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15/02/2007 | CEDH | N°54461/00;54579/00;55922/00

CEDH | AFFAIRE SOYSAL ET AUTRES c. TURQUIE


TROISIÈME SECTION
AFFAIRE SOYSAL ET AUTRES c. TURQUIE
(Requêtes nos 54461/00, 54579/00 et 55922/00)
ARRÊT
STRASBOURG
15 février 2007
DÉFINITIF
15/05/2007
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Soysal et autres c. Turquie,
La Cour européenne des Droits de l'Homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
MM. B.M. Zupančič, président,    R. Türmen,    C. Bîrsan,   Mme E.

Fura-Sandström,   MM. E. Myjer,    David Thór Björgvinsson,   Mme I. Ziemele, juges,  et de M. S. Quesada, gr...

TROISIÈME SECTION
AFFAIRE SOYSAL ET AUTRES c. TURQUIE
(Requêtes nos 54461/00, 54579/00 et 55922/00)
ARRÊT
STRASBOURG
15 février 2007
DÉFINITIF
15/05/2007
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Soysal et autres c. Turquie,
La Cour européenne des Droits de l'Homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
MM. B.M. Zupančič, président,    R. Türmen,    C. Bîrsan,   Mme E. Fura-Sandström,   MM. E. Myjer,    David Thór Björgvinsson,   Mme I. Ziemele, juges,  et de M. S. Quesada, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 25 janvier 2007,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date :
PROCÉDURE
1.  A l'origine de l'affaire se trouve trois requêtes (nos 54461/00, 54579/00 et 55922/00) dirigées contre la République de Turquie et dont cinq ressortissants de cet État, Hasan Soysal, Abubekir Çelebi, Fidan Kılıç, Selma Kılıçman et Ali Sarıpınar avaient saisi la Cour, les 27 septembre, 10 octobre 1999 et 1er novembre 1999 respectivement, en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Les requérants sont représentés par Me C. Aydın, avocat à Diyarbakır. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») n'a pas désigné d'agent aux fins de la procédure devant la Cour.
3.  Les requêtes avaient pour objet d'obtenir une décision sur le point de savoir si les faits de la cause révèlent un manquement de l'État défendeur aux exigences des articles 6, 8, 10, 11, 13 et 14 de la Convention.
4.  Les présidents des chambres constituées au sein des sections auxquelles les requêtes ont été attribuées ont décidé de les communiquer au Gouvernement, respectivement les 7 juillet, 7 octobre et 20 décembre 2005. Il a été décidé que seraient examinés en même temps la recevabilité et le bien-fondé de l'affaire en application des dispositions de l'article 29 § 3.
5.  Tant les requérants que le Gouvernement ont déposé des observations écrites sur le fond des affaires.
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
1. Hasan Soysal
6.  Au début des années 1990, le requérant commença ses activités syndicales alors qu'il travaillait à la société nationale des chemins de fer à Diyarbakır, en tant que gardien de passages à niveau.
7.  Il fut élu membre du comité de direction du syndicat des transports unis à la section de Diyarbakır en 1995 et président en 1997.
8.  Par une décision notifiée au requérant le 12 avril 1999, il fut muté à İzmir sur la demande du préfet de la région soumise à l'état d'urgence et sur le fondement de l'article 4 g) du décret-loi no 285.
9.  Cette décision n'était pas susceptible de recours devant les juridictions administratives.
2.  Abubekir Çelebi
10.  Le requérant est né en 1960.
11.  En 1991, il commença ses activités syndicales alors qu'il était instituteur à Diyarbakır.
12.  Entre 1996 et 1998, il poursuivit ses activités en tant que membre du comité de direction du syndicat des agents de l'éducation, de la science et de la culture (Eğitim-Sen) à la section de Diyarbakır.
13.  En décembre 1998, le requérant fut élu président dudit syndicat.
14.  Par une décision notifiée au requérant le 21 avril 1999, ce dernier fut muté à Tekirdağ. Cette décision avait été prise à la demande du préfet de la région soumise à l'état d'urgence et en application de l'article 4 g) du décret-loi no 285. Elle n'était pas susceptible de recours devant les juridictions administratives.
3.  Fidan Kıŀıç
15.  La requérante est née en 1967.
16.  En 1995, elle devint membre du syndicat des agents de l'éducation, de la science et de la culture (Eğitim-Sen) à la section de Diyarbakır alors qu'elle était institutrice à Diyarbakır.
17.  Elle continua ses activités dans les différentes commissions dudit syndicat.
18.  Par une décision notifiée à la requérante le 18 juin 1999, cette dernière fut mutée à Amasya. Cette décision avait été prise à la demande du préfet de la région soumise à l'état d'urgence et en application de l'article 4 g) du décret-loi no 285. Elle n'était pas susceptible de recours devant les juridictions administratives.
4.  Selma Kılıçman
19.  La requérante est née en 1975.
20.  En 1996, elle devint membre du syndicat des agents de l'éducation, de la science et de la culture (Eğitim-Sen) à la section de Diyarbakır alors qu'elle y était institutrice.
21.  En 1998, elle fut élue membre du comité de direction dudit syndicat.
22.  Par une décision notifiée à la requérante le 9 juillet 1999, cette dernière fut mutée à Rize. Cette décision avait été prise à la demande du préfet de la région soumise à l'état d'urgence et en application de l'article 4 g) du décret-loi no 285. Elle n'était pas susceptible de recours devant les juridictions administratives.
5.  Ali Sarıpınar
23.  Le requérant est né en 1971.
24.  A l'époque des faits, il était technicien agronome au sein des services de la ville de Diyarbakır.
25.  Il participa à la création du bureau local du syndicat « Tarım-Gıda Sen » de Diyarbakır et il fut élu membre fondateur du conseil d'administration provisoire de ce même syndicat. En 1998, il fut élu membre du conseil d'administration et par la suite devint le président du bureau local.
26.  A une date non précisée, lors d'une conférence de presse organisée par « la plateforme de démocratie de Diyarbakır, le requérant fit une déclaration. Le 17 février 1999, sur la base de cette déclaration, une action pénale fut intentée à son encontre devant la cour de sûreté de l'État de Diyarbakır.
27.  Par une décision du 16 avril 1999, à la demande écrite du 18 mars 1999 du préfet de la région soumise à l'état d'urgence, le requérant fut muté à Uşak.
II. LE DROIT INTERNE PERTINENT
28.  Le droit interne pertinent relatif à la région où l'état d'urgence était en vigueur et aux fonctionnaires qui étaient à leur poste dans cette région, tel qu'il était applicable à l'époque pertinente, est exposé dans les arrêts Bulğa et autres c. Turquie (no 43974/98, 20 septembre 2005), Çetin et autres c. Turquie (nos 40153/98 et 40160/98, §§ 24-32, CEDH 2003-III (extraits)), et Doğan et autres c. Turquie (nos 8803-8811/02, 8813/02 et 8815-8819/02, §§ 79-88, 29 juin 2004).
EN DROIT
I. SUR LA JONCTION DES AFFAIRES
29.  La Cour juge d'emblée qu'il y a lieu de joindre les requêtes en vertu de l'article 42 § 1 de son règlement.
II. SUR LA RECEVABILITÉ
A. Sur la violation alléguée des articles 10 et 11 de la Convention
30.  Les requérants allèguent que les décisions de mutation constituent une atteinte à leur droit à la liberté d'expression, de réunion et d'association. Ils invoquent les articles 10 et 11 de la Convention. La Cour juge approprié d'examiner ces griefs sous le seul angle de l'article 11 de la Convention ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.
2.  L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'État. »
1. Exception tirée du non épuisement des voies de recours internes
31.  Le Gouvernement soulève une exception d'irrecevabilité tirée du non-épuisement des voies de recours internes. Il allègue que les intéressés n'ont introduit aucun recours devant les instances nationales pour faire valoir leurs griefs qu'ils soulèvent maintenant devant la Cour.
32.  Les requérants font valoir l'absence d'un contrôle juridictionnel des actes émanant du préfet de la région soumise à l'état d'urgence.
33.  La Cour constate que cette exception est étroitement liée au fond du grief tiré de l'article 13 de la Convention combiné avec son article 11. Partant, elle décide de les joindre au fond.
2. Exception tirée du non respect de la règle de six mois
34.  Le Gouvernement note que la décision interne définitive, concernant le requérant Abubekir Çelebi est celle notifiée le 21 avril 1999, et concernant Ali Sarıpınar celle notifiée le 18 mai 1999. Il soutient que les requérants auraient dû introduire leurs requêtes dans les six mois suivant ces dates, dans la mesure où ils allèguent qu'il n'existait pas de recours interne effectif pour soulever leurs griefs. Il souligne que la requête d'Abubekir Çelebi a été introduite le 25 novembre 1999 et celle d'Ali Sarıpınar, le 15 février 2000.
35.  La Cour relève que la requête d'Abubekir Çelebi a été introduite le 27 septembre 1999 et celle d'Ali Sarıpınar le 1er novembre 1999. Il s'ensuit que l'exception du Gouvernement est basée sur des faits non établis et doit être rejetée.
3. Autres critères de recevabilité
36.  Le Gouvernement soutient que la Convention n'interdit pas la mutation de fonctionnaires membres d'un syndicat pour cause d'utilité publique. Il en conclut que les griefs des requérants sont incompatibles ratione materiae avec les dispositions de la Convention.
37.  Il affirme en outre que la mutation des requérants n'a pas eu pour conséquence de les empêcher d'être membre d'un syndicat ni de poursuivre des activités syndicales.
38.  La Cour rappelle avoir déjà eu l'occasion de se prononcer sur la question soulevée par les requérants dans les affaires (Ertaş Aydın et autres  c. Turquie no 43672/98, 20 septembre 2005, et Bulğa et autres, précité) et a conclu à la non-violation du droit à la liberté syndicale consacré par l'article 11 de la Convention.
39.  La Cour a examiné les présentes affaires et considère qu'il n'existe aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente. A cet égard, les décisions de mutation en question ne constituent pas, en principe, une limitation ou un empêchement au droit des requérants d'adhérer à un syndicat, d'exercer ou de jouir de la liberté d'association. Les requérants l'ont donc conservé en droit comme en fait, malgré les mesures incriminées dans le sens où ils sont restés membre des organisations syndicales en cause et ne sont pas empêchés de mener des activités syndicales dans leurs nouveaux postes ou lieux de mutation (Ertaş Aydın et autres, précité, et Schmidt et Dahlström c. Suède, arrêt du 6 février 1976, série A no 21).
40. Partant, à la lumière de l'ensemble des circonstances des présentes affaires, la Cour constate que les requérants n'ont pas démontré que les décisions de mutation prises à leur égard, ont constitué une ingérence telle que leur droit à mener des activités syndicales ait été atteint dans sa substance.
41. La Cour considère donc que cette partie des requêtes est manifestement mal fondée au sens de l'article 35 § 3 de la Convention.
B. Sur la violation alléguée des articles 8 et 14 de la Convention
42.  Dans leurs observations du 23 février 2006, les requérants, Abubekir Çelebi, Fidan Kılıç et Selma Kılıçman ont allégué la violation de l'article 8 de la Convention. La Cour constate que ce grief est tardif et doit être rejeté en application 35 § 4 de la Convention.
43.  Quant aux requérants Hasan Soysal et Ali Sarıpınar, la Cour relève que leurs griefs tiré de l'article 8 ne se heurte pas à la règle des six mois.
44.  Le Gouvernement soutient qu'il n'y a aucun obstacle à la réunification familiale pour les requérants; d'ailleurs les familles des requérants avaient la possibilité de les accompagner dans leur ville d'affectation. En acceptant de travailler dans la fonction publique, les requérants savaient très bien qu'ils pouvaient être mutés. Dans la fonction publique, la mutation est nécessaire en raison de la nature de l'emploi et de la nécessité de remédier au manque de personnel.
45.  La Cour rappelle que le statut des requérants est régi par la loi no 657 relative aux fonctionnaires d'Etat qui prévoit, en principe, la possibilité de leur mutation dans un autre service ou dans une autre ville. Partant, les mesures dont se plaignent les requérants relèvent de leurs engagements contractuels et leurs plaintes d'un effet accessoire de la mutation. Dans ces circonstances, la Cour estime qu'il n'y a pas lieu d'examiner séparément ce grief (voir, mutatis mutandis, Öztürk c. Turquie [GC], no 22479/93, § 76, CEDH 1999-VI, et Parti socialiste et autres c. Turquie, arrêt du 25 mai 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-III, p. 1259, § 57).
46.  Les requérants se plaignent du fait qu'ils aient été mutés en raison de leurs opinions politiques. Ils invoquent l'article 14 de la Convention.
47.  Compte tenu de l'ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, la Cour ne relève aucune apparence de violation quant à ce grief des requérants. Il s'ensuit que cette partie des requêtes doit être déclarée irrecevable en application de l'article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
C. Sur la violation alléguée des articles 6 et 13 de la Convention
48. Les requérants se plaignent de ce qu'il n'existe aucun moyen de recours effectif pour contester les décisions de mutation prises à leur encontre devant les autorités judiciaires. Ils invoquent ensemble ou séparément les articles 6 et 13 de la Convention.
La Cour décide d'examiner ce grief sous l'angle de l'article 13, ainsi libellé dans sa partie pertinente :
« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. »
49.  La Cour estime, à la lumière de l'ensemble des arguments des parties, que ce grief pose de sérieuses questions de fait et de droit qui ne peuvent être résolues à ce stade, mais nécessitent un examen au fond ; il s'ensuit qu'il ne saurait être déclaré manifestement mal fondé, au sens de l'article 35 § 3 de la Convention.
III. SUR LE FOND
50.  En l'espèce, la Cour considère que les éléments du dossier ne permettaient pas de conclure que le droit à la liberté d'association des requérants ait été méconnu. Cette circonstance, toutefois, ne prive pas nécessairement le grief tiré de l'article 11 de son caractère défendable (Boyle et Rice c. Royaume-Uni, arrêt du 27 avril 1988, série A no 131, p. 23, § 52). La conclusion de la Cour quant au bien-fondé n'annule pas l'obligation d'un recours effectif devant une instance nationale.
51. La Cour rappelle que l'article 13 de la Convention garantit l'existence en droit interne d'un recours permettant de s'y prévaloir des droits et libertés de la Convention tels qu'ils peuvent s'y trouver consacrés. Cette disposition a donc pour conséquence d'exiger un recours interne habilitant à examiner le contenu d'un « grief défendable » fondé sur la Convention et à offrir le redressement approprié (voir, parmi d'autres, Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 157, CEDH 2000-XI).
52. La Cour constate que sur le fondement de l'article 4 g) du décret-loi no 285, accordant de vastes prérogatives en matière de mutation au préfet de région soumise à l'état d'urgence, celui-ci peut demander la mutation du personnel du secteur public dans une ville située en dehors de cette région. Dans ses arrêts Bulğa et autres et Ertaş Aydın et autres (précités), elle a considéré que l'absence d'un contrôle juridictionnel face aux vastes prérogatives dont dispose le préfet en matière de mutation (voir § 30 ci - dessus) a privé les intéressés des garanties pouvant éviter d'éventuels abus, dans la mesure où  l'article 11 vise essentiellement à protéger l'individu contre toute ingérence arbitraire des pouvoirs publics dans l'exercice des droits qu'il consacre ( mutatis mutandis, Affaires Sørensen c. Danemark et Rasmussen c. Danemark [GC], nos 52562/99 et 52620/99, 11 janvier 2006, § 57).
53.  Dès lors, il y a lieu de considérer que les requérants sont dispensés de l'obligation d'épuiser les voies de recours internes. La Cour rejette donc l'exception du Gouvernement.
54. Partant, la Cour estime qu'il y a eu violation de l'article 13 de la Convention en raison de l'inexistence d'un recours en droit interne devant une instance nationale permettant de contester les décisions de mutation prises à l'encontre des requérants par le préfet de la région soumise à l'état d'urgence.
IV.  SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
55.  Aux termes de l'article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
56.  Les requérants demandent, à l'exception du requérant Ali Sarıpınar, la somme de 4 000 euros (EUR) chacun pour dommage moral.
57.  Le Gouvernement conteste ces prétentions.
58.  La Cour constate que les requérants ont subi un dommage moral en raison de l'inexistence d'un recours en droit interne devant une instance nationale permettant de contester les décisions de mutation prises à leur encontre par le préfet de la région soumise à l'état d'urgence. Statuant en équité, elle accorde sous ce chef à chaque requérant, à l'exception d'Ali Sarıpınar, 500 EUR.
59.  La Cour note que, le requérant Ali Sarıpınar n'a présenté aucune demande de satisfaction équitable bien que, dans la lettre qui lui a été adressée le 27 avril 2006, son attention fût attirée sur l'article 60 du règlement de la Cour qui dispose que toute demande de satisfaction équitable au titre de l'article 41 de la Convention doit être exposée dans les observations écrites sur le fond. Étant donné qu'il n'a pas soumis ses prétentions dans le délai qui lui avait été imparti à cet effet, la Cour estime qu'il n'y a pas lieu d'octroyer de somme en la matière (Willekens c. Belgique, no 50859/99, § 27, 24 avril 2003, et Roobaert c. Belgique, no 52231/99, § 24, 29 juillet 2004).
B.  Frais et dépens
60.  Les requérants Abubekir Çelebi, Fidan Kılıç et Selma Kılıçman demandent 2 105 EUR et le requérant Hasan Soysal 2 252 EUR pour les frais et dépens encourus devant les juridictions internes et la Cour. Le requérant, Ali Sarıpınar ne demande aucune somme.
61.  Le Gouvernement conteste ces prétentions.
62.  Eu égard aux éléments en sa possession et aux critères qui se dégagent de sa jurisprudence, la Cour octroie, en équité, la somme de 2 000 EUR conjointement aux requérants, moins les 850 EUR versés par le Conseil de l'Europe au titre de l'assistance judicaire, à l'exception d'Ali Sarıpınar qui n'a pas formulé de demande en la matière.
C.  Intérêts moratoires
63.  La Cour juge approprié de baser le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,
1.  Décide de joindre les requêtes ;
2.  Rejette les exceptions du Gouvernement ;
3.  Déclare la requête recevable en ce qui concerne le grief des requérants tiré de l'article 13 et irrecevable pour le surplus ;
4.  Dit qu'il y a eu violation de l'article 13 de la Convention ;
5.  Dit
a)  que l'État défendeur doit verser aux requérants, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir en nouvelles livres turques au taux applicable à la date du règlement :
i.  500 EUR (cinq cents euros) à chacun des requérants pour dommage moral, à l'exception du requérant Ali Sarıpınar (requête no 55922/00) ;
ii.  2 000 EUR (deux mille euros) conjointement, à l'exception du requérant Ali Sarıpınar, pour frais et dépens moins les 850 EUR (huit cent cinquante euros) versés par le Conseil de l'Europe au titre de l'assistance judicaire ;
iii.  tout montant pouvant être dû à titre d'impôt sur lesdites sommes ;
b)  qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ce montant sera à majorer d'un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
6.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 15 février 2007 en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Santiago Quesada Boštjan M. Zupančič  Greffier Président
ARRÊT SOYSAL ET AUTRES c. TURQUIE  
ARRÊT SOYSAL ET AUTRES c. TURQUIE 


Synthèse
Formation : Cour (troisième section)
Numéro d'arrêt : 54461/00;54579/00;55922/00
Date de la décision : 15/02/2007
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 13

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE


Parties
Demandeurs : SOYSAL ET AUTRES
Défendeurs : TURQUIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2007-02-15;54461.00 ?

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