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24/05/2016 | BELGIQUE | N°P.16.0244.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 mai 2016, P.16.0244.N


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* N° P.16.0244.N

I. et II. M. E.Y.,

* prévenu, détenu,

* demandeur en cassation,

* Me Dimitri de Béco, avocat au barreau de Bruxelles,









* contre

* O. R. V.,

* partie civile,

* défenderesse en cassation.

III. F. B.,

* prévenu, détenu,

* demandeur en cassation,

* Me Thibaud Delva, avocat au barreau d'Anvers,

* contre

1. ZONE DE POLICE N° 5340 BRUXELLES-OUEST, représentée par son collège dep

olice,

2. D. B.,

3. O. R. V., mieux qualifiée ci-dessus,

4. J. B.,

parties civiles,

* défendeurs en cassation.











I. la procédure devant la cour













* Les pourvois son...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* N° P.16.0244.N

I. et II. M. E.Y.,

* prévenu, détenu,

* demandeur en cassation,

* Me Dimitri de Béco, avocat au barreau de Bruxelles,

* contre

* O. R. V.,

* partie civile,

* défenderesse en cassation.

III. F. B.,

* prévenu, détenu,

* demandeur en cassation,

* Me Thibaud Delva, avocat au barreau d'Anvers,

* contre

1. ZONE DE POLICE N° 5340 BRUXELLES-OUEST, représentée par son collège depolice,

2. D. B.,

3. O. R. V., mieux qualifiée ci-dessus,

4. J. B.,

parties civiles,

* défendeurs en cassation.

I. la procédure devant la cour

* Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le27 janvier 2016 par la cour d'appel d'Anvers, chambrecorrectionnelle.

* Le demandeur I-II n'invoque aucun moyen.

* Le demandeur III invoque quatre moyens dans un mémoire annexé auprésent arrêt, en copie certifiée conforme.

* Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.

* Le procureur général Patrick Duinslaeger a conclu.

II. la décision de la cour

* (…)

* Sur le premier moyen

6. Le moyen est pris de la violation de l'article 3 commun auxConventions de Genève du 12 août 1949 et de l'article 141bis duCode pénal : l'arrêt condamne le demandeur en tant que dirigeantd'un groupe terroriste (prévention A) et décide qu'il ne peutêtre fait application de la cause d'exclusion prévue àl'article 141bis du Code pénal et à l'article 3 commun auxConventions de Genève au motif que les faits commis par MajlisShura Al Mujahidin et Jabhat al Nusra ne peuvent être considéréscomme des activités de forces armées ou de groupes armésorganisés en période de conflit armé au sens du droitinternational humanitaire ; le fait que ces organisationscommettent des violations du droit international humanitaire nesignifie pas que ce droit n'est pas applicable et qu'il n'y adonc pas de conflit armé interne ; le fait qu'une personne neporte pas ouvertement les armes, ne soit pas reconnaissable entant que membre d'une force armée ou ne porte pas l'uniforme nedétermine pas si elle peut ou non être considérée comme un membred'une force armée au sens du droit international humanitaire ;l'arrêt fonde également sa décision sur le critère non pertinentselon lequel il doit exister un commandement identifiable pouvanteffectivement être tenu pour responsable ; ainsi qu'il ressortdes critères utilisés dans l'arrêt Tadić rendu par le Tribunalpénal international pour l'ex-Yougoslavie, au moins une desparties à un conflit armé non international doit être un groupearmé organisé, l'appréciation du degré d'organisation étantfondée non pas sur des critères stricts, mais sur une série decritères indicatifs ; le degré d'organisation doit être appréciéavec souplesse ; l'arrêt ne tient pas compte de l'« appréciationsouple au regard de critères non limitatifs » admise au niveauinternational, qui s'appuie sur les travaux préparatoires desConventions de Genève, sur la jurisprudence internationale et surla doctrine ; au cours de la période infractionnelle, un conflitarmé non international présentant un niveau minimal d'intensitéavait lieu en Syrie, dans le cadre duquel Majlis Shura AlMujahidin et Jabhat al Nusra faisaient preuve d'un minimumd'organisation ; le fait que les deux groupes soient qualifiés deterroristes ou aient commis des actes terroristes ne fait pasobstacle à cette constatation.

7. L'article 141bis du Code pénal dispose : « Le [titre Iter. -Des infractions terroristes] ne s'applique pas aux activités desforces armées en période de conflit armé, tels que définis etrégis par le droit international humanitaire, ni aux activitésmenées par les forces armées d'un État dans l'exercice de leursfonctions officielles, pour autant qu'elles soient régies pard'autres règles de droit international. »

8. Il y a conflit armé au sens du droit humanitaire internationallorsqu'il est question de violences armées entre États ou deviolences armées persistantes entre des instancesgouvernementales et des groupes armés organisés ou entre de telsgroupes entre eux au sein d'un État.

L'existence de violences armées persistantes auxquelles desgroupes armés organisés sont parties s'apprécie essentiellementau regard de l'intensité du conflit et du degré d'organisationdes parties impliquées. Les autres critères énoncés par lajurisprudence internationale ne sont que des critères indicatifsqui peuvent être utilisés pour préciser les exigences relatives àl'intensité du conflit et au degré d'organisation des partiesimpliquées.

9. Le juge décide souverainement en fait s'il y a lieu deconsidérer certains actes comme des activités menées par desforces armées en période de conflit armé au sens visé ici.

Dans la mesure où il critique cette appréciation souveraine desfaits effectuée dans l'arrêt ou requiert un examen des faits pourlequel la Cour est sans pouvoir, le moyen est irrecevable.

10. L'arrêt considère : « L'analyse de la jurisprudenceinternationale, notamment celle qui a été développée par leTribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (dans lesaffaires Tadić, Haradinaj, entre autres), montre que diversfacteurs non cumulatifs, tels que le nombre d'affrontements entreles parties, la durée et l'intensité des hostilités et le degréd'organisation d'un groupe armé, peuvent constituer des indicesde l'existence d'un conflit armé. À cet égard, l'existence d'unestructure de commandement responsable, de règles de discipline etde procédures disciplinaires est révélatrice, de même quel'existence d'un quartier général, le contrôle d'un territoire etla possession d'armes et de matériel. La capacité de planifier etde mener des actions militaires, de conclure un accord decessez-le-feu et de s'exprimer d'une seule voix est également unélément important. »

11. Il considère en outre, d'une part, qu'à aucun moment de lapériode infractionnelle il n'y a eu de conflit armé en Belgiqueet que l'article 141bis du Code pénal ne saurait donc êtreinvoqué relativement aux actes commis en Belgique par des membresde Sharia4Belgium et, d'autre part, que les faits commis en Syriepar les groupes Majlis Shura Al Mujahidin et Jabhat al Nusra nesauraient être considérés comme des activités de forces armées oude groupes armés organisés en période de conflit armé au sens dudroit international humanitaire, notamment pour les raisonssuivantes :

* « [ces groupes, qui appartiennent] au réseauterroriste international d'Al-Qaida, mènentune lutte violente et sectaire contre leschiites, les incroyants, les valeursdémocratiques, les droits de l'homme et ledroit humanitaire »;

* « [Majlis Shura Al Mujahidin] ne [présente]pas le degré d'organisation requis. Le groupeest peu structuré et n'est pas en mesured'exercer un contrôle sur un territoire, dedéfinir une stratégie militaire et de menerdes opérations militaires d'envergure. Cegroupe se livrait essentiellement, au niveaulocal, à des pillages, du banditisme, desprivations arbitraires de liberté et desexécutions. La préparation concrète de ces`missions' était limitée ou inexistante » ;

* Jabhat al Nusra est un important grouperebelle armé qui souhaite instaurer un étatislamique mondial, ce groupe publie des`statements' sur des forums djihadistes,l'identité de son chef est inconnue, il n'y apas de commandement responsable actif et desrègles de conduite et de discipline nepeuvent être imposées pour garantir lerespect des obligations nécessaires etfondamentales imposées par le droitinternational humanitaire ;

* « La lutte menée par Majlis Shura AlMujahidin et Jabhat al Nusra est une luttearmée violente contre tous les incroyants etcontre la démocratie, les droits de l'hommeet le droit humanitaire. Bien qu'ellescomptent de plus en plus d'adeptes et tententde s'organiser davantage, les organisationsprécitées, dont le commandement n'est pasidentifiable, continuent pour l'essentiel deformer un réseau clandestin constitué dediverses cellules actives dans différentesrégions, se concertent peu et présentent undegré d'organisation limité »;

* « La circonstance que Majlis Shura AlMujahidin et Jabhat al Nusra soientsuffisamment structurés et organisés pourconstituer une organisation terroriste (…) nefait pas obstacle à l'affirmation selonlaquelle ces organisations ne constituent pasdes groupes armés organisés au sens du droitinternational humanitaire ».

Ainsi, l'arrêt ne fonde pas la décision concernantl'applicabilité de l'article 141bis du Code pénal à l'infractionmise à charge du demandeur sur des critères non pertinents, maisjustifie légalement la décision.

Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.

* (…)

* Le contrôle d'office

20. Les formalités substantielles ou prescrites à peine denullité ont été observées et les décisions sont conformes à laloi.

* PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux frais de leur pourvoi.

* Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, àBruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseillerfaisant fonction de président, Alain Bloch, Peter Hoet,Antoine Lievens et Erwin Francis, conseillers, et prononcéen audience publique du vingt-quatre mai deux mille seizepar Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction deprésident, en présence du procureur général PatrickDuinslaeger, avec l'assistance du greffier Frank Adriaensen.

* Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric deFormanoir et transcrite avec l'assistance du greffierTatiana Fenaux.

* Le greffier, Le conseiller,

24 MAI 2016 P.16.0244.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.16.0244.N
Date de la décision : 24/05/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-05-24;p.16.0244.n ?
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