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15/12/2023 | FRANCE | N°22DA01789

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 décembre 2023, 22DA01789


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) " Fizet " a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler le titre exécutoire n° 2019/T9201 émis le 23 avril 2019 par le président du département de la Seine-Maritime pour un montant de 8 677,95 euros en vue du recouvrement de pénalités de retard dans le cadre de l'exécution du marché n° 2014-407 portant sur la réalisation de petits travaux d'investissement et d'entretien du réseau routier et, d'autre part, de

la décharger de l'obligation de payer cette somme.



Par un jugement n° 2001259 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) " Fizet " a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler le titre exécutoire n° 2019/T9201 émis le 23 avril 2019 par le président du département de la Seine-Maritime pour un montant de 8 677,95 euros en vue du recouvrement de pénalités de retard dans le cadre de l'exécution du marché n° 2014-407 portant sur la réalisation de petits travaux d'investissement et d'entretien du réseau routier et, d'autre part, de la décharger de l'obligation de payer cette somme.

Par un jugement n° 2001259 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Rouen a annulé le titre exécutoire attaqué pour un motif d'irrégularité en la forme et a rejeté la requête pour le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 août 2022, la SAS " Fizet ", représentée par Me Franck Langlois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa requête de première instance ;

2°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 8 677,95 euros qui lui est demandée par le département de la Seine-Maritime ;

3°) de mettre à la charge du département de la Seine-Maritime le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le département de la Seine-Maritime s'est acquitté, deux ans avant l'émission du titre exécutoire attaqué, des factures correspondant aux travaux litigieux sans appliquer alors aucune pénalité de retard et doit, ce faisant, être regardé comme y ayant renoncé ;

- l'ordre de service n° 1597 du 22 mai 2017 par lequel le département de la Seine-Maritime a commandé les travaux litigieux ne comporte pas la signature de la société " Fizet ", qui ne peut de ce fait être regardée comme ayant accepté de réaliser les travaux dans un délai de deux mois ;

- cet ordre de service ne comporte en outre aucune indication sur la date de commencement des travaux et sur la durée de réalisation de ces derniers ;

- les bons de commande des travaux litigieux, nos 2017-33 et 2017-34, ne comportent pas non plus la signature de la société " Fizet ", ni n'indiquent le point de départ du délai d'exécution ;

- il s'ensuit qu'en application des stipulations de l'article 4-1 du cahier des clauses administratives particulières applicables au marché, aucune pénalité de retard n'est applicable et que le département de la Seine-Maritime n'est dès lors pas fondé à lui demander le paiement de la somme de 8 766,95 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2022, le département de la Seine-Maritime, représenté par Me Jehan Bejot et Me Nicolas Ferre, conclut :

1°) au rejet de la requête d'appel ;

2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il prononce l'annulation du titre exécutoire n° 2019/T9201 du 23 avril 2019 et au rejet des conclusions formées en ce sens par la SAS " Fizet " en première instance ;

3°) à ce que le paiement d'une somme de 5 000 euros soit mis à la charge de la SAS " Fizet " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les mentions portées directement sur le titre exécutoire attaqué permettaient à la société " Fizet " de comprendre les bases et éléments de calcul de sa créance ; des détails lui avaient été préalablement communiqués par un ordre de service n° 1925 du 29 mars 2019 et dans les états annexes ; la circonstance que ces documents n'aient pas été contresignés par la société " Fizet " ne permet pas de présumer qu'elle n'en a pas eu connaissance alors que la contresignature d'un ordre de service ne conditionne jamais sa force exécutoire ; c'est dès lors à tort que les premiers juges ont retenu que le titre exécutoire attaqué n'indique pas les bases de la liquidation de la créance et qu'ils ont, pour ce motif, prononcé son annulation ;

- la société " Fizet ", au soutien de ses conclusions tendant à être déchargée de l'obligation de payer la somme qu'il lui demande, n'est pas recevable à contester le bien-fondé des pénalités de retard qui lui sont infligées dès lors qu'en méconnaissance des stipulations de l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux, elle ne l'a pas préalablement saisi d'un mémoire en réclamation ; la circonstance que l'ordre de service n° 1925 du 29 mars 2019, qui prononce ces pénalités, ne lui aurait pas été régulièrement notifié ne rendrait pas inopposable la condition de recevabilité tenant au respect des procédures de réclamation préalable prévues par les pièces du marché ;

- il n'a ni renoncé à l'application des pénalités de retard, ni accordé de prolongation gracieuse des délais d'exécution, dès lors sa créance pouvait seulement se voir opposer le délai de prescription quinquennal prévu à l'article 2254 du code civil, lequel n'était pas encore expiré à la date du titre exécutoire attaqué ; les ordres de service ayant force exécutoire sans qu'ils aient même besoin d'être contresignés par le titulaire du marché, la circonstance que la société " Fizet " n'ait pas contresigné l'ordre de service n° 1597 du 22 mai 2017 commandant les travaux litigieux est sans incidence sur la faculté du département de la Seine-Maritime d'infliger des pénalités de retard ; en outre, les bons de commande, qui n'avaient pas à être contresignés par la société " Fizet " et qui mentionnaient les délais d'exécution, n'étaient pas irréguliers ; la créance de la société " Fizet " a donc un caractère certain et exigible et il était fondé à émettre le titre exécutoire attaqué.

Par ordonnance du 4 janvier 2023, la date de clôture de l'instruction a été fixée au 6 février 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guillaume Toutias, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Caroline Regnier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Antoine Marchand, représentant le département de la Seine-Maritime.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) " Fizet " est titulaire du lot n° 1 du marché à bons de commande n° 2014-407, conclu avec le département de la Seine-Maritime, portant sur des " petits travaux d'investissements et d'entretien sur réseau routier - voierie d'assainissement ". Par un ordre de service n° 1597 du 22 mai 2017, le département a invité la SAS " Fizet " à exécuter deux bons de commande nos 2017-33 et 2017-34 ayant pour objet la réalisation de travaux sur les routes départementales RD 25 à Saint-Vaast-du-Val et RD 220 à Criquetot-sur-Ouville pour des montants respectifs de 15 603,50 euros HT et 1 236,10 euros HT. Les travaux ont été réceptionnés par le département respectivement les 22 septembre 2017 et 14 décembre 2017. Par un ordre de service n° 1925 du 29 mars 2019, la SAS " Fizet " a été informée de l'application de pénalités de retard pour des montants respectifs de 7 021,58 euros HT et 1 656,37 euros HT. Le 23 avril 2019, le département de la Seine-Maritime a émis à l'encontre de la SAS " Fizet " un titre exécutoire n° 2019/T9201 d'un montant de 8 766,95 euros.

2. Par un jugement n° 2001259 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Rouen, saisi par la SAS " Fizet ", d'une part, a confirmé le bien-fondé de la créance du département de la Seine-Maritime sur cette dernière et, par suite, a rejeté ses conclusions tendant à être déchargée de l'obligation de payer la somme qui lui était réclamée par le département et, d'autre part, a annulé le titre exécutoire du 23 avril 2019 pour un motif d'irrégularité en la forme. La SAS " Fizet " relève appel de ce jugement uniquement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions, notamment ses conclusions à fin de décharge. En défense, le département de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête d'appel et, par la voie de l'appel incident, demande à la cour d'annuler le jugement en tant qu'il a prononcé l'annulation du titre exécutoire attaqué et, par suite, de rejeter les conclusions de la SAS " Fizet " présentées en première instance en ce sens.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. L'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions à fin de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens qui seraient de nature à justifier le prononcé de la décharge mais retient un moyen mettant en cause la régularité formelle du titre exécutoire, le juge n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler le titre : statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande de décharge de la somme litigieuse. Si le jugement est susceptible d'appel, le requérant est recevable à en relever appel en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande de décharge. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à cette demande.

En ce qui concerne l'appel principal de la SAS " Fizet " et le bien-fondé de la créance :

4. Par le titre exécutoire n° 2019/T9201 qu'il a établi le 23 avril 2019, le département de la Seine-Maritime a constitué la SAS " Fizet " débitrice de la somme de 8 766,95 euros, correspondant aux pénalités de retard dont elle lui était redevable en application des stipulations de l'article 4-3 du cahier des clauses administratives particulières du marché n° 2014-407 du fait des retards pris dans l'exécution des bons de commandes nos 2017-33 et 2017-34. Pour demander à être déchargée de l'obligation de payer cette somme, la SAS " Fizet " soutient que cette créance n'est ni liquide, ni exigible, ni certaine dès lors, d'une part, que le département, qui s'est acquitté des factures qu'elle lui avait adressées et s'est abstenu pendant près de deux ans d'appliquer des pénalités de retard, doit être regardé comme y ayant tacitement renoncé et, d'autre part, qu'en tout état de cause, aucun délai d'exécution ne lui était régulièrement opposable, l'ordre de service n° 1597 du 22 mai 2017 et les bons de commande nos 2017-33 et 2017-34 n'ayant pas été contresignés par elle et ne comportant aucune indication sur la date de commencement des travaux et le délai d'exécution.

5. En premier lieu, le titre exécutoire émis par le département de la Seine-Maritime le 23 avril 2019 constitue une décision faisant immédiatement grief à la SAS " Fizet ". Ainsi, nonobstant l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux stipulant que le titulaire du marché qui entend porter devant le juge un différend relatif à l'exécution du contrat doit, à peine d'irrecevabilité de sa requête, avoir préalablement saisi le maître d'œuvre et le pouvoir adjudicateur d'un mémoire en réclamation, la SAS " Fizet " est recevable non seulement à demander directement au juge administratif l'annulation du titre exécutoire en litige et la décharge de l'obligation de payer les sommes correspondantes mais également à développer au soutien de ces conclusions des moyens mettant en cause le bien-fondé des pénalités de retard que le département a entendu lui infliger. Le département de la Seine-Maritime n'est dès lors pas fondé à soutenir que ces moyens sont irrecevables pour n'avoir pas été précédemment formulés devant lui dans le cadre de la procédure amiable préalable prévue à l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux.

6. En second lieu, aux termes de l'article 4-3 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " Par dérogation à l'article 20.1 du CCAG Travaux : / Les pénalités de retard commencent à courir, sans qu'il soit nécessaire de procédure à une mise en demeure, le lendemain du jour où le délai contractuel d'exécution des prestations est expiré, sous réserve des stipulations des articles 19.2 du CCAG Travaux et par application de la formule suivante : / P = (VxR) / 100 / dans laquelle : / P = le montant de la pénalité ; / V = la valeur des prestations sur laquelle est calculée la pénalité, cette valeur étant égale au montant en prix de base, hors variations de prix et hors du champ d'application de la TVA, de la partie des prestations de retard, ou de l'ensemble des prestations si le retard d'exécution d'une partie rend l'ensemble inutilisable ; / R = le nombre de jours de retard ".

7. Par ailleurs, aux termes de l'article 19 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux : " (...) Un ordre de service précise la date à partir de laquelle démarre le délai d'exécution des travaux. (...) ". Aux termes de l'article 4-1 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " Le délai d'exécution des travaux sera fixé dans chaque bon de commande émis dans le cadre du processus décrit en 4-6. Après fourniture d'un planning détaillé, le délai d'exécution sera au plus de 1 mois à compter de la date prévue dans ce planning. A défaut, il ne pourra dépasser deux mois. / (...) ". Aux termes de l'article 4-6 du même cahier : " Le gestionnaire adressera un bon de commande à l'entreprise titulaire qui devra en accuser réception en retournant deux exemplaires du bon de commande dûment signés, datés et revêtus du cachet de l'entreprise. Ils comporteront : / (...) / - le délai d'exécution / (...) / Le délai laissé le cas échéant au titulaire pour formuler ses observations est de 48 heures ".

8. Il résulte de la combinaison des stipulations précitées que le délai d'exécution des travaux, qui est fixé dans chaque bon de commande et ne peut excéder deux mois, court à compter de la notification de l'ordre de service et que son dépassement fait, de plein droit, courir des pénalités de retard. A cet égard, un cocontractant ne peut se prévaloir de la méconnaissance par l'autre partie du principe de loyauté des relations contractuelles au motif qu'elle aurait mis tardivement à sa charge des pénalités de retard qui résultent de la mise en œuvre de stipulations convenues entre les parties.

9. D'une part, il résulte de l'instruction que le département de la Seine-Maritime a décidé d'appliquer les pénalités de retard, sur les travaux correspondant aux bons de commandes nos 2017-33 et 2017-34 qu'il a adressés à la SAS " Fizet " le 22 mai 2017, en mars 2019, soit seulement 18 et 15 mois après la réception des travaux litigieux. Il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait, lors de la réception des travaux ou de ses échanges ultérieurs avec la SAS " Fizet ", explicitement renoncé à l'application des stipulations contractuelles relatives aux pénalités de retard. Il résulte du principe rappelé au point précédent que ni la circonstance que le département se soit acquitté des factures émises par la SAS " Fizet ", ni le seul écoulement du temps ne suffisent à caractériser une telle renonciation. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que les relations contractuelles entre le département et la société avaient cessé à la date à laquelle les pénalités ont été appliquées. La SAS " Fizet " n'est dès lors pas fondée à soutenir que le département a renoncé à l'application des pénalités de retard.

10. D'autre part, il résulte de l'instruction que les bons de commande des prestations litigieuses, nos 2017-33 et 2017-34, ont été notifiés à la SAS " Fizet " par un ordre de service n° 1597 du 22 mai 2017, adressé par voie de lettre recommandée, dont elle a accusé réception le 29 mai 2017. Ces bons de commande précisaient clairement, conformément aux stipulations de l'article 4-1 du cahier des clauses administratives particulières du marché, que le délai d'exécution était de deux mois à compter de leur réception. Il ne résulte pas de l'instruction que la SAS " Fizet " ait fait part d'observations dans le délai de 48 heures qui lui était laissé à cet effet par les stipulations précitées de l'article 6-4 du même cahier des clauses administratives particulières. La circonstance qu'elle n'ait pas fait retour de l'ordre de service et des bons de commande contresignés par elle est sans incidence sur l'opposabilité du délai d'exécution. La SAS " Fizet " n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'aucun délai d'exécution ne lui était opposable.

11. Il résulte de ce qui précède, contrairement à ce que soutient la SAS " Fizet " et alors que celle-ci ne conteste par ailleurs ni la réalité des retards qui lui sont reprochés ni le calcul des pénalités qui lui sont infligées, que la créance du département est liquide, exigible et certaine et que ce dernier est fondé à en poursuivre le recouvrement. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions à fin de décharge.

En ce qui concerne l'appel incident du département de la Seine-Maritime et l'annulation du titre exécutoire attaqué :

12. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. (...) / Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

13. Il résulte de l'instruction que le titre exécutoire attaqué, s'il mentionne l'objet et le montant de la créance, ne précise pas les bases de liquidation ni les éléments de calcul sur lesquels il se fonde. La circonstance que ces bases pourraient être reconstituées à partir des stipulations du marché, des bons de commande et des constats de réception des travaux ne suffit pas à regarder le titre exécutoire comme suffisamment motivé. Par ailleurs, si le département se prévaut de ce qu'il a porté les bases de liquidation et les éléments de calcul à la connaissance de la SAS " Fizet " au moyen d'un ordre de service n° 1925 du 19 mars 2019 et de ses états annexes, il ne justifie pas que ces documents ont été régulièrement et effectivement notifiés à la SAS " Fizet ", alors que celle-ci conteste en avoir jamais eu connaissance. En outre, il est constant que le titre exécutoire attaqué n'y fait aucune référence explicite.

14. Il résulte de ce qui précède, contrairement à ce que soutient le département de la Seine-Maritime, que son titre exécutoire n° 2019/T9201 du 23 avril 2019 ne peut pas être regardé comme satisfaisant à l'obligation, faite par les dispositions précitées de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012, d'indiquer les bases de liquidation de la créance. Il n'est dès lors, sans qu'il soit même besoin de statuer sur la recevabilité de ses conclusions d'appel incident, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen en a prononcé, pour ce motif, l'annulation.

Sur les frais liés au litige :

15. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droits aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS " Fizet " est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident du département de la Seine-Maritime et celles qu'il présente sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée " Fizet " et au département de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 1er décembre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Thierry Sorin, président de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2023.

Le rapporteur,

Signé : G. ToutiasLe président de chambre,

Signé : T. SorinLa greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Maritime, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

Anne-Sophie VILLETTE

2

N°22DA01789


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01789
Date de la décision : 15/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Guillaume Toutias
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-15;22da01789 ?
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