissance prevues aux articles86, S: 1er, 128 et 131 de la Loi du 14 juillet 1994 etaient ou nonreunies.

En effet, lors de la reconnaissance de son incapacite de travail en mai1994, la defenderesse disposait de la qualite requise, au sens del'article 86 de la Loi du 14 juillet 1994, pour beneficier des indemnites.Cette qualite est cependant devenue caduque le 1er janvier 2009, « aucunjustificatif ne venant legitimer ladite qualite requise au-delà du31/12/2008 » (requete d'appel, p. 5).

Par ailleurs, la periode de trente jours prevue à l'article 131 de la Loietait egalement ecoulee puisque « la qualite visee à l'article 86 n'estplus justifiee depuis presque 3 ans (et à plus forte raison le delai detrente jours) » de sorte qu'il « est donc legalement exclu de procederà une quelconque indemnisation à partir de cette periode » (requeted'appel, p. 5 ; conclusions, pp. 5-6).

9. En enterinant le jugement entrepris, à savoir la decision que ladefenderesse « presente bien à la date de l'expertise ainsi qu'àla date du 10/10/2011 l'etat d'incapacite tel qu'il est determine parles articles 100 et 101 de la loi coordonnee du 14 juillet 1994 » etqu'« à partir de cette date [la defenderesse] redevient legalementindemnisable », sans, toutefois, verifier si, outre l'existenced'une incapacite superieure à 66%, condition requise par l'article100, S: 1er de la Loi du 14 juillet 1994, les autres conditionsd'assurabilite de la defenderesse etaient remplies en l'espece, àsavoir la qualite requise au sens de l'article 86, S: 1er de la Loidu 14 juillet 1994 ainsi que les conditions d'octroi des prestationsrequises par l'article 128 de ladite Loi, alors que l'article 101 dela Loi du 14 juillet 1994 exige que l'on verifie si toutes cesconditions sont reunies au jour de l'examen medical, les jugesd'appel violent les articles 86, S: 1er, 101, 128 et 131 de la Loi du14 juillet 1994.

En confirmant simplement que la defenderesse redevenait legalementindemnisable sans repondre au moyen defendu par la demanderesse dans sesconclusions, selon lequel la defenderesse ne repondait pas aux conditionsgenerales d'assurabilite lui permettant de beneficier du regime prevu àl'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994, les juges d'appel violentegalement l'article 149 de la Constitution.

3. La troisieme branche, subsidiaire, reproche aux juges d'appel d'avoirapplique l'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994 à une situationqu'il ne visait pas.

1. Cette disposition vise expressement la reprise d'un travail sansl'autorisation prealable prevue à l'article 100, S: 2 de la Loi ousans respecter les conditions de cette autorisation.

L'article 100, S: 2, alinea 1er, de la Loi du 14 juillet 1994 precisequ'« est reconnu comme etant incapable de travailler, le travailleur qui,dans les conditions fixees par le reglement vise à l'article 80, 5DEGreprend un travail prealablement autorise à condition que, sur le planmedical, il conserve une reduction de sa capacite d'au moins 50% ».

En rendant compatible le maintien du droit aux indemnites avec la reprised'un travail autorise, le legislateur entendait permettre une reinsertionprogressive du travailleur dans le marche du travail ou, à tout le moins,l'exercice d'une activite qui soit compatible avec son etat de sante. Entoute logique, il ne s'agissait pas d'une reprise normale de ses activitespar le travailleur.

2. Ce principe est confirme par les travaux preparatoires de la Loi du18 octobre 1991 ayant insere l'article 56bis à la Loi du 9 aout1963(ancetre de l'actuel article 101 de la Loi du 14 juillet 1994) quirelatent de longues discussions quant aux types de situations quecette disposition entendait viser.

Au depart, il s'agissait de toute reprise d'activite au sens large.

Conscient toutefois qu'il y avait lieu de faire une distinction entre ceuxqui entendaient profiter du systeme et ceux qui n'ont que de maniere tresponctuelle exerce une activite, le legislateur avait prevu que l'article56bis ne s'appliquerait pas au cas ou le travailleur reprendrait sonprecedent travail ou un travail equivalent (Projet de Loi modifiant lesarticles 40 et 56 de la Loi du 9 aout 1963 instituant et organisant unregime d'assurance obligatoire contre la maladie et l'invalidite, Senat,Session 1989-90, Doc. 882, p. 7). Cette idee est confirmee dans le dernierrapport etabli par la Commission des affaires sociales qui precisequ'« il ne s'agit donc pas de la regularisation d'une reprise normale dutravail » (Projet de Loi modifiant l'article 40 de la Loi du 9 aout 1963instituant et organisant un regime d'assurance obligatoire contre lamaladie et l'invalidite et y inserant un article 56bis et un article56ter, Chambre, Session 1990-91, Doc. 810/5).

Cela fut traduit par la reference à « un travail compatible avec sonetat de sante ».

3. Malgre que cette reference fut retiree de l'article 101 par la Loi du25 janvier 1999, il n'en demeure pas moins que ni l'article 100, S:2, ni à fortiori l'article 101 de la Loi du 14 juillet 1994 n'ontvocation à s'appliquer en cas de reprise normale du travail.

Les travaux preparatoires de la Loi du 28 avril 2010 repetent, d'ailleurs,que le regime prevu à l'article 101 s'applique aux « titulaires quipossedent une certaine capacite de travail restante et qui n'ont donc pasencore retrouve la capacite de travail leur permettant d'exercer ànouveau leur profession habituelle ou tout autre profession accessible »(Projet de loi portant des dispositions diverses, Chambre, Session2009-10, Doc. 2423/012, pp. 8-9).

La doctrine et la jurisprudence considerent egalement que le travailleurqui aurait repris sans autorisation prealable une activite à plein tempsne pourrait invoquer le benefice de l'article 101 car il s'agirait d'unereprise normale de travail non visee par cette disposition qui ne vise quela reinsertion progressive (D. Simoens et J. Put, Ontwikkelingen van desociale zekerheid 1996-2001. Wetgeving-Rechtspraak, Die Keure, 2001, p.430 ; C. trav. Anvers, 10 octobre 1997, Bull. I.N.A.M.I., 4.1.3. nr. 15 ;C. trav. Huy, 7 octobre 1998, in D. Simoens en J. Put, opcit, p. 430).

4. En faisant beneficier la defenderesse du regime prevu à l'article101 de la Loi du 14 juillet 1994 alors que celle-ci avait repris -tel que constate par le premier juge - une activite à temps plein,les juges d'appel appliquent l'article 101 de la Loi du 14 juillet àune situation qu'il ne vise pas et violent, partant, ledit article.

Par ces considerations,

L'avocat à la Cour de cassation soussigne conclut, qu'il vous plaise,Messieurs, Mesdames, de casser et annuler l'arret attaque, ordonner quemention en soit faite en marge de la decision annulee, renvoyer la causeet les parties devant une autre cour du travail et statuer comme de droitsur les depens de la presente instance.

Bruxelles, le 31 decembre 2013

Paul LEFEBVRE

Annexe :

1. L'original de l'exploit d'huissier constatant sa signification à ladefenderesse sera joint à l'original du present pourvoi.

Cette disposition prevoit que « sont beneficiaires du droit auxprestations de sante telles qu'elles sont definies au chapitre III dutitre III de la presente loi coordonnee et dans les conditions prevues parcelle-ci: (...) 3DEG les travailleurs en chomage controle; (...) 5DEG lestravailleurs qui, pour mettre un terme à leur chomage, effectuent untravail domestique et qui, pour l'application de la reglementation del'assurance chomage, conservent la qualite de salarie habituel ».

Date d'introduction par la defenderesse d'une demande de reconnaissanced'incapacite.

Disposition telle qu'applicable avant sa modification par l'article 16 dela Loi-programme (I) du 4 juillet 2011 et par l'article 6 de la Loi du 29mars 2012 portant des dispositions diverses (I).

Disposition telle qu'applicable avant sa modification par l'article 16 dela Loi-programme (I) du 4 juillet 2011 et par l'article 6 de la Loi du 29mars 2012 portant des dispositions diverses (I).

23 MAI 2016 S.14.0002.F/6

Requete/28


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.14.0002.F
Date de la décision : 23/05/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-05-23;s.14.0002.f ?
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