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17/07/2003 | CEMAC | N°004/CJ/CEMAC/CJ/03

CEMAC | CEMAC, Cour de justice, Chambre judiciaire, 17 juillet 2003, 004/CJ/CEMAC/CJ/03


Texte (pseudonymisé)
COUR DE JUSTICE
Communauté Economique et Monétaire
de l'Afrique Centrale
--------------
CHAMBRE JUDICIAIRE
--------------
AFFAIRE Aa B A CONTRE LA CEMAC
? Droit de la Fonction Publique Communautaire,
? Demande de dommages intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi par un prétendant au poste de Secrétaire Exécutif de la Communauté.
? Préjudice consécutif à une recommandation non suivie d'effet.
Compétence de la Cour : Oui,
Recevabilité: Oui.
SOMMAIRE DE L'ARRET
Dans l'espèce, il est de tradition constante au sein de l

a Communauté que l'Etat attributaire du poste de Secrétaire Exécutif le fasse pourvoir souverainement.
...

COUR DE JUSTICE
Communauté Economique et Monétaire
de l'Afrique Centrale
--------------
CHAMBRE JUDICIAIRE
--------------
AFFAIRE Aa B A CONTRE LA CEMAC
? Droit de la Fonction Publique Communautaire,
? Demande de dommages intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi par un prétendant au poste de Secrétaire Exécutif de la Communauté.
? Préjudice consécutif à une recommandation non suivie d'effet.
Compétence de la Cour : Oui,
Recevabilité: Oui.
SOMMAIRE DE L'ARRET
Dans l'espèce, il est de tradition constante au sein de la Communauté que l'Etat attributaire du poste de Secrétaire Exécutif le fasse pourvoir souverainement.
Par conséquent, la Communauté ne commet aucune faute en entérinant la décision de l'Etat camerounais proposant une autre personnalité au poste convoité par le requérant nonobstant la recommandation du Conseil des Chefs d'Etat de la défunte UDEAC.
Antoine MARADAS

COUR DE JUSTICE
_________
CHAMBRE JUDICIAIRE
__________
ARRËT N°004/CJ/CEMAC/CJ/03
Du 17/07/2003
_________
Affaire: Aa B A
C/
CEMAC
________
(Requête aux fins d'indemnisation)
________

COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE
' AU NOM DE LA COMMUNAUTE '
La Cour (Chambre Judiciaire) de Justice de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) siégeant à N'Djamena (Rép. du Tchad) le dix sept juillet deux mille trois en formation plénière composée de Messieurs:
- Jean MONGO ANTCHOUIN, Président,
- Antoine MARADAS, Juge,
- Pierre KAMTOH, Juge,
- DADJO GONI, Juge,
- Georges TATY, Juge,
Assistée de Maître RAMADANE GOUNOUTCH, Greffier;
A RENDU L'ARRET DONT LA TENEUR SUIT :
ENTRE
Le sieur Aa B A, représenté par Maîtres NOULOUWE et TCHANGA, Avocats au barreau du Cameroun BP.2884, Douala, ayant élu domicile à N'Djamena auprès de BETEL NINGANADJI Marcel, Avocat au barreau du Tchad, BP.589,

Demandeur d'une part,
ET
La Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) dont le siège social est à Bangui (République Centrafricaine), prise en la personne de son représentant légal, Monsieur C, Secrétaire Exécutif, ayant pour Conseil Maître Jean-Bernard PADARE, Avocat au barreau du Tchad, BP.5110, N'Djamena,
Défendeur d'autre part,

LA COUR
Vu le Traité instituant la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) du 16 mars 1994,
Vu l'additif au Traité de la CEMAC relatif au système institutionnel et juridique de la Communauté,
Vu la Convention du 5 juillet 1996 régissant la Cour de Justice de la CEMAC,
Vu les Actes Additionnels n°001/2000/CEMAC/CJ/CCE et n°01/02/CEMAC/CJ/CE/ portant nomination des membres de la Cour de Justice de la CEMAC,
Vu l'Acte Additionnel n°04/00/CEMAC/041/CCE/CJ/02 du 14 Décembre 2000 portant règles de procédure devant la Chambre Judiciaire de la Cour de Justice de la CEMAC,
Vu l'Acte additionnel n°006/CEMAC/041 -CCE -CJ -02 du 14 Décembre 2000 portant Statut de la Chambre Judiciaire de la Cour de Justice de la CEMAC,
Vu la requête de Monsieur Aa B A,
Oui le Juge Antoine MARADAS, en son rapport,
Oui Maître TCHANGA, Avocat de Monsieur Aa B A, en ses observations orales,
Après en avoir délibéré conformément au droit communautaire,
FAITS ET PROCEDURE
Considérant que par requête du 18 novembre 2001 Aa B A a demandé la condamnation de la CEM AC au paiement de 734.878.383 F CFA à titre de dommages -intérêts,
qu'il allègue qu'il a été nommé Secrétaire Exécutif de la CEMAC par décision n°06/98 -UDEAC -CEMAC -CE -33 du Conseil des chefs d'Etat de l'UDEAC tenu à Libreville le 5/02/1998,
qu'il a préparé et rapporté tous les dossiers de la première Conférence des chefs d'Etat de la CEMAC, tenue à Malabo les 24 et 25 juin 1999 au cours de laquelle il n'a pu prêter serment, comme prévu, la Conférence ayant nommé un nouveau Secrétaire Exécutif, mettant fin 'de facto' à ses fonctions,
que cette décision n'est pas conforme aux textes organiques de la CEMAC, notamment aux dispositions de l'article 18 de l'Additif au Traité relatif au système institutionnel et juridique de la Communauté, et qu'elle lui a causé un important préjudice matériel et moral dont la réparation est imputable à la CEMAC,
Considérant que les conseils du demandeur ont réitéré les arguments développés par leur client et invoqué la violation de la décision n°6/98 -UDEAC -CEMAC -CE -33 précitée,
Considérant que le Secrétariat Exécutif, représenté par son Agent, a rejeté les allégations du requérant en expliquant que M.Thomas B A a été nommé Secrétaire Général de l'UDEAC le 6 Décembre 1991 par le Conseil des Chefs d'Etat de l'UDEAC pour un mandat de 3 ans renouvelable, conformément aux dispositions de l'article 17 du Traité instituant l'UDEAC,
que son deuxième mandat ayant pris fin en Décembre 1998, il a été maintenu en fonction aux fins d'assurer la transition entre la fin de l'UDEAC et l'avènement de la CEMAC,
qu'une tradition constante laisse au Gouvernement Camerounais le libre choix du titulaire du poste de Secrétaire Général de l'UDEAC puis du Secrétaire Exécutif de la CEMAC,
qu'ainsi l'Etat du Cameroun ne s'est pas senti lié par la recommandation du Consiel des Chefs d'Etat de l'UDEAC relative à la confirmation formelle de Aa B A au poste de Secrétaire Exécutif,
que subsidiairement, si le refus tacite de confirmer Aa B A au poste de Secrétaire Exécutif de la CEMAC devait être considéré comme un acte violant une norme communautaire et engager la responsabilité civile de la Communauté, l'action ne peut être engagée que sur la base de la décision n°1/92 -UDEAC -587 -CE -28 du 15 février 1992 portant Statut du Personnel du Secrétariat Général de l'UDEAC et son avenant concernant le Secrétaire Général de l'UDEAC, approuvé et signé le 16 Mars 1994 par les parties,
Considérant qu'à l'audience du 19 juin 2003 et dans une note en délibéré, le demandeur a réfuté ces arguments en faisant observer:
que la clause attributive de compétence figurant dans l'avenant du 16 mars 1994 est devenue caduque du fait de la mort politique de l'UDEAC et de la mise en place de la Cour de Justice compétente pour connaître en premier et dernier ressort de tout litige opposant la Communauté à ses agents,
qu'il ne remettait pas en cause la décision souveraine des Chefs d'Etat nommant une autre personnalité à la tête du Secrétariat Exécutif de la CEMAC,
qu'il avait reçu toutes les assurances de son employeur de pouvoir être confirmé au poste de Secrétaire Exécutif,
que la décision mettant fin de manière brutale à ses fonctions est aussi bien source de frustration morale que de préjudice matériel à réparer,

DISCUSSION
Sur la compétence
Considérant que l'avenant à l'acte 1/92-UDEAC-587-CE-28 du 15 Décembre 1992 et l'article 59 portant révision du statut du personnel du Secrétariat Général attribuant compétence au Conseil des Chefs d'Etat de l'UDEAC pour connaître de tout litige pouvant naître de l'exercice des fonctions du requérant, sont devenus caducs suite à la disparition de l'UDEAC,

que depuis l'avènement de la CEMAC, cette compétence juridictionnelle est désormais dévolue à la Cour de Justice par application des articles 4 al.4 et 21 de la Convention régissant ladite Cour,
que la Cour est compétente pour connaître de la demande de Aa B A,
Sur la recevabilité
Considérant que le recours en indemnisation n'est pas soumis à la prescription de deux mois prévue à l'article 12 du Règlement de Procédure de la Chambre Judiciaire qui ne concerne que le seul recours en annulation,
Que la demande de Aa B A est recevable en la forme,
Sur le préjudice matériel
Considérant que si par décision n°6/98 UDEAC-CEMAC-33, mandat a été donné au Président de la Conférence des Chefs d'Etat de la CEMAC de confirmer formellement la nomination de Messieurs B A Aa au poste de Secrétaire Exécutif et MOUIRI-BOUSSOUGOU Dieudonné à celui de Secrétaire Exécutif Adjoint de la CEMAC, cette recommandation n'a jamais été suivie d'effet en ce qui concerne le demandeur,
que l'article 3 de la décision précitée préciseque «le mandat de B A Aa en qualité de Secrétaire Général de l'UDEAC et celui de MOURI-BOUSSOUGOU Dieudonné en qualité de Secrétaire Général Adjoint sont prorogés jusqu'à leur prise de fonction à la CEMAC»,
que B A Aa n'ayant pas été nommé Secrétaire Exécutif de la CEMAC au terme de la prolongation de son mandat, c'est à juste raison que ses droits ont été calculés sur la base de l'avenant au statut du Secrétariat Général de l'UDEAC,
que la demande en réparation du préjudice matériel n'est pas fondée,
Sur le préjudice moral
Considérant que le demandeur soutient que la promesse faite et non tenue lui a occasionné une frustration ouvrant la voie à réparation,

Considérant que s'il est constant que le Conseil des Chefs d'Etat, en sa séance du 5 février 1998, a recommandé au futur Président en exercice de la Conférence des Chefs d'Etat de la CEMAC de confirmer formellement aux postes de Secrétaire Exécutif et Secrétaire Exécutif Adjoint les anciens Secrétaire Général et Secrétaire Général Adjoint de l'UDEAC, il n'en reste pas moins vrai que le Cameroun a proposé une autre personnalité au poste de Secrétaire Exécutif,
Qu'en outre le Président de la Conférence des Chefs d'Etat n'était pas lié par le mandat du défunt Conseil des Chefs d'Etat de l'UDEAC,
que la Conférence des Chefs d'Etat de la CEMAC n'a donc commis aucune faute en nommant souverainement une personnalité autre que Aa B A au poste de Secrétaire Exécutif,
qu'en conséquence sa demande n'est pas fondée,
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de droit communautaire, en premier et dernier ressort,
Se déclare compétente,
Reçoit en la forme la requête en indemnisation introduite par Aa B A,
Au fond:
la rejette,
condamne Aa B A aux dépens.

Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président, les Juges et le Greffier.
Jean MONGO ANTCHOUIN Antoine MARADAS Pierre KAMTOH DADJO GONI
PRESIDENT JUGE JUGE JUGE
Georges TATY
JUGE

LE GREFFIER
Me RAMADANE GOUNOUTCH
RAPPORT D'AUDIENCE
AFFAIRE: Aa B A CONTRE CEMAC.
Sur les faits et procédure:
Dans sa requête introductive d'instance en date du 18 novembre 2001 intitulée requête aux fins d'indemnisation, enregistrée au greffe de la Cour le 27 novembre 2001 sous le n°252, le nommé Aa B A expose qu'il a été nommé Secrétaire Exécutif de la CEMAC par acte du Conseil des Chefs d'Etat de l'UDEAC à Libreville le 5 Février 1998,
Que ladite nomination a été matérialisée par décision n°06/98 UDEAC -CEMAC -CE -33,
Que c'est à ce titre de Secrétaire Exécutif qu'il a préparé et rapporté tous les dossiers de la première conférence des chefs d'Etat de la CEMAC tenue à MALABO les 24 et 25 Juin 1999,
Que le point concernant sa prestation de serment avait été inscrit à l'ordre du jour des travaux de la Conférence des chefs d'Etat sus-dessus mentionnée.
Mais qu'à sa grande surprise la Conférence a nommé un nouveau Secrétaire Exécutif, mettant ainsi fin à ses fonctions à lui de Secrétaire Exécutif.
Il (Aa B A ) estime que cette décision prise à son encontre n'est pas conforme aux textes organiques de la CEMAC, notamment les dispositions de l'article 18 de l'Additif au Traité relatif au système institutionnel et juridique de la Communauté et que ladite décision lui a causé un grave préjudice devant être réparé par l'allocation des dommages -intérêts qu'il réclame à la Communauté et dont il chiffre le montant à 734.878.383 F.
Faisant suite à la requête introductive d'instance, les conseils de Aa B A ont adressé un mémoire ampliatif daté du 9 Janvier 2002 et enregistré au greffe le 11 Janvier sous le n°14.
Les conseils du demandeur ont réitéré les arguments développés dans la requête introductive d'instance en insistant sur deux textes qui selon eux, la Conférence des Chefs d'Etat aurait dû prendre en compte pour déciderdu sort de leur client. Il s'agit de :
1. La décision n°6/98 UDEAC -CEMAC -CE -33 concernant la confirmation de Aa B A au poste de Secrétaire Exécutif de la CEMAC,
2. L'article 18 de l'Additif au Traité de la CEMAC traitant des conditions dans lesquelles il peut être mis fin au mandat du Secrétaire Exécutif de la CEMAC.
Répondant aux prétentions du sieur Aa B A, la CEMAC par l'intermédiaire du S.E. représenté par son conseil a fait parvenir au greffe de la Cour un mémoire en défense daté du 25 Juillet 2002 et enregistré au greffe ce même jour sous le n°024. La CEMAC conteste en tous points les affirmations du demandeur.
1) Sur le recrutement
Le défendeur rapporte que Aa B A a été nommé
Secrétaire Général de l'UDEAC le 6 Décembre 1991 par le Conseil des Chefs d'Etat de l'UDEAC pour un mandat de 3 ans renouvelable conformément aux dispositions de l'article 17 du Traité instituant l'UDEAC.
2) Sur la nomination du Secrétaire Exécutif de la CEMAC autre que Aa B A.
La CEMAC soutient que le Secrétaire Général de l'UDEAC a assuré deux mandats de 3 ans chacun qui ont pris fin en décembre 1998 et que son mandat de Secrétaire Général de l'UDEAC a été prorogé aux fins d'assurer la transition entre la fin de l'UDEAC et l'avènement de la CEMAC et qu'une fois la naissance juridique de la CEMAC intervenue, la Conférence des Chefs d'Etat nommait aux postes de Secrétaire Exécutif et de Secrétaire Exécutif Adjoint. Le défendeur ajoute en précisant que selon la tradition, ces deux postes sont dévolus respectivement au Cameroun et au Gabon qui proposent souverainement les candidats; que dans le cas d'espèce le Cameroun a préféré une autre personnalité à l'ancien Secrétaire Général de l'UDEAC alors que le Gabon faisait confirmer l'ancien Secrétaire Général Adjoint de l'UDEAC.
La CEMAC fait encore observer que si le refus tacite de confirmer Aa B A au poste de Secrétaire Exécutif de la CEMAC devait être considéré comme litigieux, l'intéressé aurait dû faire porter ce litige devant l'instance prévu dans le document qu'il a approuvé et signé et qui prévoit les conditions générales d'emploi et le cas de règlement de litige et qui date du 16 Mars 1994; document qui lui avait été adressé personnellement par le Président en exercice du Conseil des Chefs d'Etat de l'UDEAC.
N'Djamena, le
LE JUGE RAPPORTEUR
ANTOINE MARADAS


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 004/CJ/CEMAC/CJ/03
Date de la décision : 17/07/2003

Analyses

1° ? Droit de la Fonction Publique Communautaire, ? Demande de dommages intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi par un prétendant au poste de Secrétaire Exécutif de la Communauté. ? Préjudice consécutif à une recommandation non suivie d'effet. Dans l'espèce, il est de tradition constante au sein de la Communauté que l'Etat attributaire du poste de Secrétaire Exécutif le fasse pourvoir souverainement. Par conséquent, la Communauté ne commet aucune faute en entérinant la décision de l'Etat camerounais proposant une autre personnalité au poste convoité par le requérant nonobstant la recommandation du Conseil des Chefs d'Etat de la défunte UDEAC.


Parties
Demandeurs : Thomas DAKAYI KAMGA
Défendeurs : CEMAC

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;cemac;cour.justice;arret;2003-07-17;004.cj.cemac.cj.03 ?
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