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27/06/2002 | CEDH | N°22281/93

CEDH | AFFAIRE SIDDIK YASA c. TURQUIE


PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE SIDDIK YAŞA c. TURQUIE
(Requête n° 22281/93)
ARRÊT
(Règlement Amiable)
STRASBOURG
27 juin 2002
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Sıddık Yaşa c. Turquie
La Cour européenne des Droits de l'Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
M. C.L. Rozakis, président,   Mme F. Tulkens,   MM. G. Bonello,    E. Levits,   M. A. Kovler,   Mmes E. Steiner, juges,   M. F. Gölcüklü, juge ad hoc  et de M. E. Friberg

h, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 juin 2002,
Rend l'arrêt que voici, adop...

PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE SIDDIK YAŞA c. TURQUIE
(Requête n° 22281/93)
ARRÊT
(Règlement Amiable)
STRASBOURG
27 juin 2002
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Sıddık Yaşa c. Turquie
La Cour européenne des Droits de l'Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
M. C.L. Rozakis, président,   Mme F. Tulkens,   MM. G. Bonello,    E. Levits,   M. A. Kovler,   Mmes E. Steiner, juges,   M. F. Gölcüklü, juge ad hoc  et de M. E. Fribergh, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 juin 2002,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l'origine de l'affaire se trouve une requête (n° 22281/93) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet Etat, M. Sıddık Yaşa (« le requérant »), avait saisi la Commission européenne des Droits de l'Homme (« la Commission ») le 21 juin 1993 en vertu de l'ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Le requérant est représenté devant la Cour par M. Kevin Boyle et Mme Françoise Hampson, professeurs à l'université d'Essex, au Royaume-Uni. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») est représenté par ses coagents ainsi que par M. H. Kemal Gür, ministre plénipotentiaire, directeur général adjoint pour le Conseil de l'Europe et les droits de l'homme au ministère des affaires étrangères à Ankara.
3.  Invoquant les articles 2, 3, 5, 6, 8, 13, 14, 18 de la Convention, le requérant se plaignait notamment de la mort de son épouse et de son fils survenue lors d'une opération militaire menée dans leur village ainsi que de l'absence d'une enquête efficace à ce sujet. Par ailleurs, il s'estimait victime d'une violation de son droit au respect de ses biens, au sens de l'article 1 du Protocole n° 1, du fait de la destruction de sa maison par les membres des forces armées.
4.  Le 3 avril 1995, la Commission a déclaré la requête recevable.
5.  Conformément à la décision que la Commission avait prise le 2 décembre 1995, des délégués se sont rendus à Ankara le 18 novembre 1996 afin d'y recueillir des témoignages.
6.  Faute d'avoir pu terminer l'examen de la requête avant le 1er novembre 1999, la Commission l'a déférée à la Cour à cette date, conformément à l'article 5 § 3, seconde phrase, du Protocole n° 11 à la Convention.
7.  La requête a été attribuée à la seconde section de la Cour (article 52 § 1 du règlement). Au sein de celle-ci, la chambre chargée d'examiner l'affaire (article 27 § 1 de la Convention) a été constituée conformément à l'article 26 § 1 du règlement. A la suite du déport de M. R. Türmen, juge élu au titre de la Turquie (article 28), le Gouvernement a désigné M. F. Gölcüklü pour siéger en qualité de juge ad hoc (articles 27 § 2 de la Convention et 29 § 1 du règlement).
8.  Le 1er novembre 2001, la Cour a recomposé ses sections (article 25 § 1 du règlement) et la présente affaire a été attribuée à la première section dans sa nouvelle composition.
9.  Le 23 novembre 2001, après un échange de correspondance, le greffier de section a proposé aux parties la conclusion d'un règlement amiable au sens de l'article 38 § 1 b) de la Convention.
10.  Les 17 janvier et 30 avril 2002 respectivement, la représentante du requérant et le Gouvernement ont fait parvenir des déclarations formelles d'acceptation d'un règlement amiable de l'affaire.
EN FAIT
11.  Le 17 décembre 1992, un groupe armé appartenant au PKK prit un minibus civil en embuscade ; les passagers furent forcés à descendre du minibus et l'un d'eux, œuvrant pour le compte de l'Etat comme garde de village, fut exécuté  sur-le-champ.
12.  Les faits ultérieurs se trouvent controversés. 
13.  D'après la version du Gouvernement, suite à cet incident, un affrontement armé violent eut lieu à Tepecik (district de Kocaköy, province de Diyarbakır), opposant les forces de l'armée et les terroristes du PKK. Cela dura jusqu'au 20 décembre 1992 et coûta la vie à huit terroristes et un garde de village. Sept villageois, suspectés d'avoir participé aux agissements en question furent arrêtés en possession d'armes puis déférés à la justice.  
14.  Aux dires du requérant, le 19 décembre 1992, des soldats  accompagnés de gardes de village firent irruption dans Tepecik. L'un d'eux lança une grenade à l'intérieur de la maison du requérant, alors qu'il était absent. L'épouse du requérant, Yezal Yaşa, et son fils, Veysi Yaşa, y trouvèrent la mort, tout comme plusieurs autres villageois.
15.  Le 22 décembre 1992, vers 8 heures, un groupe de gardes de village retournèrent à Tepecik. Cinq d'entre eux commencèrent à tirer sur les villageois et en blessèrent quelques uns. Peu après, d'autres soldats et gardes de village arrivèrent. Ils incendièrent la plupart des habitations et rouèrent de coups les villageois voulant s'échapper des feux. Une grande partie du bétail fut également décimée.
16.  Les villageois, dont le requérant, ayant perdu leurs maisons et biens, se virent contraints de quitter Tepecik. Nulle famille ne fut autorisée à enterrer les corps de leurs proches dans le village ; ceux-ci furent amenés et inhumés à Diyarbakır.
17.  Le requérant expose s'être adressé au parquet de Diyarbakır pour se plaindre des incidents exposés ci-dessus. Un procureur lui aurait fait comprendre qu'il devait éviter de se mêler trop à cette affaire, voire  l'oublier. Le Gouvernement conteste cette thèse, tandis que le requérant affirme ne pas avoir eu le courage de saisir une quelconque instance supérieure, craignant des représailles
18.  Une enquête pénale semble avoir été initiée au sujet des décès survenus lors des événements suivant le 17 décembre 1992. Cependant, la Cour ne dispose pas d'informations quant à son issue.
EN DROIT
19.  La Cour a reçu de la part du Gouvernement la déclaration suivante :
« 1. I declare that the Government of the Republic of Turkey offer to pay ex gratia to the applicant Sıddık Yaşa an all-inclusive amount of 89,000 (eighty-nine thousand) pounds sterling1, with a view to securing a friendly settlement of his application registered under n° 22281/93. This sum, which also covers legal expenses connected with the case, shall be free of any tax that may be applicable and be paid in pounds sterling to a bank account named by the applicant and/or his duly authorised representative. This sum shall be payable within three months from the date of the notification of the judgment delivered by the Court pursuant to Article 39 of the European Convention on Human Rights. This payment will constitute the final settlement of the case.
2. The Government regret the occurrence of individual cases of death resulting from the unjustified and disproportionate use of force, as in the case of Mrs Yezal Yaşa and her son Veysi Yaşa, notwithstanding existing Turkish legislation and the resolve of the Government to prevent such actions. 
3. It is accepted that the occurrence of deaths in the present case and the inadequate investigations that followed constituted a violation of Articles 2 and 13 of the Convention. The Government undertake to issue appropriate [instructions] and adopt all necessary measures to ensure that the right to life – including the obligation to carry out effective investigations as required by these Articles – is respected. It is noted in this connection that new legal and administrative measures have been adopted which have resulted in, among other things, more effective investigations into cases of death in circumstances similar to those of the instant application.
4.  The Government consider that the supervision by the Committee of Ministers of the Council of Europe of the execution of Court judgments concerning Turkey in this and similar cases is an appropriate mechanism for ensuring that improvements will continue to be made in this context. To this end, necessary co-operation in this process will continue to take place.
5.  Finally, the Government undertake not to request the reference of the case to the Grand Chamber pursuant to Article 43 § 1 of the Convention after the delivery of the Court's judgment. »
20.  Le conseil du requérant fit parvenir une déclaration rédigée en langue turque et signée par ce dernier. La version anglaise fournie par la partie requérante se présente comme suit :
« I, the applicant Sıddık Yaşa, accept the friendly settlement declaration regarding my application against the Republic of Turkey without any reservation.
I also declare my acceptance of any responsibility undertaken on behalf of the applicant in the friendly settlement declaration.
I request the compensation money (GBP 89,000), which is agreed to be paid to myself, to be sent into the account of my authorised local lawyer after the settlement of this case. The Court and the agents of the ministry of foreign affairs will be informed about the details of this account.
Yours Sincerely,
Sıddık YAŞA, applicant. »
21.  La Cour prend acte du règlement amiable auquel sont parvenues les parties (article 39 de la Convention). Elle est assurée que ledit règlement s'inspire du respect des droits de l'homme tels que les reconnaissent la Convention ou ses Protocoles (articles 37 § 1 in fine de la Convention et 62 § 3 du règlement).
22.  Partant, il convient de rayer l'affaire du rôle.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,
1.  Décide de rayer l'affaire du rôle ;
2.  Prend acte de l'engagement des parties de ne pas demander le renvoi de l'affaire à la Grande Chambre.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 27 juin 2002 en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Erik Fribergh Christos Rozakis   Greffier Président
1 142,695.79 EUR
ARRÊT SIDDIK YAŞA  c. TURQUIE
ARRÊT SIDDIK YAŞA c. TURQUIE 


Synthèse
Formation : Cour (première section)
Numéro d'arrêt : 22281/93
Date de la décision : 27/06/2002
Type d'affaire : Arrêt (Radiation du rôle)
Type de recours : Radiation du rôle (règlement amiable)

Analyses

(Art. 13) DROIT A UN RECOURS EFFECTIF, (Art. 2-1) VIE, (Art. 39) REGLEMENT AMIABLE, (Art. 8-1) RESPECT DU DOMICILE


Parties
Demandeurs : SIDDIK YASA
Défendeurs : TURQUIE

Références :

Notice Hudoc


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2002-06-27;22281.93 ?
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