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14/06/2016 | BELGIQUE | N°P.16.0586.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 14 juin 2016, P.16.0586.N


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.16.0586.N

R. D.S.,

demanderesse en récusation,

demanderesse en cassation,

Me Tom Van Maldergem, avocat au barreau de Gand.

I. la procédure devant la cour











Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 28 avril 2016 par la courd'appel de Gand, première chambre civile.

La demanderesse invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

L'av

ocat général Luc Decreus a conclu.

II. la décision de la cour











Sur le premier moyen :











Quant à la première branche :

 



1. Le moy...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.16.0586.N

R. D.S.,

demanderesse en récusation,

demanderesse en cassation,

Me Tom Van Maldergem, avocat au barreau de Gand.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 28 avril 2016 par la courd'appel de Gand, première chambre civile.

La demanderesse invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

L'avocat général Luc Decreus a conclu.

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

 

1. Le moyen, en cette branche, invoque la violation de l'article 833 duCode judiciaire : l'arrêt considère à tort que la demanderesse aurait dûprésenter sa demande de récusation, en tant qu'elle concernait la lettredu 18 mars 2016, avant les débats devant la chambre du conseil ; l'article833 du Code judiciaire ne prescrit pas de délai exprès dans lequel larécusation doit avoir lieu, de sorte qu'il ne peut être décidé que larécusation est tardive ; l'objectif poursuivi par l'article 833 du Codejudiciaire consiste à éviter qu'une partie, en dépit d'un événementpréjudiciable entamant sa confiance dans le juge pour statuerobjectivement, laisse se poursuivre la procédure pour ne soulever que plustard la nullité ; la demanderesse n'a pas laissé la procédure sepoursuivre ; le juge d'instruction ne siège pas, en effet, dans la chambredu conseil et, après la lettre du 18 mars 2016, plus aucune requête n'aété adressée au juge d'instruction.

2. L'article 833 du Code judiciaire dispose que celui qui veut récuserdoit le faire avant le commencement de la plaidoirie, à moins que lescauses de récusation ne soient survenues postérieurement, et, si la causeest introduite par requête, avant que la requête ait été appointée.

3. Quoique l'article 833 du Code judiciaire ne prescrive pas de délaiexprès dans lequel doit être proposée la récusation, il ressort tant destermes que de l'esprit de cette disposition, des délais précis quirégissent la procédure en récusation et de la suspension qu'elle entraînede tous jugements et actes, que pareille récusation doit être proposéeaussitôt que la cause qui la fonde est connue de la partie qui s'enprévaut.

Dans la mesure où il repose sur un soutènement juridique différent, lemoyen, en cette branche, manque en droit.

4. L'arrêt considère que :

- la requête en récusation se fonde notamment sur la réponse du juged'instruction du 18 mars 2016 au conseil de la demanderesse à propos d'unedemande de levée de l'interdiction de quitter le territoire, dans laquelleil est écrit que cette demande est rejetée “avec force” ;

- en réaction, la demanderesse s'est adressée, quant à sa demande de levéede l'interdiction de quitter le territoire, à la chambre du conseil, qui aexaminé l'affaire le 8 avril 2016 ;

- ce n'est que plus de trois semaines après la lettre du juged'instruction et après que la chambre du conseil a également refusé lademande, que la requête en récusation a été déposée ;

- il suit des termes et de l'esprit de l'article 833 du Code judiciairequ'une récusation doit être proposée aussitôt que la cause qui la fondeest connue de la partie qui s'en prévaut ;

- la récusation basée sur l'écrit du 18 mars 2016 aurait dès lors dû êtredéposée immédiatement après la réception de cet écrit et, à tout le moins,avant le début des débats devant la chambre du conseil.

Par ces motifs, l'arrêt justifie légalement la décision qu'en tant qu'ellese fonde sur la lettre du 18 mars 2016, la requête en récusation de lademanderesse est tardive et donc irrecevable.

Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.

Quant à la seconde branche :

5. Le moyen, en cette branche, invoque la violation de l'article 833 duCode judiciaire : l'arrêt apprécie à tort séparément les incidentssuccessifs et n'a dès lors pas pu légalement considérer qu'en tant qu'ellerepose sur la lettre du 18 mars 2016, la récusation est irrecevable ; ilaurait dû apprécier les incidents globalement et en parallèle ; lorsqu'ilse produit, lors de plusieurs audiences successives, des incidents dontune partie prétend que, appréhendés non pas séparément mais aussiglobalement et en parallèle, ils constituent une cause de récusation, lacause de récusation doit être réputée connue de la partie qui s'en prévautau moment où le dernier incident a eu lieu.

6. S'il se produit plusieurs incidents qui, appréhendés globalement et enparallèle, constituent, selon une partie, une seule cause de récusation desorte que cette cause ne peut être connue de cette partie qu'à la date dudernier incident, il appartient au juge de considérer souverainement enfait si ces incidents distincts constituent, appréhendés globalement et enparallèle, une seule cause de récusation.

Dans la mesure où il repose sur un soutènement juridique différent, lemoyen, en cette branche, manque en droit.

7. L'arrêt apprécie séparément les deux incidents invoqués à l'appui de larequête en récusation. Il considère qu'en tant qu'elle se fonde sur lalettre du 18 mars 2016, la requête est tardive et donc irrecevable.L'arrêt indique ainsi que ces incidents ne constituent pas, appréhendésglobalement et en parallèle, une seule cause de récusation, mais qu'ilsforment chacun une cause de récusation distincte qui, en vertu del'article 833 du Code judiciaire, doit être invoquée à temps.

Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen :

8. Le moyen invoque la violation des articles 6 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 828, 1°,du Code judiciaire : l'arrêt considère à tort qu'il n'y a pas de suspicionlégitime au motif que la juge d'instruction a seulement exprimé sonétonnement par le propos “Il est plutôt culotté de faire cette demande” àpropos d'un examen, qui ne lui était pas adressé, de levée de conditionsalternatives à la détention ; pareil propos est de nature à avoir puinspirer à la demanderesse une suspicion légitime quant à l'aptitude de lajuge d'instruction à poursuivre l'instruction avec la sérénité,l'impartialité et l'indépendance requises ; en effet, il n'appartient pasau juge de s'étonner d'une requête déposée par une requérante etcertainement pas d'exprimer cet étonnement ; le juge doit uniquementrendre une appréciation juridique quant à une demande ou à un moyen dedéfense, mais non un avis ou un sentiment personnel ; le juge doits'abstenir de tout jugement de valeur moral, positif ou négatif, sur unedemande.

9. L'article 828, 1°, du Code judiciaire dispose que tout juge peut êtrerécusé s'il y a suspicion légitime.

10. Une suspicion légitime ne peut être déduite du seul fait qu'un jugeexprime son étonnement quant à la demande formée par une partie.

Le moyen, qui repose sur un soutènement juridique différent, manque endroit.

(…)

Le contrôle d'office

15. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux frais.

* Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Paul Maffei, président, Filip Van Volsem, Alain Bloch,Erwin Francis et Sidney Berneman, conseillers, et prononcé en audiencepublique du quatorze juin deux mille seize par le président PaulMaffei, en présence de l'avocat général Luc Decreus, avec l'assistancedu greffier Frank Adriaensen.

* Traduction établie sous le contrôle du conseiller Benoît Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

* Le greffier, Le conseiller,

14 JUIN 2016 P.16.0586.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.16.0586.N
Date de la décision : 14/06/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-06-14;p.16.0586.n ?
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