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16/12/1999 | BéNIN | N°88/CA

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 16 décembre 1999, 88/CA


KEKE LOUIS RENE C/ GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, DE LA LEGISLATION ET DES DROITS DE L'HOMME.N° 88/CA 16/12/1999La Cour,Vu la requête en date à Cotonou du 21 novembre 1997 enregistrée au Greffe de la Cour le 1er décembre 1997 sous n° 847/GCS par laquelle Maître Hélène KEKE-AHOLOU, Avocat près la Cour d'Appel de Cotonou, Conseil de Monsieur KEKE Louis René, Magistrat, a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décrets n° 94-265 du 11 août 1994 et 97-29 du 29 janvier 1997 portant Promotion des Magistrats;Vu le recours gracieux enregistré au s

ecrétariat du Ministère de la Justice sous n° 2286/231 du 18 ao...

KEKE LOUIS RENE C/ GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, DE LA LEGISLATION ET DES DROITS DE L'HOMME.N° 88/CA 16/12/1999La Cour,Vu la requête en date à Cotonou du 21 novembre 1997 enregistrée au Greffe de la Cour le 1er décembre 1997 sous n° 847/GCS par laquelle Maître Hélène KEKE-AHOLOU, Avocat près la Cour d'Appel de Cotonou, Conseil de Monsieur KEKE Louis René, Magistrat, a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décrets n° 94-265 du 11 août 1994 et 97-29 du 29 janvier 1997 portant Promotion des Magistrats;Vu le recours gracieux enregistré au secrétariat du Ministère de la Justice sous n° 2286/231 du 18 août 1997;Vu la communication n° 790/GCS du 17 juin 1998 transmettant au Ministre de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme pour ses observations, la requête introductive d'instance, le mémoire ampliatif ainsi que les pièces y annexées;Vu la mise en demeure adressée par lettre n° 1183/GCS du 09 septembre 1998 au Ministre de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme à laquelle le Ministre n'a pas non plus répondu;Vu la consignation constatée par reçu n° 1130 du 12 décembre 1997;Vu l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour Suprême, remise en vigueur par la Loi n° 90-012 du 1er Juin 1990; Vu toutes les pièces du dossier;Ouï le Conseiller Samson DOSSOUMON en son rapport;Ouï l'Avocat Général Nestor DAKO en ses conclusions;Après en avoir délibéré conformément à la loi:EN LA FORMEConsidérant que le requérant n'a pas reçu notification des décrets querellés et que l'Administration n'apporte pas la preuve contraire;Que selon les allégations du requérant, c'est à la date du 11 août 1997 qu'il a été informé de l'existence desdits décrets;Qu'il est à remarquer que la connaissance acquise par le requérant d'une décision lui portant grief en l'absence de notification ou publication, ne fait courir le délai de recours à son encontre que dans le cas où un acte accompli par lui révèlerait indiscutablement, la réalité de cette connaissance;Qu'une personne qui forme un recours gracieux, ou hiérarchique contre une décision reconnaît par-là même qu'elle a eu connaissance de cet acte au plus tard le jour où elle a formé ce recours;Considérant que l'analyse du recours gracieux et de la saisine de la Cour Suprême montrent:- que le requérant a introduit son recours gracieux daté du 11 août 1997 au Ministre de la Justice, lequel recours a été enregistré le 18 août 1997 sous le n° 2286/231 audit Ministère;- que la saisine de la Cour Suprême datée du 21 novembre 1997 a été enregistrée au Greffe de ladite Cour le 1er décembre 1997 sous n° 847/GCS;Qu'il résulte de ce qui précède que d'une part l'Administration est considérée comme ayant acquiescée aux allégations du requérant, d'autre part que le recours du requérant est recevable pour avoir été introduit dans les forme et délai de la loi;Qu'il échet donc de déclarer recevable le recours par lequel Monsieur KEKE Louis René, Magistrat, a introduit en annulation pour excès de pouvoir contre les décrets n° 94-265 du 11 août 1994 et n° 97-29 du 29 janvier 1997.AU FONDSur le moyen unique tiré de la violation du principe des droits acquis, excès de pouvoir en ce que le retrait d'un acte légal n'est possible que lorsqu'il n'a fait naître aucun droit.Considérant que les actes qui créent des règles applicables à tous, qu'il s'agisse de décrets, d'arrêtés ministériels, de directives nationales, d'arrêtés municipaux, peuvent être abrogés à tout moment; que personne n'a droit au maintien d'une réglementation qu'elle estimait lui être favorable; que par contre, s'agissant des décisions individuelles, c'est le principe du maintien des droits acquis en ce sens qu'une décision individuelle régulièrement intervenue ne peut jamais être retirée rétroactivement, ni être abrogée pour l'avenir si elle a créé des droits;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le sieur Louis René KEKE a été engagé dans la Fonction Publique le 07 février 1979, puis a été intégré par décret n° 83-62 du 23 février 1983 dans le corps de la Magistrature Béninoise;Qu'aux termes des dispositions du décret n° 92-332 du 26 novembre 1992 portant promotion de Magistrats, il a été promu au titre de l'année 1991, à la Catégorie A, Echelle 1, Echelon 8, Indice 1.155, à compter du 15 novembre 1991;Considérant que les articles 1, 2 et 3 du décret n° 94-265 du 11 août 1994 portant rectification des articles 1, 2 et 3 du décret n° 83-62 du 23 février 1983 portant intégration dans le Corps de la Magistrature Béninoise des Camarades Louis René KEKE, Gilbert Comlan AHOUANDJINOU, Jérôme Olaïtan ASSOGBA, Marcelline Assiba GBEHA et Jeanne Agnès AYADOKOUN, uniquement en ce qui concerne Monsieur Louis René KEKE disposent que:«ARTICLE 1ER: Les articles 1, 2 et 3 du décret n° 83-62 du 23 février 1983 portant intégration dans le Corps de la Magistrature Béninoise des Camarades Louis René KEKE, Gilbert Comlan AHOUANDJINOU, Jérôme Olaïtan ASSOGBA, Marcelline Assiba GBEHA et Jeanne Agnès AYADOKOUN sont modifiés comme suit uniquement en ce qui concerne Monsieur René Louis KEKE;Au lieu de:ARTICLE 1ER: Conformément aux dispositions de l'article 80 alinéa 2 de la Loi n° 65-5 du 20 avril 1965 portant statut de la Magistrature Dahoméenne sont intégré dans le Corps de la Magistrature Béninoise au 2è échelon du 3è grade pour compter du 15 novembre 1982, les Camarades titulaires de la Maîtrise en droit et diplômés du Centre de Formation Administrative de Perfectionnement (CEFAP) dont les noms suivent:- Louis René KEKE,- Gilbert Comlan AHOUANDJINOU,- Jérôme Olaïtan ASSOGBA, - Marcelline Assiba GBEHA,- et Jeanne Agnès AYADOKOUN.ARTICLE 2: Il est accordé aux intéressés une bonification d'ancienneté de trois (03) ans dont deux au titre du stage effectué au CEFAP et un (01) an au titre de leur formation Civique, Patriotique, Idéologique et Militaire.ARTICLE 3: Est constaté, à compter du 15 novembre 1982 l'avancement des intéressés au 3ème échelon du 3ème grade avec (01) an d'ancienneté conservée».Lire:«ARTICLE 1ER: Conformément aux dispositions de l'article 80 alinéa 2 de la Loi n° 65-5 du 20 avril 1965 portant Statut de la Magistrature Dahoméenne, Monsieur Louis René KEKE, titutlaire de la Maîtrise en Droit et de l'Attestation du Diplôme de Fin de Stage du Centre de Formation Administrative et de Perfectionnement est intégré dans le Corps de la Magistrature Béninoise à la Catégorie A, Echelle 1, Echelon 2 pour compter du 15 novembre 1982 conformément aux dispositions de l'article 72 alinéa 4 de l'Ordonnance 79-31 du 4 juin 1979, portant Statut Général des Agents Permanents de l'Etat, il est constaté au profit de l'intéressé une ancienneté conservée (AC) de huit (8) mois vingt cinq (25) jours correspondant à la moitié de la période allant du 25 mai 1981, date de son dernier avancement dans son ancien corps au 15 novembre 1982, date de son intégration dans le Corps de la Magistrature.ARTICLE 2: Il est accordé à Monsieur Louis René KEKE une bonification d'ancienneté de trois (3) ans dont deux (2) au titre du stage effectué au Centre de Formation Administrative et de Perfectionnement et un (1) an au titre de sa formation Civique Patriotique, Idéologique et Militaire, soit une ancienneté conservée de 3ans 8 mois 25 jours.ARTICLE 3: Sont constatés au profit de l'intéressé les avancements d'échelons ci-après:Corps des MagistratsLouis René KEKE:Grade: Catégorie A, Echelle 1, Echelons 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9;Dates d'effet + AC + RSM: 15 novembre 1982 + AC + RSM, 1 an 8 mois 25 jours, 20 février 1983 + AC + RSM épuisés.20 février 1985 + AC néant; 20 février 1987 + AC néant; 20 février 1989 + AC néant; 20 février 1991 + Ac néant; 20 février 1993 + AC néant.ARTICLE 4: Le reste des dispositions du décret n° 83-62 du 23 février 1983 est sans changement.ARTICLE 5: Le garde des Sceaux, Ministre de la Justice et de la Législation et le Ministre des Finances sont chargés chacun en ce qui le concerne de l'exécution du présent décret.Considérant que l'analyse du décret n° 94-265 du 11 août 1994 montre dans ses dispositions qu'il a rectifié le décret n° 83-62 du 23 février 1983 en supprimant au requérant le bénéfice du coefficient de revalorisation dégressif et ceci bien au-delà du délai du recours contentieux;Qu'en droit, l'exception d'illégalité n'est pas perpétuelle pour les actes individuels en raison du caractère intangible des effets individuels de ces actes;Qu'en l'espèce, le décret n° 92-332 du 26 novembre 1992 est un acte régulier ayant créé au surplus des droits au profit du requérant par l'octroi d'un coefficient de revalorisation portant l'indice de l'intéressé à 1150 suite à sa promotion à l'échelon 8 de la catégorie A echelle 1;Que le retrait n'est possible, que lorsqu'il s'agit d'un acte individuel irrégulier; que dans ce cas le retrait doit intervenir dans le délai du recours pour excès de pouvoir qui est de deux mois;Que les décrets qui ont violé les droits créés en 1992 sont intervenus en 1994 et en 1997, soit plus d'un an après la prise du décret n° 92-332 du 26 novembre 1992;Qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Président de la République a pris le décret attaqué qui doit en conséquence être annulé en ce qui concerne le requérant dans la mesure où le décret de 1994 et celui de 1997 ont violé les règles de la stabilité juridique en ignorant le coefficient de revalorisation dégressif accordé au requérant qui est un droit acquis;PAR CES MOTIFSD E CI D EArticle 1er: Le recours en annulation du sieur Louis René KEKE, Magistrat, en date à Cotonou du 21 novembre 1997 contre les décrets n° 94-265 du 11 août 1994 et 97-29 du 29 janvier 1997 portant Promotion des Magistrats est recevable.Article 2: Lesdits décrets sont annulés en ce qui concerne le requérant pour violation du principe des droits acquis, excès de pouvoir, avec toutes les conséquences de droit.Article 3: Les dépens sont mis à la charge du Trésor Public.Article 4: Notification du présent arrêt sera faite au requérant, au Président de la République, au Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme, au Ministre de la Fonction Publique, du Travail et de la Réforme Administrative et au Procureur Général près la Cour Suprême.Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de Messieurs:Samson DOSSOUMON, Conseiller à la Chambre Administrative,PRESIDENT;Saroukou AMOUSSA et Grégoire ALAYE,CONSEILLERS.Et prononcé à l'audience publique du jeudi seize décembre mil neuf cent quatre vingt dix-neuf, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:Nestor DAKO, MINISTERE PUBLIC,Et de Maître Irène Olga AÏTCHEDJI, GREFFIER.


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 88/CA
Date de la décision : 16/12/1999
Administrative contentieuse

Analyses

Décisions individuelles - Violation du principe du maintien des droits acquis.

Viole le principe des droits acquis un acte rectificatif pris par l'Administration au delà du délai du recours contentieux (deux mois)


Parties
Demandeurs : KEKE LOUIS RENE
Défendeurs : GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, DE LA LEGISLATION ET DES DROITS DE L'HOMME.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1999-12-16;88.ca ?
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